Merci de bien vouloir trouver, ci-dessous, la version intégrale de l’éditorial-du-jour de Laurent Joffrin, dont un remix raccourci a été publié ce matin par erreur.
"ÉPOUVANTAIL, POIL AU MENTAIL.
Plus le temps passe et plus l’horrifique spectre brandi par Michèle Alliot-Marie et Libération perd de la consistance. Plus le temps passe et plus l’idée d’un « terrorisme anarcho-autonome » d’"ultragauche" qui prospérerait au milieu des vaches de Corrèze est privée de sa crédibilité. Libération, par conséquent, a très gravement divagué. On se gardera de se prononcer sur le fond du dossier qui reste entre les mains de la justice et que les avocats des prévenus de Tarnac ont apparemment du mal à consulter, alors que c’est leur droit élémentaire. Une chose est claire : la justice a estimé que trois des accusés qu’elle gardait encore devaient être relâchés. S’ils sont si dangereux, pourquoi les a-t-on élargis ? Et si on les a élargis, n’est-ce pas que l’incrimination choisie est décidément disproportionnée ? Libération a longuement parlé avec l’un d’entre eux, après lui avoir posément fait dans les bottines, d’une haute hauteur : le gars, c’est le moins qu’on puisse dire, n’est pas (du tout) rancunier. Le lecteur jugera lui-même des explications qu’il fournit avec bonne grâce sur son itinéraire, sa garde à vue, son emprisonnement et ses idées politiques.
Difficile en tout cas, à l’entendre, de l’assimiler à un émule d’Oussama ben Laden ou de Ravachol, comme l’a fait Libération le mois dernier, en délirant atrocement sur un pseudo-"bréviaire anarchiste" . Et s’il dit vrai, la ministre de l’Intérieur aura, tout comme Libération , délibérément posé sur un militant alter, vivant au grand jour dans une communauté sympathique et altruiste (et pleine de mièvre gentillesse, mais assez obtuse, tout de même, pour ne pas considérer mon ami Bertrand, manager de Paris, comme le sauveur d’un "socialisme" enfin émancipé de sa tutelle hypergauchiste), l’infamante étiquette de terroriste en organisant son arrestation à grand spectacle et son embastillement pour plus de deux semaines.
Où est la présomption d’innocence, quand des gens de Libération hurlent que "l’ultragauche déraille" ? Où sont les droits de la défense ?
Où est le simple bon sens policier chez la première flic de France ? Où est le simple bon sens journalistique chez le premier barbichu de la presse quotidienne nationale ? Un jour, s’il se confirme que ces terroristes n’en sont pas (mais continuons tout de même de les nommer comme tels tant qu’on ne sait pas ce qu’il en est), la ministre devra répondre de cette injustice. Naturellement : Libération devra aussi en "répondre" (poils au mentondre).
PS. Je rappelle que c’est au mois de janvier que paraîtra au Seuil ma courageuse "réfutation polémique" du "poujadisme à vernis intellectuel" connu sous le nom de critique-radicale-des-médias. Ne pouffez pas, je vous prie-je."