Le petit juge de Tahiti, Jean-François Redonnet, qui est arrivé la semaine dernière à Paris pour enquêter sur le mobile de la disparition du journaliste Jean-Pascal Couraud en 1997, s’intéresse – et comment ! – aux frasques financières de Gaston Flosse et Jacques Chirac, tous deux en ligne de mire. Si Flosse a fait assassiner JPK, une hypothèse étayée par plusieurs témoignages accablants dont le journal Le Point a fait état, c’est parce que ce journaliste courageux enquêtait sur les circuits financiers tahitiens, qui menaient, pour certains, au Japon et à Chirac.
Heureux événement que l’arrivée du juge qui fait qu’on se sent, Olivier et moi, auteurs du livre sur « l’incroyable histoire du compte japonais de Chirac », un peu moins seuls !
Nous étions « obsessionnels », et même amateurs des théories du complot, d’après Gérard Davet du journal Le Monde (voir sa réponse dans un épisode précédent du blog).
Voici qu’un petit juge de Tahiti s’est laissé prendre, lui aussi, à la fable d’un compte de Chirac au Japon. C’est même la deuxième fois qu’il vient à Paris et que la Chancellerie lui paie le voyage, à lui, à sa greffière et au représentant du Parquet. Un signe malgré tout qu’au sommet de l’Etat, l’affaire est prise au sérieux.
Notre magistrat a déjà interrogé Dominique de Villepin sur l’existence du compte. Et voila l’ex Premier ministre de nier, devant le juge, que son Chirac ait mis ses petites économies au Japon entre 1992 et 1999, date où la banque de son ami Osada fait faillite dans des conditions qui vaudront à cet affairiste de passer quelque temps en prison.
Mais notre poète et grand homme et ex premier ministre et ami des amoureux de la liberté de la presse, Dominique de Villepin, a la mémoire qui flanche. Lorsque, durant l’été 2001, l’Elysée réalise que les services français sont tombés, dès 1997, sur ce fameux compte, les conseillers de Chirac s’agitent et demandent au patron de la DGSE, Jean-Claude Cousseran, au Secrétaire général des services, le général Champtiaux, ainsi qu’au Général Rodot, l’homme des missions délicates et grand pote de Villepin, de circonvenir l’incendie. Ce qui fut fait dans un rapport bidon remis à l’Elysée, abondamment repris dans Le Monde, au moment où cela tanguait, par les journalistes Hervé Gattegno et Gérard Davet, dans un papier qui fera date.
Lequel rapport, censé clore l’incendie, comme nous l’expliquons dans le livre, prétend que cette affaire de compte japonais traîne depuis des lustres dans la presse trash japonaise et qu’il ne s’agit que de méchants ragots, colportés par des barbouzes en mal de reconnaissance. C’est un point de vue, ce n’est pas le seul. Des documents internes de la DGSE, autrement plus sérieux, et que nous avons publiés dans notre livre, confirment naturellement, l’enquête menée par les services français et authentifient l’existence du compte.
Là dessus, durant l’hiver 2002, Jean-Claude Cousseran, patron donc de la DGSE, et Dominique de Villepin, sont reçus par Chirac pour faire le point sur l’affaire du compte. On est à quelques semaines des présidentielles. Jacques Chirac n’a pas encore lu le rapport Cousseran-Champtiaux-Rondot qui le dédouane officiellement. Il est plutôt tendu, un brin exalté et s’adresse au patron de la DGSE :
« – Vous savez, monsieur Cousseran, toute cette affaire de compte japonais n’a jamais existé. »
Et Villepin de prendre la parole :
« Mais si, monsieur le Président, vous avez un compte, Jean-Claude Cousseran le sait et tout est sous contrôle. »
Rapportée par Le Canard en 2007 et reprise dans notre livre, cette anecdote a deux sources. La première, Alain Richard, ministre socialiste de la défense à l’époque, qui la raconte, en privé, à deux journalistes. La seconde, c’est Jean-Claude Cousseran lui-même qui l’a confirmée à l’auteur de ce blog, crédibilisant le récit d’Alain Richard.
Drôle de jeu joué par Alain Richard durant dette période 2001 et 2002. Publiquement, il a toujours nié l’existence du compte alors qu’en privé, il le reconnaît. Double jeu qui fut le fait d’une grande partie de la gauche, des proches de Jospin aux potes de Ségolène. Les Japonais n’ont pas arrosé seulement à droite !
Et l’alliance actuelle et contre-nature entre Flosse, pote de Chirac, et les indépendantistes, très liés à Ségolène Royal, n’est pas totalement une surprise. Si l’affaire du compte japonais va jusqu’au bout, elle mouillera les chiraquiens, bien sûr, mais aussi les socialistes.
Dans certaines loges prestigieuses du Grand-Orient, comme la loge République, se cotoient des avocats très proches de Flosse et Chirac comme maître Spziner, des proches de Ségolène Royal, tels le magistrat Gilbert Flam, et des avocats conseils de grands hebdos de gauche. Que du beau monde !
Etrangement à l’époque, Alain Richard nomme auprès de lui comme conseiller Jean Bernard Ouvrieu, ancien ambassadeur au Japon et chiraqien pur jus. Lequel siège aujourd’hui à l’antenne française de la Fondation Sasakawa, du nom d’un ancien criminel de guerre japonais et ami de Chirac qui a créé une pieuvre malfaisante à Tokyo, chargée d’arroser les politiques étrangers.
Pourquoi Ouvrieu devient-il le conseiller d’un ministre socialiste, alors qu’il est un chiraquien pur sucre, et qui plus est un des hommes clés de l’affaire japonaise, comme on le raconte dans notre livre, photos à l’appui ?
Bonne question, que le juge de Tahiti, qui a convoqué l’ex ambassadeur ces jours-ci, devrait normalement lui poser. Car ce magistrat a versé notre livre au dossier judiciaire, l’année dernière. Tout comme il a fait verser au même dossier les scellés Rondot 30, 31, 32 et 33 qui figuraient dans le dossier Clearstream, et auxquels les avocats du célèbre dossier de vrai faux comptes n’avaient pas totalement accès.
Ce week end, une bécassine du JDD explique, dans l’édition du dimanche 8 février, sur quatre colonnes, que le journaliste disparu, JPK, s’est suicidé parce qu’il avait surpris sa femme avec un amant de passage. Ce qui a toujours été seriné par les journalistes dits d’investigation du JDD, qu’il s’agisse de laurent Valdiguié (dans son livre baclé sur le Canard Enchainé) et Michel Delean, grand habitué du bureau d’Yves Bertrand
Attendons la suite !