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Législation communautaire en vigueur

Structure analytique

Document 301D0156

Chapitres du répertoire où le document peut être trouvé:
[ 08.60 - Aides accordées par les États et autres subventions ]


301D0156
2001/156/CE: Décision de la Commission du 19 juillet 2000 relative à une aide d'État mise à exécution par l'Espagne en faveur du secteur du transport maritime (nouveau contrat de services publics maritimes) (Texte présentant de l'intérêt pour l'EEE) [notifiée sous le numéro C(2000) 2447]
Journal officiel n° L 057 du 27/02/2001 p. 0032 - 0050



Texte:


Décision de la Commission
du 19 juillet 2000
relative à une aide d'État mise à exécution par l'Espagne en faveur du secteur du transport maritime (nouveau contrat de services publics maritimes)
[notifiée sous le numéro C(2000) 2447]
(Le texte en langue espagnole est le seul faisant foi.)
(Texte présentant de l'intérêt pour l'EEE)
(2001/156/CE)

LA COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,
vu le traité instituant la Communauté européenne, et notamment son article 88, paragraphe 2, premier alinéa,
vu l'accord sur l'Espace économique européen, et en particulier son article 62, paragraphe 1, point a),
après avoir invité les intéressés à présenter leurs observations conformément aux articles précités(1), et compte tenu de ces observations,
considérant ce qui suit:
I. PROCÉDURE
(1) Dans une plainte reçue le 8 janvier 1998, la Commission a été informée que l'Espagne avait lancé un appel d'offres pour la fourniture de services maritimes impliquant des obligations de service public (ci-après dénommées "OSP") entre l'Espagne continentale et ses îles. Par sa lettre du 26 janvier 1998, la Commission a exprimé sa préoccupation aux autorités espagnoles au sujet du contrat et de la manière dont il avait été adjugé.
(2) Par lettre du 5 mars 1998, la Commission a informé l'Espagne de sa décision d'engager la procédure prévue à l'article 88, paragraphe 2, du traité contre le contrat précité conclu entre l'Espagne et la Compañía Trasmediterránea (ci-après dénommée "Trasmed") le 20 janvier 1998. La Commission a accordé aux autorités espagnoles un mois pour répondre aux observations formulées sur les aspects fondamentaux en question et leur a demandé à cette occasion de confirmer la suspension de l'aide d'État dans un délai de dix jours ouvrables à compter de la date de notification de la lettre.
(3) La décision de la Commission d'engager la procédure a été publiée au Journal officiel des Communautés européennes(2). La Commission a invité les parties intéressées à présenter leurs observations sur le contrat.
(4) La Commission a reçu à ce sujet les observations des intéressés. Elle les a transmises à l'Espagne en lui donnant la possibilité de les commenter et a reçu ses commentaires par lettres des 18 mars, 7 avril et 23 juillet 1998. Diverses réunions se sont également tenues, dont celle du 3 juin 1999.
II. DESCRIPTION DÉTAILLÉE DE L'AIDE
LE DÉCRET
(5) Par lettre du 30 juillet 1997, les autorités espagnoles ont notifié à la Commission, conformément à leur obligation découlant de l'article 9 du règlement (CEE) no 3577/92 du Conseil(3), leur intention de modifier le régime appliqué au cabotage maritime en Espagne. Les autorités espagnoles ont été informées que les services de la Commission avaient relevé plusieurs problèmes, tant en ce qui concerne le concept de base du projet de décret portant modification du régime que sa rédaction. Les autorités espagnoles ont amendé une partie des articles, mais, continuant dans ce sens, ont approuvé le Real Decreto 1466/1997(4) le 19 septembre 1997 sans reconsulter les services de la Commission. Devant ce qui fut considéré comme un non-respect de leurs obligations, une lettre a été envoyée aux autorités espagnoles le 22 octobre 1997, à laquelle elles ont répondu le 9 décembre suivant. Une lettre de mise en demeure leur a été envoyée le 20 avril 1998 et les réponses correspondantes ont été reçues par lettres des 27 mai et 8 juillet 1998.
(6) Le décret envisage un régime d'autorisation des lignes maritimes régulières de cabotage entre la péninsule Ibérique et les territoires non péninsulaires ainsi qu'entre ces derniers; la prestation de ces services requiert une autorisation préalable dont la validité est conditionnée au respect des OSP [selon l'article 4 du règlement (CEE) no 3577/92] que l'administration maritime espagnole peut imposer à volonté au transporteur. Le décret prévoit également que, au cas où le régime d'autorisation ne garantirait pas un niveau suffisant de service sur les lignes régulières de cabotage précitées, les autorités espagnoles pourront conclure les contrats nécessaires de service public en laissant ces lignes disponibles à d'autres opérateurs intéressés.
LE CONTRAT
(7) Par leur lettre du 2 octobre 1997, les autorités espagnoles ont fourni aux services de la Commission une copie des conditions administratives et du cahier des charges qu'elles se proposaient d'appliquer dans l'adjudication d'un contrat de prestation de services d'OSP sur neuf lignes avec les territoires non péninsulaires. Le contrat d'OSP de vingt ans alors en vigueur avec Trasmed arrivait à échéance le 31 décembre 1997(5).
(8) Une série de réunions se sont tenues, les 10, 15 et 16 octobre 1997, pour discuter des problèmes tant du décret modifié que du nouveau contrat d'OSP. En raison d'un désaccord sur la compatibilité du Real Decreto avec le nouveau contrat d'OSP, les services de la Commission ont envoyé une série de questions aux autorités espagnoles et plusieurs réunions ont eu lieu pour discuter et clarifier plus en détail ces questions.
(9) Par sa lettre du 27 novembre 1997 adressée au ministre espagnol des travaux publics, la Commission a déclaré que, si les autorités espagnoles ne pouvaient utiliser la procédure des contrats d'OSP conformément aux dispositions des orientations communautaires sur les aides d'État au transport maritime(6), elles étaient obligées, dans ce cas, de notifier tout nouveau contrat d'OSP comme aide d'État. Les autorités espagnoles n'ont pas tenu compte de cette observation.
(10) Les caractéristiques principales du contrat conclu sont les suivantes:
- le contrat porte sur la prestation de services de transport maritime réguliers de passagers et de véhicules sous le régime de bagage sur dix itinéraires (neuf compensés et un non compensé) entre Barcelone/Valence et les Baléares, Cadix et les îles Canaries, Almería/Málaga et Melilla, et Algésiras et Ceuta (ce dernier n'étant pas compensé),
- le budget de compensation prévu est de 6600 millions de pesetas espagnoles pour une période de six ans prenant cours en 1998,
- le contrat constitue un paquet: toutes les lignes seront adjugées à une seule compagnie. Toutefois, cela n'implique pas l'exclusivité sur les itinéraires, lesquels restent ouverts à d'autres opérateurs. Ces derniers doivent, pour être autorisés, remplir une série de conditions. Ces conditions sont la prestation de services réguliers d'intérêt public,
- le contrat aura une durée de 6 + 2 + 2 (10) ans, la seconde prorogation étant soumise à la consultation et à l'aval préalables de la Commission.
(11) L'invitation à soumissionner a été publiée au Boletín Oficial del Estado (BOE) du 17 décembre 1997 et, sous une forme résumée, dans la publication Lloyd's List du 23 décembre 1997. La date limite de présentation des offres était fixée au 31 décembre 1997. Le 8 janvier 1998, la Commission a reçu une plainte d'une société qui s'estimait lésée pour n'avoir pas eu assez de temps pour préparer son offre.
(12) Comme, de l'avis de l'administration espagnole, le contrat respectait les orientations sur les aides d'État au transport maritime, il n'a pas été notifié comme aide d'État conformément à l'article 88, paragraphe 3, du traité.
(13) Au moment d'engager la procédure et se basant sur l'information dont elle disposait, la Commission a émis des doutes fondés quant à la compatibilité de la mesure avec le marché commun tant en ce qui concerne le fond du contrat que la manière dont il a été adjugé. La Commission éprouvait des inquiétudes quant aux aspects suivants:
1) publicité et absence d'appel d'offres approprié: vu le volume, la durée et l'importance du contrat, la publicité faite à l'appel d'offres et le délai accordé aux soumissionnaires pour présenter leur offre étaient insuffisants;
2) les conditions applicables à d'autres fournisseurs de services opérant sur les mêmes lignes en parallèle et en concurrence avec le fournisseur d'OSP compensées n'ont pas été établies convenablement et à l'avance;
3) ligne Algésiras-Ceuta: plusieurs transporteurs privés opérant commercialement couvrent actuellement cet itinéraire. Le contrat se réserve le droit d'accorder, à l'avenir, une aide de l'État à l'adjudicataire du contrat d'OSP en cas d'instabilité dans le service de cette ligne. En effet, il n'y aurait aucune invitation réelle à soumissionner pour ce service et, par conséquent, aucune méthode adéquate pour déterminer le niveau de compensation financière de l'État adéquat pour les éventuelles OSP;
4) durée: la durée du contrat serait de six ans, avec possibilité de deux prorogations de deux ans chacune. La première prorogation de deux ans aurait lieu si, sur au moins cinq des dix lignes couvertes par le contrat, aucune prestation de services commercialement parallèle n'était apparue. La seconde prorogation aurait lieu après notification à la Commission. La période entre les invitations à soumissionner (la durée effective minimale du contrat) serait de six à dix ans, ce qui, de l'avis de la Commission, est trop long et compliquerait inutilement le développement du marché. D'autre part, des inquiétudes ont été émises quant à la présentation du contrat sous forme de paquet ou de globalisation, car cela voudrait dire que seules les compagnies les plus grandes ou un groupement de compagnies pourraient soumissionner.
(14) Dans sa rédaction actuelle, le contrat neutralise de fait l'application du droit à la libre prestation de services de cabotage entre les îles espagnoles à partir du 1er janvier 1999 comme le prévoit le règlement (CEE) no 3577/92, tant en ce qui concerne la durée du contrat que la mise en paquet de tous les itinéraires.
III. OBSERVATIONS DES INTÉRESSÉS
COMPAÑÍA TRASMEDITERRÁNEA
(15) Dans son argumentation présentée à la Commission le 11 juin 1998, Trasmed a réfuté l'existence d'effets sur le commerce entre les États membres vu que le marché du transport maritime de passagers, des transbordeurs et du cabotage insulaire en Espagne n'avait pas encore été libéralisé. L'article 6 du règlement (CEE) no 3577/92 exempte l'Espagne (entre autres États membres) de l'obligation de libéraliser le cabotage maritime jusqu'au début de 1999, ce qui signifie qu'il n'existe aucune concurrence entre les entreprises de transport maritime espagnoles et les armateurs établis dans d'autres États membres dont les navires sont immatriculés dans d'autres États membres sur le marché en question. En conséquence, le commerce entre les États membres ne se trouve en rien affecté. Et de citer la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes selon laquelle les subventions accordées aux entreprises produisant des biens ou des services dans un secteur où ne se pratique aucun commerce intracommunautaire n'entrent pas dans le champ d'application de l'article 87 du traité (arrêt du 21 janvier 1976 dans l'affaire C-40/75, Produits Bertrand SA contre Commission, et arrêt du 3 février 1977, dans l'affaire C-52/76, Benedetti contre Munari)(7).
(16) Elle a, en outre, affirmé que les mesures prises par l'Espagne coïncidaient parfaitement avec les orientations sur les aides d'État au transport maritime. Quant à la durée du contrat, ces orientations invoquent le principe général du caractère raisonnable et fixent un délai indicatif, ce qui accorde une certaine marge d'appréciation aux États membres.
(17) Au sujet des prolongations de durée du contrat, la première prorogation était subordonnée à la réalisation de certaines conditions comme l'absence d'offre commercialement parallèle sur cinq des lignes couvertes par le contrat. La possibilité d'une seconde prolongation est aléatoire et exceptionnelle, ne peut s'appliquer que pour des raisons d'intérêt public et doit être notifiée à la Commission, qui peut s'y opposer.
(18) Quant à la publicité et à l'invitation à soumissionner, Trasmed a indiqué que, à son avis, ni les orientations ni le règlement (CEE) no 3577/92 (cabotage maritime) n'imposent de conditions applicables à la publicité et au contenu des appels d'offres publiés par les États membres. En conséquence, elle pense qu'il appartient aux États membres de déterminer les conditions de cette publicité.
(19) Elle a signalé que les exigences de publicité établies par la législation espagnole reflétaient convenablement les règles communautaires et a rappelé que le délai de treize jours prévu dans la législation espagnole pour les procédures d'urgence n'est ni aussi court ni aussi discriminatoire que semble l'affirmer la Commission. En effet, bien qu'il n'apparaisse pas comme applicable au cas présent, il n'est pas inutile de se reporter à l'article 20 de la directive 92/50/CE du Conseil du 18 juin 1992 portant coordination des procédures de passation des marchés publics de services(8), modifiée en dernier lieu par la directive 97/52/CE du Parlement européen et du Conseil(9). Pour Trasmed, le paiement en question n'est pas une aide d'État aux fins de l'article 87, paragraphe 1, du traité, mais des OSP que l'Espagne est obligée de compenser.
(20) En ce qui concerne l'application de l'article 86, paragraphe 2, du traité, Trasmed a réitéré sa volonté de fournir à la Commission l'information relative au coût sous-jacent à la fourniture de ces services publics sur chacune des lignes maritimes du contrat, ce qui donnera la preuve à la Commission que la compensation accordée par l'Espagne ne dépasse pas ce surcoût. Elle rappelle que la Cour de justice a établi, dans son arrêt du 19 mars 1991 dans l'affaire C-202/88, France contre Commission(10), que deux conditions doivent être remplies pour que puisse s'appliquer l'exception visée à l'article 86, paragraphe 2: a) que l'application des règles de la concurrence ne fasse pas échec à l'accomplissement de sa mission et b) que le commerce entre les États membres ne soit pas affecté d'une quelconque manière contraire à l'intérêt communautaire.
(21) Dans le cas présent, elle considère que la compensation payée par l'État en vertu du contrat est destinée à la fourniture de ces services nécessaires et que l'application des règles de concurrence empêcherait cette fourniture puisque, comme Trasmed n'opère pas dans des secteurs ouverts à la concurrence communautaire(11), elle n'affecte pas le commerce entre les États membres.
(22) Dans sa décision d'engager la procédure, la Commission a demandé aux autorités espagnoles de confirmer qu'elles suspendaient le paiement de la compensation. Trasmed signale que la suspension totale et automatique du paiement de cette compensation constituerait une menace sérieuse sur la continuité du service.
ANAVE (ASOCIACIÓN DE NAVIEROS ESPAÑOLES)
(23) L'ANAVE (Association des armateurs espagnols) signale que l'article 6, paragraphe 1, du règlement (CEE) no 3577/92 implique que le règlement n'est pas applicable au contrat en question. Elle ajoute que la durée de cinq ans d'un contrat d'OSP est purement indicative: le texte dit, en réalité, que "la durée des contrats de service public doit être limitée à une période [...] normalement de l'ordre de cinq années...", de sorte qu'une durée de six ans paraît entièrement raisonnable et cohérente avec les orientations.
(24) L'ANAVE se plaint que la Commission n'ait fait aucune distinction entre la partie de la compensation qui pourrait être qualifiée d'aide d'État et celle relative à la prestation d'un service public, et qu'elle n'ait pas évalué les deux composantes. À défaut de cette compensation, Trasmed serait confrontée à des problèmes économiques tels qu'elle ne pourrait pas fournir le service en respectant les indispensables normes de continuité, de régularité et de qualité.
(25) Elle informe également que les mêmes entreprises qui se sont plaintes à la Commission de ce contrat sont allées au Comité des lignes régulières de l'ANAVE (formé par vingt et une compagnies de transport maritime dont beaucoup sont concurrentes de Trasmed pour le transport de passagers et de frets) et ont évoqué la possibilité que l'association attaque ce contrat devant les tribunaux espagnols. Le Comité a étudié l'affaire en détail et, ne trouvant aucune raison justifiant un tel recours, a donc rejeté la proposition.
FRED OLSEN SA
(26) Fred Olsen SA est un transporteur maritime espagnol concurrent de Trasmed sur les itinéraires reliant les îles Canaries (bien que sur aucune des lignes faisant l'objet du contrat en question). De l'avis de Fred Olsen SA, la façon la meilleure et la plus efficace pour l'Espagne de verser l'aide d'État à des liaisons de transport maritime serait de subventionner les prix des billets indépendamment du transporteur utilisé, car cela éviterait la distorsion des prix entre ceux-ci. Fred Olsen SA a intenté une action en justice contre l'Espagne devant les tribunaux espagnols au sujet du contrat en question.
ASEMAR (ASOCIACIÓN DE EMPRESAS MARÍTIMAS)
(27) L'Asemar est une association d'entreprises commerciales privées espagnoles comprenant des armateurs, des exploitants de remorqueurs et autres fournisseurs de services maritimes.
(28) Au sujet de la publicité, des délais et de la présentation correcte de l'invitation à soumissionner, elle signale que treize jours de calendrier coïncidant avec la période des vacances de Noël sont très insuffisants, comme le montre le fait que, hormis l'opérateur préexistant, aucun autre n'a présenté son offre à temps. De plus, cette procédure d'appel d'offres n'a fait l'objet de presque aucune publicité. La seule chose publiée a été un bref résumé dans la Lloyd's List du 23 décembre 1997.
(29) L'Asemar considère que les autorités espagnoles auraient dû prévoir un délai minimal raisonnable et, en tout cas, non inférieur à un mois, pour que les soumissionnaires établissent et présentent leurs offres, surtout que le contrat en question couvre dix lignes de navigation. De plus, elle indique que l'appel d'offres (publié au Boletín Oficial del Estado et en résumé dans la Lloyd's List le 23 décembre 1997) ne contenait aucune information contractuelle, mais une simple référence au cahier des charges du contrat, qu'il fallait en outre se procurer auprès de la direction générale de la marine marchande.
(30) L'Asemar est d'avis qu'il aurait fallu publier trois appels d'offres distincts pour les services existants, à savoir Péninsule/Baléares, Péninsule/Canaries et Péninsule/Afrique du Nord, ce qui aurait rendu possible la formation de groupements pour présenter des offres. Un ou plusieurs contrats, pris séparément, auraient alors pu être adjugés au groupement qui aurait présenté la meilleure offre, ce qui aurait stimulé la concurrence et offert une plus grande capacité de choix aux consommateurs.
(31) À son avis, la durée du contrat mentionné, à savoir six mois plus une prorogation de deux ans et une autre, exceptionnelle, de deux ans, est inacceptable au regard des orientations sur les aides au transport maritime en vigueur et est lourde de conséquences sur la libre concurrence sur le marché du cabotage correspondant, qui doit être libéralisé complètement le 1er janvier 1999.
(32) Elle fait valoir, en outre, que la direction générale de la marine marchande, dans l'exercice de sa responsabilité de régulation du processus d'appel d'offres, a manqué de l'objectivité et de l'indépendance nécessaires, qui sont la condition essentielle d'une concurrence loyale. La direction générale participe directement à la gestion de Trasmed.
(33) Asemar indique que, comme l'article 86, paragraphe 2, établit une exception à l'application des règles de concurrence, il doit être interprété de manière restrictive. Pour Asemar, l'Espagne n'a jamais prouvé de manière concluante que les services en question ne pouvaient pas être fournis commercialement sans compensation.
(34) Asemar déclare avoir attaqué les autorités espagnoles devant les tribunaux sur le contrat en question dans la présente affaire car elle estimait que l'appel d'offres et la procédure d'attribution du marché violaient la législation espagnole.
FLEBASA
(35) Flebasa, un fournisseur de services de transport maritime sur le marché espagnol, signale à propos du "marché géographique" des lignes maritimes régulières de cabotage en Espagne que ce marché se compose de trois marchés géographiques de référence qui comprennent le cabotage entre: a) la Péninsule et les Baléares, b) le détroit et l'Afrique du Nord et c) la Péninsule et les Canaries. Flebasa considère, de ce fait, comme illogique d'affirmer que l'appel d'offres constitue un seul paquet et d'accorder toutes les lignes à une seule entreprise. Elle est donc d'avis que l'appel d'offres public devrait au moins être divisé en lots individuels pour chacun des marchés géographiques de référence indiqués, comme cela semble approprié en tenant compte de la possibilité d'utiliser d'autres moyens de transport. Les consommateurs ont le choix entre le transport maritime et le transport aérien dans la plupart des cas sur les marchés des Baléares et des îles Canaries. Cette option n'existe pas dans le cas de l'Afrique du Nord, où on ne peut recourir qu'au transport maritime.
(36) Flebasa affirme également que l'organisme réglementaire espagnol (la direction générale de la marine marchande) manquait de l'indépendance nécessaire dans un système de concurrence loyal.
(37) À son avis, des conditions applicables à d'autres opérateurs économiques doivent être objectives et non discriminatoires, et les critères qu'utiliseront les autorités maritimes espagnoles pour autoriser d'autres entreprises désireuses d'exploiter des lignes parallèlement à celles exploitées par l'adjudicataire ne sont pas clairs. Avant de s'insérer sur le marché, les opérateurs économiques des secteurs "non réservés" doivent savoir ce qu'impliqueront leurs tâches et leurs obligations, et celles-ci doivent être transparentes, objectives et non discriminatoires, ce qui, pour l'instant, n'est pas le cas puisque les autorités peuvent imposer des conditions à leur guise.
(38) Flebasa apporte d'autres indications sur l'existence de trois marchés géographiques de référence dans le secteur du cabotage maritime régulier en Espagne, comme cela ressort également du rapport d'entreprise de Trasmed où figurent les resultats économiques relatifs aux trois chapitres intitulés "Baléares", "Détroit" et "Canaries".
IV. COMMENTAIRES DE l'ESPAGNE
(39) Au sujet de la demande de la Commission de suspendre tous les versements d'aides d'État au titre du contrat, les autorités espagnoles informent que c'est chose impossible pour des raisons pratiques ou juridiques. Selon elles, les sommes dues à Trasmed en vertu de ce contrat sont des compensations pour la prestation d'un service public et ne sont pas constitutives d'une aide d'État; quand bien même elles le seraient, la Commission ne s'est en aucune manière prononcée sur la partie du versement qui constituait l'aide en question. De plus, si l'État voulait suspendre les versements en vertu du contrat, Trasmed serait en droit de suspendre les services correspondant à celui-ci, lesquels sont des services essentiels de transport vers des territoires périphériques non péninsulaires et que l'État est obligé de garantir conformément à la législation.
(40) Les autorités espagnoles font référence à une série de réunions et à un échange de lettres qui ont eu lieu entre les services de la Commission et le ministère espagnol des travaux publics ainsi qu'à l'argument selon lequel les autorités espagnoles ont toujours essayé de coopérer dans cette affaire.
(41) Selon les autorités espagnoles, comme les orientations communautaires sur les aides d'État au transport maritime ne fixent pas de normes précises sur la publication des contrats de services publics, mais se contentent de déclarer que "les appels d'offres doivent faire l'objet d'une publicité adéquate", et compte tenu que l'adjudication a été faite conformément aux règles des articles 72 et 79 de la loi 13/1995 du 18 mai sur les contrats de l'administration publique(12) [une loi qui intègre précisément les directives du Conseil sur les contrats publics 92/50/CEE(13), 93/36/CEE(14) et 93/37/CEE(15) et dont les dernières modifications sont incluses dans la directive 97/52/CE], les délais légaux exigés tant par la législation communautaire que par la législation nationale ont été respectés dans le cas présent.
(42) Il a fallu recourir à la procédure d'urgence prévue dans la législation espagnole vu que le contrat antérieur était arrivé à expiration et que les autorités espagnoles désiraient éviter une interruption des services qui aurait eu des conséquences extrêmement graves.
(43) Au sujet de l'itinéraire Algésiras-Ceuta, les autorités espagnoles croient que la Commission n'a pas compris le véritable objet de cette mesure à caractère préventif qui vise à fournir un niveau minimal de services sur cet itinéraire. Elle a son origine dans le fait qu'un des trois opérateurs privés qui couvrent actuellement l'itinéraire a connu récemment des difficultés techniques et qu'un autre a eu des problèmes financiers. Cette clause est, selon les autorités espagnoles, une possibilité éventuelle, mais pas une situation concrète et réelle.
(44) Après d'autres contacts avec les services de la Commission, les autorités espagnoles se sont engagées à retirer cette ligne de celles couvertes par le contrat et, au cas où un service compensé sur cet itinéraire s'avérerait nécessaire à un moment donné dans l'avenir, il ne serait réalisé qu'après un appel d'offres public totalement ouvert et conforme à la procédure établie dans les orientations sur les aides d'État.
(45) Au sujet des conditions applicables aux autres opérateurs dans le contexte du Real Decreto 1466/1997, les autorités espagnoles ont confirmé, dans leur lettre du 7 avril 1998, que ces conditions seraient moins rigoureuses que pour les lignes couvertes par ce contrat. Une série de réunions se sont tenues avec les autorités espagnoles pour résoudre les problèmes en suspens relatifs au décret. Après avoir envoyé en décembre 1998 une promesse écrite de modifier le Real Decreto précité en tenant compte des objections de la Commission, les autorités espagnoles ont présenté un projet de décret revu qui est actuellement à l'examen dans le cadre de la procédure d'infraction correspondante.
(46) En ce qui concerne la durée du contrat et comme les orientations sur les aides d'État disposent que la durée du contrat doit être limitée à une période raisonnable "normalement de l'ordre de cinq années", les autorités espagnoles pensent qu'il peut y avoir des raisons qui justifient le besoin d'imposer une durée plus longue. Toutefois, au terme des conversations qu'elles ont eues avec les services de la Commission, elles ont promis de limiter la durée du contrat à quarante-deux mois, ce qui étend sa durée de validité jusqu'au 26 juillet 2001.
(47) Quant à la formation d'un paquet ou à la globalisation du contrat, les autorités espagnoles indiquent que le choix d'itinéraires dans le contrat respecte les règles établies dans le règlement (CEE) no 3577/92. Une fois ces itinéraires choisis, une étude exhaustive a été lancée dans le but de déterminer le niveau de prestation et les fréquences des services à garantir pour satisfaire la demande prévue. Une analyse économique des trois alternatives viables au contrat a alors été réalisée avec les options suivantes: a) contrats séparés par itinéraires, b) contrats de zone maritime, c'est-à-dire trois contrats séparés pour le transport vers les Baléares, les Canaries, Ceuta et Melilla, respectivement, et c) le contrat de paquet global. Une fois examinées les différentes options, on est parvenu à la conclusion qu'un seul contrat serait moins onéreux pour les ressources de l'État.
(48) Les autorités espagnoles sont en désaccord avec ce qu'elles considèrent comme le flou de l'accusation d'aide d'État formulée par la Commission puisque celle-ci ne précise pas quelle partie de la somme payée à Trasmed peut être interprétée comme une aide d'État. Elles n'acceptent pas non plus l'affirmation selon laquelle les paiements effectués à Trasmed pourraient placer l'entreprise dans une position avantageuse par rapport à d'autres. Selon elles, le contenu du contrat correspond à la définition d'un contrat non notifiable d'intérêt public.
(49) Conformément à la procédure prévue à l'article 88, paragraphe 2, du traité, les autorités espagnoles ont eu l'occasion de commenter les observations faites par les tiers intéressés.
V. APPRÉCIATION DE L'AIDE
(50) Les principaux aspects discutés dans l'ouverture de la procédure d'examen C 10/98 étaient la publicité, l'absence d'une procédure d'appel d'offres adéquate, la ligne Algésiras-Ceuta, les conditions applicables à d'autres fournisseurs de services, la durée du contrat et la mise en paquet/globalisation du contrat.
EXISTENCE DE L'AIDE
Publicité et absence d'appel d'offres adéquat
(51) Les orientations communautaires sur les aides d'État au transport maritime disposent que "les appels d'offres doivent faire l'objet d'une publicité adéquate (...) de façon que tous les transporteurs de la Communauté (...) aient bénéficié des mêmes possibilités de soumissionner". D'autre part, le règlement (CEE) n° 3577/92 dispose que "lorsqu'un État membre conclut des contrats de service public ou impose des obligations de service public, il le fait sur une base non discriminatoire à l'égard de tous les armateurs communautaires" (article 4, paragraphe 1, deuxième alinéa) et que "toute compensation due, le cas échéant, en contrepartie d'obligations de service public doit être versée à tous les armateurs communautaires" (article 4, paragraphe 2, deuxième alinéa).
(52) L'invitation à soumissionner au contrat a été publiée au BOE le 17 décembre 1997 et, sous forme résumée, dans la publication maritime Lloyd's List le 23 décembre 1997. Le délai de remise des offres expirait le 31 décembre 1997.
(53) À l'engagement de la procédure, la Commission a émis l'avis que, vu l'ampleur, la durée et l'importance du contrat, le temps laissé aux soumissionnaires pour présenter leur offre était insuffisant. La procédure adoptée était insuffisante tant pour ce qui concerne les opérateurs établis en Espagne que ceux établis dans la Communauté.
(54) Tant le gouvernement espagnol que Trasmed rappellent que les orientations communautaires sur les aides d'État au transport maritime ne fixent pas de règles précises pour la publication de contrats de services publics. Ils font, en outre, observer que l'invitation à soumissionner s'est faite conformément aux règles fixées par la législation espagnole, qui a transposé précisément les directives 92/50/CEE, 93/36/CEE et 93/37/CEE. Le gouvernement espagnol tout comme Trasmed croient que l'invitation à soumissionner a été publiée en conformité avec la législation pertinente applicable.
(55) D'autre part, ils soutiennent que l'urgence de la modalité d'adjudication se justifiait pleinement du fait que le contrat antérieur avait expiré le 31 décembre 1997. En publiant l'invitation à soumissionner le 17 décembre 1997, les autorités espagnoles voulaient éviter d'interrompre la prestation de services qui, selon eux, aurait pu se produire rapidement avec des conséquences extrêmement graves.
(56) La diffusion de l'invitation à soumissionner a été trop brève pour que les opérateurs puissent préparer correctement leurs offres. Le fait qu'aucune autre offre que celle de l'opérateur préexistant n'ait été reçue renforce la Commission dans son opinion que l'appel d'offres était incorrect vu le manque de publicité et de temps pour que les parties intéressées préparent leurs offres.
(57) La Commission prend note de l'argument des autorités espagnoles selon lequel elles étaient obligées de recourir à ce procédé pour éviter une interruption de ces services essentiels. Elle ne peut cependant être d'accord avec lui, vu que les autorités espagnoles auraient pu engager la procédure suffisamment tôt pour mener à bien l'appel d'offres sans menacer les services essentiels précités.
(58) En conséquence, et pour les raisons évoquées précédemment, la Commission est d'avis que la procédure suivie pour la publication de l'invitation à soumissionner et pour l'adjudication du contrat est contraire aux orientations sur les aides d'État.
La ligne Algésiras-Ceuta
(59) À l'engagement de la procédure, la Commission a observé que l'Espagne s'était réservé le droit d'adjuger à Trasmed des obligations de service public compensées sur cet itinéraire pour des raisons et à un prix discrétionnaire et sans appel d'offres public bien que trois autres opérateurs que Trasmed couvrent actuellement cet itinéraire.
(60) Bien que cet itinéraire n'ait pas été inclus dans l'invitation à soumissionner, il a été ajouté à la liste des itinéraires d'OSP que doit couvrir le fournisseur de services dans le cahier des charges du contrat, en dépit du fait que ce fournisseur est obligé de fournir un niveau de service donné sur cet itinéraire, et sans compensation.
(61) Les autorités espagnoles ont pris note des préoccupations exprimées par la Commission et ont supprimé cette ligne de celles contenues dans le contrat. Elles ont en outre informé la Commission que Trasmed exploitait la ligne sans compensation financière. La Commission considère que cet aspect de l'affaire est clos.
Conditions applicables à d'autres fournisseurs de services
(62) À l'engagement de la procédure, la Commission a observé que les conditions applicables aux autres fournisseurs de services opérant sur les mêmes lignes en concurrence parallèle avec le fournisseur d'OSP compensées n'avaient pas été convenablement fixées.
(63) Après plusieurs réunions consacrées à cette question, les autorités espagnoles se sont engagées à revoir le cadre juridique dans ce domaine (Real Decreto 166/1997), afin de tenir compte des inquiétudes exprimées par les services de la Commission auxquels a été présenté un projet révisé de texte qui, en principe, se conforme au règlement (CEE) no 3577/92 (cabotage maritime). La Commission a néanmoins proposé provisoirement une procédure d'infraction contre le Real Decreto espagnol, vu que, sur cette même affaire, une décision préjudicielle était pendante devant la Cour de justice(16).
(64) En ce qui concerne les points évoqués précédemment, et en particulier celui qui concerne la publicité et l'absence d'invitation à soumissionner appropriée, il y a lieu dès lors de signaler que, dans la présente affaire, toutes les conditions établies dans ce sens par les orientations communautaires sur les aides d'État au transport maritime n'ont pas été remplies. La procédure suivie ne remplit pas les conditions, notamment en ce qui concerne le niveau de publicité de l'invitation à soumissionner. En outre, le délai laissé aux parties intéressées pour préparer leur offre a été trop court.
(65) Il y a lieu de rappeler que le contrat de service public est entré en vigueur au début de 1998, c'est-à-dire avant la pleine libéralisation du cabotage en Espagne conformément aux dispositions du règlement (CEE) no 3577/92. Il ne faut toutefois pas perdre de vue que Trasmed ne réalisait pas seulement des opérations de cabotage, mais fournissait également des services maritimes internationaux (destinés, par exemple, à des passagers et aux marchandises sur la ligne reliant Algésiras, en Espagne, et Tanger au Maroc). Comme les services maritimes internationaux avaient déjà été libéralisés précédemment(17), ces échanges étaient fatalement ouverts à la concurrence d'autres opérateurs de la Communauté au cours de cette année.
(66) Si l'on se réfère au contenu de l'ordonnance de la Cour de justice du 25 mars 1998 dans l'affaire C-174/97, FFSA et autres contre Commission (La Poste)(18), laquelle a rejeté le recours en cassation introduit contre l'arrêt du Tribunal de première instance du 27 février 1997 dans l'affaire T-106/95(19), on peut donc considérer que l'Espagne, à la suite d'une application incorrecte de la procédure, a octroyé des ressources publiques qui risquent de fausser les conditions de concurrence en favorisant une entreprise donnée (Trasmed) et d'ainsi affecter le commerce entre les États membres depuis le début de 1998. En conséquence, le contrat précité est constitutif d'une aide d'État au titre des dispositions de l'article 87, paragraphe 1, du traité. Ces aides doivent être notifiées conformément à l'article 88 pour être évaluées selon les règles générales applicables aux aides d'État. À ce propos, le contrat en question a été conclu sans que les autorités espagnoles l'aient préalablement notifié et viole par conséquent l'article 88, paragraphe 3, du traité.
COMPATIBILITÉ
(67) Bien que l'aide entre dans le champ d'application de l'article 87, paragraphe 1, du traité, il est nécessaire de déterminer si des possibilités de dérogation et d'exemption existent au sens de l'article 87, paragraphes 1, 2 et 3, et de l'article 86, paragraphe 2, du traité.
(68) L'aide en question ne peut être considérée comme relevant de l'article 87, paragraphe 2, du traité puisqu'il ne s'agit pas d'une aide à caractère social octroyée à des consommateurs individuels ni d'une aide destinée à remédier aux dommages causés par les calamités naturelles ou pour compenser les désavantages économiques causés par la division de l'Allemagne.
(69) L'article 87, paragraphe 3, du traité dispose que des aides peuvent être considérées comme compatibles avec le marché commun. La compatibilité avec le traité doit être évaluée dans le contexte de la Communauté dans son ensemble et pas dans celui d'un seul État membre. Pour garantir le bon fonctionnement du marché commun et compte tenu du principe énoncé au point g) de l'article 3 du traité, les exceptions prévues à l'article 87, paragraphe 3, doivent être interprétées de manière restrictive lorsque est analysé tout régime ou tout octroi concret d'aide. Le contraire reviendrait à favoriser des secteurs ou des entreprises de certains États membres dont la situation financière se verrait renforcée artificiellement ainsi qu'à altérer les échanges entre les États membres et à fausser la concurrence sans qu'aucune considération d'intérêt commun requise par l'article 87, paragraphe 3, le justifie.
(70) Conformément au point a) du paragraphe 3 de l'article 87, les aides destinées à favoriser le développement économique de régions dans lesquelles le niveau de vie est anormalement bas ou dans lesquelles sévit un grave sous-emploi peuvent être acceptées. Bien que plusieurs régions d'Espagne remplissent les conditions d'octroi d'une aide régionale visées à l'article 87, paragraphe 3, point a), l'aide en question n'a pas été accordée en vertu d'un régime d'aides destiné fondamentalement à promouvoir le développement régional. En tout cas, l'article 87, paragraphe 3, point a), n'autorise pas les régimes d'aides qui, tel celui-ci, ne se conforment pas aux orientations communautaires sur les aides à des secteurs sensibles spécifiques comme celui du transport maritime.
(71) Quant aux exceptions prévues à l'article 87, paragraphe 3, point b), le régime d'aides en question n'est pas destiné à promouvoir la réalisation d'un projet important d'intérêt commun ni à remédier à une perturbation grave de l'économie de l'Espagne et ne présente pas non plus les caractéristiques propres à ce type de projets.
(72) En ce qui concerne l'exception prévue à l'article 87, paragraphe 3, point c), pour les aides destinées à faciliter le développement de certaines activités économiques, on est arrivé à la conclusion que l'aide dont il est ici question ne va pas dans ce sens vu qu'elle a le caractère d'une aide au fonctionnement.
(73) L'aide faisant l'objet de l'examen ne remplit pas les conditions nécessaires pour établir une dérogation et les autorités espagnoles n'ont pas non plus invoqué aucune de ces exceptions dans leurs contacts avec la Commission.
(74) En tout état de cause, l'aide, même si elle était incluse dans une de ces catégories, n'en devrait pas moins être notifiée à la Commission conformément à l'article 88 avant que ne soit appliqué le régime d'aide, chose que les autorités espagnoles n'ont pas faite.
Exception de l'article 86, paragraphe 2
Service d'intérêt économique général
(75) La Commission a engagé la procédure en déclarant qu'elle n'avait pas suffisamment d'éléments d'appréciation pour décider si l'article 86, paragraphe 2, du traité s'appliquait au contrat en question.
(76) Cet article 86, paragraphe 2, dispose que:"Les entreprises chargées de la gestion de services d'intérêt économique général (...) sont soumises aux règles du présent traité, notamment aux règles de concurrence, dans les limites où l'application de ces règles ne fait pas échec à l'accomplissement en droit ou en fait de la mission particulière qui leur a été impartie(20)."
(77) Dans son arrêt du 10 décembre 1991 dans l'affaire C-179/90, Merci convenzionali porto di Genova(21), la Cour de justice a considéré que: "à cet égard, il y a lieu de constater qu'il ne ressort ni des pièces du dossier transmis par la juridiction nationale ni des observations déposées devant la Cour que les opérations portuaires revêtent un intérêt économique général qui présente des caractères spécifiques par rapport à celui que revêtent d'autres activités de la vie économique et que, même à supposer que tel soit le cas, l'application des règles du traité, en particulier de celles en matière de concurrence et en matière de libre circulation, serait de nature à faire échec à l'accomplissement d'une telle mission".
(78) Dans le cas présent, le contrat sur lequel portait l'appel d'offres attribuait toute une série de missions spécifiques que devait accomplir le soumissionnaire. Les critères se réfèrent soit aux différentes lignes du service, soit aux saisons hivernale et estivale, ou encore contiennent des exigences générales sur les caractéristiques auxquelles doivent satisfaire les navires. On observera également que le contrat de service public concerne le trafic de passagers et de véhicules. Le tableau ci-après regroupe quelques-unes des principales conditions que doit remplir l'entreprise chargée d'exécuter le contrat de service public:
Tableau 1
>EMPLACEMENT TABLE>
(79) En suivant le raisonnement de l'affaire précitée C-179/90, Merci convenzionali porto di Genova, la première question qu'il faut se poser est de savoir jusqu'où les exigences spéciales du contrat de service public attribuées à Trasmed peuvent être qualifiées de service d'intérêt économique général.
(80) Les autorités espagnoles ont affirmé que, à défaut de compensation, les forces du marché ne pourraient fournir le niveau requis pour garantir la prestation de services essentiels de transport maritime dans les conditions adéquates de régularité, de continuité, de capacité, de qualité et de prix tout au long de l'année.
(81) Conformément aux orientations communautaires sur les aides d'État au transport maritime, par "OSP", on entend toute obligation imposée à un transporteur en vue d'assurer la fourniture d'un service conforme à des normes précises de continuité, de régularité, de capacité et de tarification, normes que le transporteur ne respecterait pas s'il était mû par son seul intérêt économique. Des OSP peuvent être imposées pour des services réguliers (...) dans les cas où le jeu des forces du marché n'assure pas un niveau de service suffisant.
(82) S'appuyant sur les informations dont elle dispose(22), la Commission a constaté que la concurrence à laquelle Trasmed est confrontée sur les lignes en question est celle du transport de fret, lequel sort du cadre du contrat de service public, dont les navires ne remplissent de toute manière pas les conditions de capacité de passagers fixées dans ce contrat. D'autre part, on rappellera que, tout au long de la procédure, aucun des concurrents potentiels de Trasmed ne s'est dit en mesure de remplir les conditions minimales établies dans le contrat conclu avec l'Espagne sans recevoir de compensation.
(83) Les autorités espagnoles ont remis à la Commission une étude(23) réalisée par un organisme indépendant, l'université polytechnique de Madrid, sur les surcoûts qu'implique l'exécution du contrat de service public.
(84) Selon cette analyse, les deux charges principales génératrices de frais supplémentaires et que l'entreprise de transport n'accepterait pas si elles n'étaient pas des obligations de service public, sont:
- l'obligation du contractant d'assurer le service toute l'année, pendant toute la durée de la concession des lignes, avec les variations de service entre les haute et basse saisons, qui sont précisées dans l'appel d'offres, et
- la nécessité de remplacer dans un délai minimal, tout bateau qui serait incapable d'assurer le service (non pour des questions de maintenance, mais à la suite d'avaries, d'accidents, etc.); le délai maximal de remplacement est égal à la durée d'un voyage complet aller et retour si celui-ci dure plus de vingt-quatre heures, ou de vingt-quatre heures s'il dure moins.
(85) Selon l'information transmise par les autorités espagnoles, toutes les lignes faisant l'objet de l'appel d'offres présentent des caractéristiques saisonnières extrêmes, avec une grande concentration de passagers avec leurs véhicules en haute saison. Si on analyse le nombre de passagers et de véhicules transportés sur ces lignes en 1993, 1994, 1995 et 1996 - la période étudiée avant le lancement de l'appel d'offres -, on constate que de 55 à 60 % de la demande annuelle de services de passagers et de véhicules correspond à la haute saison (essentiellement les vacances d'été)(24) et de 40 à 45 % au reste de l'année (sept mois environ).
(86) Mais ce n'est pas tout: en termes économiques, le trafic est encore plus saisonnier vu que les tarifs en dehors de la haute saison sont, en moyenne, beaucoup plus bas que ceux des époques d'affluence massive de passagers et de véhicules. Les effets cumulés en termes de recettes font que 60 et 65 % de celles-ci sont concentrées en été, laissant de 35 à 40 % au reste de l'année.
(87) Il ressort de tout cela qu'il n'existe aucun concurrent significatif couvrant le trafic de passagers et de véhicules sur les lignes considérées qui puisse offrir des services remplissant les conditions de fréquence, de capacité et de continuité pendant toute l'année et qui soit capable de remplacer un bateau dans les vingt-quatre heures (exigences que nous qualifierons de "fondamentales" ci-après), comme l'exige le contrat de service public.
(88) Pour les raisons qui précèdent, la Commission accepte l'argument selon lequel les deux exigences fondamentales citées créent une différence entre les services publics offerts par Trasmed conformément au contrat et les services offerts selon les critères du marché (comme ceux des concurrents). Les exigences supplémentaires à charge de Trasmed peuvent donc être qualifiées de service d'intérêt économique général.
(89) Les exigences fondamentales, ainsi que les autres (prix maximal, etc.) qui accompagnent nécessairement les premières comme une partie inséparable du contrat de service public, s'appliquent uniquement à l'entreprise chargée d'exécuter le contrat, en l'occurrence Trasmed.
(90) Les frais engendrés par la réalisation de ces critères particuliers, qui s'ajoutent à ceux du service réalisé selon les critères du marché, sont les frais supplémentaires correspondants aux OSP imposées par le contrat de service public.
(91) En conclusion, on peut affirmer que, en l'absence de concurrents significatifs réalisant des services de passagers et de véhicules sur les lignes en question, la Commission a considéré que les surcoûts calculés par l'expert, et pour lesquels une compensation doit être accordée à Trasmed, étaient les frais supplémentaires engendrés par la fourniture du service en basse saison (compte tenu de la réalisation des exigences fondamentales ainsi que des exigences secondaires) et par la nécessité d'offrir la possibilité de remplacer des navires dans les vingt-quatre heures.
Nécessité - Équivalence
(92) Faute d'un appel d'offres approprié (voir considérants 51 à 58), on ne peut présumer que la compensation accordée à Trasmed correspond aux prix qui auraient été établis en conformité avec des critères de marché dans les mêmes conditions. Pour cette raison, il faut analyser si la compensation accordée excède ce qui est nécessaire pour équilibrer le coût des OSP imposées par le contrat de service public.
(93) Dans l'arrêt rendu dans l'affaire La Poste précitée(25), la Cour de justice a soutenu que "le versement d'une aide d'État est susceptible, en vertu de l'article 86, paragraphe 2, du traité, d'échapper à l'interdiction de l'article 87 dudit traité, lorsque l'aide en question ne vise qu'à compenser les surcoûts engendrés par l'accomplissement de la mission particulière incombant à une entreprise chargée de la gestion d'un service d'intérêt économique général et que son octroi s'avère nécessaire pour que ladite entreprise puisse assurer ses obligations de service public dans des conditions d'équilibre économique".
(94) On rappellera également que les autorités espagnoles ont publié l'avis de marché du contrat de service public le 17 décembre 1997; la dotation de ce dernier était de 1100 millions de pesetas espagnoles (6600000 euros environ) par an. Dans le cadre de l'appel d'offres, Trasmed a fait une offre de 950 millions de pesetas espagnoles (soit 5700000 euros) annuels pour le contrat.
(95) Une fois établie la spécificité des OSP dans le cadre du contrat de service public, il s'agit de déterminer dans quelle mesure le service doit être subventionné et si les compensations sont de nature à freiner le développement du commerce communautaire.
(96) Conformément à l'étude réalisée par l'expert, la méthode utilisée pour évaluer la compensation minimale nécessaire se base sur les surcoûts nécessaires pour garantir la réalisation des OSP en basse saison. Cette dernière est la période pendant laquelle, selon les affirmations, se produisent des pertes d'exploitation significatives à la suite des OSP mentionnées (service supplémentaire en basse saison satisfaisant à toutes les autres exigences ainsi que possibilité de remplacer un navire dans les vingt-quatre heures), imposées par le contrat de service public(26).
(97) Sur la base de ces éléments, l'expert incluait dans la première colonne du tableau présenté ci-après les surcoûts des sept lignes (sur les neuf) qui, selon lui, étaient en déficit annuel. Les deux autres colonnes reflètent les résultats réels de Trasmed en 1998-1999, soit sur toutes les lignes, soit sur celles qui accusent un déficit net annuel:
Tableau 2
>EMPLACEMENT TABLE>
(98) La Commission prend acte que certaines des lignes n'accusent pas de déficit annuel. Mais même sur ces lignes, le contrat de service public impose des exigences supplémentaires de continuité, de fréquence et de capacité qui génèrent des coûts et réduisent les bénéfices de l'entreprise. Bien que ces lignes ne puissent être qualifiées d'OSP, elles contribuent à alléger la charge financière de Trasmed et, par conséquent, le volume des ressources publiques nécessaires à la compensation.
(99) Dans ce sens, et bien que des droits exclusifs d'accès au marché n'aient pas été accordés à Trasmed, il n'est pas inutile de rappeler l'arrêt de la Cour de justice du 19 mai 1993 dans l'affaire C-320/91 (Corbeau)(27). La Cour a établi que l'obligation, pour le titulaire de cette mission, assurer ses services dans des conditions d'équilibre économique présuppose la possibilité d'une compensation entre les secteurs d'activités rentables et des secteurs moins rentables et justifie, dès lors, une limitation de la concurrence, de la part d'entrepreneurs particuliers, au niveau des secteurs économiquement rentables.
(100) En effet, autoriser des entrepreneurs particuliers à faire concurrence au titulaire des droits exclusifs dans les secteurs de leur choix correspondant à ces droits les mettrait en mesure de se concentrer sur les activités économiquement rentables et d'y offrir des tarifs plus avantageux que ceux pratiqués par les titulaires des droits exclusifs, étant donné que, à la différence de ces derniers, ils ne sont pas économiquement tenus d'opérer une compensation entre les pertes réalisées dans les secteurs non rentables et les bénéfices réalisés dans les secteurs plus rentables.
(101) Compte tenu de la possibilité d'une subvention croisée entre différentes lignes, il ressort de l'exposé précédent que l'aide d'État accordée à Trasmed n'excède pas la compensation minimale nécessaire pour équilibrer les surcoûts supportés pour satisfaire aux exigences fondamentales du contrat de service public. Le déficit total accusé par Trasmed en 1998 et 1999 est, respectivement, de 931 et 1002 millions de pesetas espagnoles. Ces montants correspondent grosso modo aux 950 millions de pesetas espagnoles d'aides d'État reçues annuellement et qui se situent en deçà des surcoûts totaux prévus, calculés par l'expert à 1330 millions de pesetas espagnoles.
(102) Les chiffres du tableau présenté plus haut montrent également que la méthode choisie par Trasmed pour calculer les pertes, et dans laquelle sont pris en compte les résultats de toutes les lignes du paquet, nécessite moins de ressources de l'État (moins de compensation) que si on avait choisi un mécanisme qui eût entraîné une compensation ligne par ligne, vu que celui-ci n'obtiendrait aucun avantage des bénéfices réalisés sur les deux lignes rentables.
(103) À la demande de la Commission et afin de vérifier les résultats obtenus selon la méthode suivie tableau 2, l'expert a réalisé une estimation globale des frais et recettes totaux qu'enregistrerait une entreprise qui executerait le contrat de service public (en tenant compte de l'action globale sur les lignes considérées, y compris les transports de fret) en haute et en basse saison(28):
Tableau 3
>EMPLACEMENT TABLE>
(104) Comme le montre le tableau 3, les résultats d'exploitation des voyages sont négatifs, aussi bien en basse qu'en haute saison, si l'on ne tient compte que des passagers et de leurs véhicules (couverts par le contrat de service public). Toutefois, compte tenu de tout le flux de trafic(29), le déficit reste d'une certaine façon compensé par la prestation simultanée de services de transport de marchandises (non inclus dans le contrat de service public), qui cause un déficit en basse saison (- 1803 millions de pesetas espagnoles), mais un excédent appréciable en haute saison (267 millions de pesetas espagnoles). Cela confirme le caractère nettement saisonnier du trafic de transbordeurs dont parle le contrat de service public, comme nous l'avons vu précédemment.
(105) Pour calculer selon cette méthode les surcoûts engendrés par les OSP du contrat de service public, il faut se rappeler que le trafic de passagers/véhicules accuse, en basse saison, un déficit de 4200 millions de pesetas espagnoles. Ce chiffre, bien que compensé par les résultats positifs du transport de fret, continue d'accuser un déficit global de 1803 millions de pesetas espagnoles en basse saison. Si on compense le déficit de la basse saison par les bénéfices de la haute saison, la perte totale s'établit à 1536 millions de pesetas espagnoles. Comme ce chiffre reflète les pertes subies par le trafic de passagers et de véhicules uniquement, en basse saison, et compensées par tous les autres résultats tout au long de l'année, on peut affirmer que les pertes d'exploitation de 1536 millions de pesetas espagnoles constituent les surcoûts correspondant aux OSP du contrat de service public.
(106) On peut donc conclure que la méthode suivie au tableau 2 comme celle du tableau 3 aboutissent à des résultats similaires en ce qui concerne les frais supplémentaires des OSP: 1300 et 1536 millions de pesetas espagnoles.
(107) Comme les deux calculs effectués par l'expert sont cohérents entre eux et que le second (qui tient compte des frais et recettes totaux des haute et basse saisons) confirme la validité de la ligne et est même, d'une certaine façon, plus pragmatique que le premier, la Commission peut accepter l'analyse. Dans ce contexte, on relèvera qu'aucune des parties intéressées n'a présenté d'étude comparative de ce type au cours de la procédure.
(108) Il convient également de rappeler que Trasmed a présenté une offre de 950 millions de pesetas espagnoles qui a été acceptée par les autorités espagnoles et qui se situe en deçà du plus petit des deux résultats obtenus par l'expert (1300 millions de pesetas espagnoles).
(109) En conséquence et puisque la Commission accepte la méthode suivie pour évaluer les surcoûts supportés dans l'exécution du contrat de service public, il est permis de conclure que les 950 millions de pesetas espagnoles octroyés à Trasmed ne dépassent pas le minimum nécessaire pour la réalisation des OSP, ni en ce qui concerne les exigences fondamentales ni en ce qui concerne les autres exigences incluses dans le cadre du contrat de service public.
(110) On peut également conclure que le contrat de service public qui nous occupe n'apporte pas un excès de compensation et, donc, que le mécanisme de compensation ne permet pas de subvention croisée des autres routes (étrangères au contrat de service public) de Trasmed.
(111) Pour toutes ces raisons et bien que, comme nous l'avons vu, l'aide n'ait pas été accordée à l'issue d'une procédure d'appel d'offres appropriée, elle est nécessaire pour garantir la fourniture d'un service essentiel et reste proportionnée aux objectifs poursuivis, comme nous l'avons démontré précédemment.
RÉPERCUSSION SUR LE COMMERCE ENTRE ÉTATS
(112) D'autre part, comme l'exige l'article 86, paragraphe 2, du traité, aucune exception, notamment aux règles de concurrence, ne doit affecter les échanges dans une mesure contraire à l'intérêt de la Communauté. En ce qui concerne les effets éventuels sur les conditions des échanges, la Commission prend note des points suivants:
- Première année du contrat (1998): pendant cette première année, les lignes en question sont ou étaient réservées à des navires battant pavillon espagnol, conformément au règlement (CEE) no 3577/92(30).
- Durée: lorsqu'elle a engagé la procédure, la Commission a signalé que, dans l'appel d'offres, la durée du contrat était fixée à six ans, avec possibilité de deux reconductions de deux ans chacune. Dans les spécifications du contrat, la seconde prorogation (après huit ans) était assortie de la condition qu'une consultation de la Commission ait eu lieu préalablement. La durée du contrat ainsi déterminée aurait empêché la libéralisation du cabotage maritime au sens du règlement (CEE) no 3577/92 [...]. D'autre part, elle enfreindrait les orientations sur les aides d'État au transport maritime, puisqu'il s'agit d'OSP. Ces orientations précisent en effet que "la durée des contrats de service public doit être limitée à une période raisonnable (normalement de l'ordre de cinq années) (...). À l'expiration de la période spécifiée, les contrats doivent être soumis a une nouvelle procédure d'offre publique, conformément à la procédure décrite ci-dessus".
C'est pourquoi les autorités espagnoles ont promis que la durée du contrat n'irait pas au-delà du 26 juillet 2001 (quarante-deux mois). Tout contrat qui le remplacera entrera en vigueur à l'expiration de celui en cours et devra respecter la législation communautaire en vigueur (une procédure d'appel d'offres qui devra se conformer au principe de publicité, de transparence et de non-discrimination). Les autorités espagnoles se sont engagées à cesser, à cette date ou avant celle-ci, le versement des aides correspondant à ce contrat.
- Formation d'un paquet ou globalisation du contrat: à l'engagement de la procédure, la Commission a signalé que les autorités espagnoles n'avaient pas expliqué de manière satisfaisante pourquoi les neuf (ou dix) lignes devaient se présenter sous forme de paquets et être adjugées en un contrat unique qui menaçait, dans la pratique, de freiner le processus de libéralisation du cabotage maritime [prévu dans le règlement (CEE) no 3577/92].
La Commission tient à préciser que, afin de trouver un équilibre entre les questions de trésorerie publique et les exigences d'accès au marché, les États membres disposent d'une marge d'appréciation pour décider d'adjuger les contrats assortis d'OSP ligne par ligne ou en combinant certaines routes en un même paquet. Comme la Commission l'a signalé à l'ouverture de la procédure, elle éprouvait des inquiétudes quant à certaines formulations du contrat en ce qui concerne tant sa durée que la globalisation des routes en un contrat, car elles pouvaient freiner la libéralisation du cabotage et affaiblir la concurrence(31). Cependant, le contrat étant à présent limité à quarante-deux mois et le risque d'effets négatifs sur le développement du commerce et de la concurrence étant réduit au minimum, la Commission a décidé de ne pas insister sur ce point.
- Les autorités espagnoles ont également promis que tout contrat successif devrait respecter les exigences communautaires applicables (contrat d'une durée non supérieure à cinq ans, séparation des routes et respect strict de l'obligation de ne pas compenser excessivement ni de permettre des subventions croisées dans des activités compétitives) et que ce contrat n'entrerait en vigueur qu'après un délai et une publicité suffisants, de façon que toutes les entreprises de transport maritime de la Communauté aient l'occasion de préparer leurs offres.
- Les autorités espagnoles sont d'accord d'exclure immédiatement du contrat en vigueur la route Algésiras-Ceuta, qui fonctionne sans compensation financière.
(113) D'autre part, la Commission est consciente qu'il faudra un certain temps pour exécuter pleinement les engagements antérieurs. Ainsi, elle autorisera le maintien en vigueur du contrat en question jusqu'au 26 juillet 2001 (ce qui donnera au contrat une durée de quarante-deux mois). Cette durée a été décidée pour que puissent être élaborés complètement le cadre normatif et les nouveaux contrats en concertation avec les services de la Commission et de l'industrie maritime et pour que les soumissionnaires éventuels aient tout le temps de préparer leurs offres pour les nouveaux contrats.
(114) Il est à signaler également que la période d'octroi de l'aide a été réduite substantiellement afin de garantir sa limitation dans le temps. En outre, le caractère temporaire de l'aide permettra au système fonctionnant jusqu'alors en Espagne (selon lequel s'effectuait la desserte des îles) d'évoluer ainsi que l'implantation d'un système d'appel d'offres approprié pour tout contrat à venir.
(115) Comme les exigences fondamentales et secondaires (OSP) imposées à Trasmed par le biais du contrat de service public ont été qualifiées de "service d'intérêt économique général" et que le financement public du contrat coïncide avec les frais supplémentaires supportés par l'exploitant, que ledit contrat ne comporte donc pas de surcompensation et que sa durée, donc aussi ses effets possibles sur le développement du commerce, a été considérablement réduite, on peut affirmer que, comme l'exige l'article 86, paragraphe 2, du traité, la compensation n'a pas affecté le développement des échanges d'une manière qui lèse l'intérêt communautaire.
VI. CONCLUSIONS
(116) La Commission conclut que l'Espagne a exécuté illégalement une aide d'État en faveur de la Compañía Trasmediterránea, en infraction avec les dispositions de l'article 88, paragraphe 3, du traité. Néanmoins, la compensation peut être autorisée conformément à l'article 86, paragraphe 2, bien que l'article 87, paragraphe 1, lui soit applicable et que les exceptions visées à l'article 87, paragraphes 2 et 3, ne puissent être invoquées.
(117) Le champ d'application de la présente décision se limite aux aspects relatifs aux ides d'État et ne préjuge pas de l'application d'autres règles communautaires,
A ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION:

Article premier
L'Espagne a, en infraction avec les dispositions de l'article 88, paragraphe 3, du traité, exécuté illégalement une aide d'État en faveur de la Compañía Trasmediterránea. La compensation peut néanmoins être autorisée conformément à l'article 86, paragraphe 2, pourvu que soient respectées les conditions prévues à l'article 2.

Article 2
L'Espagne est tenue de mettre un terme au contrat actuel au plus tard le 26 juillet 2001 en suspendant tout versement au titre de l'aide à cette date ou avant celle-ci.
Tout contrat successif doit respecter les conditions communautaires applicables (contrat non supérieur à cinq ans, séparation des routes et strict respect de l'obligation de ne pas surcompenser ni de permettre des subventions croisées sur des activités concurrentielles). Ledit contrat n'entre en vigueur qu'au terme d'un délai et qu'après une publicité suffisante pour que toutes les entreprises de transport maritime de la Communauté aient l'occasion de préparer leurs offres.
La ligne Algésiras-Ceuta ne fait pas partie du présent contrat et la Compañía Trasmediterránea ne peut recevoir de compensation financière en ce qui concerne cette ligne.

Article 3
Le Royaume d'Espagne est destinataire de la présente décision.

Fait à Bruxelles, le 19 juillet 2000.

Par la Commission
Pedro Solbes Mira
Membre de la Commission

(1) JO C 147 du 13.5.1998, p. 10.
(2) Voir la note 1 de bas de page.
(3) JO L 364 du 12.12.1992, p. 7.
(4) BOE 226 du 20.9.1997, p. 27712.
(5) Au sujet de ce contrat, la Commission a décidé, le 5 novembre 1997, conformément à l'article 88 (ancien article 93), paragraphe 1, du traité, de proposer aux autorités espagnoles de prendre des mesures appropriées pour aligner sur le droit communautaire les dispositions régissant l'aide financière à Trasmed, ce qui a été communiqué aux autorités espagnoles par lettre (référence 10045) du 3 décembre 1997.
(6) JO C 205 du 5.7.1997, p. 5.
(7) Recueil 1976, p. 1, et Recueil 1977, p. 163, respectivement.
(8) JO L 209 du 24.7.1992, p. 1.
(9) JO L 328 du 28.11.1997, p. 1.
(10) Recueil 1991, p. I-1223.
(11) Jusqu'au 1er janvier 1999, seuls les armateurs communautaires dont les navires seraient immatriculés en Espagne ont le droit de fournir les services en question.
(12) BOE 119 du 19.5.1995, p. 14601.
(13) Voir les notes 8 et 9 de bas de page.
(14) JO L 199 du 9.8.1993, p. 1.
(15) JO L 199 du 9.8.1993, p. 54.
(16) Affaire C-205/99; renvoi de la Cour suprême espagnole à la Cour de justice, en date du 12 mai 1999, conformément à l'article 234 du traité, relatif à une décision préjudicielle dans l'affaire pendante devant la Cour au sujet du Real Decreto 1466/1997.
(17) Règlement (CEE) n° 4055/86 du Conseil du 22 décembre 1986 portant application du principe de la libre circulation aux services de transports maritimes entre États membres et entre États membres et pays tiers (JO L 378 du 31.12.1986, p. 1).
(18) Recueil 1998, p. I-1303.
(19) Recueil 1997, p. II-229.
(20) La Cour de justice a signalé, dans l'affaire 127/73, BRT II (Recueil 1974, p. 313), que l'article 86, paragraphe 2, ne s'appliquait que si l'entreprise s'est vu confier une tâche d'intérêt économique général par le biais d'un acte d'administration publique. La Cour a fourni quelques indications sur ce qu'il faut entendre par 'service d'intérêt économique général': dans l'affaire C-66/86, Ahmed Saeed Flugreisen (Recueil 1989, p. 803), elle a affirmé que la couverture d'itinéraires aériens commercialement non viables constituait un service de ce type.
(21) Recueil 1991, p. I-5889.
(22) Information comparée avec les données de l'étude "Impacto de la liberalización del cabotaje marítimo en los Estados miembros de la Unión Europea" [règlement (CEE) n° 3577/92]. Troisième rapport; octobre 1998 (Bilbao Plaza Marítima, SL; École technique supérieure d'ingénieurs navals de l'université polytechnique de Madrid).
(23) Lettre de la représentation permanente de l'Espagne à la direction générale TREN, du 30 mars 1999.
(24) L'étude réalisée par l'université de Madrid et sur laquelle s'appuie ces chiffres suggère que la haute saison a une durée de cinq mois environ. Son estimation est plus modérée en ce qui concerne la durée des haute et basse saisons que pour celle de l'appel d'offres, vu qu'elle estime que la haute saison dure trois mois, du 15 juin au 15 septembre de chaque année. Bien sûr, plus la basse saison est courte (peu rentable), moins on peut espérer de compensation de l'État.
(25) Voir les notes 18 et 19 de bas de page.
(26) L'analyse des experts a été effectuée avant tout en vue de vérifier les frais que devait supporter l'État selon différentes possibilités de contrat sur les neuf lignes faisant l'objet du contrat de service public. Ce n'est que dans une seconde étape, basée sur le concept préexistant de coût-bénéfice, que l'analyse a été poursuivie en vue d'établir les surcoûts minimaux associés au contrat de service public en basse saison.
Les tableaux 2 et 3 présentés ci-après montrent les surcoûts et les recettes supplémentaires découlant du respect des OSP imposées par le contrat de service public. Le calcul de ces surcoûts et recettes se base sur la notion de "navire standard" (par exemple, "transbordeur standard") qui satisfait à des conditions fondamentales répondant aux exigences opérationnelles et techniques.
Les recettes ont été établies sur la base des entrées moyennes perçues sur les lignes considérées avec le "transbordeur standard" au cours des deux dernières années, en tenant compte des tendances observées. Les différentes composantes des recettes considérées ont été les passagers, leurs véhicules, le niveau de service à bord et le fret.
Les frais directs (FD) sont ceux qui sont liés aux passagers, à leurs véhicules, au niveau du service à bord et au fret.
Les frais variables (FV) comprennent la partie correspondant au combustible et les taxes portuaires, considérées proportionnellement au temps de navigation et à l'utilisation des ports.
Les frais fixes (FF) du navire ont été calculés sur la base d'une période d'exploitation de 5400 heures pour toute l'année (350 jours), à l'exception des postes d'amortissement, des frais financiers et assurance, qui sont calculés pour l'année civile (365 jours). Les FF découlant de l'exploitation indépendante des différentes lignes sont calculés sur la base du "transbordeur standard" précité. Les FF de toutes les lignes considérées ensemble sont proportionnels au nombre minimal d'entrées au port, imposées dans la description technique de chaque ligne.
Les frais de remplacement d'un navire afin de garantir la continuité du service ont été estimés en supposant l'existence d'un transbordeur de rechange. Plusieurs possibilités ont été calculées selon la propriété ou le contrat d'affrètement de celui-ci, le résultat étant une moyenne de 631 millions de pesetas espagnoles par an.
(27) Recueil 1993, p. I-2533.
(28) Lettre de l'Espagne du 10 juin 1999 contenant le compte rendu de la réunion tenue avec la DG VII à Bruxelles au sujet du contrat de fourniture de services maritimes réguliers de cabotage de passagers et de véhicules.
(29) Les transbordeurs pouvant transporter des passagers et des véhicules peuvent également embarquer des camions et une certaine quantité de fret, même si le contrat de service public n'exige pas la fourniture de tels services.
(30) Le règlement (CEE) no 3577/92 applique le principe de la libre circulation des services de transports maritimes dans les États membres. Conformément à son article 6, les services réguliers de passagers et de transbordeurs effectués, par exemple, en Méditerranée et le long des côtes espagnoles sont exemptés de l'application du règlement jusqu'au 1er janvier 1999.
(31) Vu la part de Trasmed sur le marché espagnol des services de passagers et de transbordeurs, le rapport en question sur le cabotage (voir tableau 3) indique que Trasmed exploite 25 navires sur un total de 68, ce qui implique un total de 179102 TB pour l'entreprise face à un total de 287160 TB.



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Structure analytique Document livré le: 12/03/2001


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