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Crise en thème

Indigestion de couleuvres

9 juin 2010 à 17h39
Trente ans que des gens bien intelligents, bien payés et bien technocrates signent des papiers permettant aux marchés d’être dérégulés. Et maintenant ?

Trente ans que le marché se dérégule… ou plutôt que des gens bien intelligents, bien payés et bien technocrates signent des papiers permettant aux marchés d’être dérégulés.

Alors… ce qui pourrait nous sortir de là, nom de nom, ce sont des mesures telles que le Glass-Steagall Act qui permet la séparation des banques de dépôt et des banques d’investissement.

C’est ce qui s’est passé lors de la crise de 1929. Ça a tenu une bonne quarantaine d’années jusqu’à les marchés le rongent jusqu’à l’os et poussent Clinton à l’abroger haut et court.

D’ailleurs, Christine l’alouette — une oiselle à robe grise qui m’apparaît parfois au fond d’une pinte — pense que ce ne serait pas une bonne idée… et ça, croyez-moi, c’est un signe très clair :

C’est LA bonne idée à mettre en place, fissa !

Sinon on devra se contenter de mesurettes qui maintiennent le système bien en place… des contraintes peu contraignantes, pour ne pas "affoler les marchés".

Dernière idée lumineuse en date : le coupe-circuit de la SEC. Si les marchés dégringolent de plus de 10%, on coupe le courant ! Ben oui, c’est évident, comme ça on ne change rien.

Taxer les banques, c’est une autre chouette idée, ouaip. Ça leur permettrait d’avoir un fonds pour sauver leur slip en cas de krach et de ne pas taper dans la caisse au passage.

Oui mais voilà, les bankers auront beau avoir un super fonds de secours, en cas de krach ils dilueront leurs pertes sur toutes leurs activités, jusqu’au crédit et frais de dépôts.

Alors… qu’a-t-on d’autre au rayon des bonnes idées pour intimer — gentiment et sans brusquer — l’ordre aux financiers d’arrêter de nous saigner à blanc ? Ah oui, un projet…

Interdire les ventes à découvert à nu sur actions, obligations et CDS sur titres souverains — voilà une idée qui a du sens : interdire de faire couler un pays. J’applaudis.

C’est déjà arrivé… en 1992, lorsque George Soros a investit 10 milliards de dollars contre la livre, empochant 10% environ de ROI. L’Angleterre à genoux, frappée par un seul homme.

Alors l’euro dans tout ça… eh bien ça serait peut-être pas une si mauvaise idée de le protéger — qu’en dites-vous ? Un peu de régulation dans ce monde de dépravés… Moi je vote pour !

Après tout c’est le gouvernement Mitterrand en 1986 qui a ouvert la brèche… pourquoi le couple Sarkozy/Lagarde ne la fermerait-il pas ? Le monde marche sur la tête ou pas ?

Non sérieusement, un assainissement du marché serait de bon aloi. Si ce n’est pas aujourd’hui, alors que l’on vit la pire crise financière depuis 1929 — faut-il le rappeler — alors quand ?

Mais c’est là que les choses se compliquent… nous ne sommes plus strictement Français, nous sommes Européens — et à ce titre nous devons penser collectivement, pour le bien commun.

De l’Europe faisons table ronde

Et le garant du bien commun en Europe, c’est l’ERT. Vous savez l’ERT, European Round Table, c’est la table ronde des industriels européens — architectes de l’Europe "compétitive au niveau mondial".

Leur détermination se résume à cette petite phrase de M. Philippa, secrétaire général :

"Nous soutenons pleinement la création d’un organisme de coordination européen pour l’éducation afin de promouvoir les MST (maths, science, technologie) dès l’école primaire. Nous sommes prêts à jouer le jeu – financièrement – en espèces et en nature."

Mais c’est bien sûr ! On n’a qu’à appeler ça les "jeunesses européennes" tant qu’on y est !

Et des idées ludiques comme celle-là, l’ERT en développe treize à la douzaine — comme supprimer la Sécurité sociale… repousser l’âge de la retraite, etc. Vous voyez le genre.

Moins social que le principal lobby européen, ça ne court pas les rues. Et c’est avec cette canaille que doivent composer nos chers représentants lorsqu’ils sont à Bruxelles.

Leur argument est toujours le même : "Si nous voulons être compétitifs… il faut s’aligner".

La fuite en avant

Evidemment, dans ce contexte l’Etat, c’est le parasite. C’est celui qui gaspille les recettes fiscales quand il faudrait appliquer la vision de l’ERT, droit dans ses bottes made in Europe.

Une lutte à trois s’engage, où l’Etat a les plus mauvaises cartes…

Les banques prêtent aux entreprises qui remplissent les caisses de l’état qui renfloue les banques qui rachètent la dette des Etats dont la solvabilité dépend des entreprises.

C’est maintenant qu’ils préparent le terrain pour les 10, 20 prochaines années — ils vont choisir la fuite en avant de peur de se faire avaler par les émergents — et l’Etat va plier.

Pendant ce temps le peuple de travailleurs sans travail, qui voit d’un mauvais œil le gel des salaires, la fonte des retraites, l’évaporation du pouvoir d’achat, avale couleuvre sur couleuvre.

Pourtant, je me souviens qu’il avait dit NON.

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State is dead, baby… La crise vue de 2012