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Le PCRD, ou comment piloter la recherche publique des pays de l'union européenne de façon à s'assurer qu'elle ne servira à rien

Nota : toute ressemblance avec la réalité ne pourrait être que totalement fortuite

C'est une évidence de dire que la construction de l'Europe ne peut que bénéficier d'un effort de recherche, propice à son développement économique et social : c'est la raison pour laquelle depuis de longues années l'union européenne consacre un budget important au Programme Cadre de Recherche Développement : le PCRD

Dans ce domaine le premier souci de la commission européenne est cependant d'éviter que ses subventions puissent perturber la concurrence : pour cette raison elle a inventé le terme de "recherche précompétitive", c'est-à-dire de recherche dont on s'assure qu'elle n'avantagera personne (et donc ne servira à personne...)

D'un autre côté elle veille à ne pas financer de la recherche fondamentale ni de grands équipements européens, car ce n'est pas dans sa vocation

On aurait alors pu penser qu'elle veuille s'appuyer sur des travaux de recherche pour déterminer sa politique dans des domaines complexes comme la santé, l'environnement, la sécurité, la fiscalité,... : on constate malheureusement que les directions générales de la commission chargées des grandes politiques publiques utilisent bien peu les capacités du PCRD pour initier les projets de recherche qui seraient nécessaires à cette fin (elles ne participent d'ailleurs que très modestement aux travaux d'élaboration du Programme Cadre)

En l'absence de politique sous-jacente (ambition industrielle, enjeux de santé ou de sécurité,...), le processus d'élaboration de ce Programme Cadre n'est évidemment pas simple : pendant plusieurs années, de nombreuses et vastes réunions permettent à chacun des lobbys de recherche de faire valoir tout l'intérêt d'investir dans sa discipline, ce qui bien évidemment ne peut conduire à rien de conclusif. Tout ce travail, Dieu merci, n'est guère utilisé car in fine se sont les diplomates qui décident en quelques semaines devant le côté impératif des échéances

Leur raisonnement, très consensuel, s'appuie sur des principes arithmétiques simples : l'objectif final est que chacun des pays membres puisse obtenir les "taux de retour" auxquels il a droit.

Connaissant la structure de recherche de chacun des pays (définie à partir d'une nomenclature calquée sur le plan de bureau des fonctionnaires de la commission) et ces fameux taux de retour , il est très facile de définir le pourcentage du Budget à affecter à chacune des discipline (aéronautique, nucléaires, énergies renouvelables,...) pour que, quasi mécaniquement, chaque pays obtienne son dû : la résolution de ce petit problème mathématique de 15 équations à 15 inconnues peut se faire très simplement en inversant une matrice (et pour les non-mathématiciens par approximations successives à partir du bilan du plan précédent...)

Rajoutons que les procédures administratives sont particulièrement lourdes et le pourcentage de dossiers retenus est en général faible (souvent le taux de "d'écrèmage" des dossiers approche les 90 % ), tant et si bien qu'il faut compter bien souvent 2 F de salaire administratif pour monter les dossiers afin d'obtenir statistiquement 1 F de subventions

Malheureusement la structure budgétaire d'un nombre significatif de nos grands centres de recherche a conduit au fil des ans les salaires à accaparer la quasi totalité des financements disponibles, et ne permet plus aux laboratoires de dégager les moyens nécessaires à leur fonctionnement.

Les subventions venant de l'extérieur revêtent dans ce contexte un enjeu essentiel et, bien que représentant un montant faible par rapport à la totalité du budget du laboratoire, elles ont une capacité d'orientation déterminante pour les laboratoires publics il est parfois préférable de transformer 2 F de salaire en 1 F de subventions quand celles-ci sont indispensables pour faire tourner le laboratoire et que l'allègement des frais de personnel par réduction d'effectifs est impossible (alors que bien entendu la plupart des entreprises ont renoncé à cette source de financements devant ce triste tableau)

Si l'on fait la synthèse de tout cela en s'aperçoit que les 18 milliards d'euros de ressources fiscales européennes du PCRD n'auront en rien contribué à l'élaboration d'une politique européenne efficace ... et auront à l'inverse conduit à dépenser 3 F d'argent public pour injecter in fine 1 F de subventions afin d'orienter un programme de recherche, lui-même financé pour l'essentiel par le budget des États , dans une direction telle que l'on se sera assuré que celui-ci ne servira à rien : certains considèrent que ces 18 milliards sont encore insuffisants

Jean-Michel Deux

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