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Enquête, menaces, et représailles

22 octobre 2010 à 10h50
Qu’est-ce que l’investigation journalistique ? Comment a-t-elle évolué, comment s’exerce-t-elle à l’heure actuelle et quel est son avenir ? Neuf journalistes qui ont mis les pieds dans le grand bain de l’enquête nous éclairent sur ce genre à part du journalisme (Épisode 5/7).

LAURENT VALDIGUIE – Journaliste au service « Enquête » du Journal Du Dimanche.

« Les patrons de presse pensent que les menaces de procès et les pressions ont mis fin à l’investigation, et que c’est un journalisme dangereux. Nous ne sommes pas en Chine, il n’y a aucun risque à faire correctement son travail en France, y compris sur un président de la république. C’est plus difficile de suivre les supporters du PSG que de pratiquer l’investigation. C’est peut-être le cas pour les sites internet, qui peuvent voir leur économie mise en péril par une lourde amende. Mais jamais aucune condamnation n’a mis en péril un titre.

Chirac a été élu douze ans. Beaucoup de choses ont été écrites sur son système. Aucun journaliste qui a été mêlé à ces révélations n’a eu la moindre pression. Il n’y a à ma connaissance aucun exemple de journaliste victime, financièrement ou physiquement, de représailles. C’est de la mythologie. » [1]

(Photo : D.R.).

LAURENT JOFFRIN – Directeur du quotidien Libération.

« Je ne pense pas que les pressions et les menaces de procès aient poussé les patrons de journaux à être plus réticents à l’idée de pratiquer l’enquête. Si l’on m’apporte une affaire sérieuse, je la publie. Si une information remet en cause un annonceur ou une entreprise, on la publiera de la même façon, même si on ne cherche pas les nuire. On va les appeler pour leur demander leur avis, comme tout journaliste procède avec ses sources. Je ne connais pas d’affaires qui ne sortent pas. Cette idée selon laquelle il existe un complot pour étouffer des affaires ne fonctionne pas dans une démocratie comme la France. Le pluralisme de la presse française fait que tout sort.

Nous avons beaucoup de procès à gérer. Lorsque l’enquête est de bonne foi, il est rare que nous les perdions. Les services de communication essaient de plus en plus de contrôler l’information. Ils ont toujours existé mais étaient beaucoup moins nombreux et moins aguerris. Aujourd’hui, les entreprises se méfient des journalistes. C’est là qu’il faut faire preuve d’opiniâtreté. » [2]

(Photo : D.R.).

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Lire ou relire sur Bakchich.info l’épisode précédent du blog de Benoit Pavan :

Qu’est-ce que l’investigation journalistique ? Comment a-t-elle évolué, comment s’exerce-t-elle à l’heure actuelle et quel est son avenir ? Neuf journalistes qui ont mis les pieds dans le grand bain de l’enquête nous éclairent sur ce genre à part du (…)

Voir aussi le blog professionnel de Benoit Pavan : http://benoitpavan.wordpress.com/

Vérité apparente Contestation journalistique

Notes

[1] Propos recueillis le 23 avril 2008 à Paris, dans les locaux du journal.

[2] Propos recueillis le 17 avril 2008 à Paris, dans les locaux du journal.