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Conseil régional : La gauche cigare

8 janvier 2009 à 19h29
L’heure n’est pas venue, pas encore, de dresser un bilan – contrasté – des actions de la Région. Mais un lieu a valeur de symbole : le « Carré de la République ». Devenu le restaurant VIP des élus…

« On aurait bien voulu louer, ou emprunter, le Carré de la République… »

C’était à l’automne 2007. La Région venait de racheter les salons Drouot, en plein cœur d’Amiens, pour un million d’euros, et ça nous paraissait une excellente nouvelle : associations, écoles, théâtreux, chanteurs, pourraient organiser des concerts, des débats dans cette salle. Spacieuse. Confortable. Centrale.

Mais c’était pas si simple. Il fallait envoyer des faxes, des courriels, contacter le cabinet, appeler, rappeler, re-rappeler, et finalement, après un mois et demi de tractations : « Je crois que ça ne va pas être possible. » On s’était rabattus, donc, pour notre fête, comme d’habitude, sur l’ancienne Salle Dewailly (désormais Gracchus Babeuf). Mais si on ne pouvait pas obtenir « le Carré de la République », ni nous, ni des chanteurs, ni personne, alors ça servait à quoi ? «  C’est réservé pour les élus, nous informait le Conseil Régional. Y a open bar. Parfois y a des conventions aussi, des buffets, le comité du tourisme, les chambres de commerce… Mais en général, c’est notre cantine trois étoiles. »

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Le lieu mérite bien ses trois étoiles, en effet.

Un fakirien y a déjeuné, de quoi ouvrir une rubrique gastronomique : « Coquilles Saint-Jacques au beurre de Guérande en entrée, filet de boeuf (admirablement poêlé) et ses petits légumes (fèves croquantes et courgettes fondues), salade de chèvre chaud sur croûtons frottés, mousse au chocolat farcie de dés de fruits frais, le tout arrosé de Margaux et d’un Saint Vérain de bonne année. » Avec, bien sûr, des serveurs en costume de pingouin à chaque bout de table.

C’était « pour faire des économies », on nous assura alors : mieux vaut déjeuner à cette « cantine » que dans les restaus d’Amiens. Sauf qu’une dépense gourmande n’empêche pas l’autre : les comptes du Conseil régional regorgent de « déjeuners de travail » à 515 € aux Marissons, à 1 888,70 € à la Brasserie Jules, de « réceptions » à 3 240 € aux Sans-Soucis, à 3 945,61 € au Petit Poucet, toutes les bonnes adresses des gourmets. A l’heure de la crise, c’est pas toute la Picardie qui se serre la ceinture…

On nous traitera de « poujadistes », de « démagogues », qui faisons « le jeu de la droite ».

Pas d’accord.

D’abord, parce que c’est avec de l’argent public – notre argent donc – qu’on a privatisé ce lieu. Les salons Drouot étaient, auparavant, l’un des repaires de la bourgeoisie amiénoise. Mais le paradoxe, c’est que cet espace s’avérait plus ouvert, moins privé, qu’aujourd’hui ! Plus disponible qu’avec une Région en ferme les portes soirs et week-ends. Qui en réserve l’accès à ses affidés. Et c’est encore nous qui payons les vigiles…

Ensuite, justement parce que c’est la gauche (moins Gremetz) qui s’auto-octroie ce traitement princier. Les conseillers de l’opposition n’ont, il est vrai, guère protesté contre ces douceurs. Mais c’est la gauche qui les a décidés. Elle qui, supposément, devrait se tenir aux côtés des salariés, devrait se contenter de ticket-restaurant, la gauche s’offre au contraire des lieux à part. Où les élus sont soignés en barons.

Enfin, parce que le Conseil Régional en a fait un emblème, quasiment. Aussitôt après le rachat, la salle fut rebaptisée « Carré de la République ». Sans honte. Mais est-ce là, franchement, la « République » que nous souhaitons ? Est-ce au-dessus de cette gargote VIP que nous pouvons inscrire « Liberté-Egalité-Fraternité » avec fierté ?

Des euros partis en fumée

Capital le révélait, dans son numéro de juillet 2008 : « Les cigares du pharaon picard coûtent très cher à ses administrés », et le mensuel relevait « une délibération de 21 644 euros, destinée à garnir la cave à havanes du cabinet présidentiel ». Claude Gewerc publiait aussitôt un communiqué, rétablissant « les bons chiffres » : « 5976 € en 2005, 5234 € en 2006, 3567 € en 2007 », et précisant que la cave est « mise à disposition des 57 membres du Conseil Régional ». C’est une étrange défense. D’abord, parce qu’on n’a jamais vu Elodie Gossuin, ou Brigitte Fourré, ou même Maxime Gremetz avec un cigare au bec. Quand le Président s’en révèle, lui, un fin amateur. Surtout, voilà qui ne répond pas à la question de principe : est-ce aux Picards de payer – en plus du « Margaux », des « coquilles Saint-Jacques au beurre de Guérande », de la « mousse au chocolat farcie de dés de fruits frais »,etc. – les cigares d’élus aux rétributions déjà amples ?

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8 Messages de forum

  • Conseil régional : La gauche cigare

    9 janvier 2009 10:44, par trybuna ludu
    il n’y a pas de parti de gauche serieux en France. Sans equilibre politique on va dans le mur…
  • Si seulement c’était qu’en Picardie…
  • Conseil régional : La gauche cigare

    10 janvier 2009 00:20, par pièce détachée

    Vu les connotations élitistes de carré en termes d’urbanisme — Carré du Louvre, Carré des Orfèvres, Carré des Antiquaires, Carré du carré Hermès… —, l’appellation « Carré de la République » sentait déjà le roussi, non ?

    En fait, c’est juste une modernisation de « salon(s) », qui fait très bourgeoisie du XIXe siècle. Cela devenait sans doute ringard. Mais la cave à cigares est toujours là.

    Avec « carré », on peut aussi écrire « tête au carré »…

  • Conseil régional : La gauche cigare

    11 janvier 2009 20:49, par Presse indéPicarde
    LES DOCUMENTS SONT VISIBLES SUR NOTRE SITE

    Voir en ligne : http://presse-libre-picarde.over-bl...

  • Conseil régional : La gauche cigare

    17 janvier 2009 19:59, par Florent
    Quel honte de se prétendre de gauche avec de telle pratique. Cela ne vaut même pas une ligne de plus. Un électeur de gauche
  • Conseil régional : La gauche cigare

    14 juin 2009 14:17, par Capucine
    BEURK BEURK BEURK ! C’est à vomir ! Ah les cons-citoyens ! Sont biens … bons ! Non ? Pourquoi donc les respecter ! EM-PI-FFRONS NOUS RIEN QU’ENTRE NOUS … Mais c’est quand ? C’est quand qu’ ON SE LEVE ! Qu’on répande donc les noms de tous ces goinfreurs impudents ! Des noms !
  • Conseil régional : La gauche cigare

    4 décembre 2009 11:40, par richard
    ça me rappel une colère que nous avions pris la veille de noël avec les chômeurs qui réclamaient que leur soient octroyés les fonds sociaux des assedic qui n’étaient pas distribués. Un administrateur des Assedic, (maurice de la CGT) nous prévient que les autres administrateurs allaient se goberger dans un grand restaurant de Creteil. Nous avons débarqué à une dizaine(dont deux maman très en colère et en grande difficulté qui avaient droits à ces fonds) dans le salon chiquement décoré. Les tables étaient dressés bourgeoisement, les vins de grands crus. Un contraste saisissant entre ce refus et cette scène d’un obscénité criante. Nous leur avons retourné les assiettes sur la gueule, pris des photos tiré un journal des le lendemain"les ripoux des ASSEDIC" distribué le surlendemain dans toutes les antennes assedic du 94. Cherchez le lien ? je vous laisse le faire ; pour moi , il a à voir avec l’altérité, le soin des autres, le gout des autres aussi. Je vais au restaurant, je ne suis pas dans le besoin, mais ma colère est intact. Et mes parents m’ont appris que ce qui était bon pour moi, l’était pour les autres aussi. cordialement à François. Richard D