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Entre chiens et loups

Coup de boule / lundi 11 août 2008 par Séverin Buzinet
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Si vous randonnez paisiblement dans les alpages de Savoie, vous ne verrez pas la queue d’un loup, mais vos mollets risquent de se souvenir des chiens. Car ces grosses peluches nommées « patous » vous dévorent un vieux campeur en moins de deux, c’est écrit dans Le Monde du 9 août : l’innocent marcheur s’est carrément fait braquer par trois des meilleurs amis de l’homme et du mouton, qui, à huit reprises, aux jambes et aux épaules, ont planté leurs dents dans sa chair musclée. Et il paraît que « de tels incidents se multiplient dans les estives savoyardes depuis que les éleveurs s’équipent en moyens de protections pour faire face à la présence du loup ». Le 28 juillet déjà, une dame se faisait bouffer… Autant dire que les randonneurs foutent le souk dans nos montagnes, avec leurs gourdes et leurs grosses godasses, ils dérangent les oiseaux, les guêpes, les vers de terre, les troupeaux, ceux qui les bouffent et ceux qui les gardent. Les randonneurs nous emmerdent. Aucune loi ne protège cette espèce (à la différence du loup, qui a bien du pot), donc : virons les randonneurs, et les vaches seront bien gardées.

Ce n’est pas que je sois un ami des bêtes en général ni des loups en particulier. Je m’interroge très souvent, au contraire, sur les pulsions profondes qui poussent certains de mes contemporains à se laisser fasciner par cet animal encombrant et couvert de parasites (on lui doit, paraît-il, le transport gratuit de certaines variétés nouvelles de tiques ou de puces des Abruzzes au Vercors), au point de pleurer de joie lorsqu’il envahit nos pâturages en croquant de gentils moutons qui auraient avantageusement pu terminer leur vie en devenant côtelettes ou pull-over. « Mais non, disent les amis du loup, qui sont, d’une part, grands connaisseurs de la bonté cachée du loup, et, d’autre part, finauds comme des renards, ce ne sont pas les loups qui bouffent les moutons, ce sont des chiens errants ! ». La preuve : il y a des chiens errants partout, dans le Cantal, en Seine-et-Marne, en Ardèche, ici et là, ils côtoient des troupeaux ovins ou bovins, et il arrive exceptionnellement qu’ils chapardent un agneau (parfois, c’est le berger qui s’est offert un gigot) ; mais le seul endroit où des tas, des monceaux, des tonnes de moutons sont chaque année bouffés par les « chiens errants », c’est là où il y a des loups. Ou des ours. Autrement dit, le chien errant attaque le mouton pour emmerder le loup. Par jalousie. Pas de loup ? Le chien errant fait les poubelles et cherche à niquer Mirza dans sa niche. Il ne monte pas à mille cinq cents mètres pour respirer le bon air dans les éboulis et se cailler la queue à deux pas des névés. A croire que certaines régions flattent monstrueusement l’appétit des teckels largués sur l’autoroute et font pousser les canines des labradors sans colliers. Mais passons : la logique est un art trop humaniste pour séduire les zoophiles.

Non, je ne veux pas m’acharner et soutenir, par exemple, que s’il n’y avait pas de loups, les moutons et les bergers feraient leurs nuits en paix, sans molosses pyrénéens, avec seulement un des ces cabots modestement poilus et inoffensifs qui s’égosillent en aboiements quand passent les randonneurs et tournent des films émouvants pour Walt Disney. Je ne voudrais pas non plus apporter mon soutien, aveuglément, à la suggestion sur laquelle se conclut l’article de notre respectable quotidien : faire un fichier généalogique des chiens patous « de bonne qualité », issus d’une « bonne lignée ». Ni déplorer, avec sa correspondante de Chambéry, que ce fichier « annoncé pour 2007, n’est toujours pas opérationnel ». (Remarque en passant : l’idée que des fonctionnaires puissent s’occuper à longueur de journées à l’élaboration d’un tel document me transporte. J’espère que la réduction des déficits s’appliquera aux services du « fichier généalogique national des chiens de protection » au même titre qu’aux écoles maternelles).

Les raisons de ma réticence ? D’abord, en matière de fichiers, il y a d’autres scandales en cours dans le pays – qui supporterait qu’on fasse un fichier (on pourrait l’appeler : Edwige-bis) des patous de six mois et plus susceptibles de devenir de criminels, en indiquant leurs préférences sexuelles et syndicales ? Ensuite, si on se met à appliquer l’eugénisme aux cabots gardeurs de brebis, je ne doute pas que les voleurs de poules seront bientôt triés ab utero. Et puis zut, tiens, je me lâche : d’accord pour l’épuration génétique, mais plutôt que de bricoler le berger pyrénéen édenté, on n’a qu’à fabriquer le loup-OGM végétarien, et jeter les autres. Fini, les expertises contradictoires, les indemnisations onéreuses, les subventions aux associations bidon, les barbelés dans les alpages (merci, amis écolos !), le génocide des mérinos, les flots de sang sur les myrtilles, les mollets lacérés jusqu’aux pataugas : vivement le loup végétarien ! Grâce à la science moderne, marcheurs, marchez en paix, moutons, dormez sereins, et vous, les amis du loup, faites comme vos ancêtres : contentez-vous de lire Jack London.


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17 MESSAGES
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Forum

  • Entre chiens et loups
    le jeudi 11 septembre 2008 à 17:51
    Pourquoi en France nous avons des problèmes avec les loups et les ours et pourquoi en Yougoslavie ou leur population est 10 fois plus nombreuse les bergers ne sont pas dérangé ??? La réponse c’est qu’en France nos bergers ont des troupeaux immenses . Le berger est sur un côté de la coline qu’il ne vois pas le bout de son troupeau qui se trouve deux verssant plus loing et donc forcément c’est difficile de surveiller les attaques des loups des ours ou des chiens errants . En Yougoslavie il y a encore des vrais bergers qui vivent de leur troupeaux et ils ne sont jamais emmerdé par les loups ou par les ours car ces bergers là peuvent surveiller leur troupeau de dimention raisonnable , c’est de l’élevage familial et non industriel . Ici en France on veut faire de l’élevage intensif pour le ponion on est prêt à stéréliser nos campagnes , si c’est pas les bergers qui ne veulent rien d’autre que de l’herbe dans les colines se sont les chasseurs qui ne veulent pas autre chose que du sanglier … Franchement qu’on veinne pas pleurer qu’un loup ou qu’un ours c’est servit de quelques brebis sur un troupeau de 2000 têtes moi ça me fait rire toute ses idioties .
  • Entre chiens et loups
    le lundi 18 août 2008 à 22:15, Didier a dit :
    Je tiens simplement à suggérer à l’auteur de l’article de se rendre sur place avant de relayer un sujet qu’il a vu dans un quotidien. Les promeneurs et les randonneurs sont avertis de la présence des patous, il suffit de savoir lire avant de pénétrer dans les zones où ils sont présents. Ils sont même, en général, avec le troupeau derrière des barrières de contention. Mais il n’empêche que la bravoure de l’être humain le pousse à déroger les "interdits", à ses risques et périls… Arrêtons, les "t’as vu, on a parlé de moi dans le journal", et respectons les pâturages, les vrais randonneurs et ceux qui connaissent et respectent vraiment la nature, ne sont jamais sujets à ce genre de problème, pourquoi ? C’est bien de faire une page sur de plus le net, mais c’est une page inutile, je ne parle même pas de l’image qui est donnée du loup, l’auteur en a t-il déjà vu un, j’en doute ? C’est désagréable à lire, mais bien écrit, c’est vrai. J’espère qu’un jour Sèverin nous parlera des droits de l’homme en Chine. Là, c’est l’homme qu’on chasse avec de vrais chiens entrainés pour ça.
  • Entre chiens et loups
    le samedi 16 août 2008 à 11:53, Joce & Pascal a dit :
    Bonjour, Ma compagne et moi avons eu notre ration de fou rire en lisant cet article, très bien écrit et nous vous en remercions. Nous sommes entièrement d’accord avec vous sur certains points. Si les patous "chiens de bergers pyrénéens" étaient parfaitement éduqués de tels accidents n’auraient pas lieu. Logiquement les éleveurs doivent signaler la présence de ces chiens, est-ce fait ???? Comme beaucoup de gens, certains randonneurs pensent que tout leur appartient, sauf leurs détritus qui laissent sur place après une collation revigorante. Concernant le loup, il faut savoir qu’il a sa place au même titre que l’HOMME, et il était là bien avant ce dernier. L’HOMME par sa soif de PROPRIETE, a réduit en peau de chagrin l’espace vital de beaucoup d’animaux dont le canis lupus. Certes le loup transporte des tiques et des parasites ; l’HOMME de la drogue, de la violence, de la haine et des geste déplacés et désaprouvés sur de jeunes enfants, et nous en passons tellement la liste est non exhaustive. Oui nous sommes des défenseurs des loups et en règle générale du RESPECT de la nature. Nous rejoingnons votre analyse sur notre dernier article "Actualité" sur notre site. Votre article est très pertinent, et utile, un lien reportant à votre page sera mis en place sur notre site, sauf si vous y voyez un inconvénient. Cordialement Joce & Pascal
  • Entre chiens et loups
    le mardi 12 août 2008 à 09:10, Ervé a dit :

    Des barbelés dans les alpages !? Avec des miradors ?

    Vous ne devez pas randonner très souvent, mon brave Séverin.

    • Entre chiens et loups
      le mardi 12 août 2008 à 10:42, Buzinet a dit :
      Revoyez votre Mercantour (secteur Fenestre et Boréon), ou le sud-Vanoise. J’y trotte chaque année.
      • Entre chiens et loups
        le mardi 12 août 2008 à 12:40, Ervé a dit :

        Bon, d’accord. Possible pour le Mercantour. Mais comme il était plutôt question des alpages savoyards…

        Je randonne essentiellement en Vanoise et dans le Beaufortin, et il m’est rarement arrivé de devoir enjamber des barbelés. Tout au plus quelques clôtures électrifiées, facilement contournables.

        Mais pourquoi cette allusion aux écolos ?

  • Entre chiens et loups
    le lundi 11 août 2008 à 19:21, KneuKneu a dit :
    Je vous renvois à un article de françois Mouton paru dans le numéro 46 - Septembre 2003 - du bulletin de liaison de la SFEPM : "En 1992-1998, la brucellose ovine a causé l’abattage de 69366 ovins en région PACA. Dans les années 1990, le coût annuel de la lutte contre la brucellose ovine était compris entre 30 et 40 millions de francs. La prévalence apparente de la tremblante dans ces mêmes départements est faible, ce qui n’est pas le cas dans les Pyrénées-Atlantiques (plus de 150 foyers) mais là-bas, il n’y a pas de loups, juste nos derniers ours. En passant, rappelons que la fièvre aphteuse, pour cause de commerce « intensif » de moutons a conduit à l’abattage de près de 60000 ovins en 2001, mais c’était exceptionnel. Le chiffre le plus étonnant est quand même celui des animaux envoyés à l’équarrissage. Le total ovins-caprins en 2000 est d’un peu plus de 700000 animaux. Les chiffres sont comparables d’une année sur l’autre. Comme ce n’est pas la destination « naturelle » des animaux de ferme, il serait intéressant de mieux connaître les raisons d’un tel affectif d’animaux détruits. Enfin, par principe, le chiffre des animaux éliminés à l’équarrissage ne peut pas tenir compte de ceux morts en montagne et non redescendus … Encore un commentaire pour dire que les fonds déboursés pour rembourser les dégâts viennent tous du ministère chargé de l’Environnement, et pas du ministère chargé de l’agriculture. Pour une question de pastoralisme, on appréciera. Le ministère chargé de l’Agriculture n’a d’ailleurs pas vraiment l’intention de voir les choses changer . Il faut dire qu’il leur reste justement à prendre en charge le coût des maladies… Ensuite, on accuse le loup de chasser des proies pour se nourrir, c’est-à-dire d’être carnivore. Curieux. Quand on connaît le montant des dégâts attribués aux ongulés sauvages (suidés, cervidés, bovidés), on aurait pu penser que la venue du loup aurait été plutôt appréciée . Cela ne semble pas être le cas. Il vaut mieux payer les dégâts de gibier que s’en faire manger quelques-uns par le loup, question de principe."
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