KARL LASKE – Journaliste au service « société » du quotidien Libération, il est spécialiste des affaires de corruption et d’intégrité publique.
« Une vague de contestation journalistique a existé au cours des années 90. Elle est toutefois arrivée à son terme pour des raisons inhérentes aux affaires qui ont occupé les médias durant ces années là. D’abord, les financements des partis politiques se sont normalisés du fait de l’application des lois et donc de la mise en œuvre d’un financement politique légal et massif. Sur le plan judiciaire, cette vague s’est également tarie. Du coup, l’appétit des rédactions aussi. Résultat, des journalistes qui faisaient de l’enquête ont été poussés vers d’autres rubriques.
Ensuite, la situation politique est différente aujourd’hui. Depuis 2002, la vie politique est marquée par une forme de normalisation dans les deux grands partis. Il y a quelque chose de l’ordre du consensus qui se dégage des débats politiques. Certes, il y a toujours des phénomènes de petits règlements de comptes politiques qui se manifestent, mais ils sont plus anodins. Et cela se répercute sur l’investigation journalistique.
Enfin, les journaux sont aujourd’hui dirigés par des personnes issues des cercles d’influence politique. Pour ces patrons, être dans la bataille politique compte. Si la vie politique est pacifiée, ils y sont donc pour beaucoup. Nous sommes dans un contexte où la contestation du pouvoir est à un minimum sur le plan politique et à fortiori, sur le plan journalistique. Certains patrons de presse sont des hommes d’influence. Pour ce qui est de la presse, la saison n’est donc ni à la contre-enquête, ni à la contestation. » [1]
(Photo : D.R.).
Lire ou relire sur Bakchich.info l’épisode précédent du blog de Benoit Pavan :
Voir aussi le blog professionnel de Benoit Pavan : http://benoitpavan.wordpress.com/
[1] Propos recueillis le 29 avril 2008 à Paris, dans les locaux du journal.
