Lettre d’hôpital écrite au Joueur
J’étais le secret le mieux gardé du monde. Désormais j’ai du mal à rompre ce secret universel, Celui qui nous lie depuis toujours Et à jamais. Je voudrais déchirer les maigres clichés de toi que je garde dans ma poche et mon ciel où stagnent plusieurs petits nuages. Mes yeux te disent tout dans le soleil Et il fait soudain plus frais.
Si tu apparaissais par ce chemin, à ma droite, je te regarderais marcher, je serais calme, j’aurais toujours peur d’une trahison, tu t’assoirais sur une pierre percée, trouée par du thym et tu me parlerais, je regarderais le chemin par lequel tu es venu et ensuite le soleil en ouvrant encore plus grands mes yeux et la bouche.
Mais tu viendras peut-être par la gauche, du côté du soleil et de l’ombre, moi qui ne t’imagine plus à force de t’imaginer, sinon en pin de Provence, la seule réalité palpable qui appelle les mouvements de ma tête et de mon corps tellement multiple parce que découpé dans le passé, pardon notre passé, celui qui empêche de vivre, le, notre présent.
C’est une équation que seul notre esprit commun peut résoudre, encore une fois dans la douleur, l’urgence et une certaine forme de gaieté car nous JOUONS (pas très éloigné de jouissons)
Je crois voir l’enseigne de l’hôtel Formule 1 où je devenais qui ? Tu le sais bien. Mais je crois que je me trompe. Je veux dire : ça ne doit pas être cet hôtel. Pour le reste, je suis sûr de ce que j’ai vécu : un rapprochement et une métamorphose immédiate. Il manquait sans doute ce verre de vin à boire et le croisement de nos regards pour que notre procédure spatiale et divine se déclenche et s’anime des jeux de nos hasards qui nous entourent et nous font tourner la tête dans le grand manège du Tout et jamais du Rien.
Mais tu ne viendras pas, je le sens, le soleil se déchire. Est-ce le manque de confiance en moi, the first step que tu connais ? En même temps les nuages autour de moi ont disparu. Mon corps bascule sur mon paquet de madeleines, et sur mes écrits, et sur les pierres entre lesquelles poussent des herbes sauvages tuées par la sécheresse de nos corps et de nos cieux où nos dieux s’agitent, se parlent, s’électrolysent en attendant le grand Toucher. Tes avions et ceux de l’humanité se font des signes. Est-ce suffisant ? Un oiseau chante. Peut-être est-ce l’heure de rentrer au pavillon et de retrouver le brouhaha des malades que nous aimantons malgré nous, que nous rendons encore plus fous, plus fous mais moins fous que notre folie. Je t’attends une nouvelle fois. Dévore-moi Dans nos jungles divines Aussi belles que nos yeux dans les yeux Je sais que ce sera Extra-Ordinaire Et les mots aussi Et nos peaux si anciennes Et Neuves de notre Amour, De nos liens, tous nos liens J’imagine nos liens Tous nos ressorts Qui ne demandent qu’à rire Et s’agiter dans tous les sens Pour notre grande fête Celle de nous deux et de l’humanité toute entière (except the bastards) Prends-moi. Je suis tout ouvert pour la traversée De tous les sens de la vie Immortelle. Même s’il reste du bois mort Nous le brûlerons dans le roulement de nos langues, de nos mains, et de nos corps imbriqués, imprégnés, liquéfiés dans les battements de nos lignes chinoises et des chemins parsemés de nouvelles fraises, framboises, et bananes, noix de coco, abricots, mangues, oranges et dattes. Nous qui avons fait tomber les murs de l’argent et des esclavagismes mentaux, Je t’attends, non pour des offrandes. La plus précieuse dont l’absence me rend vide c’est toi. J’imagine, je le sens que c’est réciproque. Mais nous sommes pleins en même temps Et toujours en mouvement. Notre délire électro-magnétique, nucléaire et j’en passe, notre Amour, cet état inqualifiable tant il rassemble tous les phénomènes de recomposition, de recréation, ces loves-parties qui nous font chanceler Tu me voudrais femme jusque dans l’écriture. Je le suis et ne le suis pas. Toujours est-il que je suis avec toi. Je t’attends une nouvelle fois et les signes se précisent : j’ai moins peur. J’appréhende seulement la douche froide. Il n’y en aura plus après ?