Animateur DJ dans une boîte de nuit du quartier des Halles, Stéphane, 38 ans, est accusé d’acquisition, de détention, de transport de cannabis et de cocaïne – et d’avoir fait usage, offert ou cédé ces mêmes produits stupéfiants. « Je reconnais tous les faits », dit-il, blanc comme un linge. Stéphane comparaît devant la 23e chambre. Il sort tout juste de sa garde-à-vue.
Les circonstances de ce flagrant délit sont troubles. Le 16 novembre, vers midi et demi, Stéphane croise deux clients de sa boîte de nuit, rue de la Grande Truanderie, dans le premier arrondissement de Paris. Les deux hommes sont suffisamment bruyants pour que Stéphane leur demande de se modérer : « Calmez-vous les gars, je suis chargé. Avec ce que j’ai dans les poches, je n’ai pas envie de me faire remarquer par la police ». Quelques minutes plus tard justement, la police les interpelle et demande à Stéphane de vider ses poches. Il en sort une petite boulette de cannabis (0,3 g) d’abord, puis, un à un, treize sachets de poudre blanche. Soit 14,5 g de cocaïne au total.
« Vous ne saviez pas que les deux premiers individus étaient de la police ? », demande le Président de la cour. « Non, pas du tout, répond Stéphane, toujours blême. Sinon je ne leur aurais évidemment pas dit que j’étais chargé. Je ne me doutais de rien, je les avais déjà eus comme client au sein de la discothèque ». Le Président opine du chef, marque un silence, puis continue la lecture des faits : « On trouvera aussi dans vos poches, 590 euros en liquide ainsi qu’une feuille de papier avec des prénoms et des chiffres : 60, 60, 40… Les montants en euros des commandes des uns et des autres, j’imagine, une feuille de compte ? » Stéphane acquiesce : « On peut dire ça comme ça ».
Une perquisition est effectuée au domicile de Stéphane où l’on trouve « deux morceaux de cannabis, une cuillère et une carte en plastique servant à manipuler la cocaïne ». « Les textos relevés sur votre portable sont non ambigus », souligne le Président, avant d’ajouter : « Et vos tests d’urine sont positifs à la cocaïne et au cannabis ». Stéphane affirme pourtant ne pas être dépendant : « Je suis loin d’être un consommateur régulier, dit-il. Mais mon métier ne m’aide pas à m’éloigner de la drogue. Je dois justement changer de profession très bientôt, redevenir chef de rang dans un restaurant – c’est mon métier à l’origine, et cela me réussit mieux ». L’enquête de personnalité confirme ses dires. Une promesse d’embauche l’attend effectivement dans un restaurant.
Le Procureur rappelle la peine plancher de quatre années de prison pour de tels faits. Il demande 18 mois avec mandat de dépôt. À l’écoute de ce réquisitoire, les signes de nervosité de Stéphane s’accroissent. Il se ratatine sur sa chaise, ne cesse de déglutir et cligne énergiquement les yeux. L’avocat de la défense prend la parole : « Mon client reconnaît les faits et l’on est loin d’une vente à grande échelle. Reconnaissez d’ailleurs l’amateurisme de la situation. Nous avons ici une personne qui crie dans la rue à qui veut l’entendre qu’il est “chargé” ». Et d’insister surtout sur sa situation familiale : « Mon client, divorcé, est père d’une petite fille de 12 ans. Et l’on craint, car nous avons des raisons de le penser, qu’une incarcération soit le prétexte rêvé pour son ex-compagne de lui soustraire la garde de son enfant. Mon client a des moyens concrets de se sortir du milieu de la nuit. Je ne veux pas taxer le ministère public d’absence de sentiment ou de cœur, mais Stéphane a concrètement la volonté de s’en sortir. Je vous demande de lui laisser cette chance ».
Verdict. Dix-huit mois de prison dont six avec sursis sont prononcés, avec mandat de dépôt et deux ans de mise à l’épreuve.