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Législation communautaire en vigueur

Structure analytique

Document 398D0157

Chapitres du répertoire où le document peut être trouvé:
[ 13.20.20 - Industrie navale ]
[ 08.60 - Aides accordées par les États et autres subventions ]


398D0157
98/157/CE: Décision de la Commission du 5 novembre 1997 concernant l'aide que l'Espagne envisage d'accorder à Astilleros Zamacona SA pour la construction de cinq remorqueurs (Le texte en langue espagnole est le seul faisant foi.) (Texte présentant de l'intérêt pour l'EEE)
Journal officiel n° L 050 du 20/02/1998 p. 0038 - 0044



Texte:

DÉCISION DE LA COMMISSION du 5 novembre 1997 concernant l'aide que l'Espagne envisage d'accorder à Astilleros Zamacona SA pour la construction de cinq remorqueurs (Le texte en langue espagnole est le seul faisant foi.) (Texte présentant de l'intérêt pour l'EEE) (98/157/CE)

LA COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,
vu le traité instituant la Communauté européenne, et notamment son article 93, paragraphe 2, premier alinéa,
vu la directive 90/684/CEE du Conseil du 21 décembre 1990 concernant les aides à la construction navale (1), modifiée par la directive 94/73/CE (2), et notamment son article 4 paragraphe 3,
après avoir mis les intéressés en demeure de présenter leurs observations, conformément à l'article 93, paragraphe 2, et vu ces observations,
considérant ce qui suit:

I
Le 20 novembre 1996, la Commission a décidé d'ouvrir la procédure prévue à l'article 93, paragraphe 2, du traité, en vue d'examiner la demande des autorités espagnoles de proroger le délai de livraison de trois ans prévu à l'article 4, paragraphe 3, de la directive 90/684/CEE pour cinq remorqueurs faisant l'objet de contrats signés en décembre 1991 par Astilleros Zamacona SA (ci-après dénommée «Zamacona»), petit chantier naval situé à Bilbao. Si cette demande était acceptée, ce chantier pourrait bénéficier d'une aide de 9 % de la valeur contractuelle de chacun des navires en question (c'est-à-dire le plafond de l'aide applicable en 1991).
L'article 4, paragraphe 3, de la directive prévoit que le plafond de l'aide applicable à un contrat est celui qui est applicable à la date de signature du contrat, sauf lorsque le navire est livré plus de trois ans après la date de signature du contrat final. Dans ce cas, le plafond est celui qui était en vigueur trois ans avant la date de livraison du navire. En l'espèce, les navires n'ayant pas été livrés avant 1995 ou 1996, le plafond de l'aide applicable serait donc normalement de 4,5 %.
L'article 4, paragraphe 3, deuxième alinéa, dispose toutefois que la Commission peut proroger ce délai de trois ans lorsque cela se justifie en raison de la complexité technique du projet ou de retards résultant de perturbations inattendues, substantielles et justifiables affectant le programme de travail d'un chantier.
Étant donné qu'elle doutait que ces conditions soient remplies, la Commission a décidé d'engager la procédure.
La Commission a communiqué au gouvernement espagnol sa décision d'engager la procédure prévue à l'article 93, paragraphe 2, par lettre SG(96) D/10713 du 6 décembre 1996. Cette lettre a été publiée au Journal officiel des Communautés européennes (3) sous forme d'une communication adressée aux autres États membres et autres intéressés, les invitant à soumettre leurs observations.

II
Dans le cadre de la procédure, les autorités espagnoles ont présenté leurs observations par lettre du 24 janvier 1997. Celles-ci ont été complétées par les informations supplémentaires fournies lors de deux réunions informelles qui se sont tenues le 10 avril 1997 et le 28 mai 1997 entre les services de la Commission et les représentants du chantier, et lors de contacts bilatéraux.
La Commission a également reçu des observations des gouvernements de deux États membres (Danemark et Royaume-Uni), qui partagent les doutes de la Commission sur la compatibilité de la prorogation envisagée du délai de livraison avec la directive 90/684/CEE. Le Royaume-Uni, notamment, fait remarquer qu'un certain nombre de ses chantiers situés dans des régions sensibles construisent des remorqueurs et sont en concurrence directe avec des chantiers espagnols tels que Zamacona. La Commission a communiqué ces observations au gouvernement espagnol par lettre du 21 avril 1997, en l'invitant à lui faire part de ses commentaires. Le gouvernement espagnol a répondu par lettre datée du 12 mai 1997.

III
Dans leurs commentaires, les autorités espagnoles ont réitéré leur point de vue selon lequel, sur la base des informations transmises antérieurement, les circonstances affectant Zamacona doivent être considérées comme des «perturbations inattendues, substantielles et justifiables affectant le programme de travail du chantier». À l'appui de cette affirmation, elles ont fait valoir plusieurs arguments spécifiques, qui peuvent être synthétisés comme suit.

a) Modifications apportées à la législation portuaire
La loi 27/1992 du 24 novembre 1992 sur les ports publics et la marine marchande, qui a mis en place un nouveau cadre réglementaire en modifiant sensiblement les dispositions relatives aux services portuaires, notamment le pilotage, n'était pas prévue lors de la signature, en décembre 1991, des contrats relatifs aux cinq remorqueurs.
L'esprit de la nouvelle loi a primé les décisions commerciales prises par les armateurs un an avant son entrée en vigueur. Il en est notamment résulté des transferts de propriété pour quatre des navires et la conclusion d'accords d'exploitation en commun. En outre, comme la législation mettait l'accent sur la sécurité, les spécifications techniques des navires ont fait l'objet de certaines adaptations: construction de parois creuses dans les machineries, réaménagement des réservoirs de carburant, augmentation de la puissance des moteurs auxiliaires, amélioration des moyens de lutte contre l'incendie et modification des cheminées et des passerelles en vue d'améliorer la visibilité.
Les autorités espagnoles estiment que l'entrée en vigueur de la nouvelle loi a entraîné des perturbations substantielles et justifiables.

b) Construction d'un nouveau quai d'armement
D'après les autorités espagnoles, la construction du nouveau quai par les autorités du port de Bilbao (propriétaire du terrain sur lequel Zamacona exploite son chantier) a entraîné des perturbations inattendues du programme de travail du chantier. Celui-ci affirme que, même si les dispositions de l'accord conclu avec les autorités portuaires le 10 octobre 1991 ne précisaient pas les délais d'achèvement des travaux ou leur ampleur exacte, il avait reçu l'assurance verbale que les travaux seraient achevés au plus tard le 30 avril 1992; or, ils n'ont, en réalité, pas démarré avant le 19 mai 1992 et n'ont été achevés que le 4 mai 1993. En outre, le nouveau quai n'est devenu pleinement opérationnel qu'en juin 1994, après que le chantier eut procédé à des travaux complémentaires et mis en service les installations nécessaires (électricité, eau, réservoirs à gaz, grue, dispositifs anti-incendie, ateliers, etc.).
En ce qui concerne l'incidence des travaux sur le programme de Zamacona, les travaux effectués ont été les suivants: des murs extérieurs ont été construits autour d'une zone attenante aux installations de Zamacona; une fois la construction achevée, la zone a été remblayée; un brise-lames, dans le périmètre duquel la zone d'armement du chantier était auparavant située a ensuite été démoli et, enfin, le nouveau quai a été construit. Pendant la construction des murs extérieurs et les travaux de remblai, quarante à cinquante camions traversaient chaque jour le chantier, ce qui en a ralenti l'activité. En outre, il a fallu maintenir des effectifs à l'ancien quai d'armement et à la principale cale de lancement jusqu'à ce que le nouveau quai soit construit, car ces installations donnaient accès au chantier et faisaient partie de la zone de travaux. Selon Zamacona, cette situation a eu pour conséquence que, pour deux navires déjà en construction, les travaux se sont déroulés dans des conditions difficiles et pour les navires restants, la construction a dû se faire en cale sèche, dans l'atelier de réparation.
De l'avis des autorités espagnoles, l'analyse des principaux paramètres de l'activité de Zamacona depuis 1988 atteste que ces travaux ont eu des effets préjudiciables sur la productivité de ce chantier, comme le montre le tableau suivant:
>EMPLACEMENT TABLE>
Selon les autorités espagnoles, ces chiffres montrent que:
- 1993 est l'année où les contrats ont été les moins nombreux,
- les travaux correspondant aux carnets de commandes pour 1992 et 1993 n'ont pu être exécutés de manière satisfaisante, le nombre de quilles posées et celui des livraisons subissant une baisse en chiffres tant absolus que relatifs,
- en 1994, une fois les travaux achevés, la production a retrouvé un niveau satisfaisant.
De même, les données fournies concernant le chiffre d'affaires, les effectifs et le chiffre d'affaires par personne montreraient que la croissance enregistré en 1991 et 1992 s'est ralentie en 1993 [nonobstant la reprise du chantier naval Ardeag; voir à cet égard le point c)] avant de se redresser en 1994.

c) Reprise du chantier Ardeag
Les autorités espagnoles ont expliqué que le ministère de l'industrie avait approuvé, le 18 mars 1992, le programme d'action de Zamacona pour 1991-1993. Par la suite, dans le cadre de l'importante restructuration du secteur de la construction navale en Espagne, Zamacona a repris le chantier naval Ardeag, avec son carnet de commandes et ses effectifs à compter du 1er janvier 1993. C'est ainsi qu'en décembre 1992, Zamacona a présenté au ministère un programme remanié, qui a été approuvé le10 mars 1993.
Les autorités espagnoles reconnaissent que cette reprise ne justifie pas en soi le retard de livraison des cinq remorqueurs mais affirment que si cet élément est ajouté à toutes les autres circonstances qui prévalaient à ce moment-là, on se trouve en présence d'une situation ayant entraîné des perturbations inattendues, substantielles et justifiables. Ces perturbations étaient inattendues dans la mesure où la reprise n'était pas prévue au moment de la signature des cinq contrats, et elles sont justifiables car la reprise a abouti à une réduction nette de capacité dans les deux chantiers, contribuant ainsi au nécessaire ajustement structurel du secteur. En ce qui concerne l'ampleur des perturbations, les autorités espagnoles estiment que celles-ci ont été substantielles puisque le transfert du carnet de commandes d'Ardeag, y compris les travaux en cours, a entraîné un surcroît d'activité occasionnant des retards dans le programme de production initial de Zamacona. Zamacona soutient qu'il a dû exécuter en priorité les contrats d'Ardeag et que la charge de travail supplémentaire a représenté, selon ses estimations, un total de 78 846 heures de travail (il s'agissait, pour 1993 et 1994, de deux contrats à terminer, de deux constructions totalement nouvelles, ainsi que de divers travaux de réparation et de transformation), soit, d'après les calculs de Zamacona, un peu plus de dix mois de travail, si l'on prend pour base la moyenne mensuelle des heures de travail effectives au cours de la période 1993-1995.
Selon les autorités espagnoles, le fait que la reprise constituait une décision volontaire n'entre pas en ligne de compte pour établir l'existence de perturbations inattendues, substantielles et justifiables affectant le programme de travail de Zamacona puisque l'article 4, paragraphe 3, deuxième alinéa, de la directive 90/684/CEE ne précise pas que les circonstances responsables des perturbations doivent être extérieures au chantier concerné.

IV
Il convient de rappeler que l'article 4, paragraphe 3, premier alinéa, de la directive 90/684/CEE dispose que le plafond applicable à un contrat est celui qui est en vigueur à la date de signature du contrat final. Toutefois, cette règle n'est pas applicable à un navire livré plus de trois ans après la date de signature du contrat final. En pareil cas, le plafond applicable au contrat est celui qui était en vigueur trois ans avant la date de livraison du navire. Il s'agit, par cette dernière disposition, d'empêcher les chantiers navals de se soustraire à l'effet de la réduction progressive du plafond de l'aide applicable en acceptant des commandes bénéficiant d'un niveau d'aide élevé en fin d'année civile, juste avant l'application d'une réduction, tout en sachant que les navires ne pourront pas être achevés dans un délai raisonnable.
Dans le cas présent, la valeur contractuelle des navires était inférieure à 10 millions d'écus. En décembre 1991, lors de la signature des contrats, le plafond d'aide applicable était de 9 %. Toutefois, comme il est expliqué ci-après, les navires n'ont pas été livrés avant le second semestre de 1995 ou le début de 1996, de sorte que le délai de livraison de trois ans a été dépassé de sept à quatorze mois, selon le cas. En conséquence, le plafond de l'aide applicable à ces contrats devrait être celui en vigueur trois ans avant la date de livraison des remorqueurs, c'est-à-dire en 1992-1993, soit 4,5 %.
L'article 4, paragraphe 3, deuxième alinéa, de la directive dispose toutefois que la Commission peut proroger le délai de livraison de trois ans prévu lorsque cela se justifie en raison de la complexité technique du projet de construction navale concerné ou de retards résultant de perturbations inattendues, substantielles et justifiables affectant le programme de travail d'un chantier. Les autorités espagnoles fondent leur demande sur ce dernier motif. Elles affirment que le fait de donner une suite favorable à cette demande ne porterait pas atteinte aux conditions de la concurrence dans le secteur de la construction navale. Une telle décision permettrait pourtant à Zamacona de recevoir des aides d'une intensité plus élevée que celles auxquelles il pourrait sinon prétendre et de bénéficier ainsi d'un avantage par rapport à d'autres chantiers. En outre, le fait d'accéder à cette demande créerait un précédent important puisqu'à ce jour, la Commission a interprété le deuxième alinéa de l'article 4, paragraphe 3, de la directive de manière restrictive et n'a approuvé qu'une seule demande de prorogation, pour cause de complexité technique du projet de construction navale.

V
Après analyse des documents contractuels, il apparaît qu'en l'espèce, les faits sont les suivants. Les cinq contrats ont été signés en décembre 1991 (en même temps qu'onze autres contrats, dont un seul est entré en vigueur). L'échéance du délai d'entrée en vigueur (clause 18 des contrats) a été différée jusqu'à des dates diverses, comprises entre le 30 avril 1992 et le 30 décembre 1992, et était subordonnée au versement d'un premier acompte par l'armateur. La clause 10 des contrats précisait que la durée de construction serait de quatorze mois à compter de la date d'entrée en vigueur (à l'exception du contrat 300 pour lequel le délai de construction était compris entre quatorze et seize mois), sauf si le chantier informait les armateurs que ces délais ne pourraient pas être respectés en raison de causes extérieures (cas de force majeure). Tous les contrats, hormis le contrat 300, stipulaient également, à la clause 18, que si les contrats n'étaient pas entrés en vigueur à la date prévue, ils seraient frappés de nullité.
Le 25 novembre 1992, deux contrats (318 et 319) ont été modifiés pour proroger le délai d'entrée en vigueur jusqu'au 31 juillet 1994 au plus tard (soit une prolongation du délai initial de dix-neuf mois supplémentaires). Des avenants aux contrats 318 et 319, portant modification des spécifications des navires, ont été signés le 20 décembre 1993 (dans les deux cas, ils ont eu pour effet de diminuer légèrement le montant du contrat), et le 5 mars 1994, ont été signés les avenants mettant ces contrats en vigueur. Des avenants aux contrats 300 et 301 ont été signés le 10 mai 1994 en vue de modifier les spécifications techniques des navires (ce qui a entraîné une hausse de près de 30 % du montant du contrat) et de mettre en oeuvre les contrats en vigueur. (Le contrat 301 a apparemment fait l'objet d'un avenant supplémentaire signé le 28 avril 1995, dont le contenu n'a pas été communiqué). Un avenant au contrat 320 a été signé le 20 mars 1994, en vue de modifier les spécifications techniques du navire (ces modifications ont entraîné une légère augmentation du montant du contrat) et de permettre l'entrée en vigueur du contrat.
Enfin, en 1994, après être entrés en vigueur, quatre des cinq contrats ont été transférés à d'autres armateurs.
Le tableau suivant présente un récapitulatif de ces faits:
>EMPLACEMENT TABLE>
Il ressort de ce qui précède que le dépassement du délai de livraison de trois ans prévu à l'article 4 paragraphe 3 de la directive 90/684/CEE se situe dans une fourchette de sept à quatorze mois; en outre, les dates de livraison initialement prévues aux contrats ont été dépassées dans la mesure suivante:
- contrat 300: 2 ans et 2 mois,
- contrat 301: 2 ans et 4 mois,
- contrat 318: 1 an et 4 mois,
- contrat 319: 1 an et 5 mois,
- contrat 320: 1 an et 7 mois.
En outre, étant donné les reports d'entrée en vigueur des contrats et les autres modifications qui y ont été apportées, il est extrêmement douteux qu'aucun des contrats signés en 1991 puisse être qualifié de contrat final aux fins de l'article 4, paragraphe 3, premier alinéa, de la directive, qui définit le plafond de l'aide applicable comme celui «en vigueur à la date de la signature du contrat final» (soulignement ajouté). Ces doutes concernent notamment les contrats 301 et 320 qui, selon les conditions des contrats initiaux, auraient dû, en principe, être frappés de nullité dès lors que les armateurs n'avaient pas rempli leurs obligations prévues à la clause 18 relative à l'entrée en vigueur; ils valent également pour les contrats 300 et 301, dont le montant a sensiblement augmenté.
Les faits exposés ci-dessus suffisent à conclure que les conditions justifiant une prorogation du délai de livraison de trois ans visé à l'article 4, paragraphe 3, de la directive ne sont pas remplies.

VI
En ce qui concerne les arguments avancés par les autorités espagnoles à l'appui de la demande de prorogation, le libellé de l'article 4, paragraphe 3, deuxième alinéa, de la directive 90/684/CEE impose à la Commission l'obligation de déterminer si le retard de livraison des navires résulte de perturbations inattendues, substantielles et justifiables affectant le programme de travail du chantier. Les autorités espagnoles n'ont fait valoir aucun argument attestant que ce critère est rempli.
Les modifications apportées à la législation portuaire semblent avoir constitué une évolution inattendue, qui n'était pas prévue au moment de la signature des contrats en décembre 1991. Il n'a toutefois pas été prouvé que cet événement inattendu ait occasionné, dans le programme de travail de Zamacona, des perturbations ayant retardé la livraison des navires. Cette nouvelle législation a simplement eu pour effet de créer parmi les armateurs un climat d'incertitude, qui les a amenés à différer l'entrée en vigueur des contrats. Les armateurs ont également décidé d'apporter d'importantes modifications à la conception et aux spécifications techniques des navires, non seulement pour prendre en considération le nouveau cadre juridique, mais aussi (comme la communication relative à l'ouverture de la procédure l'indiquait déjà) pour tenir compte de la dévaluation de la peseta, qui avait entraîné une hausse des coûts (les moteurs de propulsion allemands prévus au départ ont ainsi été remplacés par des moteurs moins coûteux). Ces différents éléments, s'ajoutant à la nécessité de régler les modalités du financement nécessaire, ont amené les armateurs à retarder encore l'entrée en vigueur des contrats. À l'évidence, c'est cette situation qui a retardé la livraison des bateaux et non des perturbations affectant le programme de travail de Zamacona.
En ce qui concerne la construction du nouveau quai d'armement, il ne semble pas qu'elle ait été imprévisible au moment de la signature des contrats en décembre 1991: en effet, le port de Bilbao avait approuvé antérieurement un projet de réaménagement de ses installations, qui aurait entraîné la disparition du quai utilisé par Zamacona pour l'armement et la réparation des navires. Ce projet a fait planer un doute sérieux sur l'existence même du chantier, jusqu'à ce que les autorités du port de Bilbao et Zamacona signent, en octobre de cette même année, un accord prévoyant le remplacement du quai démoli par un nouveau.
En ce qui concerne l'ampleur des perturbations, il ne fait guère de doute que les travaux ont affecté les activités de Zamacona depuis le début 1992 jusqu'à mai 1993, même s'il convient de noter, malgré les déclarations contraires du chantier, que le nombre de quilles posées, de lancements et de livraisons ne semble pas avoir été nettement inférieur aux niveaux enregistrés antérieurement.
Il n'est toutefois pas prouvé que les perturbations aient entraîné un quelconque retard dans la livraison des remorqueurs. Rien ne prouve notamment que Zamacona ait, conformément à la clause 10 des contrats, informé les armateurs que la livraison des navires devrait être retardée en raison de perturbations affectant son programme de travail. Cela n'a rien de surprenant dans la mesure où les contrats ne sont pas entrés en vigueur avant mars ou mai 1994, soit près d'un an après l'achèvement des travaux et juste avant que Zamacona ne termine la mise en service du nouveau quai.
Enfin, en ce qui concerne la reprise du chantier Ardeag au 1er janvier 1993, elle n'était pas prévue au moment de la signature des contrats en décembre 1991 et a donc constitué une évolution inattendue. Il est vrai également que son incidence sur Zamacona - absorption d'effectifs et reprise du carnet de commandes d'Ardeag - a été substantielle. Toutefois, malgré l'argumentation contraire des autorités espagnoles, il convient de noter que l'opération de reprise résultait d'une décision commerciale prise par le chantier (qui lui a également permis de bénéficier d'aides à l'investissement d'un montant total de 559 millions de pesetas) et que dans ces conditions, il était prévisible que cette décision aurait pour conséquence d'alourdir et éventuellement de perturber le programme de travail de Zamacona.
Quant à l'ampleur de ces répercussions, les autorités espagnoles elles-mêmes semblent admettre qu'elle ne saurait expliquer le retard survenu dans la livraison des cinq remorqueurs. Selon Zamacona, la reprise a entraîné 78 846 heures de travail supplémentaires (dont 41 000 heures, soit plus de 50 %, consacrées aux deux nouvelles constructions), ce qui équivaudrait à environ dix mois de travail pour le chantier. Il est toutefois difficile de suivre ces calculs, car ils présentent des incohérences par rapport aux données fournies en ce qui concerne les effets de la construction du nouveau quai d'armement (celles-ci comprennent apparemment des chiffres relatifs aux effectifs et aux contrats de l'ancien chantier Ardeag et montrent que seul un contrat de nouvelle construction est entré en vigueur en 1993). Même si cette estimation de dix mois de travail était acceptée, cela n'explique pas le retard pris par rapport aux dates de livraison initialement prévues pour les navires concernés, qui est largement supérieur à dix mois. Qui plus est, de même que pour le nouveau quai, aucune preuve n'est venue étayer les affirmations de Zamacona selon lesquelles les perturbations consécutives à la reprise l'ont amené à retarder la livraison des navires en question. Cela confirme que ce retard s'explique par la décision des armateurs de différer l'entrée en vigueur des contrats.

VII
Eu égard à ce qui précède, il convient de conclure à l'existence de doutes sérieux sur le caractère de contrat final des contrats 300, 301, 318, 319 et 320 signés en décembre 1991. La conclusion s'impose également que le retard survenu dans la livraison des cinq remorqueurs couverts par ces contrats n'est pas imputable à des perturbations inattendues, substantielles et justifiables affectant le programme de travail de Zamacona. En conséquence, les conditions énoncées à l'article 4, paragraphe 3, deuxième alinéa, de la directive 90/684/CEE ne sont pas remplies et le niveau de l'aide accordée pour ces cinq remorqueurs ne saurait excéder le plafond de l'aide en vigueur trois ans avant la livraison effective des navires, c'est-à-dire 4,5 %. Une décision contraire aurait pour effet de créer un dangereux précédent ayant de graves implications en matière de contrôle des aides d'État dans le secteur de la construction navale.
Les autorités espagnoles ayant donné des garanties selon lesquelles aucune aide supérieure à 4,5 % n'a pour l'instant été accordée pour les contrats en question, il n'y a pas lieu d'ordonner un remboursement,
A ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION:


Article premier
Le projet de l'Espagne d'accorder à Astilleros Zamacona SA une aide sous forme de subvention directe à concurrence de 9 % de la valeur contractuelle avant aide pour cinq contrats signés en décembre 1991 portant sur la construction de remorqueurs (numéros 300, 301, 318, 319 et 320) est incompatible avec le marché commun car cette aide n'est pas conforme aux dispositions de l'article 4, paragraphe 3, de la directive 90/684/CEE.

Article 2
L'Espagne réduit le niveau des aides envisagées pour les cinq contrats en question de manière à garantir que l'aide ne dépasse pas, pour chaque navire, 4,5 % de la valeur contractuelle avant aide, conformément au plafond commun applicable pour 1992 et 1993, tel que fixé par la Commission conformément aux dispositions de l'article 4, paragraphes 2, 3 et 4, de la directive 90/684/CEE.

Article 3
L'Espagne informe la Commission, dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision, des mesures prises pour s'y conformer.

Article 4
Le Royaume d'Espagne est destinataire de la présente décision.

Fait à Bruxelles, le 5 novembre 1997.
Par la Commission
Karel VAN MIERT
Membre de la Commission

(1) JO L 380 du 31. 12. 1990, p. 27.
(2) JO L 351 du 31. 12. 1994, p. 10.
(3) JO C 58 du 25. 2. 1997, p. 8.


Fin du document


Structure analytique Document livré le: 11/03/1999


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