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Gants dit / samedi 6 février 2010 par Kenneth de Bier
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Aussi incompris que le poète, le gardien de but n’a jamais les éloges qu’il mérite. En voici un pour remettre les pendules du stade à l’heure.

Dans Le Portrait, Nicolas Gogol nous raconte les mésaventures du jeune peintre Tchartkov, qui a choisi le succès au détriment de l’Art. Le football a, semble-t-il, pris le même chemin, mettant en avant les Zidane, Maradona, Ronaldinho et autres Isaïas au jeu spectaculaire et facilement vendeur. Mais à l’ombre des cages se cache le ténébreux, le veuf, l’inconsolé.

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Au bord du monde

Depuis Baudelaire, tout bon poète se doit d’être à la fois au cœur et à la marge du monde ; il en souligne les failles, les paradoxes et les zones d’ombre. Ainsi, le gardien défend le lieu essentiel, sacré même, du football : le but. En cela, il est plus proche que quiconque du cœur du football. Avec pourtant ce paradoxe : sa position idéalement centrale est géographiquement excentrée – reflet sans doute d’une dualité corps / âme que ne renieraient pas les néo-platoniciens romantiques, et qui explique sans doute la sempiternelle mélancolie de Lionel Letizi.

Le gardien de but se construit donc sur une faille, un décalage : si l’on comprend qu’il est nécessaire au jeu, on le cantonne tout de même aux extrémités du terrain (donc du monde). Suivant la même logique, peu d’entre nous se portent volontaires pour garder les buts du dimanche matin ; on pressent confusément que l’on passe de l’autre côté, que va s’opérer une séparation métaphorique d’avec la communauté. L’angoisse nous étreint, qui ne tarde pas à devenir crainte métaphysique : crainte de côtoyer le néant, crainte de s’approcher trop près du gouffre, et de s’y évanouir sans espoir de retour (i.e aller aux cages tous les dimanches). Le match sans gardien et buts en sac à dos garantit alors un entre soi confortable : le terrain de football n’est alors plus la scène sur laquelle se joue le drame de l’existence, mais un simple espace ludique et innocent.

Tenir la balle

Cette altérité radicale du gardien se retrouve également sur le plan linguistique, si l’on peut dire, puisque le gardien est le seul joueur qui s’exprime avec ses mains, quand le langage dominant s’articule autour du pied. "Un étranger dans sa propre langue", dirait Bergson, avec ce que cette situation implique d’interrogations ontologiques. À l’instar du poète qui tente par son travail sur la langue de saisir le sens véritable des mots, le gardien est en effet le seul capable de saisir et de tenir, littéralement, le principe fondamental et moteur qui anime le football. C’est-à-dire le ballon. Il est d’ailleurs le seul qui désire le tenir, les joueurs de champ s’empressant généralement de s’en débarrasser d’une passe ou d’un tir.

De ce point de vue, il faut remarquer que les écoles anglaise et brésilienne produisent nombre d’artistes dont les toiles ne cessent de nous répéter la vanité de cette quête du principe originel. En France, on reste cependant plus académique, avec une tendance à railler les avant-gardistes comme Damien Grégorini (dont la filiation avec Magritte est flagrante tant ses interventions nous clament que Ceci n’est pas une sortie aérienne) ou le jeune performer serbe Vladimir Stojkovic et ses happenings déroutants.

La beauté de son art

Ce qui nous conduit à la question fondamentale du poste de gardien de but, encore une fois paradoxale. En effet, c’est par son échec, par son sacrifice symbolique répété, que vit le football : le jeu (le spectacle) demande que le gardien aille encore et encore chercher le ballon au fond des filets – la fascination de Camus pour le mythe de Sisyphe devient alors terriblement évidente. Mais n’est-ce pas le lot de tout poète ? Cette tension vers la perfection, vouée par avance à être décevante – et dont l’œuvre est le témoin – n’illustre-t-elle pas la maxime de Michaux qui fait de l’artiste celui qui "résiste à la tentation de ne pas laisser de traces" ? Car le gardien a besoin du but pour exister, il a besoin d’échouer pour que le jeu perdure : l’échec du gardien est en effet la garantie de la fécondité du monde. Dans ce rapport dialectique qui unit le jeu et le gardien, le but encaissé est donc une respiration dans l’œuvre du gardien, un assourdissant silence contrapuntique qui souligne en creux la beauté de son Art.

Voilà pourquoi, dans ce football contemporain où l’impératif catégorique impose l’efficacité et la réussite (de la passe, du tir, du dribble…), le gardien apparaît comme une figure grotesque et fragile, poétique en somme ; il est la victime consentante et rédemptrice des buteurs qui le martyrisent sans répit – comme les marins torturaient l’Albatros.

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