J.O. Numéro 299 du 26 Décembre 2001       J.O. disponibles       Alerte par mail       Lois,décrets       codes       AdmiNet

Texte paru au JORF/LD page 20597

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Observations du Gouvernement sur les recours dirigés contre la loi de financement de la sécurité sociale pour 2002


NOR : CSCL0105250X



La loi de financement de la sécurité sociale pour 2002, adoptée le 4 décembre 2001, a été déférée au Conseil constitutionnel par plus de soixante députés et par plus de soixante sénateurs. Les requérants invoquent, à l'encontre de ce texte, de nombreux moyens qui appellent, de la part du Gouvernement, les observations suivantes :

I. - Sur les critiques dirigées contre l'ensemble de la loi

A. - Les auteurs des recours adressent à plusieurs dispositions de la loi déférée des critiques qui, selon les sénateurs, mettent en cause la constitutionnalité du texte dans son ensemble.
Certaines de ces critiques concernent des transferts de charges au profit du fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale (FOREC). Selon les requérants, ces transferts porteraient atteinte à l'équilibre financier de la sécurité sociale, et plus précisément à celui de la branche maladie, ainsi qu'à l'équilibre du fonds de solidarité vieillesse (FSV). Les sénateurs mettent également en cause la contribution, prévue par l'article 42, de la branche maladie au financement du plan « BIOTOX ». Ils critiquent, de même, les dispositions des articles 59 et 68 prévoyant que les excédents de la branche famille pour 2000 abonderont le fonds d'investissement pour la petite enfance et le fonds de réserve des retraites. S'agissant de ce dernier, ils contestent aussi l'article 67, qui lui affecte des recettes précédemment destinées à la Caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés.
Les députés et sénateurs requérants mettent ensuite en cause la sincérité des prévisions de recettes par catégorie, figurant à l'article 16, et des objectifs de dépenses énoncés à l'article 69. S'agissant des premières, ces évaluations ne tiendraient pas compte de l'évolution de la situation économique et reposeraient sur des recettes hypothétiques. Les sénateurs contestent, en particulier, le fait que la réévaluation des prévisions ne porte que sur la contribution sociale de solidarité des sociétés. S'agissant des dépenses, l'article 69 ne prendrait pas en compte les mesures prévues par les articles 59 et 68, ce qui se traduirait par une fausse amélioration du solde. Les requérants considèrent en outre que la prise en charge par la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF) du congé de paternité de devrait pas apparaître dans les objectifs de dépenses de la branche famille, lequel serait surestimé. Selon les auteurs des deux saisines, l'objectif national des dépenses d'assurance maladie (ONDAM) serait, à l'inverse, sous-estimé.
Enfin, les sénateurs, auteurs du second recours, contestent les prévisions révisées pour 2001, figurant aux articles 17, 70 et 72. Ils font en particulier grief au Gouvernement de ne pas avoir réévalué suffisamment les prévisions de recettes.
B. - Le Conseil constitutionnel ne saurait faire sienne cette argumentation.
1. S'agissant des transferts de charges, le recours des sénateurs repose sur des prémisses contestables, dans la mesure où l'argumentation sur laquelle il s'appuie revient à postuler que l'équilibre de chacune des branches - voire celui des organismes concourant au financement de la sécurité sociale - constituerait une condition de la conformité à la Constitution des dispositions introduites dans une loi de financement de la sécurité sociale.
Or cette thèse ne découle ni de la lettre de la loi constitutionnelle du 22 février 1996, ni des débats qui en ont précédé l'adoption. Sans doute le rétablissement de l'équilibre des comptes sociaux constitue-t-il un objectif que le constituant a entendu prendre en compte. Sans doute aussi le débat auquel donne lieu, chaque année, la loi de financement est-il de nature à permettre que soient réunies les conditions d'un retour à l'équilibre. Mais l'on ne saurait, pour autant, critiquer utilement des dispositions contenues dans une telle loi au seul motif que leur impact sur l'une des branches ou sur l'un des organismes concourant au financement de la sécurité sociale serait négatif.
Le moyen tiré d'une atteinte à l'équilibre, notamment à celui des branches, est donc inopérant.
En tout état de cause, on observera que le régime général demeure globalement excédentaire : ni le projet de loi initial - ainsi que le montre le tableau figurant page 30 de son annexe C -, ni le texte issu du débat parlementaire ne remettent en cause cet excédent.
2. En ce qui concerne la sincérité des prévisions, les différentes critiques contenues dans les recours appellent les trois séries d'observations suivantes :
a) S'agissant en premier lieu des évaluations de recettes, il est nécessaire de bien distinguer ce qui relève des débats d'experts ou de l'appréciation politique de ce qui peut mettre en cause la conformité à la Constitution de la loi de financement de la sécurité sociale au regard du principe de sincérité.
Les chiffres retenus par le Gouvernement peuvent évidemment faire l'objet de débats mais, au plan juridique, seule une surévaluation manifeste, certaine et volontaire des prévisions dénaturant la signification du contrôle parlementaire sur ces prévisions, pourrait donner prise à un contrôle de constitutionnalité.
Or, tel n'est pas le cas, le Gouvernement s'étant fondé sur des projections étayées par des travaux d'experts, cohérentes avec celles du projet de loi de finances pour 2002 et présentées à la commission économique de la nation du mois de septembre.
Le principe de sincérité s'applique ici à un exercice de prévision qui est marqué par des aléas importants. Il s'agit en effet d'évaluer, avant que l'année soit achevée, les recettes de l'ensemble de l'année suivante ; à ce titre, la prévision des recettes pour l'année 2002 comporte encore plus d'incertitudes que celle de recettes de l'année en cours.
Les hypothèses macro-économiques retenues dans le rapport économique, social et financier (RESF) associé au projet de loi de finances pour 2002 tablent sur une croissance française de 2,3 % en 2001 et 2,5 % en 2002, avec la possibilité d'un point bas à 2,1 % en 2001 et à 2,25 % en 2002 compte tenu des incertitudes notamment liées aux attentats du 11 septembre. La masse salariale du secteur marchand progresserait de 5,8 % en 2001 et de 5,0 % en 2002, avec une croissance de l'emploi salarié de 2,8 % en 2001 et de 1,7 % en 2002 et une croissance des salaires nominaux par tête de 2,9 % cette année et de 3,3 % l'an prochain.
Ces hypothèses rejoignaient celles de l'ensemble des prévisionnistes au début du mois de septembre. A cette date, le consensus des prévisionnistes internationaux (« Consensus Forecast ») envisageait ainsi une croissance française de 2,4 % en 2001 et de 2,5 % en 2002.
Par ailleurs, les dernières prévisions disponibles publiées au cours des deux derniers mois confortent jusqu'à présent ces projections. Certains résultats sont même meilleurs que ce qui était envisagé :
- les comptes trimestriels du troisième trimestre 2001 publiés par l'INSEE le 23 novembre dernier mettent en évidence une hausse de 0,5 % du PIB au troisième trimestre, après 0,2 % au deuxième trimestre. L'acquis de croissance à la fin du troisième trimestre pour l'année 2001 (1) s'inscrit ainsi à 2,1 %, en cohérence avec les prévisions du RESF ;
- selon une enquête récente réalisée par le ministère de l'emploi et de la solidarité, l'emploi salarié marchand dans le secteur concurrentiel aurait progressé de 0,3 % par trimestre au deuxième et au troisième trimestre, ce qui porte l'acquis de croissance pour 2001 à près de 3,0 %, un niveau supérieur aux projections du RESF pour l'ensemble de l'année (2,8 %) ;
- enfin, le salaire mensuel de base de l'ensemble des salariés a progressé de 0,7 % au troisième trimestre, après 0,5 % au deuxième trimestre, ce qui a alimenté le pouvoir d'achat des ménages, comme envisagé dans les prévisions du RESF ;
- par ailleurs, les dernières données disponibles sur le recouvrement des cotisations conduisent à réviser à la hausse les recettes du régime général pour l'année 2001. L'hypothèse de croissance en moyenne annuelle s'établirait à 6,5 %, soit un gain de 0,6 % par rapport aux comptes prévisionnels. Ce gain de recettes en 2001 devrait avoir une incidence positive sur les comptes 2002 présentés en annexe du projet de loi.
Les prévisions publiées par les organismes publics ou privés dans le courant du mois d'octobre et de novembre ont souligné la dégradation de la conjoncture internationale et les conséquences économiques néfastes des attentats du 11 septembre. Cependant, les résultats statistiques publiés jusqu'à présent, dans un contexte de baisse des prix du pétrole et de réponse rapide de la politique économique, suggèrent que certains de ces organismes ont peut-être surréagi négativement aux événements récents. Le Gouvernement met en oeuvre une stratégie qui combine le souci de renforcer la croissance et de la protéger autant que possible, et qui a montré son efficacité lors des chocs précédents. Les baisses d'impôts et de cotisations sociales s'inscrivent dans cette logique.
Quant au taux de croissance de l'ONDAM, pour juger de son réalisme, il faut garder à l'esprit qu'on est en présence d'un objectif de dépenses et non pas d'une enveloppe budgétaire limitative. Il ne s'agit donc pas d'un montant maximum de dépenses, mais d'un seuil défini en fonction des choix de santé publique, au-delà duquel des mécanismes de régulation des dépenses doivent être mis en oeuvre. Les dépassements qui ont pu être observés au cours des exercices récents ne remettent donc pas en cause cet objectif dans son principe.
Le taux de 4,0 % inscrit dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2002 est proche du taux de croissance du PIB prévu. Cet objectif peut être considéré comme volontariste, mais il est en phase avec la croissance de la richesse nationale. Au demeurant, les mesures prises en matière de dépenses de santé devraient permettre d'infléchir l'évolution des dépenses à l'avenir.
On relèvera d'ailleurs que les dépassements constatés dans le passé ne représentent qu'une très faible proportion des dépenses totales (1,5 % par rapport à l'ONDAM inscrit dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001), soit l'ordre de grandeur de l'erreur de prévision. De ce fait, ils n'ont en définitive pas remis en cause les équilibres globaux de l'assurance maladie.
b) En deuxième lieu, il convient de souligner que, pour la première fois cette année, la loi de financement de la sécurité sociale comprend des agrégats de dépenses et de recettes révisés, afin de tenir compte de la décision no 2000-437 DC du 19 décembre 2000 sur la loi de finances rectificative pour 2000 : cette décision ayant censuré le transfert au FOREC du reliquat des droits sur les tabacs perçus par l'Etat, au motif qu'aucune loi de financement n'avait pris en compte l'incidence de cette opération et qu'aucune ne pouvait plus le faire avant la fin de l'exercice considéré, les articles 17, pour les recettes, et 70, pour les dépenses, enregistrent donc l'impact financier des mesures nouvelles intervenues depuis le vote de la loi de financement pour 2001 sur les dépenses et les recettes de l'année 2001.
Par ailleurs, dans un souci de sincérité et d'exactitude, il a été décidé de retenir comme base pour bâtir ces agrégats révisés les dernières prévisions de dépenses et de recettes établies à l'occasion de la réunion de la Commission des comptes de la sécurité sociale de septembre 2001, ces chiffres correspondant aux dernières données disponibles.
On notera que cette innovation importante de la loi de financement pour 2002 va dans le sens d'une meilleure information du Parlement.
c) S'agissant enfin des critiques concernant plus particulièrement les évaluations de recettes relatives à la la contribution sociale de solidarité à la charge des sociétés (C3S), il convient de préciser que c'est un impôt assis sur le chiffre d'affaires des sociétés au taux de 0,13 %, recouvré pour le compte de l'Etat par la caisse d'assurance vieillesse des commerçants (ORGANIC).
L'essentiel du produit de la contribution de l'année en cours est affecté, en vertu de l'article L. 651-1 du code de la sécurité sociale, au financement de l'ORGANIC, de la CANCAVA (caisse d'assurance vieillesse des artisans) et de la CANAM (caisse d'assurance maladie des travailleurs non salariés non agricoles). Depuis 1999, une partie de ce produit est aussi affectée exceptionnellement au financement du régime des exploitants agricoles (BAPSA).
En application des articles L. 651-1, L. 135-3 (4o) et L. 135-7 (1o et 2o), tout ou partie du solde de la contribution est affecté l'année suivante (n + 1) :
- d'une part, au fonds de solidarité vieillesse (FSV), dont l'éventuel excédent est lui-même transféré en tout ou partie au fonds de réserve pour les retraites (FRR) l'année n + 2 ;
- d'autre part, directement, au fonds de réserve pour les retraites.
Au regard de la loi de financement de la sécurité sociale de l'année n, les montants d'acomptes de C3S affectés à l'ORGANIC, la CANCAVA, la CANAM et le BAPSA sont pris en compte dans l'agrégat des recettes (ligne impôts et taxes affectés). Le solde de l'année n compte tenu du versement des acomptes, affecté à ces caisses, puis le solde disponible affecté au FSV et/ou directement au FFR sont pris en compte dans l'agrégat recettes de l'année n + 1.
En 2001, il avait été prévu d'affecter 1,830 Md de francs de C3S au BAPSA. Dans le cadre de la loi de finances rectificative pour 2001, le Gouvernement a proposé au Parlement d'augmenter cette somme de 1,542 Md de francs (art. 8 du projet de loi). Cet abondement supplémentaire est prélevé sur le solde de C3S 2001 en attente d'affectation, lequel solde s'est révélé supérieur à 0,8 Md de francs à ce qui était initialement prévu. En effet, le compte de la contribution enregistrait au 31 octobre une rentrée effective de 19,9 Mds de francs contre 19,1 Mds de francs prévus.
Le Gouvernement a, par conséquent, fait adopter par le Parlement, deux modifications de la loi déférée :
- une modification de l'agrégat recettes révisé pour 2001 (art. 17) qui a été majoré de 1,5 Md de francs correspondant à l'affectation de cette somme au BAPSA ;
- une modification de l'agrégat recettes pour 2002 (art. 16) qui a été minoré de 0,7 Md de francs. En effet, cet agrégat enregistre la diminution de 1,5 Md de francs du solde 2001 de C3S du fait du versement supplémentaire au BAPSA, mais aussi le supplément de 0,8 Md de francs constaté, supplément qui n'avait pas été pris en compte lors de l'élaboration du projet de LFSS.
Contrairement à ce que soutiennent les requérants, les évaluations portant sur cette contribution sont donc aussi sincères et exhaustives qu'il est possible.

II. - Sur les dispositions ayant une incidence
sur l'exercice 2000

A. - Plusieurs dispositions de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2002 sont contestées au regard de leur incidence sur l'exercice 2000.
1. Ainsi, l'article 59 a pour objet de doter le fonds d'investissement pour la petite enfance d'une somme de 1,5 milliard de francs, prélevée sur l'excédent de la CNAF pour l'exercice 2000. De son côté, l'article 68 prévoit le versement au fonds de réserve pour les retraites d'une somme de 5 milliards de francs, également prélevée sur le même excédent.
Selon les sénateurs, auteurs de la seconde saisine, ces deux articles n'auraient pas leur place dans la loi déférée, dans la mesure où ils ne concernent que les comptes de l'exercice 2000.
2. Par ailleurs, le deuxième alinéa du II de l'article 12 procède à l'annulation des créances sur le FOREC, enregistrées par l'ACOSS et par les différents régimes concernés, et se rapportant à la compensation par cet établissement des allégements de charges, prévue par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000. Il prévoit également la modification des comptes 2000 des organismes de sécurité sociale pour tenir compte de cette mesure.
Les auteurs des deux recours contestent cet article en lui faisant grief de remettre en cause les conditions générales de l'équilibre de la sécurité sociale en 2000, sans que la présente loi comporte une disposition rectifiant les prévisions de recette pour cet exercice. Ils considèrent que cette mesure ne repose pas sur un motif d'intérêt général et que la loi ne peut remettre en cause les comptes d'exercices clos, alors que les règles de la compatibilité auraient dû conduire à imputer cette mesure sur l'exercice 2001. Seraient en outre méconnus l'exigence de clarté de la loi, le principe d'annualité et la capacité de contrôle du Parlement sur les comptes de la sécurité sociale.
B. - Ces critiques ne sont pas fondées.
1. S'agissant des articles 59 et 68, les requérants se méprennent, tant sur la portée des dispositions en cause que sur les principes régissant l'insertion de dispositions dans une loi de financement.
Ces deux dispositions ont en effet pour seul objet, et pour seul effet, d'affecter à des fins particulières qu'elles définissent, et à compter de la publication de la présente loi, une partie des excédents de la branche famille constatés en 2000.
Elles retracent ainsi des mouvements financiers très importants au sein des organismes entrant dans le champ des loi de financement de la sécurité sociale ou entre eux. Aucune disposition constitutionnelle ou organique ne fait obstacle à ce que le législateur se prononce sur l'utilisation des reports à nouveau inscrits aux comptes de bilan après la clôture de ces derniers. Il paraît même particulièrement légitime que le Parlement soit en mesure de statuer sur cette utilisation dans le cadre de l'examen de ces lois.
De plus, tant l'abondement de 1,5 Md du fonds d'investissement pour la petite enfance que le prélèvement de 5 Mds sur l'excédent 2000 de la branche famille en faveur du fonds de réserve pour les retraites affectent directement la trésorerie du régime général soit en 2001, soit en 2002, en fonction des dates respectives du paiement des investissement en crèches et de l'exécution du transfert vers le FRR. Or, dès lors, d'une part, que la trésorerie du régime général et les conditions de son équilibre entrent bien dans le champ des lois de financement de la sécurité sociale, d'autre part que la loi de financement pour 2002 peut aussi rectifier la loi précédente, c'est à bon droit que les articles en cause ont été introduits dans la loi déférée.
2. Quant à l'article 12, les critiques qui lui sont adressées appellent les observations suivantes :
a) En premier lieu, cet article tire les conséquences d'un constat, qui est que les recettes encaissées par le FOREC au cours de l'année 2000 se sont révélées insuffisantes pour compenser l'intégralité des exonérations qui auraient dû être prises en charge par ce fonds.
Le régime général étant en excédent en encaissement/décaissement en 2000 sans que cette créance ait été honorée, il a été jugé opportun de tirer les conséquences de cette situation en procédant à leur annulation. Cette mesure, qui a le mérite de la clarté, a paru préférable à la solution de facilité qui aurait consisté à laisser les régimes de sécurité sociale conserver ces créances dans leurs bilans.
Au total, le montant de l'annulation de créances prévu par la loi s'élève à environ 16,2 milliards de francs en droits constatés.
Cette annulation, qui signifie que des remboursements qui devaient intervenir si la loi était demeurée inchangée n'interviendront finalement pas, ne présente aucun caractère rétroactif. Elle procède d'un choix d'opportunité auquel le Parlement a procédé, comme il lui était loisible de le faire, en considération de la situation des organismes créanciers et des finances publiques. Un tel choix ne se heurte à aucun obstacle constitutionnel.
Par ailleurs, il est prévu - et il s'agit là d'une mesure distincte - que les organismes de sécurité sociale rectifient leurs comptes 2000 pour tirer les conséquences de cette annulation. Sans doute les règles comptables traditionnelles auraient-elles justifié un enregistrement de cette opération dans les comptes 2001. En effet, une annulation de créance doit donner lieu à l'inscription d'une charge équivalente dans le compte de résultat de l'organisme considéré. Le comptable doit, en principe, passer cette écriture dans les comptes ouverts au moment où il devient certain que la créance ne sera jamais honorée. En l'absence de précision sur le mode de comptabilisation à retenir, les comptables des organismes de sécurité sociale concernés auraient normalement été conduits à passer une charge dans leurs comptes 2001, dès la publication de la loi, comme la Cour des comptes a eu l'occasion de le préciser.
Mais ces règles comptables ne procèdent d'aucune norme supérieure dont le respect s'imposerait au législateur. Il est donc loisible à ce dernier de prescrire l'application de règles différentes. Or, dans la mesure où ces créances sont nées au cours de l'année 2000, il est apparu plus conforme à la logique économique de décider que les organismes concernés devraient enregistrer l'annulation des créances sur le FOREC dans leurs comptes 2000.
Il est vrai que, à la différence de la disposition de l'article qui annule la créance, celle qui prend parti sur l'imputation comptable présente un caractère rétroactif, dans la mesure où, s'appliquant à des exercices clos, elle affecte des situations juridiquement constituées. Mais il convient à cet égard de souligner que, en dehors du domaine pénal, et sous réserve des limitations apportées par la jurisprudence en matière de validation ou de mesures d'effet équivalent, le principe demeure qu'il est normalement permis au législateur d'édicter des dispositions rétroactives. En particulier, aucun principe de valeur constitutionnelle ne lui interdit de prescrire la correction de comptes d'exercices clos.
A cet égard, c'est à tort que les requérants se prévalent de la jurisprudence sur les mesures fiscales rétroactives, marquée notamment par la décision no 98-404 DC du 18 décembre 1998. La censure alors prononcée était en effet spécialement motivée par la circonstance que la mesure en cause conduisait à majorer, pour un nombre significatif d'entreprises, une contribution exceptionnelle due pour un exercice antérieur, et qui avait déjà été recouvrée depuis deux ans. Rien de tel ici où la mesure n'a aucun caractère fiscal et n'affecte en rien le patrimoine des particuliers : il s'agit seulement de corriger les comptes d'un nombre restreint d'organismes de sécurité sociale.
Rien ne s'oppose donc à ce que le législateur choisisse, comme il l'a fait, de privilégier, pour des motifs de logique économique, l'enregistrement comptable d'une décision d'annulation de créances sur l'exercice sur lequel elles sont nées.
b) En deuxième lieu, l'argument selon lequel l'enregistrement de l'annulation de la créance des régimes sur le FOREC sur les comptes 2000 porterait atteinte à la capacité de contrôle du Parlement ne peut davantage être accueilli.
En effet, l'opération d'annulation de créances et ses modalités auraient difficilement pu être arrêtées de façon plus transparente à l'égard du Parlement, puisque c'est le législateur lui-même qui les a déterminées par le vote de la loi de financement de la sécurité sociale. Il a donc pu en apprécier pleinement la portée.
Par ailleurs, si l'opération d'annulation de créances prévue à l'article 12 a bien un impact sur les comptes 2000 des organismes de sécurité sociale, il est inexact d'en déduire un affaiblissement de la capacité de contrôle du Parlement. En effet, lorsque le Parlement doit donner son avis sur les comptes des régimes de sécurité sociale à une date donnée, il ne peut, par définition, le faire qu'en prenant en compte l'état du droit à cet instant, de même que les données économiques et sociales connues au moment où il se prononce. Tout changement ultérieur de législation ou de circonstances rend nécessaire une correction des appréciations portées antérieurement, mais ne témoigne en rien d'une atteinte au pouvoir de contrôle du Parlement.
c) En troisième lieu, cette mesure entre parfaitement dans le champ des lois de financement de la sécurité sociale tel que défini à l'article LO 111-3 du code de la sécurité sociale et pouvait, à ce titre, figurer dans la présente loi. En effet, la décision d'annuler les créances enregistrées par les régimes de sécurité sociale sur le FOREC au titre de l'exercice 2000 a, de toute évidence, un impact financier sur ces régimes : à défaut d'annulation, ces créances auraient été honorées au cours de cette année 2001 ou au cours de l'année 2002 et les recettes ainsi reçues auraient donc augmenté à due concurrence.
Quant à l'exercice 2000, on soulignera qu'un éventuel vote du Parlement sur des comptes modifiés n'est pas prévu par les dispositions organiques régissant les lois de financement. Ce vote serait, en toute hypothèse, sans objet car ces lois n'adoptent pas des comptes en tant que tels mais des objectifs de recettes et de dépenses. En outre, il importe de souligner que, compte tenu des règles de présentation qui prévalaient alors, ces objectifs avaient été adoptés en encaissement/décaissement dans le cadre de la loi de financement pour 2000, et non en droits constatés. Or une annulation de dette ne peut, par définition, avoir d'effet que sur des comptes tenus en droits constatés.
La rectification explicite des montants sur lesquels le législateur s'était alors prononcé n'aurait donc pas eu de sens.

III. - Sur l'article 13

A. - L'article 13, relatif aux ressources du FOREC, apporte des modifications aux clés de répartition de certaines taxes affectées à cet établissement public. Il est en particulier prévu qu'il sera désormais bénéficiaire de la totalité du produit des droits sur les alcools et de la contribution sur les contrats d'assurance des véhicules à moteur, ainsi que de l'essentiel du produit des droits sur les tabacs.
Pour contester ces mesures, les députés, auteurs du premier recours, font valoir qu'elles méconnaissent le principe du consentement à l'impôt, dans la mesure où la vocation du FOREC est différente des finalités en vue desquelles ces contributions avaient été créées et affectées à l'assurance maladie.
B. - Ce moyen est inopérant.
Il procède en effet, tout comme les critiques qui avaient été adressées aux dispositions de l'article 7 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 affectant à ce même fonds le produit de la taxe générale sur les activités polluantes, d'une confusion entre les règles régissant l'assiette d'une imposition et celles relatives à son affectation. Comme l'a alors jugé la décision no 99-422 DC du 21 décembre 1999, aucune norme constitutionnelle n'interdit d'affecter à un établissement public tel que le FOREC des recettes fiscales qui avaient, à l'origine, un autre objet. Et il ressort de la même décision que le principe du consentement à l'impôt n'est pas en cause, dès lors que le Parlement a été informé des motifs du choix opéré et y a librement consenti par son vote.

IV. - Sur l'article 18

A. - L'article 18 de la loi déférée modifie le cadre conventionnel régissant les relations entre les caisses d'assurance maladie et les professions de santé afin d'associer ces derniers à la mise en oeuvre du dispositif de régulation des dépenses d'assurance maladie.
L'objet du dispositif adopté a été présenté par la ministre de l'emploi et de la solidarité et le ministre délégué à la santé lors de la présentation de l'amendement en première lecture. Il s'agit de « lier le contrat et les mécanismes de régulation ». Ainsi, le « respect des engagements conventionnels... exonère les professionnels (concernés) de l'application des lettres clés flottantes » (JO, AN, 2e séance du 23 octobre 2001, page 6441). Ce dispositif a été précisé en deuxième lecture en articulation avec des dispositions existantes du code de la sécurité sociale sur les contrats de bonne pratique et les accords de bon usage. Il correspond à une architecture conventionnelle à deux étages :
- un accord-cadre concernant l'ensemble des professions qui permet aux professionnels et aux caisses de se mettre d'accord sur des dispositions transversales concernant l'exercice libéral ;
- des conventions professionnelles qui doivent prévoir des engagements collectifs et individuels, dont le respect exonère les professionnels concernés de l'application du mécanisme dit des « lettres clefs flottantes ».
Selon les sénateurs, auteurs du second recours, cet article , dont une partie résulte d'amendements introduits en nouvelle lecture, aurait été adopté en méconnaissance des règles régissant l'exercice du droit d'amendement.
De leur côté, les députés requérants font valoir que le mécanisme retenu pénalise, en méconnaissance du principe d'égalité, les médecins conventionnés par l'effet du règlement conventionnel minimal, qui relèveraient seuls du dispositif de maîtrise comptable.
B. - Ces critiques appellent les remarques suivantes :
1. S'agissant de la procédure au terme de laquelle cet article a été adopté, on notera qu'il a été introduit dans le texte en discussion lors de la première lecture à l'Assemblée nationale, le 25 octobre 2001 et que, s'il a ensuite été complété en nouvelle lecture, c'est pour tenir compte de la poursuite de la concertation avec les organismes et professions concernés, tout en respectant les contraintes régissant l'exercice du droit d'amendement.
a) En premier lieu, au regard des règles régissant l'exercice du droit d'amendement, il importe de relever que les éléments essentiels du dispositif ont été introduits avant la réunion de la commission mixte paritaire, et que, dès lors, la procédure de conciliation entre les deux assemblées organisée par l'article 45 de la Constitution - sur laquelle repose la jurisprudence issue de la décision no 98-402 DC du 25 juin 1998 - a pu pleinement jouer.
Chacune des deux assemblées a pu débattre de ce sujet au cours de la navette. Le débat a eu lieu devant les deux assemblées en première lecture, sur un dispositif certes moins complet mais dont les principales dispositions étaient identiques à celle du dispositif définitivement adopté.
Ainsi ce texte introduisait une disposition commune à l'ensemble des conventions nationales, intégrant notamment dans le champ de celles-ci la définition d'engagements individuels et collectifs des professionnels, les modalités de suivi de la réalisation de ces engagements et les dispositions applicables en cas de non-respect des engagements. En outre, le texte supprimait le pouvoir unilatéral des caisses en matière de régulation de l'évolution des dépenses pour les professions régies par une convention nationale.
Au regard des préoccupations qui sont à l'origine de la jurisprudence dont se prévalent les sénateurs requérants, il importe de souligner que l'on n'est pas en présence d'un sujet nouveau introduit dans un texte à un stade où la procédure de conciliation ne pouvait plus jouer. Il ne s'agit pas d'un projet improvisé en dernière minute au cours du débat mais d'un dispositif dont les éléments substantiels ont été introduits dans le texte en première lecture, puis ont pu être précisés et complétés du fait de l'arrivée à son terme d'un long processus de concertation.
S'agissant de ces précisions et compléments, ils appellent les remarques suivantes :
Sans doute les points I et II qui instaurent un accord-cadre commun à tout ou partie des professions de santé, et qui résultent de la concertation menée et de la demande forte des professionnels et des caisses d'assurance maladie, ne découlent-ils pas nécessairement des dispositions adoptées en première lecture. Mais l'ensemble des autres précisions contenues dans l'amendement introduit en nouvelle lecture sont étroitement liées aux dispositions de l'article restant en discussion. Ces précisions portaient ainsi :
- sur les engagements collectifs et individuels : la concertation a conduit à situer les engagements collectifs et individuels dans le cadre d'avenants aux conventions, ce qui nécessitait de procéder aux ajustements des dispositifs existants, accords de bon usage des soins (IV) et contrats de bonne pratique (V et, suite à un amendement parlementaire, XIV). Ces dispositions s'avéraient nécessaires pour utiliser ces instruments, conformément à l'obligation nouvelle posée dans l'amendement adopté en première lecture. Il en était de même des pouvoirs de substitution de l'Etat en cas de carence des partenaires conventionnels (VI) ;
- et sur les modalités de l'exonération de l'application unilatérale du dispositif de régulation pour les professions régies par une convention, exonération également inscrite dès la première lecture et dont il fallait tirer les conséquences quant au dispositif de régulation existant (VIII, IX, XIII) et aux dispositifs de substitution applicables (extension du règlement conventionnel minimal : X, XI).
b) En second lieu, il convient de souligner que, s'il est apparu préférable de différer la mise au point du dispositif sous sa forme achevée, c'est parce qu'en matière de relations entre l'assurance maladie et les professionnels de santé, il est nécessaire, pour légiférer efficacement, de mener à bien une concertation associant les caisses, les partenaires sociaux et les syndicats représentants les professionnels de santé.
En effet, seule une telle concertation est susceptible de permettre que les professionnels adhèrent au dispositif projeté, condition nécessaire à la mise en oeuvre effective et à l'efficacité de ce dispositif. C'était d'autant plus indispensable en l'espèce que le dispositif de régulation mis en place par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 n'a pas fonctionné en 2001, notamment du fait du refus de la CNAMTS de le mettre en oeuvre.
Il était donc impossible d'imaginer une quelconque maîtrise des dépenses de ville sans évolution de ce dispositif, qu'il revenait à la présente loi de financement de réaliser. Le recours à des amendements gouvernementaux a ainsi été imposé par le calendrier. Les négociations n'ont pu aboutir avant le dépôt du projet de loi en raison principalement du renouvellement du conseil d'administration de la CNAMTS, qui a été installé le 10 octobre 2001. C'est pourquoi le Gouvernement, lorsqu'il a proposé ce dispositif en première lecture, a expliqué aux parlementaires qu'il aurait vocation à être enrichi et précisé à l'issue de la concertation. Il s'agissait d'articuler le calendrier de la loi de financement avec les contraintes de la concertation et de la négociation, dans un souci de transparence à l'égard du Parlement et en respectant les limites du droit d'amendement.
En outre, c'est à tort que les sénateurs, auteurs de la seconde saisine, soutiennent que le Gouvernement a entendu se soustraire à l'avis de la CNAMTS. En l'occurrence, le projet d'amendement complétant en nouvelle lecture à l'Assemblée nationale le dispositif initial lui a été officiellement transmis et son conseil d'administration a émis un avis favorable sur ce texte, à l'unanimité, lors de sa séance du 20 novembre 2001.
En résumé, le Gouvernement considère que la procédure suivie est conforme à la Constitution, dès lors, d'une part, que l'économie générale du nouveau dispositif avait été exposée et débattue au Parlement et adoptée par l'Assemblée avant la réunion de la commission mixte paritaire, d'autre part, que les compléments introduits dans ce même article en nouvelle lecture étaient bien en relation directe avec le texte en discussion : il ne s'agissait alors que de préciser, au vu de la concertation qui s'était poursuivie, les éléments utiles pour compléter le dispositif initial.
2. Quant au moyen invoqué à l'encontre de ce même article dans la saisine des députés, il repose sur une lecture erronée de la loi dans la mesure où, contrairement à ce qu'ils indiquent, les professionnels régis par le règlement conventionnel minimal ne sont pas régis par un texte conventionnel.
En effet, il résulte clairement du deuxième alinéa de l'article L. 162-5-9 du code de la sécurité sociale, dont la rédaction est issue de l'ordonnance no 96-345 du 24 avril 1996, que les dispositions du règlement conventionnel minimal ne s'appliquent qu' « en l'absence de convention nationale ». Il résulte tout aussi clairement de la rédaction de ce texte, résultant de l'article 18 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2002, que le pouvoir unilatéral des caisses de prendre des mesures n'est maintenu qu' « en l'absence de convention nationale » pour la profession concernée.
Il s'ensuit que les professionnels régis par le règlement conventionnel minimal ne sont pas placés sous un régime de convention et qu'ils se trouvent ainsi dans une situation objectivement différente des professions ayant conclu une convention nationale. Il est donc normal que la loi applique des mécanismes différents à ces deux situations.
Ce point a d'ailleurs été évoqué au cours des débats à l'Assemblée nationale et le rapporteur a expliqué qu'il était logique que l'existence d'une convention nationale entraîne des conséquences différentes de son absence (cf. JO, Assemblée nationale, 1re séance du 22 novembre, page 8468).

V. - Sur l'article 20

A. - Cet article modifie l'article L. 245-1 du code de la sécurité sociale, relatif à la contribution dont sont redevables les entreprises assurant l'exploitation en France d'une ou plusieurs spécialités pharmaceutiques donnant lieu à remboursement par les caisses d'assurance maladie ou de médicaments agréés aux collectivités et autres services publics.
L'assiette de cette contribution est égale au total des charges comptabilisées au cours du dernier exercice clos au titre des frais de prospection et d'information des praticiens afférents à l'exploitation en France des spécialités pharmaceutiques remboursables ou des médicaments agrées aux collectivités. En sont exonérées les entreprises dont le chiffre d'affaires hors taxes réalisé en France est inférieur à 15 millions d'euros (100 MF).
Pour freiner la progression des dépenses de médicaments remboursables induite par la forte croissance du chiffre d'affaires de l'industrie pharmaceutique attendue sur l'exercice 2001, il apparaît nécessaire d'intervenir en vue d'infléchir l'activité promotionnelle des laboratoires pharmaceutiques en direction des prescripteurs. En effet, les dépenses de promotion peuvent donner lieu, au-delà d'un certain montant, à une pression excessive sur les prescripteurs. C'est pourquoi l'article 20 de la loi déférée accroît le rendement et la progressivité de cette contribution, les sommes ainsi perçues devant bénéficier à la branche maladie.
Selon les députés, auteurs du premier recours, les règles de détermination du taux de cette contribution ne prennent en compte ni les différences de situation pouvant exister entre les redevables, ni leurs capacités contributives. La référence aux dépenses de promotion ne serait pas non plus rationnelle, dans la mesure où elle inciterait à la réduction des effectifs de visiteurs médicaux et porterait ainsi atteinte à leur droit du travail. En outre, ces mêmes règles avantageraient les laboratoires réalisant le plus gros chiffre d'affaires. Enfin, la loi introduirait des effets de seuil contraires au principe posé par l'article 13 de la Déclaration de 1789.
Les requérants contestent aussi l'assiette de la contribution. Ils estiment que la prise en compte des activités de pharmacovigilance pour introduire un abattement n'est pas rationnelle et que la loi ne pouvait s'abstenir de préciser ce que sont les frais de prospection qu'elle entend prendre en compte. Cette incompétence négative serait d'autant plus grave que seraient en cause plusieurs libertés dont les limites ne peuvent être fixées que par la loi. Ils ajoutent que l'article contesté méconnaît le principe de nécessité de l'impôt.
B. - Pour sa part, le Gouvernement considère que ces dispositions sont conformes aux principes constitutionnels.
1. S'agissant en premier lieu du taux de la taxe, et contrairement à ce que soutiennent les requérants, le fait de retenir les dépenses de promotion comme dividende du rapport déterminant ce taux est bien fondé sur un critère en rapport avec les capacités contributives des redevables.
Il convient en effet de souligner que le diviseur de ce même rapport est précisément le chiffre d'affaires des entreprises, lequel constitue naturellement un élément déterminant de leur capacité contributive. En outre, les entreprises dont le chiffre d'affaires est inférieur à 100 MF sont exonérées de cette contribution.
Dans ces conditions, le fait qu'une part prépondérante des dépenses de promotion soit consacrée à la rémunération des visiteurs médicaux ne saurait faire obstacle au pouvoir du législateur de déterminer l'assiette et les taux de la contribution en tenant compte du montant de ses dépenses. Quant au droit au travail de ces salariés, la loi n'y porte évidemment aucune atteinte.
On ajoutera que c'est précisément pour viser non le montant en valeur absolue des dépenses de promotion mais leur part relative que le chiffre d'affaires a été choisi comme diviseur de ce rapport. Il est parfaitement logique que les dépenses de promotion varient en fonction de la taille des entreprises et de l'importance de leurs chiffres d'affaires. Ne pas tenir compte de cette réalité serait précisément méconnaître les capacités contributives des redevables.
Il faut souligner en effet que la définition de l'assiette de la taxe est avant tout en cohérence avec l'objectif poursuivi, qui est de diminuer la pression promotionnelle qui s'exerce sur les prescripteurs. Dans cet objectif, il est logique que cette assiette soit constituée de l'effort promotionnel mesuré par le rapport entre les dépenses promotionnelles et le chiffre d'affaires. Il est logique également que le taux de la taxe soit d'autant plus élevé que ce ratio est plus fort.
Quant à l'argument selon lequel ce choix aurait en fait pour conséquence d'inciter les entreprises à augmenter leur chiffre d'affaires, il est dépourvu de portée : en tout état de cause, l'objectif même de toute entreprise est d'accroître son chiffre d'affaires et il est vraisemblable que les modalités d'établissement de la contribution sur les dépenses de promotion sont indifférentes sur ce point. En revanche, l'objectif poursuivi par la mesure - et dont la rationalité ne peut être contestée - est d'inciter les entreprises à modérer leurs dépenses de promotion et les modalités de détermination de la contribution sont bien cohérentes avec cet objectif.
S'agissant des effets de seuil, on relèvera qu'ils sont limités par le mode de calcul de la contribution. En effet, contrairement à ce que semblent considérer les députés auteurs de la saisine, le calcul s'effectue par tranches : il est ainsi de 9,5 % pour la part des dépenses correspondant à un ratio inférieur à 10 %, puis de 17 % pour la part des dépenses correspondant à un ratio compris entre 10 % et 12 %, de 25 % entre 12 % et 14 % et de 31 % pour la part correspondant à un ratio supérieur à 14 %. Les effets de seuil sont ainsi lissés et leur effet est considérablement minoré par cette technique de calcul, qui n'est pas sans précédent en matière fiscale, notamment pour l'impôt sur le revenu.
2. En second lieu, l'argumentation mettant en cause l'abattement introduit par la loi ne peut davantage être accueillie.
Contrairement, en effet, à ce que soutiennent les auteurs de la saisine, l'article L. 5122-11 du code de la santé publique impose aux visiteurs médicaux de relayer les effets indésirables constatés par les prescripteurs. La pharmacovigilance n'est donc pas étrangère à leur activité. L'abattement introduit dans le régime de cette contribution est ainsi justifié par l'existence de cette obligation qui incombe aux visiteurs médicaux et donc, par voie de conséquence, aux employeurs de ces derniers.
On remarquera ensuite que le législateur a retenu un mécanisme d'abattement forfaitaire de 3 % sur l'ensemble des rémunérations des visiteurs médicaux et non une déductibilité de dépenses réellement engagées, dont le montant serait, par définition, difficile à mesurer. Le montant de l'abattement est ainsi défini sans ambiguïté par le législateur, qui n'est nullement resté en deçà de la compétence que l'article 34 de la Constitution lui fait obligation d'exercer.
De même peut-on relever que les dispositions relatives à l'assiette de la taxe sont fixées par l'article L. 245-2 du code de la sécurité sociale, issu de l'ordonnance no 82-290 du 30 mars 1982, qui la définit avec la précision souhaitable. Les dispositions en cause ne sont pas modifiées par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2002 qui se borne à ajouter, dans cet article qui en comporte déjà, des abattements supplémentaires.

VI. - Sur l'article 42

A. - L'article 42 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2002 a pour objet de faire participer le fonds national d'assurance maladie de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés, à hauteur de 1,3 milliard de francs, au financement, dans le cadre du plan BIOTOX du fonds de concours créé en vue de l'achat, du stockage et de la livraison de traitements pour les pathologies résultant d'actes terroristes.
Pour contester cette mesure, les députés requérants soutiennent qu'elle méconnaît le douzième alinéa du Préambule de 1946, dans la mesure où la solidarité de la nation devrait se traduire par des dépenses relevant du budget de l'Etat. Ils considèrent que les assurés relevant de la CNAMTS supportent ainsi une dépense qui ne leur incombe pas, en méconnaissance du principe d'égalité devant les charges publiques.
B. - Cette argumentation est dépourvue de portée.
Elle consiste en effet à confondre deux questions, celle de la responsabilité de l'Etat dans la mise en oeuvre de la solidarité nationale et celle des modalités de financement des dépenses correspondantes. Compte tenu de l'objet des mesures en cause, il était légitime de faire participer la CNAMTS au financement des dépenses induites par le plan BIOTOX.
Sur ce point, on notera qu'il s'agit du financement de produits de santé (antibiotiques, vaccins et antidotes chimiques) qui sont destinés à être utilisés dans les structures de soins pour le traitement curatif et préventif de personnes exposées à des agents infectieux ou chimiques. Ces produits sont, d'ailleurs, couramment utilisés dans le système de soins. Il s'agit de constituer rapidement, compte tenu de la situation, une réserve importante de ces produits. Une partie des produits sera stockée dans des hôpitaux et le reste dans les laboratoires fournisseurs et donc à l'intérieur même de la filière sanitaire.
Ce financement ne repose nullement sur les assurés relevant de ce régime et dont les cotisations sont demeurées inchangées. On soulignera, à cet égard, que le financement de la CNAMTS repose, pour une proportion de 45 %, sur des recettes fiscales. Le moyen tiré de ce que les assurés relevant de cette caisse supporteraient ainsi une dépense qui ne leur incombe pas manque donc en fait.
On peut d'ailleurs rappeler qu'il existe nombreux précédents de semblables mesures : financements par la seule CNAMTS d'établissements publics de l'Etat agissant pour l'ensemble de la communauté nationale (établissement français du sang ou établissement français des greffes, par exemple) ; financement par le fonds national de prévention, d'éducation sanitaire et d'information pour la santé de campagnes de prévention nationale

VII. - Sur l'article 56

A. - L'article 56 prévoit le remboursement par la Caisse nationale des allocations familiales aux différents organismes payeurs ainsi qu'à l'Etat des dépenses afférentes au congé de paternité créé par l'article 55 de la même loi.
Tirant argument du caractère de cette prestation, qui relèverait du domaine de l'assurance maladie-maternité, les sénateurs, auteurs du second recours considèrent que cette disposition méconnaît le 3o du I de l'article LO 111-3 du code de la sécurité sociale qui, selon eux, imposerait qu'une prestation servie par une branche déterminée soit financée par cette même branche. Il estiment en outre que le remboursement de cette prestation à l'Etat méconnaît le principe d'universalité budgétaire qui fait obstacle à ce que des charges permanentes de l'Etat ne soit pas prises en charge par le budget.
B. - Ces moyens sont inopérants.
Ils reposent, là aussi, sur une confusion entre la détermination de la collectivité ou de l'organisme à qui incombe certaines dépenses et les modalités de financement des dépenses en cause.
Or le 3o du I de l'article LO 111-3 du code de la sécurité sociale, qui ne concerne que la présentation, par branche, des objectifs de dépenses des régimes obligatoires n'a ni pour objet, ni pour effet de déterminer les conditions dans lesquelles ces dépenses devraient être financées. Le Conseil constitutionnel a d'ailleurs déjà admis qu'une prestation servie par une branche puisse être financée par une autre branche dans la mesure où cette prestation entre bien par nature dans le périmètre de la branche. Il en est ainsi des majorations de pension pour enfants, avantages familiaux différés pris en charge par la branche famille (no 2000-437 DC du 19 décembre 2000).
Le congé de paternité ressortit incontestablement à la politique familiale. Il vise à permettre l'épanouissement, dès la naissance, des liens entre les pères et leurs enfants et un égal exercice de l'autorité parentale par le père et la mère. Cette mesure s'inscrit dans une politique plus large de renforcement des liens de filiation, que portent également par exemple la proposition de loi en cours d'examen sur l'autorité parentale ou l'expérimentation d'un livret de paternité, et des conditions d'exercice de l'autorité parentale.
Le recours aux caisses d'assurance maladie pour le service de la prestation se justifie par l'objectif d'assurer, y compris dans la façon dont les jours de repos sont indemnisés, un égal exercice de leurs droits par les parents : les pères en congé sont indemnisés de la même façon que le sont les femmes en congé de maternité appartenant au même régime. Or il n'aurait pas été de bonne gestion de faire servir par les caisse d'allocations familiales une prestation que les organismes d'assurance maladie ont d'ores et déjà l'habitude de liquider et de servir. Le service de la prestation par les caisses d'assurance maladie, pour lesquelles elles reçoivent une rémunération de la branche famille, est donc une modalité de mise en oeuvre de la mesure cohérente avec l'objectif qu'elle poursuit.
De même le principe d'universalité budgétaire, tel qu'il a été énoncé par le Conseil constitutionnel dans la décision no 94-351 DC du 29 décembre 1994, n'est-il nullement en cause ici : les dépenses correspondant aux versements effectués par l'Etat à ses agents au titre de la nouvelle prestation sont retracées par le projet de loi de finances pour 2002, puisque les agents concernés conservent leur traitement. L'article 56 de la loi déférée se borne à définir les modalités de participation de la CNAF à ces dépenses.
Les fonctionnaires de l'Etat ne bénéficient pas d'indemnités journalières mais voient l'intégralité de leur rémunération maintenue durant la durée du congé de maternité. Par symétrie, les pères en congé de paternité verraient donc maintenue l'intégralité de leur traitement durant le congé.
Une partie de cette rémunération sera prise en charge par la CNAF et donnera lieu à remboursement par la CNAF à l'Etat. Cette part sera calculée, pour des raisons d'équité, dans des conditions équivalentes à l'allocation servie aux salariés du régime général (rémunération nette sous plafond). L'Etat garantira par ailleurs, au-delà du remboursement opéré par la CNAF, le maintien de la rémunération du fonctionnaire, de la même façon que les employeurs privés pourront garantir, s'ils le souhaitent, le maintien du salaire à leurs agents.
Le congé de paternité, ainsi qu'il a été indiqué ci-dessus, est une prestation de la politique familiale et son financement relève de la branche famille. Or l'Etat n'est pas son propre assureur en matière de politique familiale : il ne fait que servir pour le compte de la CNAF les prestations - en application de l'article L. 212-1 du code de la sécurité sociale - mais est assujetti, comme les autres employeurs, à une cotisation assise sur le traitement de ses agents (au même taux de 5,4 % minoré de 0,2 point en contrepartie du service des prestations). En pratique, il verse à la CNAF le solde de la contribution à laquelle il est assujetti et des prestations servies sur son budget.
La part de la rémunération servie par l'Etat aux fonctionnaires pendant la durée du congé de paternité et compensée par la CNAF n'est donc que la contrepartie de la cotisation versée par l'Etat au titre de la branche famille, dont le taux est maintenu. Il ne s'agit donc pas d'un transfert de charges, pas plus que ne pourrait être qualifiée de transfert la création ou l'augmentation d'une prestation familiale. Sans compensation du coût par la CNAF, l'Etat employeur serait dans une situation inéquitable puisque, bien que cotisant au titre des prestations familiales comme les employeurs privés, il serait obligé de supporter le coût du congé de paternité alors que ce coût serait pris en charge pour les employeurs privés par la branche famille.

VIII. - Sur l'article 60

A. - L'article 60 de la loi soumise au Conseil constitutionnel porte de 15 % à 30 % la part de la majoration de 10 % de la pension de vieillesse servie aux parents d'au moins trois enfants qui est prise en charge par la Caisse nationale des allocations familiales.
Selon les sénateurs requérants, cette mesure est contraire au principe d'égalité, dans la mesure où les ressources de la CNAF n'ont pas été modifiées. Dans ces conditions, l'accroissement de la part des prestations versées par cette caisse à des retraités aurait pour conséquence que ces derniers bénéficieraient deux fois des prestations familiales.
B. - En réponse à cette argumentation, on se bornera à observer que le principe du transfert de cette charge à la CNAF a été posé par l'article 21 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001.
Or cet article a été contesté en vain devant le Conseil constitutionnel, qui a écarté une argumentation semblable dans sa décision no 2000-437 DC du 19 décembre 2000. Contrairement à ce que soutiennent les requérants, la substitution d'un taux de 30 % à celui de 15 % est par elle-même sans incidence sur la conformité de ce transfert à la Constitution.

IX. - Sur l'article 76

A. - Cet article a pour objet de fixer, comme le prévoit le 5o du I de l'article LO 111-3 du code de la sécurité sociale, les limites dans lesquelles les besoins de trésorerie des régimes obligatoires de base peuvent être couverts par des ressources non permanentes.
Selon le recours des sénateurs, certains de ces plafonds s'exposeraient à des critiques. Ceux de la Caisse autonome de la sécurité sociale dans les mines et du fonds spécial des pensions des ouvriers des établissements industriels de l'Etat ne seraient pas compatibles avec le caractère excédentaire de la trésorerie de ces régimes. Le plafond consenti au régime général serait surestimé. Quant à celui de la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales, il s'appuierait sur des hypothèses exagérément optimistes.
Les requérants en déduisent que l'article 76 n'est pas sincère et méconnaît l'article LO 111-3, dans la mesure où ces plafonds perdraient ainsi leur vocation d'indicateurs d'alerte.
B. - Ces moyens ne peuvent être accueillis.
1. D'une manière générale, il n'y a pas de lien direct entre l'amélioration des comptes sociaux et la trésorerie de la sécurité sociale. La trésorerie enregistre des variations quotidiennes au vu des mouvements relevés sur les recettes et les dépenses. Or ces recettes et ces dépenses n'évoluent pas de manière symétrique, de telle sorte que la trésorerie subit de fortes variations à certains moments de l'année.
2. Cela est tout particulièrement vrai pour le régime général. En effet, la masse de ses recettes et de ses dépenses, près de 1 500 Mds de francs en 2001 pour chacune de ces sommes. En outre, la trésorerie de ce régime inclut celle des prestations qu'il sert pour le compte de l'Etat (RMI, AAH, API...) dont le financement par le budget de l'Etat est soumis à certains aléas dans le temps.
Aussi, dans une année favorable comme le sera 2001, l'amplitude entre le « pic » et le « creux » de la trésorerie du régime atteint néanmoins environ 75 Mds de francs. Il est de plus assez difficile de prévoir qu'il sera effectivement le « creux » de cette trésorerie. Il a été ainsi de - 12 Mds le 1er octobre alors que les prévisions établies dans le cadre du projet de LFSS l'automne précédent l'estimaient à - 24 Mds de francs.
Alors que l'on sait que le contexte de l'année 2002 sera moins bon que celui de 2001, il a paru prudent au Gouvernement de maintenir l'autorisation d'emprunt pour 2002 à 4,420 Mds d'euros (29 Mds de francs).
3. S'agissant de la CNRACL, selon les prévisions de la Commission des comptes de la sécurité sociale de septembre dernier, elle devrait connaître une situation financière plus dégradée en 2002 qu'en 2001 compte tenu de la progression de ses charges. Cette évolution est principalement liée au fait que la CNRACL est un des principaux contributeurs au financement des transferts de compensation vieillesse, dont le montant devrait être relevé l'année prochaine.
Dans ce contexte, il n'a pas paru déraisonnable de porter le plafond d'emprunt à 0,5 milliard d'euros en 2002.
4. Enfin, les régimes des mines et des ouvriers de l'Etat reçoivent de leur côté d'importants transferts de compensation versés par les autres régimes pour le financement des risques qu'ils gèrent.
Ces montants et leur calendriers de versement sont soumis à des modifications. La répartition des acomptes de compensations pour 2002 et la date de leur versement n'a pas encore été effectuée ou fixée. Il est donc possible que ces deux régimes soient ponctuellement confrontés en 2002 à un besoin de trésorerie rendant le recours à l'emprunt nécessaire.

X. - Sur le rattachement de certaines dispositions au domaine
des lois de financement de la sécurité sociale

A. - Plusieurs dispositions de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2002 auraient, selon les requérants, été adoptées en méconnaissance des règles régissant le domaine des lois de financement, dans la mesure où elles n'affecteraient pas directement l'équilibre financier des régimes obligatoires de base. Tel serait le cas, selon les députés auteurs du premier recours, des articles 31, 73 et 75 et, selon les sénateurs, des articles 30 et 73.
B. - Ces critiques appellent les remarques suivantes.
1. S'agissant du III de l'article 30, il a pour objet de remédier à une erreur contenue dans la loi no 2001-647 du 20 juillet 2001 relative à l'allocation personnalisée d'autonomie (APA).
Il apparaît en effet que la rédaction de l'article L. 232-8 du code de l'action sociale et des familles issue de cette loi pose problème. Lors de l'adoption de la loi, une distorsion s'est malencontreusement introduite dans l'appréciation des ressources du demandeur de l'APA, selon que ce dernier réside à domicile (art. L. 232-4) ou en établissement (L. 232-8). Les concours financiers apportés par les enfants, ainsi que certaines prestations sociales fixées par voie réglementaire sont déduites des ressources dans le premier cas mais pas dans le second.
Or cette distorsion ne repose que sur une erreur matérielle : l'article L. 232-8 fait référence, pour l'appréciation des ressources en établissement, au deuxième alinéa de l'article L. 232-4 relatif à la non-prise en compte des rentes viagères, tout en comportant un troisième alinéa, exacte reproduction textuelle de ce principe. En revanche n'y figurent pas les dispositions du troisième alinéa de l'article L. 232-4 concernant la participation des enfants à la prise en charge de la perte d'autonomie de leurs parents et certaines prestations sociales à objet spécialisé. Cette redondance révèle l'erreur qui s'est matérialisée, au deuxième alinéa du I de l'article L. 232-8, par la référence au « deuxième alinéa de l'article L. 232-4 » alors qu'il ne pouvait s'agir que du troisième alinéa, le contenu de ce dernier visant justement les déductions relatives à la participation des enfants et aux prestations sociales à objet spécialisé.
En introduisant une disposition permettant de corriger cette erreur, la loi ne fait que mettre fin à une rupture du principe d'égalité. On ne peut, en effet, réserver aux usagers un traitement différent des usagers dans l'appréciation de leurs ressources, selon qu'ils résident chez eux ou dans un établissement d'hébergement pour personnes âgées. Si le texte n'était pas corrigé, une personne âgée amenée à quitter son domicile pour entrer dans une maison de retraite se verrait opposer les concours financiers que lui apportent spontanément ses enfants - et, le cas échéant, la perception d'une allocation de logement - lors de l'examen ou du réexamen de ses droits à l'allocation personnalisée d'autonomie.
Il importe d'autant plus d'encourager les solidarités familiales que c'est précisément en établissement que les participations financières des enfants se renforcent pour concourir aux frais de séjour de leurs parents et qu'elles y revêtent tout leur intérêt et toute leur utilité. En l'absence d'une telle disposition correctrice, la modicité des montants d'allocation personnalisée d'autonomie attribuée en établissement devrait, dans la majeure partie des cas, être compensée par les caisses de sécurité sociale, sur leurs crédits d'action sociale. Ces dépenses supplémentaires des caisses devraient être supérieures à 15 millions d'euros, sachant que le coût total de l'APA en 2002 sera égal à environ 2,4 milliards d'euros. La disposition contestée vise donc à éviter ce transfert de charge, qui s'écarte manifestement de l'intention des rédacteurs de la loi du 20 juillet 2001.
On peut d'ailleurs noter que les requérants ne contestent pas le bien-fondé de cette disposition, qui rétablit l'égalité de traitement des usagers dans le mode d'appréciation des ressources au titre du calcul de la participation financière et, par conséquent, du montant de l'allocation personnalisée d'autonomie.
2. L'article 31 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2002 modifie l'ordonnance no 82-272 du 26 mars 1982 relative à la durée hebdomadaire du travail dans les établissements sanitaires et sociaux. Il prévoit l'abrogation des dispositions des articles 2 à 7 de ce texte, qui fixent notamment la durée hebdomadaire du travail à 39 heures. Il dispose explicitement que le temps de travail des agents de la fonction publique hospitalière (FPH) est réduit, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat.
En précisant que ce décret fixera des règles d'organisation du travail analogues à celles qui s'appliquent aux agents des autres fonctions publiques, le texte implique nécessairement le passage à 35 heures hebdomadaires et une référence annuelle de 1 600 heures maximum de temps de travail effectif, puisque ces deux dispositions sont applicables notamment à la fonction publique de l'Etat.
Contrairement à ce que soutiennent les requérants, cette disposition est inséparable des mesures financières en assurant le financement (cf. décision no 99-422 DC du 21 décembre 1999 sur les centres de santé), elles-mêmes introduites dans la loi de financement de la sécurité sociale à travers une majoration de l'ONDAM à hauteur de 2,944 milliards de francs. Ce montant (dont 2,479 milliards de francs pour les établissements de santé hors soins de longue durée) correspond à la part prise en charge par l'assurance maladie dans le recrutement de 12 400 agents dès 2002 et le financement d'heures supplémentaires, pour un volume équivalent à 3 487 emplois. Il est pris en compte dans le montant de l'ONDAM fixé par l'article 71 de la loi de financement à 112,8 milliards d'euros pour l'année 2002.
L'objectif des dépenses hospitalières qui sera fixé par le Gouvernement en fonction de l'ONDAM ainsi déterminé prendra en compte ce financement supplémentaire qui donnera lieu à une majoration en conséquence des dotations globales des établissements. De la même façon, les établissements du secteur médico-social verront leur tarifs de soins majorés en conséquence.
3. L'article 73 de la loi déférée apporte d'importantes simplifications, à compter de 2002, aux formalités qui pèsent sur les petites entreprises et les associations et sur les travailleurs indépendants, notamment en mobilisant à cette fin les nouvelles technologies. Cette réforme aura une portée déterminante sur le mode de recouvrement des contributions et cotisations sociales.
Cet article a bien sa place dans une loi de financement de la sécurité sociale, pour deux séries de raisons :
a) En premier lieu, il a un impact significatif sur les dépenses des régimes de base de sécurité sociale, dans la mesure où la simplification a un coût.
Il convient à cet égard de souligner que le groupement d'intérêt public chargé de la modernisation des déclarations sociales, qui mettra en oeuvre le I du nouvel article L. 133-5 du code de la sécurité sociale, a prévu en 2002 un programme d'investissement, directement lié à cet article , de 18 millions d'euros (soit 120 millions de francs), dont la plus grande partie sera financée par le régime général.
De son côté, ce dernier engagera en 2002 des dépenses significatives pour mettre en oeuvre l'offre de service destinée aux associations et aux entreprises qui n'utiliseront ou ne pourront utiliser l'offre de service du GIP (II de l'article L. 133-5).
Enfin, les caisses chargées des travailleurs non salariés engageront également, l'année prochaine, des dépenses pour mettre en place leur offre commune de services, prévue par le nouvel article L. 133-6, même si ces dépenses seront plus modestes.
b) En second lieu, cet article contribuera à l'amélioration des recettes, tant du régime général que des régimes de non-salariés.
S'agissant du premier, l'article L. 133-5 devrait permettre une meilleure déclaration par les créateurs d'entreprises et les toutes petites entreprises et réduire ainsi une partie du travail illégal. Il améliorera donc le taux du recouvrement, notamment pour le régime général : on peut à cet égard noter que 0,01 point de taux de recouvrement de l'ACOSS correspond à 15 millions d'euros (soit 100 millions de francs).
L'article L. 133-6 a aussi pour but de faciliter l'acceptation des prélèvements sociaux des travailleurs indépendants en simplifiant et en rationalisant leur recouvrement. Ces prélèvements représenteront 11 milliards d'euros en 2002 (soit 73 milliards de francs). La réforme devrait conduire, là aussi, à l'amélioration du taux de recouvrement. La seule amélioration de 0,5 point (CSG et cotisations d'allocations familiales) rapporterait 29 millions d'euros (soit 190 millions de francs).
4. Enfin, l'article 75 réforme les missions et les modes de gestion de l'Union des caisses nationales de sécurité sociale (UCANSS).
Cet organisme exerce les fonctions d'employeur des 200 000 agents des organismes du régime général de sécurité sociale et est seul habilité à faire évoluer leur convention collective nationale. Il est donc responsable d'une masse salariale de 44 milliards de francs, imputée sur les fonds de gestion administrative des trois caisses nationales et de l'ACOSS. Son budget propre, en outre, est de 189 millions de francs.
L'article 75 vise tout d'abord à permettre à l'UCANSS d'exercer ses compétences, notamment en matière de négociation collective, de manière régulière, afin de pallier la carence actuelle de son conseil d'administration, liée à la décision prise par le MEDEF et la CGPME en octobre 2000 de n'y plus siéger. En effet, le code de la sécurité sociale ne contient pas de disposition permettant, en cas de carence du conseil d'administration de l'UCANSS, de confier régulièrement les compétences qu'il exerce à une autre autorité ou à un administrateur provisoire. En réformant les modalités de gestion de cet organisme, l'article 75 lui permettra de fonctionner de nouveau de manière régulière, même en l'absence du MEDEF et de la CGPME.
Ce faisant, la réforme permettra la reprise du processus de négociation collective au niveau national dans le régime général de la sécurité sociale, qui est paralysé depuis plus d'un an. De fait, l'UCANSS n'a pu respecter en 2001 l'obligation annuelle de négocier sur les salaires que prévoit l'article L. 132-12 du code du travail. L'absence de négociation collective au niveau national rend impossible toute revalorisation de la valeur du point applicable aux agents relevant du régime général de la sécurité sociale et toute révision de leur classification.
Il importe à cet égard de souligner que les dépenses de personnel, sur lesquelles l'activité de cet organisme a ainsi une incidence directe, représentent un élément significatif des dépenses de la sécurité sociale. A titre d'exemple, une hausse des salaires de 1 % représente 400 millions de francs de dépenses supplémentaires.
En second lieu, l'article 75 vise à fixer les conditions dans lesquelles les ressources nécessaires à la gestion administrative de l'UCANSS sont prélevées chaque année sur les encaissements du régime général, de façon analogue à ce qui a été fait pour l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) dans le cadre de l'article L. 225-6 du code de la sécurité sociale issu du III de l'article 56 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001. Ces prélèvements, qui constituent l'essentiel des ressources du budget de l'UCANSS, ne reposaient en effet sur aucune base légale.


(1) L'acquis de croissance à la fin du troisième trimestre est la croissance en moyenne annuelle en 2001 qui serait obtenue si la croissance du PIB s'avérait nulle au dernier trimestre.
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