La chute du suivi des affaires « sensibles », peut de son côté s’expliquer par la diminution des pratiques illégales dans le financement des partis politiques. Si elles existent toujours indéniablement, leurs auteurs sont aujourd’hui bien plus vigilants. D’autant que la divulgation au grand public des procédés de corruption au sein de la classe politique durant les deux dernières décennies a débouché sur une législation encadrant le financement des partis. Pour contrer d’éventuelles révélations, les hommes politiques se rangent désormais derrière des communicants affûtés, pour la plupart issus du journalisme, et qui connaissent bien le milieu et ses méthodes. « La séduction. C’est la première arme des Spin doctors (conseillers en communication). Vous faire sentir qu’ils sont du même milieu culturel que vous. être polis, arrangeants, sympathiques. Après, ils sont en mesure de faire du troc, de vous proposer une exclusivité en échange de l’oubli ou de l’occultation de quelque chose de gênant pour leur client. Avec eux, les journalistes ne sont jamais muselés, mais leur indépendance est de plus en plus rognée », explique Paul Moreira dans une interview au site 01men.com publiée le 25 avril 2007.
En parallèle à l’arrivée des Spin doctors et à une modification de leur relation avec les hommes politiques, une évolution s’est également opérée dans leurs rapports avec une justice consciente de détenir l’information. « Beaucoup de choses ont évolué dans la façon de faire de l’investigation. Il y a eu une phase triomphante du journalisme d’investigation, qui était la phase anti-pouvoir. Le danger, c’est que tout cela a un peu été exploité politiquement. Le Canard en a fait une arme politique contre Giscard et Le Monde une arme politique contre Mitterrand », avoue Jean-Marie Pontaut. « Là, on a un peu tourné au règlement de comptes et à l’objectif politique. Il y a un retour de balancier aujourd’hui. Les journalistes d’investigation ont été trop près des policiers et des juges. La première partie des années 80 a été une joyeuse rigolade. La seconde a déjà vu ce changement s’amorcer. Ils ont fait beaucoup plus attention. L’investigation politique se fait moins car il y a moins d’affaires politiques. La dernière a été Clearstream » [1].
Lire ou relire sur Bakchich.info l’épisode précédent du blog de Benoit Pavan :
Voir aussi le blog professionnel de Benoit Pavan : http://benoitpavan.wordpress.com/
[1] Propos recueillis le 29 avril 2008 à Paris, dans les locaux du L’Express.