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Mort de Bérégovoy : un homme du « Monde » a toujours raison

Vérité officielle : c’est Chirac qui a fait couler le « Rainbow Warrior »

6 mai 2008 à 12h07
Quinze ans après la mort de Pierre Bérégovoy le phosphore des investigateurs est bouillant. Des journalistes et des gens ordinaires, ce que ne sont pas les journalistes, s’interrogent sur les vraies conditions de la disparition de l’ancien gazier. On se demande bien pourquoi tant de livres, tant de films puisque l’affaire est jugée, limpide : Bérégovoy s’est suicidé. Pas de doute puisque c’est Jacques Follorou, du « Monde », qui écrit ça dans un livre…

Je n’ai pas d’archives mais je crois avoir lu, signé Follorou du Monde, au moment de l’assassinat du préfet Erignac , que le motif du crime était à rechercher dans un projet immobilier qui devait naitre sur la forteresse de Bonifacio. Sûrement vrai.

Pardon pour ces querelles de boutiques et la mise en liquidation publique de nos vanités de journalistes, de vous installer dans nos cuisines, mais au Monde, je les trouve vraiment épatants. En 1985, au moment où j’écrivais dans VSD, journal de caniveau, « La DGSE a fait couler le Rainbow Warrior », Edwy Plenel et Le Monde accusaient, eux, « le commandant Charrier et des barbouzes du RPR ». Ce qui n’empêche qu’aujourd’hui, si vous posez la question à un lycéen : « Qui est le Woodward de l’affaire Greenpeace ? », il va répondre Plenel. C’est la vie. Soyons Plenel ou rien.

Follorou est un brave type, honnête et bon journaliste. Mais il doit admettre que, comme moi, il lui arrive de se tromper. Et qu’il est ridicule, autour d’un fait divers ou d’une affaire d’Etat (le ressort est le même) de planter des piquets autour de son « investigation », avec des barbelés et de coller une pancarte : « Celui qui va au-delà est un con. Un membre du gang de la théorie du complot ». Pour bétonner le poids de son enquête, on mobilise des potes dans les radios-télés, dans les journaux qui vous félicitent. Avec la vérité s’agit de vendre le livre qui va avec.

Le « Vieux con » a connu, juste après l’invention de l’imprimerie, une période d’émulation entre journalistes. Où l’indice trouvé par un autre était utilisé pour aller soi-même plus loin, si possible. C’est fini. Il y a maintenant des PME du vrai. Des usines à vérité qui vous servent le plat à température. Je ne veux pas dire que ce qui est écrit dans ces ateliers soit faux, je dis que, plus qu’un chemin de la liberté, il y a maintenant une Nationale du vrai qui rassure.

Un jour, place de la Bourse, j’ai rencontré Francis Schull qui était un truc dans le genre chef des études au Centre de Formation des Journalistes. Je lui ai demandé s’il enseignait le doute ? Il m’a répondu : « Non, rien que des certitudes ». Deux années de suite je suis allé raconté des sottises sur le doute au CFJ. Puis les certitudes ont pris le dessus.

Mais, puisque c’est Bérégovoy qui nous occupe, on y revient. Il se trouve qu’il y a un mal élevé, nommé Francis Gillery qui a fait un film qui va passer samedi 3 mai sur FR3 à 23 heures. Et l’enquête de ce Gillery qui n’est ni dans les coteries, ni connu dans la vie du sérail, montre qu’on peut avoir un doute sur la vraie mort de « Béré ». Pourquoi pas ! Mais c’est vraiment pas bien. La transgression ça va, mais à ce point là !

Je ne vais pas vous chanter « Le poète a dit la vérité… ». Ce serait inapproprié et ridicule. En ce qui me concerne, il y a un an, j’ai rencontré Pascal Mornac un type qui chante dans la douleur mais avec talent. Il y a quinze ans, le 1er mai 93, il était à 150 mètres de l’endroit où « Béré » est mort. Il a entendu deux coups de feu puis, avec ses potes, s’est pointé sur la berge du canal pour tomber face à une dame avec un chien et deux types « genre commando ».

Il n’y avait alors, autour du corps de « Béré », ni pompiers, ni flics, ni garde du corps, ni chauffeur, rien que la solitude, la dame et le chien et deux profils de barbouze. La question que je pose, avec Gillery aux très grands investigateurs est la suivante : « Qui étaient ces deux types qui veillaient sur le révolver encore fumant de Bérégovoy ? »

En fait je suis vache avec Le Monde. Dans le supplément télé de ce quotidien, Olivier Zilbertin, certainement un méga niais, écrit à propos de film de Francis Gillery : « Il y a vraiment de quoi insinuer plus que de douter ». Insinuer veut dire « Inscrire dans un registre pour donner authenticité »… Je ne veux pas mettre le bazar dans un journal qui en connait trop, mais ce serait bien que Follorou et Zilbertin se téléphonent.

Fêtes pour Israël, larmes en Palestine « TA GUEULE ELKABBACH »

27 Messages de forum

  • Mort de Bérégovoy : querelles entre gens du "Monde"

    1er mai 2008 14:54, par JM Bourget

    Avant, à juste titre, que les lecteurs rigoureux ne me tombent dessus, j’avoue, qu’un peu hâtif ce matin, j’ai négligé la relecture :

    Donc : Surement s’écrit Sûrement, Sois-même s’écrit soi-même, qu’y s’écrit qui, vrai s’écrit vraie, 1 s’écrit 1er et la berge la berge. Et pardon mille fois pardon. Comme punition je vais recopier la lettre d’Elkabbach au Monde. Cent fois.

    • Mort de Bérégovoy : querelles entre gens du "Monde" 4 mai 2008 19:54, par GEORGES COTTINEAU
      Dîtes donc, il y a des gens qui mettent un sacré bout de temps avant de faire des révélations… Un Commissaire de la DGSE m’a interpellé sur le parking des Invalides le jour de la levée du corps de ma belle mère Giberte Beregovoy ; il me disait qu’ il connaissait le nom des assassins de mon beau- père ;je lui ai répondu qu’il lui appartenait -dès lors -de livrer cette information à un Commissaire de police pour que les auteurs soient immédiatement recherchés. Mais , voilà malheureusement le point où tout s’écroule : le Commissaire en question n’était sûr qu’à 95%. Ce sont ces 5% qui changent tout !Et il n ’y a jamais eu de déposition en bonne et due forme.Faute d’informations probantes.
      • Mort de Bérégovoy : querelles entre gens du "Monde" 5 mai 2008 09:55, par JM Bourget

        Merci pour votre réponse. Je ne suis pas son mentor mais je pense que Pascal Mornac est prêt à témoigner de ce qu’il a entendu et vu ce 1er mai 93. Je connais ce garçon depuis plus d’un an, je sais que, en dépit de la haine des commères, il dit ce qu’il vrai. Vrai confirmé à mes oreilles par l’un de ses copains qui, pour des raisons privées ne peut témoigner à visage découvert. Quand je rencontre Mornac, il n’attire pas mon attention sur les "militaires", il l’attire sur le deux coups de feu. Ce n’est donc pas quelqu’un qui, subitement, est venu me "vendre" une histoire qu’il a inventée. Je ne dis pas que Pierre Bérégovoy ne s’est pas suicidé. Je pose la question de ces 2 types présents juste au moment du drame. Pour le reste je vois que la journaliste du Journal du Centre, madame Atila a vu du sang sortir par le sommet du crane, comme le chef des pompiers et comme le montre la photo. Mais France Inter et autres nous assurent que la balle a traversé les tempes de part en part ?????? Bien à vous.

        JM Bourget

        • J’ai regardé le documentaire de France 3.

          Je fais 2 observations :

          1- le malaise palpable de l’ex-procureur de Nevers conduit en soi à se poser des questions sur la façon dont l’enquête a été verrouillée ;

          2- ouvrez un livre de médecine légale, allez à la page de la photo d’un suicidé au 357 magnum, et vous constaterez une déformation totale du crâne du côté de la sortie de la balle, avec un trou en entonnoir inversé de l’ordre de la dizaine de cm de diamètre et une défiguration partielle du cadavre. On est loin des blessures asseptisées vues au cinéma…et du crane de M. Bérégovoy que l’on distingue intact dans le documentaire de samedi dernier.

          De ces éléments, on déduit qu’il y a un pb manifeste de véracité dans le prétendu contenu des "notes d’autopsie" (une nouveauté en procédure) du proc opportunément mais maladroitement évoquées vendredi dernier sur France-Inter, dans l’émission organisée autour de la parole officielle de MM Deloire et Follorou sous la houlette d’un animateur d’une partialité saisissante.

          La levée de bouclier suscitée par le documentaire courageusement diffusé par France 3 loin des cotteries du microcosme de la presse parisienne et de son autocensure trop fréquente, témoigne en soi de l’existence d’un doute que ce genre de comportements est hélàs de nature à transformer en certitudes.

          En tout cas, bravo à vous, M. Bourget, pour votre papier, à M. Gillery pour son travail, et à M. Mornac pour son honnêteté.

          J’espère que Bakchich nous informera des suites de cette affaire.

        • La journaliste du Journal du Centre c’est Mme ANIBAL, pas ATILA !!!
  • Mort de Bérégovoy : un homme du « Monde » répond

    6 mai 2008 23:10, par Olivier Zilbertin

    Bonsoir, Je n’avais évidemment pas écrit "il y a vraiment de quoi insinuer plus que de douter", ce qui ne me semble pas vouloir dire grand-chose. J’avais écrit "il y a vraiment de quoi insinuer plus que le doute". Je ne saurai jamais par quel grand mystère cette phrase c’est retrouvée torturée… Ma conclusion d’origine était en outre très cohérente avec la teneur générale de mon article, comme le confirme le premier paragraphe : "On voulait commencer ici par : il y a quinze ans, le 1er mai 1993, quelques semaines seulement après avoir quitté Matignon, l’ancien premier ministre Pierre Bérégovoy s’est donné la mort d’une balle dans la tête, le long d’un canal latéral à la Loire. Un fait sans précédent dans l’histoire de la Ve République. A l’occasion de cet anniversaire, plusieurs documents et documentaires reviennent sur le parcours et la tragédie de cet homme.

    Sauf qu’après avoir vu le documentaire de Francis Gillery, on n’est vraiment plus sûr de rien. S’agissait-il vraiment d’un suicide ? Au terme d’une enquête très fouillée, de témoignages inédits, la question se pose plus que jamais en tout cas." Merci. Cordialement. Olivier Zilbertin

    • Merci mon bon confrère pour la fermeté de votre opinion ce qui n’est pas une machandise courante par les temps qui, eux, courent. J’avais été surpris par la tournure de phrase et pensé à une embuscade de typographe. En ce qui concerne, plus qu’une continuelle bataile d’Hernani avec couteaux et clans d’arrêt, je rêve d’un travail, à plat, sur l’histoire et les faits divers qui serait beaucoup enrichissante pour nos journaux qui, c’est une vérité, perdent des lecteurs qui s’évadent vers le préfabriqué du gratuit ou le fantasmé de certain spots d’Internet. Sites sur lesquels on ferait mieux de réfléchir, pourquoi le besoin de cette expression réputée libre, plutôt que de dauber à coups d’anathèmes. Salutations dans la distinction (comme dirait Bourdieu).

      JM BOURGET

  • Le plus incroyable après la diffusion de ce reportage est le silence unanime de la presse, presse qui se livre à une (fausse) course au scoop, est là silencieuse.

    Vous avez dis bizarre …

    Car sa vision apporte pour le moins d’énormes doutes quand à la version officielle …

    • Comprenant les dangers qu’une personne honnête, court, dans un entourage plutot douteux de l’époque. Etonnant aussi, une telle disparition, d’ancien ministre, est le chapeau, qu’il fait porter, aux 2 agents de sa sécurité. Cela, pour un ancien résistant est contraire, de la mise en cause d’autrui et ne pouvait pas échapper à sa vigilance éclairée et à son intelligence de chef de gouvernement Il lui aurait été facile par ailleurs de se procurer une arme de protection personnelle Tout celà dépasse la crédibilité et contribue à faire planer un doute Un homme intègre, ne peut pas défendre son honneur, et laisser un doute, accusant autrui en suscitant l’interrogation merci de me lire m@n
  • Sans m’interroger sur la véracité de l’Histoire officielle (même si je me questionne à titre privé), on peut se demander si le lycéen lambda d’aujourd’hui (ou même l’étudiant, tant qu’on y est) sait qui est ce Woodward (Nixon n’est plus dans l’actualité depuis un petit moment !) dont vous parlez au début de votre post. Cordialement,

    Sam

  • Le doute est permis. Le doute est nécessaire. Le doute demande maintenant des réponses. Des réponses doivent et peuvent être données. Par exemple on pourrait commencer par la publication (rendre public et au peuple) des résultats de l’autopsie de M. le premier Ministre Pierre Bérégovoy… autopsie dont on pourra alors avoir des doutes !
    • Apres l’émission, lors du débat Carreyrou et Tillinac ont ensemble demandé a ce qu’on publie les rapports d’autopsie et de balistique. C’en est ou ? Je me suis moi aussi étonnée du silence de la presse après tous ces émissions contradictoires… Ca sent le roussi
  • Il est assez plausible qu’un garde du corps charge son 357 Magnum avec du 38 spécial hollow point. Votre livre de médecine légale n’est alors pas à la bonne page…

    Si vous tirez un coup de feu à 20m d’un mur, comme le contrefort d’un canal, vous pouvez entendre 2 coups espacés d’un dixième de seconde (40m à 340 m/s).

    Il faudrait donc en savoir plus pour pouvoir juger…

  • 2 mois plus tard…du nouveau ?

    Ou bien la Vérité officielle de la bienpensance médiatico-politique a t’elle réussi à ré-enterrer (pour de bon ?) ce dossier en dépit du travail remarquable et pour le moins troublant de Monsieur Gillery (et de Monsieur Bourget !!) ?

    Nous sommes nombreux à espérer que, sinon les autorités (ne soyons pas naïfs !), du moins les journalistes qui ne se satisfont pas des déclarations officielles, rebondissent sur les éléments recueillis à ce jour…

    Alors, à suivre sur Bakchich, M. Bourget ?