Duel au sommet
Un procès à ne pas rater
19 janvier 2009 à 15h30Savait-elle depuis longtemps que la branche métallurgique, la principale organisation du Medef, sortait régulièrement de grosses liasses de billets pour "fluidifier les relations sociales" ? C’est ce qu’affirme Daniel Dewavrin (DD), ancien patron de la dite branche, l’Union des industries et des métiers de la métallurgie. Il s’appuie notamment sur des propos de Denis Gautier-Sauvagnac (DGS) qui lui aurait confié qu’elle était "parfaitement au courant". Laurence Parisot les a traité de "sacrés menteurs" et elle a attaqué le premier en diffamation.
Alors, savait-elle ou non ? La question est plus importante qu’on ne l’imagine communément. Elle peut décider, tout simplement, de l’avenir politique de Laurence Parisot, et lever un nouveau coin du voile sur les secrets les plus inavouables de notre pays. Si, comme elle le soutient, elle ignorait les pratiques de l’organisation jusqu’au 25 septembre 2007, la veille de la révélation du scandale dans la presse, les patrons qui menaçaient de l’entraîner dans leur chute devront affiner leur stratégie. En revanche, si Daniel Dewavrin gagne le procès, une averse de questions va tomber sur la première dame du patronat français.
L’affaire est de taille. Ce n’est pas tous les jours que les patrons des patrons se font la guerre très ouvertement. Surtout pour une affaire aussi saignante. Ce genre de conflit "à couteaux tirés" provoque généralement de belles éviscérations, très instructives pour qui veut bien examiner la tripaille. On ne le dit pas assez, c’est à ce genre de règlement de comptes qu’on doit la révélation des scandales les plus énormes. L’affaire Elf, par exemple, est sortie grâce à la guerre qui a opposé les patrons se disputant la direction du pétrolier au profit de leur écurie politique. De même, nous n’aurions rien su des fluidités de DGS si des patrons puissants ne s’étaient disputé la direction du MEDEF, jusqu’alors entre les mains de la branche métallurgique (UIMM). Autrement dit, le combat des chefs qui oppose, ce lundi 19 janvier, Laurence Parisot à Daniel Dewavrin, dès 14h 30 devant la 17ème chambre du Tribunal de grande instance de Paris, est l’une des étapes de la guerre qui a fait exploser DGS, quand il présidait l’UIMM. La prestation des deux champions pourrait faire mettre au jour quelques détails intestinaux…
Que Laurence Parisot soit contrainte de se défendre publiquement face aux affirmations de Daniel Dewavrin, qui a autrefois navigué aux commandes d’une grande industrie de l’armement (c’est l’un des patrons les mieux protégés de la République) avant de prendre la présidence de l’UIMM, est le signe d’une division beaucoup plus profonde et grave qu’on ne l’imagine. Chacun d’eux garde un arsenal de dossiers sous le coude, prêts à partir comme des… ogives nucléaires. Ou à être négociés.
DD va-t-il nous convaincre que Lolo en savait plus qu’elle ne le dit ? Il affirmait, il y a peu, qu’il apportera des éléménents de preuves au procès… A son initiative, deux témoins se présenteront à la barre : Gautier-Sauvagnac lui-même, et Arnaud Leenhardt, également ex président de l’UIMM.
Du côté de la plaignante, rien ne filtre.
Roger Lenglet