L’éPURé n° 10
C’était ma fête samedi. Je ne pouvais pas la rater, les journaux, la télé, les affiches en ville parlait de « Ça » : La fête des Amoureux. Même Google s’était orné de tourtereaux au cas où j’aurais voulu y échapper.
Mais des « Valentin », j’en connais pas. Des Amoureux par contre, j’ai tout de suite pensé à tout le monde, à vous, à moi, puis je me suis ravisé … faut voir, quand même !
Allez, direction les dictionnaires, car on se doit d’être pro, et on rigole pas avec des mots comme « amoureux », comme d’ailleurs on rigole pas avec l’amour paraît-il. On rigole pas avec grand-chose j’ai l’impression en ce moment. Deux définitions sont presque systématiquement accolées, ha, y aurait deux amoureux(ses) distinct(e)s en chacun de nous ?
1 - Qui aime par amour, qui est enclin à l’amour (Rien que ça, ça nécessiterait une thèse de 800 pages tellement c’est nébuleux et … incohérent ? Peut on aimer autrement que par amour ? Que peut vouloir dire être enclin à l’amour ??)
2 - Qui est passionné, éprouve une vibration et une émotion résultant d’une attirance forte (Heu, ça a à voir avec l’amour ça ? En même temps, j’aurai dû me douter que c’était un sujet casse-gueule, mais les championnats de ski, je savais pas quoi dire)
Ça commence mal donc, je croyais que les deux étaient quasiment opposées, n’avaient rien à voir l’une avec l’autre, que ni l’amour ni le désir n’étaient synonymes du sentiment amoureux. Remarque, on dit aussi être amoureux de la peinture, de l’Uzège et de Johnny Depp. C’est d’ailleurs pour ça que c’est aussi ma fête, je suis amoureux de Kyra Sedgwick en ce moment, vous moquez pas !
Bref, j’y comprends pas grand-chose sauf que comme pas mal de copines et de copains dont je tairai les noms (par respect pour eux et aussi parce que j’aurais quelques problèmes si je le faisais), le fait de manger un plat tout fait et vite fait avec la télé allumée à ma gauche sans que je la regarde, mon ordinateur et mes ami(e)s pixélisés face à moi, le cendrier presque plein, les chaussettes trouées et quelques autres détails bien pire que la décence m’interdit de révéler, je ne suis à priori pas concerné par cette fête qui me provoque un bégaiement à son évocation, la la la sa sa … la sa saint Valentin. Et tout cela n’a pas grand-chose à voir avec l’Amour.
Reste toutes ces questions existentialistes qui peuplent nuits, magasines psy ou féminins, et qui en turlupinent plus d’un(e) : « Aimer, c’est pareil qu’être amoureux(se) ? » ; « Est-ce que je peux être amoureux(se) sans que la réciproque soit vraie ? (Si tu as choisi Johnny Depp, ça te pend au nez) » ; « Pourquoi pas moi ? (Je peux rien faire pour toi, j’ai pas son numéro du portable de Johnny Depp) » …
Non, heureusement, il y a des sujets plus importants que l’amour en ce moment, comme la politique, l’argent, l’économie. Et Total, notre fleuron. 14 Milliards de bénéfices en 2008, un record, répartis à 60 % pour l’investissement, 38 % pour les actionnaires, 2 % pour les salariés (l’inflation en 2008 se situe quant à elle entre 1 et 3 % selon les sources, c’est compris dans le prix ?) Autant dire que la marque de carburants la plus chère de France, qui ne se soucie guère d’écologie et d’éthique, participe toujours à sa façon à un système qui détériore le rapport entre les fruits du capital et ceux du travail. Mais l’année prochaine, grâce à notre Président, les bénéfices de Total se répartiront de la manière suivante : 33 % pour l’investissement, 33 % pour les actionnaires, et 33 % pour les salariés. Pas chouette notre Président ?
Ce qui m’incite à créer ma propre société de « paris en ligne » et de proposer de parier avec qui le souhaiterait qu’en cette fin d’année 2009, dans le cas d’un bénéfice substantiel qui ne saurait échapper au groupe Total, les salariés n’auront pas une rétribution sur la part des bénéfices à hauteur de 33 %. Faut bien vivre. Les jeux et autres paris étant réservés à un monopole d’Etat, j’espère ne pas être écroué pour ce crime de lèse Majesté.
En attendant donc une fin d’année 2009 qui ravira les salariés, l’éPURé s’accorde quelques jours à la capitale… j’ai besoin de vacances moi, c’est fou, j’y comprends plus rien à l’économie, à la politique et à l’amour.
Grégory Hadjopoulos
16/02/09