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Décret no 94-569 du 11 juillet 1994 autorisant la création par la société Nersa d'une centrale nucléaire à neutrons rapides de 1 200 MWe sur le site de Creys-Malville (département de l'Isère)


NOR : INDF9400678D


Le Premier ministre, Sur le rapport du ministre de l'industrie, des postes et télécommunications et du commerce extérieur, du ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche et du ministre de l'environnement, Vu l'ordonnance no 58-1371 du 29 décembre 1958 tendant à renforcer la protection des installations d'importance vitale; Vu la loi no 61-842 du 2 août 1961 relative à la lutte contre les pollutions atmosphériques et les odeurs, ensemble les textes pris pour son application; Vu la loi no 64-1245 du 16 décembre 1964 relative au régime et à la répartition des eaux et à la lutte contre leur pollution, modifiée par la loi no 92-3 du 3 janvier 1992 sur l'eau, ensemble les textes pris pour son application; Vu la loi no 66-537 du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales, et notamment son article 5; Vu la loi no 72-1152 du 23 décembre 1972 autorisant la création d'entreprises exerçant sur le sol national une activité d'intérêt européen en matière d'électricité, en conformité avec la loi no 46-628 du 8 avril 1946 sur la nationalisation de l'électricité et du gaz, ensemble le décret du 13 mai 1974 autorisant la création de la société Centrale nucléaire européenne à neutrons rapides S.A. (Nersa), approuvant les statuts de cette société et la soumettant au contrôle économique et financier de l'Etat; Vu la loi de finances rectificative pour 1975 (no 75-1242 du 27 décembre 1975), et notamment son article 17; Vu la loi no 76-629 du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature, ensemble le décret no 77-1141 du 12 octobre 1977 pris pour l'application de l'article 2 de cette loi; Vu la loi no 76-663 du 19 juillet 1976, modifiée par la loi no 92-646 du 13 juillet 1992, relative aux installations classées pour la protection de l'environnement, ensemble les textes pris pour son application; Vu la loi no 80-572 du 25 juillet 1980 sur la protection et le contrôle des matières nucléaires, ensemble les textes pris pour son application; Vu la loi no 87-565 du 22 juillet 1987 relative à l'organisation de la sécurité civile, à la protection de la forêt contre l'incendie et à la prévention des risques majeurs; Vu la loi no 91-1381 du 30 décembre 1991 relative aux recherches sur la gestion des déchets radioactifs; Vu le décret no 63-1228 du 11 décembre 1963 modifié relatif aux installations nucléaires, et notamment son article 4-III, ensemble les textes pris pour son application; Vu le décret no 66-450 du 20 juin 1966 modifié relatif aux principes généraux de protection contre les rayonnements ionisants; Vu le décret no 74-945 du 6 novembre 1974 modifié relatif aux rejets d'effluents radioactifs gazeux provenant des installations nucléaires de base et des installations nucléaires implantées sur le même site; Vu le décret no 74-1181 du 31 décembre 1974 relatif aux rejets d'effluents radioactifs liquides provenant d'installations nucléaires; Vu le décret no 75-306 du 28 avril 1975 modifié relatif à la protection des travailleurs contre les dangers des rayonnements ionisants dans les installations nucléaires de base; Vu la demande présentée le 27 octobre 1992 par la société Nersa en vue d'obtenir, en application de l'article 4-III du décret du 11 décembre 1963 modifié susvisé, l'autorisation de création de la centrale nucléaire de Creys-Malville et le dossier joint à cette demande, modifié le 16 décembre 1992; Vu les résultats de l'enquête publique effectuée du 30 mars 1993 au 14 juin 1993; Vu le rapport de la direction de la sûreté des installations nucléaires du 18 janvier 1994 relatif à la sûreté du réacteur Superphénix; Vu l'avis émis par la commission interministérielle des installations nucléaires de base lors de sa séance du 6 avril 1994; Vu l'avis conforme du ministre d'Etat, ministre des affaires sociales, de la santé et de la ville, en date du 7 juillet 1994, Décrète:

Art. 1er. - La société Centrale nucléaire européenne à neutrons rapides S.A. (Nersa) est autorisée à créer sur le site nucléaire dit de Creys-Malville (commune de Creys-Mépieu) l'installation nucléaire de base constituée par un réacteur à neutrons rapides et l'ensemble des équipements implantés dans le périmètre qui lui est associé, fixé sur le plan ci-joint (1), dans les conditions définies par la demande susvisée du 27 octobre 1992 et le dossier joint à cette demande en sa version du 16 décembre 1992 sous réserve des dispositions du présent décret.

Art. 2. - La société Nersa, en sa qualité d'exploitant de l'installation nucléaire de base visée à l'article 1er, se conformera aux dispositions du présent décret, sans préjudice du respect des autres dispositions en vigueur, notamment en matière: - d'application du code de travail; - de rejets d'effluents radioactifs; - d'appareils à pression; - de régime de l'eau; - de protection de l'environnement; - de protection et de contrôle des matières nucléaires; - de prévention des risques technologiques.

Art. 3. - Compte tenu du caractère prototype de l'installation, celle-ci sera exploitée dans des conditions privilégiant explicitement la sûreté et l'acquisition des connaissances, dans un objectif de recherche et de démonstration. En conséquence, la production électrique du réacteur ne pourra être soumise aux exigences d'approvisionnement du réseau électrique. Ces objectifs seront pris en compte dans l'élaboration des règles générales d'exploitation prévues aux articles 5 et 6 du présent décret, ainsi que dans le traitement des incidents. Un programme d'acquisition de connaissances sera établi et éventuellement mis à jour; en particulier, il sera rendu compte semestriellement aux ministres chargés de l'environnement, de l'industrie et de la recherche de son calendrier prévisionnel, de son déroulement et des difficultés éventuelles rencontrées. Avant la première divergence du réacteur, ce programme d'acquisition de connaissances sera approuvé par le ministre chargé de la recherche; ses mises à jour éventuelles feront, le cas échéant, l'objet d'une approbation de même nature. En tout état de cause, au plan de la sûreté, et sans préjudice des autorisations prévues à l'article 4-2 du présent décret, les expériences prévues par ce programme devront avoir reçu, préalablement à leur engagement, une autorisation, délivrée par les ministres chargés de l'environnement et de l'industrie dès lors que l'installation reste conforme aux prescriptions techniques du présent décret. Les expériences menées dans le domaine de la réduction des déchets à longue durée de vie feront l'objet d'un rapport annuel transmis à la Commission nationale d'évaluation, instituée par la loi du 30 décembre 1991 susvisée.

Art. 4. - La société Nersa respectera les prescriptions techniques énumérées ci-après:

1. Qualité de l'installation En application de l'arrêté du 10 août 1984 relatif à la qualité de la conception, de la construction et de l'exploitation des installations nucléaires de base, la société Nersa veillera à obtenir pour les structures, composants et systèmes importants pour la sûreté, à savoir les barrières protégeant les travailleurs et les personnes du public des effets des produits dangereux, notamment radioactifs, et les éléments nécessaires à l'efficacité à court et à long terme de ces barrières, une qualité en rapport avec les fonctions qu'ils assurent. Un système efficace permettant que soit définie la qualité à rechercher, que celle-ci soit obtenue, que ce résultat soit contrôlé et que soient rectifiées les erreurs éventuelles, sera mis en place. Ce système comprendra la mise en oeuvre d'un ensemble contrôlé d'actions planifiées et systématiques, fondé sur des procédures écrites et archivées. En particulier, la société Nersa procédera à la surveillance et au contrôle de l'action de ses fournisseurs sur les différents matériels, notamment du circuit primaire. Un dossier précisant, pour les différents matériels, les classes de sûreté et les niveaux de qualité adoptés ainsi que les règles, codes ou normes utilisés avec la justification de cette utilisation, sera tenu à jour et adressé à l'occasion de ses mises à jour à la direction de la sûreté des installations nucléaires.

2. Eléments combustibles Des essais et examens appropriés seront effectués, avant le chargement des éléments combustibles dans le réacteur, afin de justifier les options techniques prises et de déterminer les limites technologiques des éléments combustibles. En fonctionnement normal, une marge suffisante par rapport aux limites technologiques ainsi déterminées sera prévue; en outre, des examens périodiques d'éléments combustibles seront effectués, après irradiation dans le réacteur, afin de vérifier le comportement de ces éléments combustibles en service. Les éléments combustibles seront munis de systèmes mécaniques permettant de contrôler leur mise en place dans le réacteur et interdisant notamment une mise en place dans une zone insuffisamment refroidie. Les dispositifs d'alimentation en sodium primaire seront conçus de façon à réduire les risques de bouchage. Un dispositif permettra de détecter et de localiser les éléments combustibles présentant des défauts de gainage. Les règles générales d'exploitation prévues aux articles 5 et 6 du présent décret fixeront les conditions d'exploitation de ce dispositif afin d'éviter l'entraînement de particules de combustible solide dans le sodium primaire. En outre, seront soumis à autorisation, délivrée par les ministres chargés de l'environnement et de l'industrie dès lors que l'installation reste conforme aux prescriptions du présent décret: - toute modification de l'installation ou de son exploitation ayant un impact notable sur les principales caractéristiques neutroniques du coeur; - toute expérience d'incinération d'actinides mineurs. En tout état de cause, chaque expérience ne pourra porter que sur une quantité d'actinides mineurs inférieure à 20 kilogrammes; - tout fonctionnement du réacteur en sous-génération de plutonium. En tout état de cause, la capacité de sous-génération sera limitée à 25 kilogrammes de plutonium par terawattheure.

3. Enceinte intermédiaire: cuve principale, dalle et structures associées La cuve principale et les structures qui l'entourent seront conçues de façon à permettre l'inspection en service de cette cuve. Les structures internes, et notamment le sommier supportant les éléments combustibles, seront conçus, réalisés et surveillés afin que les phénomènes susceptibles de les affaiblir, en particulier les vibrations, n'aient pas pour effet de diminuer l'aptitude de ces structures à remplir les fonctions pour lesquelles elles sont prévues. La cuve principale et le système de remplissage qui lui est associé seront conçus de façon que toute vidange accidentelle soit impossible. Des dispositions seront prises pour que, en cas de fuite de sodium primaire, le refroidissement des éléments combustibles soit suffisant pour éviter un endommagement grave de leur intégrité. Nersa tiendra à jour et transmettra à la direction de la sûreté des installations nucléaires un dossier justifiant les dispositions prises ou prévues en application des trois derniers alinéas ci-dessus.

4. Enceinte primaire: cuve de sécurité et dôme Des dispositions seront prises pour permettre l'inspection en service de la cuve de sécurité. Par ailleurs, des moyens permettant, en tant que de besoin, les essais d'étanchéité des traversées de l'enceinte primaire seront prévus. Nersa tiendra à jour et transmettra à la direction de la sûreté des installations nucléaires un dossier sur ces deux points. L'enceinte intermédiaire et l'enceinte primaire seront conçues de façon à résister aux conséquences d'un accident qui libérerait brutalement une énergie mécanique de 800 mégajoules. L'enceinte intermédiaire ne sera pas la source de projectiles risquant d'endommager l'enceinte primaire; par ailleurs, les fuites de sodium seront limitées. L'enceinte primaire contiendra, avec une étanchéité suffisante, les effets secondaires éventuels d'un tel accident; en particulier, pour tenir compte d'un éventuel feu de sodium primaire sous forme pulvérisée, elle pourra supporter une surpression de trois bars. Nersa réexaminera périodiquement les dispositions prises pour respecter les exigences fixées à l'alinéa précédent et en informera la direction de la sûreté des installations nucléaires.

5. Surveillance des matériels et structures Des dispositions appropriées seront prises et périodiquement actualisées afin d'apprécier l'état des matériels et structures importants pour la sûreté et de détecter précocement leur éventuel vieillissement. Dans ce cadre, Nersa transmettra à la direction de la sûreté des installations nucléaires, tous les deux ans, un dossier spécifique au bloc réacteur et aux générateurs de vapeur.

6. Enceinte secondaire L'étanchéité de l'enceinte secondaire, constituée par le bâtiment du réacteur, sera telle que celle-ci puisse être maintenue en dépression en fonctionnement normal, sauf lors de certaines manutentions spéciales et en cas d'accident plausible survenant à l'intérieur de l'enceinte primaire ou dans la chaîne de manutention. Cette étanchéité fera l'objet de vérifications périodiques. En outre, l'enceinte secondaire conservera son intégrité en cas de surpression accidentelle résultant d'un feu de sodium et résistera également aux agressions envisagées au point 13 ci-dessous.

7. Refroidissement du coeur en fonctionnement normal et accidentel En marche normale, la chaleur produite par le coeur du réacteur sera évacuée vers le circuit secondaire des générateurs de vapeur par l'intermédiaire de boucles secondaires véhiculant du sodium. L'entraînement des pompes des circuits de refroidissement sera assuré par des systèmes appropriés et redondants permettant l'évacuation de la puissance du coeur dans tous les cas de fonctionnement normal, sans dépassement des limites admises pour les éléments combustibles et les structures internes. L'organisation générale des circuits de refroidissement sera telle qu'en cas d'arrêt des pompes des circuits de refroidissement et compte tenu de l'inertie propre de ces pompes et de leur alimentation, la convection naturelle du sodium assure un refroidissement suffisant. La teneur en impuretés du sodium des circuits primaire et secondaire sera en fonctionnement normal maintenue à une valeur suffisamment faible pour éviter la présence de particules pouvant entraîner le bouchage des tuyauteries essentielles pour le refroidissement du coeur et une corrosion incompatible avec le bon fonctionnement de l'installation. Par ailleurs, les fuites éventuelles de sodium primaire vers le sodium secondaire pourront être détectées et localisées. La radioactivité du sodium secondaire sera contrôlée périodiquement. Les générateurs de vapeur seront conçus et réalisés de façon à limiter les conséquences d'une éventuelle réaction du sodium avec l'eau en cas de fuite ou de rupture d'un tube; ils seront par ailleurs dotés de dispositifs de protection permettant de prévenir les dommages qui pourraient être causés par la propagation d'ondes de pression à l'ensemble du générateur de vapeur concerné ainsi qu'au circuit de sodium secondaire et à l'échangeur intermédiaire associés. Des dispositifs permettront, d'autre part, de détecter les fuites d'eau vers le sodium et des actions automatiques de sécurité seront, en tant que de besoin, prévues. Un dossier relatif aux risques de propagation de la rupture d'un tube de générateur de vapeur aux tubes voisins sera périodiquement actualisé et adressé à la direction de la sûreté des installations nucléaires. En cas de défaillance totale de l'ensemble des moyens normaux de refroidissement, une évacuation en secours de la puissance résiduelle sera assurée de façon à éviter un endommagement grave des éléments combustibles. Un dispositif approprié sera mis en place pour permettre, dans certains cas d'accidents plausibles entraînant une fusion de combustible, de recueillir la partie fondue du combustible.

8. Contrôle-commande et système de protection Le coeur et les circuits de refroidissement du réacteur seront conçus de façon à permettre un fonctionnement stable du réacteur et à assurer, en fonctionnement normal, une contre-réaction nucléaire intrinsèque en cas d'augmentation de réactivité ou de déséquilibre entre la production de chaleur et son évacuation. Le contrôle-commande comportera des systèmes de régulation permettant de maintenir le réacteur dans sa plage normale de fonctionnement, un système de protection pouvant agir en particulier sur des systèmes de sauvegarde permettant d'éviter ou de réduire les conséquences des incidents ou accidents pouvant affecter l'installation, et des systèmes d'arrêt du réacteur, comprenant deux systèmes d'arrêt principaux et un système d'arrêt complémentaire capable d'arrêter le réacteur même en cas de déformation importante de celui-ci; la présence du système d'arrêt complémentaire ne nuira pas à l'indépendance des systèmes d'arrêt principaux. La séparation entre les systèmes de régulation et de protection sera telle que le fonctionnement des mécanismes de protection ne soit pas perturbé dans l'éventualité d'une défaillance ou d'une mise hors service soit d'un composant unique, soit d'une chaîne du système de régulation ou de la partie commune aux systèmes de régulation et de protection. Le système de protection sera conçu avec une indépendance et une redondance suffisantes pour présenter une fiabilité et une possibilité d'essai en exploitation adaptées aux fonctions de sécurité à assurer. Les modalités de déplacement des barres de commande seront déterminées de telle sorte que leur manoeuvre accidentelle par suite d'erreur d'opérateur ou d'avarie d'automate ne provoque pas d'excursion de puissance non maîtrisée par les systèmes de protection et d'arrêt. Des dispositions de construction seront prises pour éviter l'éjection accidentelle d'une barre de commande hors du coeur; en tout état de cause, la réactivité qui pourrait résulter d'un tel accident sera limitée de manière à éviter un endommagement grave du combustible. La mesure du flux neutronique permettra de suivre la puissance du réacteur depuis le niveau résultant de la multiplication sous-critique, au niveau << sources >>, jusqu'au-delà de la puissance nominale, avec un recouvrement suffisant des gammes des chaînes de mesures. Les conditions de fonctionnement et l'état des éléments combustibles seront surveillés par des mesures de l'activité du sodium et des mesures individuelles de la température du sodium sortant de chaque élément combustible; les ruptures de gaines éventuelles pourront être localisées: les mesures et les dispositions associées seront telles qu'une variation importante des conditions de fonctionnement ou de l'état des gaines d'un élément combustible entraîne l'arrêt automatique du réacteur avec un temps de réponse suffisamment court pour éviter toute extension grave du défaut. Lorsque, compte tenu de la complexité du phénomène que l'on veut contrôler, des calculateurs seront utilisés pour l'élaboration de certaines actions de sécurité, ils répondront aux exigences précédemment indiquées pour le système de protection et auront exclusivement une fonction de sécurité; il sera par ailleurs tenu compte de leur indisponibilité éventuelle. Toutes les parties constitutives des systèmes de protection et d'arrêt pourront supporter des conditions physiques au moins aussi contraignantes que celles qui seraient engendrées par les circonstances accidentelles plausibles, sans qu'il puisse en résulter la paralysie des actions de sécurité nécessaires dans ces circonstances. Une salle de commande sera prévue d'où l'on pourra assurer le fonctionnement du réacteur sans risque dans les conditions normales et son maintien dans un état sûr en cas d'accident plausible; une protection appropriée contre l'irradiation et la contamination sera mise en place. Des équipements permettant d'amener, de maintenir et de surveiller l'installation en état d'arrêt sûr seront prévus à des emplacements extérieurs à la salle de commande. Ces équipements feront l'objet d'essais périodiques. En cas d'incident pouvant conduire à l'évacuation de la salle de commande, les moyens de conduite normaux resteront disponibles, sans modifications notables de leurs performances, pendant un laps de temps suffisant pour que puissent être réalisées les opérations nécessaires pour l'utilisation des équipements précités; un tel incident n'aura pas de conséquences sur l'efficacité et la fiabilité de ces équipements.

9. Puissance du réacteur La puissance thermique prévue est de l'ordre de 3 000 MW, ce qui correspond à une puissance électrique nette de l'ordre de 1 200 MWe. La puissance thermique de fonctionnement sera fixée par les ministres chargés de l'environnement et de l'industrie lors de l'approbation prévue à l'article 6.

10. Circuits de ventilation et de rejet Les dispositions ci-après seront prévues: - les circuits de ventilation des zones présentant des risques permanents de contamination seront munis de systèmes d'épuration appropriés. Là où des pièges à iode sont utilisés, leur efficacité fera l'objet de contrôles périodiques. Des dispositifs de préfiltration seront mis en place afin d'éviter le colmatage des filtres; - le circuit de rejet à la cheminée sera muni de filtres à poussières, ininflammables et à haute efficacité, et d'un dispositif de contrôle continu de l'activité des rejets; - les règles générales d'exploitation mentionnées aux articles 5 et 6 préciseront les modalités de surveillance des rejets. En particulier, des dispositions seront prises pour qu'en cas d'accident il soit possible de limiter l'extension de la contamination et de contrôler le rejet éventuel à l'extérieur. Les mesures à prendre figureront dans un plan d'urgence interne qui sera établi en même temps que le rapport provisoire de sûreté prévu à l'article 5.

11. Manutention et stockage des éléments combustibles Le stockage et toute manutention des éléments combustibles neufs ou irradiés seront réalisés de manière à exclure tout risque de criticité et à limiter les risques d'échauffement ou de chute pouvant endommager le combustible. Ils seront conçus et exploités de façon à limiter les conséquences des accidents plausibles ou des défectuosités des éléments combustibles. L'installation disposera notamment d'une capacité en gaz permettant la fonction de transfert des assemblages combustibles. Les règles générales d'exploitation prévues aux articles 5 et 6 préciseront les consignes de sécurité à établir et les procédures à respecter pour les opérations de stockage et de manutention du combustible. Toutes les opérations de chargement et déchargement pour renouvellement de la charge de combustible nucléaire ne pourront intervenir qu'avec l'approbation des ministres chargés de l'environnement et de l'industrie.

12. Protection contre les séismes La conception des ouvrages sera telle que, pour un séisme d'intensité VIII de l'échelle MSK, et avec un spectre de réponse de résonateurs adapté au site, le maintien des fonctions de sécurité du réacteur, dont l'arrêt sûr de la réaction en chaîne et le refroidissement à long terme, le confinement des substances radioactives, la protection sanitaire et la mesure des rayonnements ionisants, reste assuré.

13. Protection contre les agressions d'origine interne ou externe à l'installation Les dispositifs et circuits de sécurité, en particulier les systèmes de protection et de sauvegarde, les différentes enceintes, les locaux électriques, les structures de stockage du combustible et des effluents, seront protégés de façon suffisante, par des dispositions de construction et, éventuellement, par redondance, contre les agressions d'origine interne ou externe à l'installation, en particulier contre tous les effets dynamiques et les projectiles qui pourraient atteindre ces ouvrages, et notamment ceux qui pourraient résulter de défaillances d'équipements de l'installation. A cet égard, l'installation sera protégée par des dispositions de construction suffisantes contre les chutes d'aéronefs plausibles sur le site de la centrale. La société Nersa se tiendra informée des projets de modification de l'environnement industriel par rapport à la description du dossier joint à la demande d'autorisation de création susvisée, ayant ou pouvant avoir des conséquences sur l'application des dispositions du présent décret; elle devra alors présenter aux ministres chargés de l'environnement et de l'industrie un dossier précisant les conséquences de la modification envisagée, compte tenu des situations normales et accidentelles prévisibles.

14. Protection contre les incendies Des dispositions seront prises pour minimiser les risques et les conséquences des incendies, permettre leur détection, empêcher leur extension et assurer leur extinction. A cet égard, des matériaux non combustibles et résistants à la chaleur seront utilisés chaque fois que possible, en particulier à l'intérieur de l'enceinte secondaire et pour la salle de commande. Des dispositions seront prises pour limiter les risques d'enfumage de la salle de commande.

15. Dispositions relatives à l'utilisation du sodium comme fluide de refroidissement L'installation sera conçue de manière à : - limiter l'extension d'un feu de sodium aux équipements voisins et à prévenir toute atteinte à l'intégrité de l'enceinte primaire. A cette fin, un cloisonnement et des exutoires adaptés seront mis en place dans les locaux concernés et notamment dans les galeries secondaires; - détecter, avec une fiabilité suffisante, les fuites des circuits ou capacités véhiculant ou contenant du sodium. Les locaux abritant de tels circuits ou capacités seront dotés de détecteurs de feu adaptés. Les circuits véhiculant du sodium seront organisés de manière à ce qu'en cas de fuite celle-ci puisse être repérée et que le circuit concerné, ou la portion de circuit concernée, puisse être isolé et vidangé. Ils seront en outre protégés, si nécessaire, par des dispositions appropriées contre les risques d'endommagement par la chute d'objets ou par d'éventuels fouettements de tuyauteries. Les circuits de refroidissement utilisant de l'eau au voisinage de sodium seront, à l'exception des générateurs de vapeur, tels qu'au moins deux barrières étanches séparent l'eau du sodium. Les fuites d'eau de tels circuits pourront être détectées.

16. Auxiliaires Les diverses sources d'alimentation en énergie et en fluides seront de capacité, de redondance et en nombre suffisants pour assurer, à tout moment, l'alimentation des systèmes de protection et de sauvegarde, ainsi que des systèmes de régulation et des systèmes d'évacuation de la chaleur produite par l'installation. En particulier, en cas de perte ou d'indisponibilité d'une ou plusieurs sources électriques de secours, le fonctionnement de l'installation ne pourra pas être prolongé au-delà d'une durée qui sera fixée dans les règles générales d'exploitation prévues aux articles 5 et 6, compte tenu de la nature et du nombre de sources électriques défaillantes. Des dispositions seront prises ou prévues, notamment dans les règles générales d'exploitation prévues aux articles 5 et 6, pour permettre, dans toutes les circonstances plausibles, une alimentation suffisante de l'installation en eau de refroidissement.

17. Transport des produits radioactifs Tout transport sur le site de produits radioactifs, y compris les déchets radioactifs, sera effectué selon des modalités propres à assurer le respect de la réglementation relative à la protection des différentes catégories de travailleurs et des personnes du public.

18. Protection des travailleurs et du public contre l'exposition aux rayonnements ionisants Des zones réglementées seront délimitées à l'intérieur de l'installation conformément aux prescriptions du décret no 75-306 du 28 avril 1975 modifié. Des dispositions appropriées seront prises pour que, compte tenu des règles générales d'exploitation prévues aux articles 5 et 6 du présent décret et compte tenu des différents travaux prévisibles, notamment des opérations de maintenance et de manutention du combustible, les équivalents de dose reçus par les travailleurs et le public restent, dans les limites fixées par la réglementation en vigueur, aussi faibles que possible.

19. Effluents liquides et gazeux Toutes dispositions seront prises pour permettre le respect des modalités de rejets d'effluents liquides et gazeux, telles que fixées dans le cadre de la réglementation en vigueur. Elles auront notamment pour objet d'éviter la contamination de la nappe phréatique. Un contrôle périodique en sera effectué. Des mesures de surveillance appropriées seront prises pour ce qui concerne les risques de fuite des systèmes de traitement et de stockage des effluents. Le circuit des effluents liquides radioactifs sera indépendant; les canalisations correspondantes seront clairement identifiées et leur étanchéité fera l'objet de vérifications périodiques. Une station de traitement des effluents liquides radioactifs sera prévue ainsi qu'un réservoir de stockage tenu en réserve.

20. Déchets solides L'exploitant s'efforcera de réduire le volume et l'activité totale des déchets solides produits dans son installation. Afin de faciliter leur traitement, leur conditionnement et leur stockage ultérieur dans des centres agréés ou leur recyclage, les déchets résultant de l'exploitation de l'installation seront triés par nature et par catégorie de nuisance chimique ou radioactive. Aucun stockage définitif de substances radioactives n'aura lieu sur le site.

Art. 5. - Le rapport de sûreté, les règles générales d'exploitation et le plan d'urgence interne, en vigueur à la date de publication du présent décret, restent applicables. La société Nersa présentera de plus aux ministres chargés de l'environnement et de l'industrie (direction de la sûreté des installations nucléaires), au plus tard deux mois avant la première divergence, une actualisation du rapport provisoire de sûreté comportant en particulier tous les éléments permettant de s'assurer qu'ont été respectées les prescriptions d'ordre constructif fixées à l'article 4 et que, compte tenu des règles générales d'exploitation que la société Nersa compte suivre pour les opérations de montée en puissance et de mise en service, ces opérations pourront être effectuées dans des conditions de sûreté satisfaisantes. Ces règles générales d'exploitation ainsi que le plan d'urgence interne seront joints au rapport provisoire de sûreté. La première divergence ne pourra intervenir qu'après que les ministres chargés de l'environnement et de l'industrie auront donné leur approbation au programme de démarrage, au rapport provisoire de sûreté, aux règles générales d'exploitation et au plan d'urgence interne et qu'auront été apportées, à leur demande, les modifications à l'installation et à ces documents qu'ils auront jugées nécessaires pour assurer la conformité de l'installation aux prescriptions du présent décret et pour que l'exploitation en soit effectuée dans des conditions satisfaisantes de sûreté. L'installation sera considérée comme mise en exploitation, au sens de l'article 17 de la loi du 27 décembre 1975 susvisée, deux mois après l'approbation prévue à l'alinéa ci-dessus.

Art. 6. - Dans un délai qui sera fixé par les ministres chargés de l'environnement et de l'industrie (direction de la sûreté des installations nucléaires), lors de l'approbation prévue à l'article 5 et au plus tard dix mois avant l'expiration du délai fixé à l'article 13 du présent décret, la société Nersa présentera aux ministres chargés de l'environnement et de l'industrie un rapport définitif de sûreté qui comportera, outre les éléments contenus dans le rapport provisoire de sûreté, mis à jour compte tenu soit des modifications demandées par les ministres chargés de l'environnement et de l'industrie lors de l'approbation prévue à l'article 5, soit des modifications postérieures à cette approbation proposées à la suite des essais, toutes précisions sur: - les essais et épreuves effectués; - les conditions réelles de démarrage et les essais de montée en puissance; - les enseignements tirés des essais. Ce rapport sera accompagné des mises à jour des règles générales d'exploitation que la société Nersa entend suivre pour l'exploitation et du plan d'urgence interne. L'installation ne pourra être considérée comme mise en service, au sens du décret du 11 décembre 1963 modifié susvisé, qu'après que les ministres chargés de l'environnement et de l'industrie auront donné leur approbation au rapport définitif de sûreté, aux règles générales d'exploitation et au plan d'urgence interne précités et qu'auront été apportées, à leur demande, les modifications aux installations et à ces documents qu'ils auront jugées nécessaires pour assurer la conformité de l'installation aux prescriptions du présent décret et pour que l'exploitation de celle-ci puisse s'effectuer dans des conditions satisfaisantes de sûreté.

Art. 7. - Sans préjudice du respect des réglementations en vigueur, la société Nersa se conformera aux dispositions suivantes: 1o L'installation sera exploitée de façon que son fonctionnement ne soit pas à l'origine de bruits ou vibrations pouvant constituer une gêne pour la tranquillité du voisinage. 2o La société Nersa procédera aux mesures nécessaires pour permettre le contrôle des rejets dans le Rhône de l'installation, de leurs effets sur l'environnement ainsi que du bruit émis par l'installation. Les résultats de ces mesures seront archivés.

Art. 8. - L'installation faisant l'objet du présent décret sera désignée par le ministre chargé de l'industrie comme installation d'importance vitale, en application de l'article 1er de l'ordonnance du 29 décembre 1958 susvisée. Dans les conditions prévues par cette ordonnance, l'exploitant coopérera aux mesures nécessaires pour assurer la protection de l'installation contre toute tentative de sabotage ainsi que contre toute tentative de détournement de matières fissiles ou radioactives, conformément aux directives qui lui seront données par le ministre chargé de l'industrie. Les mesures correspondantes seront intégrées dans le plan particulier de protection soumis à l'approbation du préfet de l'Isère, en application de l'article 3 de l'ordonnance du 29 décembre 1958 susvisée. Le contrôle de ces mesures sera assuré tant par le préfet de l'Isère, dans le cadre de l'ordonnance précitée, que par les inspecteurs des installations nucléaires de base, dans les conditions fixées par l'article 11 du décret du 11 décembre 1963 modifié susvisé. Par ailleurs, l'exploitant précisera les dispositions qu'il compte prendre pour minimiser les conséquences d'un acte de sabotage. Ces dispositions devront faire l'objet d'une approbation du ministre chargé de l'industrie.

Art. 9. - Le transport du combustible neuf et du combustible irradié pourra être effectué par route, sur un trajet aussi réduit que possible.

Art. 10. - Sans préjudice de l'application des règlements en vigueur, tout accident ou incident, nucléaire ou non, ayant eu ou risquant d'avoir des conséquences notables sur la sûreté de l'installation visée par le présent décret, sera déclaré sans délai par l'exploitant aux ministres chargés de l'environnement et de l'industrie et au ministre chargé de la santé.

Art. 11. - A partir de sa mise en service, l'installation restera conforme à la description donnée dans le rapport définitif de sûreté approuvé et sera exploitée suivant les règles générales d'exploitation elles-mêmes approuvées. Sauf dans les cas où les modifications de l'installation envisagées par la société Nersa doivent, en application de l'article 6 du décret du 11 décembre 1963 modifié susvisé, faire l'objet d'une nouvelle autorisation, toutes autres modifications de l'installation ou des règles générales d'exploitation seront subordonnées à l'approbation, par les ministres chargés de l'industrie et de l'environnement, d'une proposition détaillée que l'exploitant devra soumettre auxdits ministres. Lorsque la société Nersa prévoira, pour quelque cause que ce soit, la mise à l'arrêt définitif de l'installation, elle devra présenter préalablement au directeur de la sûreté des installations nucléaires les documents prévus à l'article 6 ter du décret du 11 décembre 1963 modifié susvisé.

Art. 12. - Le ministre chargé de l'industrie et le ministre chargé de l'environnement notifieront à l'exploitant les prescriptions techniques relatives aux installations entrant dans le champ d'application de la loi du 19 juillet 1976 susvisée situées dans le périmètre fixé sur le plan annexé au présent décret et comprises dans la demande d'autorisation de création du 27 octobre 1992 susvisée. De plus, la société Nersa avisera les ministres chargés de l'environnement et de l'industrie de tout nouveau projet de création d'une installation entrant dans le champ d'application de la loi du 19 juillet 1976 susvisée et implantée dans le périmètre délimité sur le plan annexé au présent décret. Les ministres précités notifieront à l'exploitant les prescriptions techniques auxquelles il doit se conformer. Ces prescriptions feront l'objet d'une ampliation au ministre chargé de la santé et au préfet du département de l'Isère.

Art. 13. - Le délai prévu au III de l'article 4 du décret du 11 décembre 1963 modifié susvisé est de cinq ans à compter de la publication du présent décret.

Art. 14. - Le ministre de l'industrie, des postes et télécommunications et du commerce extérieur, le ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche et le ministre de l'environnement sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française.

Fait à Paris, le 11 juillet 1994.


EDOUARD BALLADUR Par le Premier ministre: Le ministre de l'industrie, des postes et télécommunications et du commerce extérieur, GERARD LONGUET Le ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, FRANCOIS FILLON Le ministre de l'environnement, MICHEL BARNIER
(1) Le plan annexé au présent décret peut être consulté: A la direction de la sûreté des installations nucléaires, 99, rue de Grenelle, Paris (7e); A la direction du gaz, de l'électricité et du charbon, 99, rue de Grenelle, Paris (7e); A la direction régionale de l'industrie, de la recherche et de l'environnement, 146, rue Pierre-Corneille, Lyon (Rhône); A la préfecture de l'Isère, place de Verdun, Grenoble (Isère).