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Coup de tonnerre dans l’affaire Clearstream

Perquisition, auditions / jeudi 17 janvier 2008 par Nicolas Beau
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Avec l’audition, mercredi 16 janvier, de l’ancien patron des Renseignements Généraux (RG), Yves Bertrand, l’instruction de l’affaire du vrai-faux listing connait un tournant décisif. A l’époque, ce grand pro de la manipulation travaillait pour Philippe Massoni, conseiller de Chirac à l’Elysée. La farce va-t-elle virer à l’affaire d’Etat ?

Le mercredi 16 janvier au matin, une perquisition a été déclenchée au domicile d’Yves Bertrand, l’ancien patron des Renseignements Généraux (retrouver ici les articles précédents), dans le dix septième arrondissement, où cet homme de l’ombre connaît une pré retraite paisible en compagnie de ses quatre chats. Une première, sans précédent, sous la Cinquième République.

Les flics envoyés par les juges d’Huy et Pons, chargés du dossier Clearstream, se sont également rendus à l’Iga, la prestigieuse Inspection générale de l’administration, où ce vieux serviteur de l’Etat avait été relégué depuis sa mise à l’écart par Nicolas Sarkozy. Yves Bertrand a été entendu pendant de longues heures. Et tant pis pour les habitudes du patron de l’Iga, ancien préfet blanchi sous le harnais, qui aimait tant partager un repas de midi bien arrosé avec l’ami Bertrand.

Dans le même temps, les hommes de la Police judiciaire du ministère de l’Intérieur ont interpellé le journaliste Stéphane Ravion, qui avait ses habitudes, comme beaucoup de journalistes, au quatrième étage de la rue des Saussaies, où se trouvait, à la belle époque, le bureau du patron des RG, protégé par des portes capitonnées. Ce grand serviteur de l’Etat ou plutôt de sept ministres successifs de l’Intérieur y recevait ses amis de la presse pour un whisky ou une tisane. L’air mi bonasse, mi renfrogné, il y recueillait les infos avec délectation, une lueur de jubilation dans le regard.

Yves Bertrand - JPG - 31.9 ko
Yves Bertrand
© Kerleroux

Héritier du « Cabinet noir » de la Reynie, le surintendant de la police sous Louis XIV et du service des fiches de la III République, Yves Bertrand se prenait pour le « démineur de la République », comme l’ont écrit ses amis journalistes. Ses hommes l’appelaient « Grincheux » ou « Papy », c’était selon.

Dans la foulée de l’audition de Bertrand et de Ravion, les flics devraient entendre, si ce n’est déja fait, la fidèle commissaire de l’ancien patron des RG, Brigitte Henri. Les enquêteurs ont retracé son emploi du temps à l’époque de la confection des vrais faux listings, en 2003 et début 2004. Ils sont désireux de l’interroger sur ses relations avec certains protagonistes de l’affaire comme Imad Lahoud. La version livrée pour l’instant par les intéressés est en effet un peu angélique. On nous explique que Dame Henri avait caressé l’idée qu’Imad Lahoud, d’origine libanaise, lui faciliterait l’adoption d’un enfant à Beyrouth. Et ce dernier comptait sur l’aide de l’officier des RG pour récupérer son permis à point. Louables aspirations ! Une certitude, Brigitte Henri, à l’époque, était censée diriger les RG dans l’Isère. Les enquêteurs ont découverts que cette fonctionnaire consciencieuse passait plus de temps à Paris et même au Luxembourg, qu’à Grenoble.

L’audition d’Yves Bertrand est-elle une surprise ? Pas totalement. La semaine dernière, Bakchich expliquait comment les deux magistrats d’Huy et Pons venaient de découvrir un quatrième listing dont les noms proviendraient directement de fiches des Renseignements Généraux. On savait également que le patron d’une petite boite de conseil en stratégie, Pierre Sellier, avait été entendu par les enquêteurs pour avoir rédigé une note sur ses échanges avec le journaliste Stéphane Ravion en novembre 2006.

À lire le verbatim de cette rencontre, on a l’impression d’être dans un mauvais roman noir. « Stéphane Ravion, note Sellier, a été appelé en 2003 à son retour du Yémen par Bertrand. Ce dernier lui a proposé de bosser pour le cabinet noir (…) Il s’agissait de trouver tout ce qu’on peut contre Sarkozy, pour l’abattre ! » Et Sellier de poursuivre : « Ravion est surtout réputé, être l’ame damnée ou le petit soldat de Bertrand, son mec pour les coups tordus, prèt à tout ». D’où la curiosité croissante des juges sur le rôle joué par « Averel », le joli surnom dont Sellier semble avoir baptisé Dominique de Villepin, grand ami de Bertrand, mis en examen le 27 juillet 2007 pour « complicité de dénonciation calomnieuse, recel de vol et d’abus de confiance et complicité d’usage de faux », et que les juges souhaitent ardemment réentendre en dépit des réticences de l’ancien Premier ministre.

Depuis l’été dernier, Yves Bertrand se savait dans le collimateur et se montrait très attentif à tout ce qui était écrit le concernant. C’est dans ce contexte qu’il a rédigé un livre au titre évocateur : Je sais rien, mais je dirai (presque) tout. Le résultat, un peu allusif, représente un honnête galop d’essai pour un deuxième tome, qui irait, lui, plus au fond des choses. Le site du Point a d’ailleurs annoncé récemment que notre Saint-Simon des commissariats était disposer à écrire la suite de ses mémoires si on venait lui chercher des poux dans la tête. Le moment, semble-t-il, est venu.

Une certitude, la fable que l’on nous a servi jusqu’à présent dans l’affaire Clearstream paraît mise à mal. Que nous dit-on ? Et bien que deux hommes et deux seulement seraient au coeur de toute cette embrouille : Jean Louis Gergorin et Imad Lahoud, l’un et l’autre adoubés, mais de loin, par ce grand méchant de Villepin. Le premier, brillant X-Mines, et le second, soldat perdu de la cause du renseignement, auraient concocté, le soir à la veillée, les fameux faux listings. Ces deux héros du sitcom Clearstream ne veulent pas recueillir seuls les lauriers de tout ce peplum et on les comprend.

Du coup, l’instruction de Zig et Puce semblait un brin patiner. Au point d’ailleurs qu’on ignore encore qui a fabriqué concrètement les listings. Avec le formidable rebondissement survenu ce mercredi 16 janvier, les deux juges se rapprochent enfin du coeur de toute cette carambouille. Il était temps. Interrogé par les policiers, c’est à dire dans une situation forcément moralement difficile pour l’ancien grand flic qu’il est, Yves Bertrand va-t-il admettre un rôle dans l’affaire Clearstream ? Sera-t-il contraint, pour éviter le pire, à « balancer » ses commanditaires ? Longtemps très proche de Dominique de Villepin, alors que ce dernier était secrétaire général à l’Elysée, Yves Bertrand a du s’éloigner, après la réélection de Chirac, de son mentor. Lequel, nommé au Quai d’Orsay, avait désormais d’autres horizons et préférait le tenir à distance. Les coups tordus que les deux hommes avaient concocté contre Lionel Jospin avant la présidentielle n’étaient à l’honneur ni de l’un ni de l’autre.

Quant à Nicolas Sarkozy, il s’est toujours méfié d’Yves Bertrand, en raison des recherches que les RG avaient fait sur son compte dès les années 2001 et 2002. Un peu seul, Bertrand s’était rapproché, en 2002 et 2003, de l’Elysée, où il comptait au moins un fidèle ami en la personne de Philippe Massoni, un ancien patron des RG comme lui, qui l’avait fait venir à ses cotés… dès 1987. Rien ne vaut, dans les périodes difficiles, les vieux amis fidèles. Avec leurs protections à l’Elysée, leurs relations dans la presse, leurs rencontres avec les principaux protagonistes de l’affaire Clearstream et leur gout pour les coups tordus, Massoni et Bertrand auraient-ils eu vent, même de très loin et par hasard, du grotesque montage des fameux vrais faux listings ?

Disons que la question n’est pas totalement absurde.


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17 MESSAGES
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  • Coup de tonnerre dans l’affaire Clearstream
    le mercredi 8 octobre 2008 à 23:36, jean a dit :
    je m’appelle jluc courbet et ai été journaliste a l’agence capa en 1997 ET 1998.j’ai collaboré avec Pascal henri et stephane ravion sur de nombreux sujets.je confirme, qu’il est impossible de travailler sur des sujets aussi sensibles s’en etre "adoubé" par les services…stephane n’etait pas le "petit soldat" de BERTRAND.
  • Coup de tonnerre dans l’affaire Clearstream
    le vendredi 18 janvier 2008 à 22:53, MengWan a dit :

    Je pense qu’il serait intéressant de savoir combien a été dépensé sur cette "affaire" aux frais du ministère de la Justice !

    Ce ministère n’a jamais le nécessaire pour accomplir correctement ses tâches, y compris a minima, (se) dépenser autant pour ce "machin" sans intérêt est assez énorme.

    Que Mr le (roi-)Président rétablisse les "lettres de cachet" pour se venger de ses ennemis personnels, çà nous coûtera moins cher …

  • Coup de tonnerre dans l’affaire Clearstream
    le vendredi 18 janvier 2008 à 12:40

    Tonnerre de Brest !

    Le patron de l’IGA, c’est Thierry Klinger, préfet du Finistère de septembre 2000 à mars 2003.

  • Coup de tonnerre dans l’affaire Clearstream
    le vendredi 18 janvier 2008 à 09:30
    vous pourriez aussi dire que votre "collegue STEPHANE RAVION" a aussi été perquisitionné . C’est aussi ça L’INTEGRITE
  • Coup de tonnerre dans l’affaire Clearstream
    le vendredi 18 janvier 2008 à 07:16, fortinat a dit :
    Coup de tonnerre ?? s’il advient une grosse info vous l’appellerez comment ?…Sans rancune.
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