L’humeur de Probst
C’est Charles Pasqua qui, dans les années 80, avait imprudemment déclaré qu’il fallait envoyer François Mitterrand devant la Haute Cour de justice. C’est l’époque où Bruno Tellenne, le frère pas franchement gauchiste de Karl Zero, lui écrivait ses discours. Charlie avait dû s’excuser auprès de celui qui était le chef de l’État. Plus tard, il gagnera l’estime de Mitterrand qui le qualifiait de « vrai républicain ». Cette semaine, c’est Pasqua qui comparaît devant la Cour de justice de la République. Est-ce que Claude Guéant, son ancien bras droit place Beauvau en 1993 et 1994 qui doit être entendu, va se porter à son secours ? Une certitude, Charlie va compter ses amis.
Lorsque j’ai vu Charlie communier lors de la messe d’enterrement de Philippe Séguin sous le regard impassible de Chirac, j’ai eu un petit pincement au coeur. Et la semaine dernière dans Bakchich, je découvre que le grand Jacques et sa fille Claude ne le saluent pas lorsqu’ils le croisent à la brasserie Lipp un dimanche à déjeuner. Cette scène m’a rappelé un combat de rhinocéros auquel j’ai assisté au Kenya. Le choc de leurs cornes faisait un bruit mat, déchirant. Ils se sont aimés, ils se haïront.
Des brouilles, il y en a toujours eu entre Pasqua et Chirac. Déjà, Bernadette n’a jamais aimé le vendeur de pastis que Charles était resté à ses yeux. C’est lui, pensait-elle, qui ramenait les gonzesses à son Jacques. Après le putsch raté sur le RPR que Charlie tente avec Séguin en 1991, il y a eu un petit froid. Pasqua aurait alors dû se faire élire président du Sénat, il connaîtrait aujourd’hui une vieillesse heureuse.
La vraie sortie de route, c’est quand Pasqua prend le parti de Balladur en 1995. Encore que trois mois après son élection à l’Élysée, le grand Jacques décore Charles de la Légion d’honneur et nomme Marchiani préfet du Var. Lequel Marchiani veillait au grain quand Chirac s’échappait du fort de Brégançon, l’été, pour rejoindre Claudia Cardinale. Autant de bons souvenirs… Enfin, les velléités de Pasqua de se présenter en 2002 ont fini par exaspérer Chirac. Charlie a toujours caressé, mais jamais assumé, un destin national. Ses proches y ont toujours cru davantage que lui-même. Et si Pasqua était un faux dur ?