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Quai Branly, musée branlant

jeudi 22 juin 2006 par Uriel Da Costa
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Mitterrand a imprimé sa patte à la Bibliothèque Nationale, Chirac a marqué de son sceau le musée quai Branly : aucun projet ne s’y inscrit, du chiraquisme pur sucre !

En soi, l’ouverture d’un musée est toujours une bonne nouvelle et celui du quai Branly ne fait pas exception. L’autre question est de voir, à l’usage, comment celui-ci utilisera son fond constitué des 350 000 objets arrachés au musée national des Arts d’Afrique et d’Océanie (créé en 1960 par André Malraux à la porte Dorée) et aux collections d’ethnologie du musée de l’Homme. Hormis leurs expositions respectives, ces deux entités s’inscrivaient dans des projets scientifiques qui firent les grands jours de l’école française d’anthropologie, l’une des plus fécondes du monde. Ohé du Quai, ohé, où sont les chercheurs africains ou ceux du monde océanique ? Où sont les étudiants de Pierre Clastres, d’Emmanuel Terray ou de Claude Meillassoux ? Où est la matière ethnologique d’un musée censé faire comprendre comment vivent les autres ?

Le musée qui mêle bobo et chiraquisme finissant

Et il n’est pas suffisant qu’une des salles du musée Branly porte le nom de Claude Lévi-Strauss pour qu’on soit tout à fait rassuré sur ce plan. Le vrai nom qui domine l’entreprise n’est autre que celui du collectionneur et marchand d’art Jacques Kerchache (1942-2001) dont Jacques Chirac fit la connaissance sur une plage de Maurice durant ses vacances de l’été 1992. Connu pour ses frasques et nombreux pillages, ce marchand s’est soucié, sa vie durant, des sociétés concernées par sa quête de « beaux » objets comme d’une guigne. Autant dire que la valeur d’échange et la cotation sur le marché des antiquités exotiques a davantage guidé son accumulation prédatrice des pièces que la compréhension des pratiques sociales dont elles témoignent.

Evalués selon les canons du « beau » d’un Occident post-colonial toujours en recherche d’exotisme, les objets exposés parleront-ils des hommes et des femmes qui les ont conçus ? Produits d’appel obligent, il est à craindre que le musée du quai Branly ne sombre, pour l’instant, dans l’esthétisme bobo du chiraquisme finissant : un « goût » faisant la « distinction » entre « nous » et les « primitifs », mais surtout un goût purement esthétique qui n’altère en rien la donne effroyablement déséquilibrée entre un Nord sûr des valeurs de sa globalisation en cours et un Sud de plus en plus pittoresque et misérable. C’est toujours si beau la pauvreté.

Les faits et gestes de l’architecte du musée ne sont guère plus rassurants. Jean Nouvel qui prétend « relier le sens et le sensible » a fait confectionner par les Papous de Nouvelle-Guinée des objets de commande aux bonnes dimensions de son bâtiment qu’il a conçu comme « une sculpture ». C’est tout dire.

Du sensationel, pas de sens

Enfin et surtout où sont les arts premiers des sociétés indo-européennes ? L’intégration des collections d’Europe comme celles - par exemple du musée alpin et rhodanien de Grenoble - aurait eu l’avantage de mettre l’accent sur des « continuums », non pas ceux de la fausse communauté des hommes chère aux humanistes de l’âge classique, mais ceux des invariants propres à la plupart des sociétés dites primitives, y compris les nôtres. Cette confrontation des objets usuels de la vie quotidienne aurait été certainement plus féconde que les déclarations moralisantes du président de la République sur le dialogue des cultures et le respect des humiliés… Là encore, eut-il fallu envisager la belle enveloppe du quai Branly pour un contenu qui fasse sens, conformément à de vrais programmes de recherches, à de vraies coopérations internationales, à de vraies ambitions pour un public qui pourrait être différent de celui du musée Grévin.

La réponse à ces questions nécessite un peu de temps, mais pas trop.


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