Je suis opposé par principe à ce que les opérations caritatives (à la télévision ou ailleurs) se substituent au droit à la santé, en prétendant combler les trous béants laissés par le démantèlement de la protection sociale au détriment des plus pauvres et des plus malades.
Pour autant, pour ceux qui pensent que nous devons nous résigner au recours à la charité — en l’absence d’un rapport politique suffisant pour obtenir l’égalité des droits de tous face à la maladie — voici quelques informations à méditer pendant les quelques jours entre le 1er décembre, Journée mondiale contre le sida dont tente de s’approprier Sidaction (alors que l’association n’est qu’un acteur parmi d’autres dans la lutte contre le sida), et le 5 décembre, date du premier jour du Téléthon organisé par l’Association française contre les myopathies.
Selon le rapport de l’IGAS, Sidaction consacre 36% des emplois de l’association aux frais de structure (dont 27% au titre des coûts directs d’appel à la générosité du public).
Ces coûts pour Sidaction posent question d’autant plus que l’association n’a pas à supporter les coûts de l’organisation des opérations de télévision, financées par les chaînes publics avec l’argent de la redevance et par les chaînes privées avec la publicité.
À titre de comparaison, le tableau en page 4 du rapport annuel 2007 de l’AFM montre que cette association consacre 9,5% aux frais de collecte et 6,8% aux frais de gestion, soit 15,3%.
L’AFM est gérée conjointement par les familles d’enfants touchés par la myopathie, des médecins et des chercheurs.
Selon l’IGAS, « Sidaction reste une association très fermée où les nouvelles adhésions ne peuvent intervenir qu’avec l’accord des 2/3 des membres », et l’Inspection souligne également que « le rôle premier que s’attribue l’association tend parfois à minimiser l’action menée par les autres organismes engagés dans la lutte contre le Sida »…
L’AFM a été contrôlée 3 fois par la Cour des comptes en 10 ans (1998-2008). En 1988, elle reçoit le Prix Cristal de la transparence financière de la Compagnie Régionale des Commissaires aux Comptes de Paris
Sidaction a été contrôlée deux fois en 15 ans par la Cour des comptes, en décembre 2000, avec ses Observations sur les comptes d’emploi pour 1994 à 1996 des fonds SIDACTION, et en 2009.
L’AFM récolte aujourd’hui environ 100 millions d’euros, pour environ 6 millions pour Sidaction. Pourtant, en 1994, le premier Sidaction avait récolté un montant équivalent à celui du téléthon de l’époque, alors que la stigmatisation des malades du sida était d’autant plus présente qu’il n’y avait pas encore les trithérapies…
Selon le quotidien 20 Minutes du 2 avril 2008 :
Des dons en stagnation et peu de téléspectateurs. (…) Les Français ont boudé les principaux programmes autour du Sidaction. La semaine dernière, la première partie du téléfilm n’a touché que 14,8 % du public. Et la grande soirée de samedi, « Les stars chantent contre le sida », toujours sur France 2, n’a fait guère mieux, avec 15,3 % de part d’audience. « Ce programme reste celui qui génère le plus de dons (30 % des appels du week-end) », nuance-t-on à la chaîne. Rien n’y fait : malgré un dispositif médiatique fort de nouveaux partenaires, dont Jimmy, Comédie et Planète, Sidaction atteint 5,55 millions d’euros, le chiffre de 2007 à la même date.
Caveat emptor.