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Un sans-papier dénoncé par sa gourde de fiancée

10 avril 2009 à 19h37

Comparutions immédiates du 16 mars 2009, TGI de Bobigny

Tant qu’il n’aura pas régularisé sa situation administrative, Ahmed, 33 ans, devra veiller à être très, très gentil avec son acariâtre de fiancé. Entré en France en 1998 avec un simple visa sportif, ce jeune Marocain comparaît pour séjour irrégulier et pour s’être soustrait à une mesure de reconduite à la frontière. Si Ahmed a été embarqué de force dans un avion, c’est complètement à cause d’elle. Elle l’aime, mais par dépit amoureux, elle avait décidé de « l’emmerder ».

Du lit à l’avion

Le 15 février, Sarah, 29 ans, se présente au commissariat de Clichy-la-Garenne (92). Cette jeune française d’origine marocaine vient porter plainte contre son petit ami pour « violences et menaces de mort » et précise que celui-ci n’a pas ses papiers : « Il a déjà un arrêté de reconduite à la frontière au-dessus de la tête », précise-t-elle aux policiers. L’homme est alors activement recherché – pour être finalement cueilli quelques jours plus tard dans son quartier. Outre le séjour irrégulier, Ahmed n’a aucune autre mention au casier.

Le 14 mars, à la fin de sa période de rétention, celui-ci est conduit à Roissy Charles De Gaulle et embarqué de force dans un avion pour Casablanca. À bord, il se débat tant que le commandant de bord décide de le débarquer. Placé en garde-à-vue, il comparaît aujourd’hui épuisé – et reconnaît les faits : « J’ai été pris au dépourvu, dit-il, je n’avais pas du tout préparé ce départ et ne m’y étais pas du tout résolu – c’est arrivé trop vite. Faut nous comprendre ! On nous fait sauter du lit à l’avion, sans un sous en poche, sans affaire, sans rien… Je n’allais pas partir comme ça ! En plus, la plainte de ma copine avait été classée sans suite ».

Au bar avec ses copains

Dans le public, des sanglots peu discrets se font entendre : la fiancée est là pour témoigner en faveur du prévenu. Elle explique qu’ils se sont rencontrés en 2006, qu’ils vivent chez elle, mais qu’Ahmed participe au loyer quand il le peut : « Il travaille au noir et gagne environ 1000 euros par mois ». Le couple doit se marier, mais les papiers administratifs d’Ahmed tardent à arriver du Maroc, ce qui provoque des « tensions » au sein du couple.

Toute l’attention du Président se concentre rapidement sur elle, la délatrice. « Vous l’avez dénoncé sur des faits de violence et de menaces totalement imaginaires. Pourquoi l’avoir signalé à la police ? Vous saviez pertinemment que votre dépôt de plainte l’enverrait directement au centre de rétention ! » Sarah répond timidement : « Oui, je sais. Parfois, quand cela va mal entre nous, quand il traîne trop longtemps au bar avec ses copains, je me dis qu’il est avec moi simplement pour les papiers – cela me rend folle. Mais entre nous, c’est une vraie relation, Monsieur le Président ».

« S’il aime véritablement mademoiselle, il peut l’épouser au Maroc, tranche le Procureur. Une fois marié, le prévenu pourra demander un titre de séjour et revenir sur notre territoire ». Il requiert trois mois avec sursis et une interdiction du territoire français (ITF) d’un an : « Je ne demande qu’un an pour lui donner la possibilité du rapprochement familial ».

Le jugement. Une ITF d’un an, mais pas de prison avec sursis.

La procrastination d’Abdel lui coûte une possible reconduite à la frontière Un mois ferme pour « quelques minutes dans une Fiat Punto »