|
Législation communautaire en vigueur
Document 383D0245
Chapitres du répertoire où le document peut être trouvé:
[ 13.20.40 - Textiles ]
[ 08.60 - Aides accordées par les États et autres subventions ]
383D0245
83/245/CEE: Décision de la Commission du 12 janvier 1983 relative à un régime d'aide en faveur du secteur textile/habillement en France (Le texte en langue anglaise est le seul faisant foi)
Journal officiel n° L 137 du 26/05/1983 p. 0024 - 0027
Texte:
***** DÉCISION DE LA COMMISSION du 12 janvier 1983 relative à un régime d'aide en faveur du secteur textile/habillement en France (Le texte en langue française est le seul faisant foi.) (83/245/CEE) LA COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES, vu le traité instituant la Communauté économique européenne, et notamment son article 93 paragraphe 2 premier alinéa, après avoir mis, conformément aux dispositions dudit article, les intéressés en demeure de présenter leurs observations, et vu ces observations, I considérant que, en date du 19 février 1982, le gouvernement français a notifié à la Commission un projet d'ordonnance visant à instituer un régime d'aide en faveur du secteur textile/habillement sous forme d'une prise en charge par l'État d'une partie des cotisations de sécurité sociale incombant aux employeurs du secteur; que les modalités d'application dudit régime annoncées par le gouvernement français ont été effectivement notifiées le 16 avril 1982; considérant toutefois que, par ordonnance no 204 du 1er mars 1982, le régime d'aide précité est entré en vigueur et que les modalités d'application ont été mises en vigueur le 16 avril 1982 par décret no 82340, publié au Journal officiel de la République française le 17 avril 1982; que, ce faisant, le gouvernement français a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l'article 93 paragraphe 3; considérant que ce régime d'aide se traduit par une prise en charge par l'État d'une partie des cotisations de sécurité sociale à raison de 10 % du montant total des rémunérations servant de base, dans la limite du plafond, au calcul des cotisations de sécurité sociale incombant obligatoirement aux employeurs du textile/habillement, lorsque les entreprises en cause s'engagent à maintenir le niveau de l'emploi et à réaliser un certain niveau minimal d'investissement; que cette prise en charge est portée à 12 % lorsque l'entreprise en cause s'engage en outre à procéder à des créations nettes d'emplois; considérant que les entreprises dont les difficultés seraient susceptibles d'affecter l'équilibre économique et social d'une région peuvent obtenir un allégement égal à 8 % sans être tenues aux mêmes conditions relatives à la main-d'oeuvre et aux investissements sur présentation d'un plan de modernisation et d'adaptation de l'entreprise et de sauvegarde de l'emploi approuvé par l'autorité administrative compétente; considérant que la prise en charge des cotisations de sécurité sociale est subordonnée à la conclusion entre l'État et l'employeur concerné d'un contrat d'une durée égale à 12 mois renouvelable pour une nouvelle période de 12 mois; considérant que la Commission, à l'issue d'un premier examen, a estimé que le régime en cause n'était pas compatible avec le marché commun et a, en conséquence, décidé d'ouvrir la procédure prévue à l'article 93 paragraphe 2 première phrase du traité CEE à l'égard de ce régime; qu'à cet effet elle a mis par lettre du 14 mai 1982 le gouvernement français en demeure de présenter ses observations; II considérant que le gouvernement français, suite à l'ouverture par la Commission de la procédure prévue à l'article 93 paragraphe 2, a présenté ses observations par lettre du 16 juillet 1982; considérant que, dans cette lettre, le gouvernement français a souligné les difficultés de l'industrie du textile et de l'habillement en France en termes de pertes d'emplois, de production, de pénétration des importations et de l'accroissement probable de ces difficultés en cas d'accession future dans la Communauté économique européenne de l'Espagne et du Portugal; qu'il justifie l'institution des nouvelles aides par le niveau élevé des charges sociales auxquelles sont soumis les employeurs en France par rapport aux autres États membres de la Communauté; qu'il insiste en particulier sur le fait qu'il s'agirait d'une mesure exceptionnelle visant à inciter l'investissement et à maintenir l'emploi; qu'il ne peut pas partager l'avis de la Commission selon lequel il s'agirait d'une aide au fonctionnement; considérant que, dans le cadre de cette même procédure, cinq États membres ont présenté leurs observations et ont souligné que les aides françaises en question sont cumulables avec les aides déjà existantes et ne tiennent compte ni des exigences d'une restructuration véritable ni de l'intérêt communautaire et qu'elles sont, par leur intensité et leur forme, de nature à provoquer un transfert des difficultés vers d'autres États membres sans pour autant faciliter l'assainissement structurel de l'industrie française; considérant que, dans ce même cadre, trois fédérations ont souligné de leur côté que les mesures françaises qui visent l'augmentation des investissements et de l'emploi sans opérer aucune sélectivité ne peuvent que provoquer une augmentation artificielle des capacités de production dont les entreprises des autres États membres, qui connaissent des difficultés égales ou supérieures à celles de l'industrie du textile et de l'habillement en France, subiront les effets; III considérant que la prise en charge par l'État des cotisations de sécurité sociale dues par les entreprises, lorsqu'elle favorise uniquement certains secteurs économiques, constitue une aide sectorielle qui diminue d'autant les charges leur incombant normalement; qu'il est notoire que s'agissant des secteurs du textile et de l'habillement, secteurs qui connaissent une situation difficile dans toute la Communauté et dans lesquels la concurrence est très vive entre États membres, ces aides sont de nature à affecter les échanges entre États membres et à fausser ou à menacer de fausser la concurrence au sens de l'article 92 paragraphe 1 du traité CEE, en favorisant les entreprises françaises ou leur production; considérant que l'article 92 paragraphe 1 du traité CEE prévoit l'incompatibilité de principe avec le marché commun des aides remplissant les critères qu'il énonce; que les dérogations à cette incompatibilité prévues à l'article 92 paragraphe 3 du traité CEE, seules dérogations concernées dans le cas d'espèce, précisent les objectifs poursuivis dans l'intérêt de la Communauté et pas seulement dans celui des secteurs particuliers de l'économie nationale; que ces dérogations doivent être interprétées strictement lors de l'examen de tout programme d'aide à finalité régionale ou sectorielle, ou de tout cas individuel d'application de régimes d'aides générales et, en particulier, qu'elles ne sont applicables que dans les cas où la Commission est à même d'établir que, sans elles, le jeu des lois du marché ne permettrait pas d'obtenir, à lui seul, des entreprises bénéficiaires qu'elles adoptent un comportement de nature à contribuer à la réalisation d'un des objectifs visés par ces dispositions; considérant qu'accorder le bénéfice desdites dérogations à des aides n'impliquant pas une telle contrepartie reviendrait, en accordant des avantages indus à certains États membres, à laisser affecter les échanges entre États membres et à fausser la concurrence sans que l'intérêt communautaire ne le justifie en aucune manière; considérant que, lorsqu'elle applique les principes rappelés ci-avant à l'examen de régimes d'aides, la Commission doit s'assurer de ce qu'il existe, dans le chef des entreprises bénéficiaires, une contrepartie justifiant l'octroi de l'aide, en ce sens que l'aide est nécessaire pour promouvoir la réalisation de l'un des objectifs énoncés à l'article 92 paragraphe 3 du traité CEE; que, lorsque ceci ne peut pas être démontré, il est clair que l'aide ne contribue pas à la réalisation des objectifs poursuivis par ces dérogations, mais qu'elle sert à améliorer la situation financière des entreprises en question; considérant que, dans le cas d'espèce, le système de l'aide ne permet pas de constater l'existence d'une telle contrepartie dans le chef des entreprises bénéficiaires; considérant, en effet, que le gouvernement français n'a pu donner, ni la Commission déceler aucune justification permettant d'établir que l'aide en cause remplit les conditions requises pour bénéficier d'une des dérogations prévues à l'article 92 paragraphe 3 du traité CEE; considérant que, en ce qui concerne les dérogations prévues au paragraphe 3 sous a) et c) de l'article 92 du traité CEE relatives aux aides destinées à favoriser ou à faciliter le développement de certaines régions, il y a lieu de constater que le niveau de vie en France n'est pas anormalement bas et qu'il n'y sévit pas un grave sous-emploi au sens de la dérogation visée sous a); que par son champ d'application, à savoir toutes les entreprises d'un secteur économique donné, quelle que soit leur localisation, le régime d'aide en cause n'a pas pour objectif le développement de régions au sens de la dérogation visée sous c); considérant que, en ce qui concerne les dérogations prévues au paragraphe 3 sous b) de l'article 92 du traité CEE, il est manifeste que le régime en cause n'est pas destiné à promouvoir la réalisation d'un projet important d'intérêt européen commun, ou à remédier à une perturbation grave de l'économie française; que d'ailleurs, à cet égard, d'après les informations socio-économiques disponibles pour la France, aucun élément ne permettrait de conclure à l'existence d'une perturbation grave de son économie, telle que celle visée par l'article 92 paragraphe 3 sous b); considérant que, par ailleurs, la prise en charge par l'État des cotisations de sécurité incombant aux entreprises d'un secteur industriel déterminé est assimilable à une aide au fonctionnement pour les entreprises concernées de caractère strictement conservatoire; que, d'une manière générale, la Commission s'est toujours opposée aux aides de fonctionnement, étant donné qu'habituellement ces aides ne remplissent pas en elles-mêmes les conditions qui les rendraient susceptibles de bénéficier de la dérogation prévue à l'article 92 paragraphe 3 sous c) du traité CEE, en ce sens qu'elles ne sont pas de nature à faciliter le « développement » de l'activité économique en cause tel que prévu par cette même disposition; que le caractère d'aide assimilable à une aide au fonctionnement est d'autant plus évident dès lors que la réduction des charges sociales s'applique à la totalité des salariés et non pas uniquement à ceux qui occuperaient des emplois nouvellement créés; considérant que de telles mesures d'aide ne pourraient perdre leur caractère d'aide assimilable à une aide au fonctionnement, et bénéficier, le cas échéant, d'une dérogation à l'incompatibilité de principe des aides avec le marché commun, que si, compte tenu des modalités et des critères retenus pour l'octroi des aides, la Commission était à même de déceler un élément de contrepartie de la part des entreprises bénéficiaires en ce sens que la prise en charge par l'État des cotisations de sécurité sociale serait liée à un effort spécial de l'entreprise qui répondrait à l'intérêt communautaire; considérant que, s'agissant du secteur textile/habillement, la Commission a précisé dans les encadrements communautaires en matière d'aides à ce secteur, définis avec les États membres en 1971 et 1977, les objectifs à poursuivre dans l'intérêt communautaire; que ces lignes directrices visent notamment un assainissement sélectif des entreprises du secteur, la non-augmentation des capacités de production dans les sous-secteurs déjà structurellement excédentaires, la promotion des reconversions externes ou internes au secteur, la dégressivité des interventions; qu'elles excluent tout soutien à caractère uniquement conservatoire qui ne ferait que transférer les difficultés d'un État membre à un autre; considérant que le régime d'aide français en faveur du secteur textile/habillement sous forme d'une prise en charge par l'État des cotisations de sécurité sociale dues par les entreprises s'applique à toutes les entreprises du secteur qui mettent en oeuvre un programme de modernisation et d'adaptation; que l'aide est octroyée, sur base de contrats entre les employeurs et l'État, à condition uniquement que l'entreprise s'engage à maintenir ou à augmenter le niveau de l'emploi et des investissements; qu'il n'est exigé aucune autre contrepartie de la part des entreprises, ni en termes de restructuration, ni en termes de réductions de capacité dans les sous-secteurs déjà excédentaires sur le plan communautaire ou dans lesquels l'industrie française est particulièrement performante; qu'il n'est prévu aucune sélectivité quant à la nature des investissements, qui peuvent dès lors être le simple remplacement des équipements et installations existants, ni quant au choix des bénéficiaires eu égard à leur viabilité financière à terme; qu'il n'y a aucune relation directe entre le nombre d'emplois maintenus ou créés et l'importance de l'aide, puisqu'elle porte sur la totalité de la main-d'oeuvre indépendamment du nombre d'emplois maintenus ou créés; qu'enfin aucune dégressivité n'est prévue pendant la période au cours de laquelle les aides sont octroyées et peuvent se cumuler, d'ailleurs, avec les aides existantes tant sectorielles que générales; qu'il est dès lors patent que le régime d'aide en cause ne répond pas aux objectifs définis dans les encadrements communautaires en matière d'aides au secteur du textile et de l'habillement et que les conditions imposées aux entreprises à titre de contrepartie sont insuffisantes; considérant que, en conséquence, vu la forme des aides, et compte tenu de l'absence de contrepartie valable dans l'intérêt communautaire, les aides en cause, dans un secteur où de plus la concurrence intracommunautaire est très vive, sont de nature à altérer les échanges dans une mesure contraire à l'intérêt commun; que, dès lors, il n'existe aucun élément qui puisse fonder la Commission à exonérer le régime d'aide considéré de l'incompatibilité des aides avec le marché commun, en le faisant bénéficier de la disposition dérogatoire prévue à l'article 92 paragraphe 3 sous c) du traité CEE; considérant que les arguments avancés par le gouvernement français en présentant ses observations ne sont pas de nature à modifier cette position; que si, en effet, la situation du secteur textile/habillement s'est détériorée en France au cours de ces dernières années, il s'agit là, cependant, d'une constatation commune à l'ensemble des industries du textile et de l'habillement de la Communauté et les difficultés auxquelles doivent faire face les entreprises des autres États membres sont au moins égales sinon supérieures à celles auxquelles les entreprises françaises sont confrontées; qu'il en est ainsi tant en ce qui concerne le passif des échanges intracommunautaires que le taux de pénétration des importations par rapport à la consommation et la diminution des postes de travail; que si les charges sociales dues par les employeurs en France sont élevées, les salaires français sont, en ce qui concerne la charge salariale totale, dans une situation actuellement plus avantageuse par rapport à la majorité des entreprises des autres États membres; que, en tout état de cause, si les conditions générales dans lesquelles les entreprises exercent leurs activités sont susceptibles de varier d'un pays de la Communauté à l'autre, un État membre ne peut cependant isoler tel élément particulier de ces conditions générales et compenser par des aides les coûts supplémentaires qui en résultent à ce titre pour ses entreprises par rapport à leurs concurrentes dans les autres États membres; considérant, compte tenu de ce qui précède, que le régime d'aide français en faveur du secteur textile/habillement, instauré par l'ordonnance no 204 du 1er mars 1982 et le décret no 82340 du 16 avril 1982, est incompatible avec le marché commun aux termes de l'article 92 du traité CEE et doit en conséquence être supprimé; que le gouvernement français ne doit dès lors conclure aucun contrat comme prévu par les dispositions précitées et doit mettre fin aux contrats d'ores et déjà conclus avec les entreprises, et ce en violation de l'article 93 paragraphe 3 du traité CEE, A ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION: Article premier La République française supprime, dans un délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision, le régime d'aide en faveur du secteur textile/habillement, institué sous forme d'une prise en charge par l'État d'une partie des cotisations de sécurité sociale incombant aux employeurs du secteur, par l'ordonnance no 204 du 1er mars 1982 et dont les modalités d'application sont prévues par le décret no 82340 du 16 avril 1982. En outre, la République française n'accorde plus aucune aide en vertu du régime en question à partir de la date de la notification de la présente décision. Article 2 La République française communique à la Commission les dispositions qu'elle a adoptées pour se conformer à la présente décision au plus tard à l'expiration du délai fixé à l'article 1er premier alinéa. Article 3 La République française est destinataire de la présente décision. Fait à Bruxelles, le 12 janvier 1983. Par la Commission Frans ANDRIESSEN Membre de la Commission
Fin du document
Document livré le: 11/03/1999
|