Chloé Juhel et Raphäl Yem sont deux journalistes qui bossent à la radio parisienne Générations FM (88.2 FM). Chloé nous y avait déjà invités pour parler de la génération sacrifiée au sida en banlieue.
Ils ont installé leurs quartiers d’été dans l’enceinte de la « maison mère » des journalistes radio, 116 avenue Kennedy, pour animer et réaliser Sur le banc, avec pour but de donner la parole à des gens « aux parcours atypiques ».
Lundi soir j’y étais, donc, car répondant aux critères de présentation de l’émission sauf sur un point : je suis un peu un habitué des micros, car j’anime sur Fréquence Paris Plurielle l’émission Survivre au sida depuis 15 ans pour donner la parole et informer les personnes séropositives et leurs familles.
Depuis que je fais de la radio, j’ai toujours soigneusement esquivé parler à la première personne. Et là, du coup, je me retrouve à écouter Tina et Wahiba, deux militantes de la première heure du Comité des familles, qui parlent… de moi et de mon engagement. Non seulement je dois répondre et parler de moi, mais j’ai choisis la musique de l’émission (Si je les avais écouté de la Fonky Family), et j’ai pu raconter quelques bribes de mon parcours personnel, y compris comment le fait de me retrouver aux États-Unis pendant la première guerre du Golfe avait forgé mon engagement militant, comme les guerres de 67 et 73 avaient provoqués les prises de conscience de la génération précédant la mienne…
Quel rapport avec le sida ? « La condition du colonisé est une condition nerveuse » disait Frantz Fanon. Des luttes anti-coloniales comme des guerres impérialistes du nouveau millénaire, il est possible de tirer des leçons pour comprendre comment et pourquoi c’est partout les plus pauvres et les plus foncés qui se retrouvent dans les tranchées de la lutte contre le sida, le plus souvent dans un schéma colonial…
J’ai tenu à expliquer deux choses : d’une part qu’il y a eu une catastrophe dans les quartiers pauvres liée à l’abandon de la santé de ceux qui y vivent. Si l’épidémie du sida a frappé aussi durement les habitants des cités, ce n’est pas le fruit du hasard, mais bien celui de choix politiques faits en haut lieu. Et, d’autre part, que mon propre engagement n’est que celui d’un modeste témoin des décombres et des conséquences de cette catastrophe. Rien de plus, mais rien de moins non plus.