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Législation communautaire en vigueur
Document 300D0334
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[ 08.60 - Aides accordées par les États et autres subventions ]
300D0334
2000/334/CE: Décision de la Commission du 25 novembre 1998 concernant les aides d'État accordées à l'entreprise Enirisorse SpA [notifiée sous le numéro C(1998) 3866] (Le texte en langue italienne est le seul faisant foi.) (Texte présentant de l'intérêt pour l'EEE)
Journal officiel n° L 120 du 20/05/2000 p. 0001
Texte:
Décision de la Commission du 25 novembre 1998 concernant les aides d'État accordées à l'entreprise Enirisorse SpA [notifiée sous le numéro C(1998) 3866] (Le texte en langue italienne est le seul faisant foi.) (Texte présentant de l'intérêt pour l'EEE) (2000/334/CE)
LA COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES, vu le traité instituant la Communauté européenne, et notamment son article 93, paragraphe 2, premier alinéa, après avoir invité(1) les intéressés à présenter leurs observations en vertu des articles précités, considérant ce qui suit: I Par lettre du 13 janvier 1998, la Commission a informé le gouvernement italien de sa décision d'ouvrir la procédure prévue à l'article 93, paragraphe 2, du traité à l'encontre des aides accordées, sous la forme d'apports de capital, par l'ENI au profit du sous-holding Enirisorse SpA (ci-après dénommé "Enirisorse". Il convient de préciser d'emblée qu'Enirisorse est une filiale à 100 % du holding public italien ENI qui, à l'époque des faits examinés, était contrôlé par l'État italien par l'entremise du ministère du Trésor, actionnaire majoritaire. Les faits à l'origine de l'ouverture de la procédure Par la décision 98/212/CE(2), la Commission avait décidé de clore la procédure relative aux apports de capital effectués par l'ENI au profit d'Enirisorse entre 1992 et 1996. Ces apports de capital réalisés dans le cadre d'un plan de restructuration se chiffraient à 1819 milliards de lires italiennes. Le gouvernement italien a été informé de la décision de la Commission par lettre du 2 mai 1997. Dans le cadre de la décision 98/212/CE, la Commission avait décidé que les apports de capital pour un montant de 1819 milliards de liresétaient compatibles avec le marché commun et l'accord EEE, en vertu de l'article 92, paragraphe 3, point c), du traité CE et de l'article 61, paragraphe 3, point c), de l'accord EEE, pour autant que le gouvernement italien satisfasse à certaines conditions. Ces conditions, dans la mesure où elles intéressent la présente décision, étaient, pour l'essentiel, les suivantes: - l'Italie s'engageait à mener à terme le plan de restructuration, et donc à privatiser les sociétés et les sites de production appartenant à Enirisorse, et à procéder à la liquidation définitive de cette dernière pour le 31 décembre 1998, - le produit des privatisations devait servir à couvrir les éventuels coûts ultérieurs de liquidation d'Enirisorse, - le gouvernement italien devait mettre en place une procédure de suivi de l'exécution de la décision. Le premier rapport semestriel rédigé par le gouvernement italien est parvenu à la Commission le 11 novembre 1997. Il révélait, entre autres, que la vente de Pertusola Sud, une des deux entreprises restantes d'Enirisorse SpA qui exploitait un site de production de zinc à Crotone, n'avait pas encore été réalisée, contrairement au plan de restructuration notifié par l'Italie et accepté par la Commission. Les problèmes concernant Pertusola Sud avaient joué un rôle important dans la décision 98/212/CE. L'Italie, en effet, avait dit, à l'époque, que l'entreprise serait soit fermée, soit vendue à un acheteur intéressé avant la fin de 1997. Dans ce dernier cas, l'acquéreur devait réorienter la production du zinc vers le nickel. C'est dans ces termes que la fermeture ou la vente de Pertusola Sud en 1997 était prévue dans le plan de restructuration d'Enirisorse notifié à la Commission et cité par celle-ci dans les motifs de sa décision 98/212/CE. Pour la Commission, en effet, il apparaissait indispensable pour atteindre l'objectif final du plan de restructuration d'Enirisorse, à savoir la liquidation définitive de celle-ci, que Pertusola Sud soit fermée ou vendue à un acquéreur privé, puisque les pertes d'exploitation d'Enirisorse pour 1997 lui étaient imputables. Le rapport révélait également que l'ENI avait procédé à de nouveaux apports de capital à Enirisorse en 1997, à hauteur de 133 milliards de lires, ce capital frais ayant servi, entre autres, à couvrir les coûts d'exploitation de Pertusola Sud et les coûts de liquidation d'Enirisorse. Or, le plan de restructuration notifié à la Commission ne prévoyait pas ces nouveaux apports, qui n'étaient donc pas entrés en ligne de compte dans la décision 98/212/CE. N'ayant pas été notifiés à la Commission, ils avaient par conséquent été effectués de manière illégale. Force était donc à la Commission de considérer ces nouveaux apports en capital comme de nouvelles aides, illégales puisqu'elles avaient été accordées en violation de l'obligation de notification préalable imposée par l'article 93, paragraphe 3, du traité. Sur la base des informations recueillies durant la première phase de son enquête, la Commission est parvenue à la conclusion que les recapitalisations effectuées par l'ENI en 1997 ne pouvaient offrir une rentabilité financière suffisante, la liquidation, à brève échéance, d'Enirisorse étant déjà programmée. L'argument selon lequel L'ENI aurait agi comme un investisseur privé n'était donc pas défendable. Par ailleurs, Enirisorse avait également essuyé de lourdes pertes durant plus de cinq ans; un investisseur privé aurait restructuré ou liquidé Enirisorse beaucoup plus tôt pour éviter de nouvelles pertes. La Commission, qui avait des doutes sur la compatibilité avec le marché commun des apports de capital cités, étant donné qu'ils ne semblaient pas pouvoir être admis au bénéfice des dérogations prévues à l'article 92, paragraphes 2 et 3, du traité, a décidé d'ouvrir la procédure prévue à l'article 93, paragraphe 2, du traité à l'égard des nouveaux apports de capital. II À la suite de la publication de la décision d'ouverture de la procédure(3), le gouvernement du Royaume-Uni est intervenu dans la procédure par lettre du 6 avril 1998, à l'appui des arguments avancés par la Commission. Les autorités britanniques soutenaient, en particulier, que la recapitalisation par l'ENI d'Enirisorse, compte tenu de la situation financière de cette dernière, n'obéissait pas à la logique de l'investisseur privé. Par lettre du 4 mai 1998, la société Union minière, productrice de zinc et concurrente directe de Pertusola Sud, est elle aussi intervenue dans la procédure, à l'appui des arguments avancés par la Commission. L'Union minière soutenait, en particulier, que les nouveaux apports de capital à Enirisorse, relatifs aux exercices 1997 et 1998 et destinés à couvrir les pertes de Pertusola Sud, société contrôlée par elle, constituaient une aide d'État non notifiée et injustifiée. Ces nouvelles aides faussaient de manière évidente et injustifiée la concurrence sur le marché du zinc, qui souffrait déjà d'un excédent structurel de capacités de production. Aucun autre État membre ou autre partie intéressée n'a présenté d'observations à la Commission. Celle-ci a transmis les observations du Royaume-Uni et de l'Union minière au gouvernement italien par lettre du 28 mai 1998. III Dans sa réponse à la lettre d'ouverture de la procédure ainsi qu'aux observations susmentionnées des tiers, le gouvernement italien a contesté aussi bien la décision d'ouverture de la procédure prise par la Commission que les observations des tiers, en faisant valoir que: - les apports de capital incriminés d'un montant de 133 milliards de lires avaient été communiqués à la Commission dans le cadre du suivi prévu par la décision 98/212/CE, - sur ces 133 milliards, 34 milliards sont destinés à couvrir les pertes de Pertusola Sud, les 99 milliards restants devant servir à couvrir des coûts se rapportant à Enirisorse. Ces 99 milliards ont servi à la réalisation du plan de restructuration approuvé par la Commission; ce nouvel apport de 99 milliards de lires doit être considéré comme autorisé quand au fond, bien qu'il ne figure pas formellement dans les aides prévues par le plan, alors que la Commission avait prévu, à l'article 3, paragraphe 1, point b), de la décision 98/212/CE, que l'Italie lui communiquerait tout autre coût de liquidation, - les sommes (99 milliards de lires) destinées à couvrir les coûts de liquidation et de fermeture d'une entreprise ne peuvent matériellement fausser les conditions de concurrence puisqu'elles sont destinées à des entreprises qui cessent définitivement leur activité et quittent le marché. Pour ce qui est des 34 milliards de lires versés à Pertusola Sud, l'Italie reconnaît qu'Enirisorse a procédé, en 1997, à la recapitalisation de Pertusola Sud à hauteur de 34 milliards, afin d'éponger ses pertes. Toutefois, le gouvernement italien expose ce qui suit: - la Commission savait, lorsqu'elle a adopté sa décision 98/212/CE, que les pertes de Pertusola Sud pour cette année s'élèveraient à 48 milliards de lires. Par conséquent, en imposant la vente ou la fermeture de Pertusola avant la fin de l'année 1997, la Commission aurait implicitement approuvé la poursuite des activités jusqu'à cette date et la résorption des pertes accumulées en 1997 qui en découlait, - l'établissement de Pertusola est situé dans une zone géographique (Crotone) admissible aux aides régionales prévues à l'article 92, paragraphe 3, point a), du traité; les aides en question devraient, par conséquent, être considérées comme compatibles avec le marché commun à la lumière de la disposition précitée du traité. IV Enirisorse a été constituée en 1991 comme "pur" holding financier dans le but d'optimiser les ressources économiques et financières du groupe ENI et, avant tout, de centraliser sous une seule autorité la gestion des participations détenues par le groupe, en particulier dans le secteur minier. En effet, l'ENI et son actionnaire de l'époque (le ministère du Trésor italien) avaient décidé, en 1991, de se dégager des activités non stratégiques afin de rétablir la rentabilité des activités stratégiques en les séparant de celles qui enregistraient des pertes. L'ensemble de l'opération devait aboutir à la privatisation du holding Enirisorse. Dans cette perspective, Enirisorse avait élaboré un plan d'intervention extraordinaire, qui prévoyait notamment la fermeture de l'établissement de Pertusola Sud avant la fin de 1997 ou sa cession à un acquéreur intéressé qui devait transformer l'établissement en une unité de production de nickel. Au terme de la période 1992-1996, Enirisorse avait reçu de son actionnaire unique, l'ENI, au titre de sa recapitalisation, 1819 milliards de lires destinées à permettre la mise en oeuvre du plan. Ces aides ont été jugées compatibles par la Commission dans sa décision 98/212/CE, et conformes aux conditions et exigences stipulées dans le plan de restructuration notifié. Au cours de la même période, Enirisorse prévoyait, en outre, de retirer environ 840 milliards de lires de la vente de différentes sociétés et branches de l'entreprise. V Assimilation des apports en capital contestés à des aides d'État Afin de déterminer si la recapitalisation à hauteur de 133 milliards de lires constitue une aide d'État, la Commission examine le flux de capitaux entre l'État italien, principal actionnaire à l'époque des faits, et Enirisorse à la lumière du principe de l'investisseur privé dans une économie de marché, qu'elle a énoncé dans sa communication aux États membres(4). Selon ce principe, une opération financière est une aide d'État si elle n'avait pas été entreprise par un investisseur privé opérant dans les conditions normales d'une économie de marché. À l'époque des faits en cause, c'est-à-dire en 1997, des actionnaires privés détenaient des participations dans L'ENI aux côtés de l'État italien qui était très largement majoritaire. Toutefois, à la même époque, le ministère du Trésor, actionnaire majoritaire de l'ENI, jouait un rôle stratégique de premier plan dans la détermination des choix d'entreprise du groupe. Les apports en capital de 133 milliards de lires incriminés ont été financés par des bénéfices qui, sinon, seraient allés aux actionnaires de l'ENI et, en particulier, à son actionnaire majoritaire, à savoir l'État italien. Par conséquent, les fonds mis par l'ENI à la disposition d'Enirisorse doivent être assimilés à des ressources d'État au sens de l'article 92, paragraphe 1, du traité. La Commission a de bonnes raisons de considérer que le rendement financier de ces apports en capital de l'ENI d'un montant de 133 milliards de lires était insuffisant - il serait plus juste de dire inexistant -, étant donné que l'intervention consistait essentiellement à couvrir les pertes d'une société qui aurait déjà dû être liquidée (Pertusola Sud) et d'autres coûts de liquidation non autrement précisés dont on ne voit pas pourquoi l'ENI les prendrait à sa charge si elle n'était pas soumise à une obligation juridique précise. En l'absence d'une telle obligation juridique, dont il incombait aux autorités italiennes de prouver l'existence, le comportement de l'ENI se situe en dehors de toute logique d'investisseur privé dans une économie de marché; en effet, l'ENI ne peut escompter un rendement suffisant de sa mise de fonds ni même aucun rendement du tout en l'occurrence, aussi minime soit-il, puisque la décision de liquider Enirisorse au plus tard le 31 décembre 1998, quoi qu'il advienne, était déjà prise. On ne saurait donc soutenir que l'ENI a agi comme un investisseur privé lorsqu'elle a décidé de procéder à un nouvel apport de capital d'un montant de 133 milliards de lires. Un opérateur privé aurait liquidé Enirisorse, en limitant dans toute la mesure du possible les coûts de liquidation et en n'intervenant que dans la mesure où il y aurait été tenu par une obligation juridique précise. Les éléments dont dispose la Commission l'amènent à exclure que l'ENI soit intervenue pour s'acquitter d'une obligation juridique liée aux procédures ordinaires de liquidation d'une société. Il s'ensuit que les mesures en question constituent des aides d'État. VI Caractère illégal des aides d'État en cause En ce qui concerne la légalité des aides en cause, dans sa réponse à l'ouverture de la procédure, l'Italie soutient que les apports en capital incriminés d'un montant de 133 milliards de lires avaient été communiqués à la Commission dans le cadre du suivi prévu par la décision 98/212/CE. À cet égard, la Commission tient à souligner que l'information relative à ces nouveaux apports en capital, livrée en vrac avec les autres informations transmises à la Commission dans le cadre du suivi en question, aurait dû faire l'objet d'une notification formelle, étant donné qu'il s'agissait de nouvelles aides non comprises dans le montant des aides autorisées avec la décision 98/212/CE. En tout état de cause, les autorités italiennes n'ont pas respecté l'obligation de notifier les aides avant leur mise à exécution, comme la Cour de justice des Communautés européennes l'a précisé, en particulier dans son arrêt du 11 décembre 1973, dans l'affaire 120/73, Lorenz contre Allemagne(5). Les autorités italiennes elles-mêmes reconnaissent que ces 133 milliards de lires n'étaient pas inclus dans les 1819 milliards de lires autorisés par la Commission. Elles soutiennent toutefois que, sur ces 133 milliards, 99 ont servi à réaliser le plan de restructuration approuvé par la Commission. Selon elles, ce dernier apport doit être considéré comme autorisé quant au fond, bien qu'il ne figure pas formellement parmi les aides prévues par le plan, alors que la Commission avait prévu, à l'article 3, paragraphe 1, point b), de sa décision 98/212/CE, que l'Italie lui communiquerait tout autre coût de liquidation. Or, la Commission ne peut accepter pareille exception dans la mesure où l'article 2 de sa décision 98/212/CE prévoyait expressément que l'ENI ne pouvait réinvestir le produit des privatisations des sociétés d'Enirisorse dans d'autres sociétés lui appartenant, mais qu'elle devait s'en servir pour couvrir d'éventuels coûts ultérieurs de liquidation d'Enirisorse. Le libellé de cet article ne laisse aucun doute sur le fait que si la Commission, au moment d'adopter ladite décision, n'excluait pas que la liquidation puisse entraîner des coûts supplémentaires, ce n'était certes pas, pour elle, avec de nouvelles aides publiques sous forme de nouveaux apports en capital, comme cela a été le cas, qu'il fallait y faire face, mais bien au moyen du produit des privatisations des sociétés d'Enirisorse. Tout aussi dépourvue de fondement semble être l'affirmation des autorités italiennes selon laquelle la Commission, sachant que Pertusola Sud allait enregistrer de nouvelles pertes de 48 milliards de lires et ayant accepté sa fermeture au plus tard le 31 décembre 1997, avait implicitement autorisé la couverture de ces pertes. Or, le fait que la Commission ait eu connaissance du fait que Pertusola Sud allait enregistrer de nouvelles pertes n'implique nullement qu'elle ait accepté l'octroi de nouvelles aides visant à les couvrir. En effet, il était parfaitement concevable, et c'est en tout cas ainsi que la Commission l'entendait, comme il ressort de sa décision 98/212/CE, qu'Enirisorse utilise les recettes des privatisations intervenues entre-temps pour faire face aux pertes prévisibles de Pertusola Sud ou, de toute façon, des ressources internes du holding, sans avoir recours à un nouvel apport en capital tout à fait imprévu, comme cela a été le cas. Il s'ensuit que les mesures en question constituent des aides d'État illégales dans la mesure où elles ont été accordées sans que l'Italie les notifie au préalable à la Commission et, a fortiori, sans qu'elles aient été autorisées par celle-ci conformément aux dispositions de l'article 93, paragraphe 3, du traité. VII Compatibilité avec le marché commun des aides illégales en cause En ce qui concerne la compatibilité des aides, l'Italie fait valoir avant tout que les sommes destinées à couvrir les coûts de liquidation et de fermeture d'une entreprise ne peuvent matériellement fausser les conditions de concurrence dans le marché commun ni affecter les échanges entre États membres, puisque les bénéficiaires sont des entreprises qui cessent définitivement leurs activités et quittent le marché. La Commission fait observer à cet égard qu'il s'agit là d'une affirmation gratuite en l'espèce: elle est directement contredite par les observations de l'Union minière, concurrente de Pertusola Sud, qui se plaint que les aides en question aient permis à l'entreprise de poursuivre ses activités sur le marché du zinc, faussant ainsi la concurrence entre elle et les autres producteurs de zinc. En effet, dans le cas d'espèce, les entreprises qui ont bénéficié directement ou indirectement des aides en cause poursuivent aujourd'hui encore leurs activités sur les marchés et continuent bien souvent à produire, comme c'est le cas de Portovesme et de Pertusola Sud, qui reste un producteur actif de zinc bien qu'elle ait été mise en liquidation depuis quelques mois déjà. Sans les aides incriminées, elle aurait dû être vendue ou fermée depuis longtemps. L'exception soulevée par les autorités italiennes ne peut donc être accueillie, puisqu'il s'agit de dépenses de liquidation qui ont eu des répercussions, directes ou indirectes, sur des entreprises qui sont encore actives sur le marché. L'Italie soutient, d'autre part, que, de toute façon, l'établissement de Pertusola est situé dans une zone géographique (Crotone) admissible aux aides régionales en vertu de l'article 92, paragraphe 3, point a), du traité. Les aides en cause devraient donc être considérées comme compatibles avec le marché commun en vertu de la disposition précitée du traité. La Commission fait observer à cet égard que l'article 92, paragraphe 3, point a), du traité autorise la Commission à déclarer compatibles avec le marché commun, par dérogation à l'interdiction des aides d'État qui affectent les échanges entre États membres et sont susceptibles de fausser la concurrence, les "aides destinées à favoriser le développement économique de régions dans lesquelles le niveau de vie est anormalement bas ou dans lesquelles sévit un grave sous-emploi, quand elles n'altèrent pas les conditions des échanges dans une mesure contraire à l'intérêt commun". La Commission a autorisé des aides régionales dans ce contexte après avoir vérifié le critère de la viabilité de l'entreprise. En d'autres termes, la Commission n'autorise une aide régionale que pour autant qu'elle puisse effectivement apporter un avantage à la région, presque toujours sous l'angle de l'emploi, lié à la viabilité à long terme de l'entreprise aidée. En tout cas, il est évident et confirmé par une jurisprudence constante (voir, en dernier lieu, l'arrêt du Tribunal de première instance du 15 septembre 1998, affaires jointes T-126/96 et T-127/96, EFIM et BFM contre Commission)(6) que la Commission ne peut pas, même dans le cadre de l'application de l'article 92, paragraphe 3, point a), du traité, ne pas prendre en considération l'intérêt communautaire, toute mesure régionale spécifique devant être appréciée en fonction de son incidence au niveau communautaire. Dans le cas d'espèce, il ne fait pas de doute que l'Italie invoque purement et simplement une dérogation régionale pour une entreprise qui doit être liquidée, indépendamment de toute perspective de viabilité même à moyen terme. Cela implique que l'apport en capital litigieux ne pourra pas déboucher sur une amélioration concrète de l'emploi dans la région, puisque les autorités italiennes elles-mêmes reconnaissent que, de toute façon, Pertusola Sud, qui a déjà été mise en liquidation, fermera ses portes pour le 31 décembre 1998. L'intervention en cause ne semble pas non plus s'inscrire dans une politique régionale définie, une aide à la liquidation d'une entreprise pouvant difficilement être considérée comme "destinée à favoriser le développement économique" de la zone en question. Il s'agit, au contraire, d'une nouvelle intervention visant à maintenir Pertusola Sud sur le marché à n'importe quel prix et pour seulement quelques mois de plus, en dehors de toute logique industrielle, économique et régionale. Par conséquent, pour ce qui est des dispositions de l'article 92, paragraphe 3, point a), du traité, la Commission doit constater que les mesures d'aide ad hoc en cause n'ont pas été accordées en application d'une stratégie publique visant à favoriser effectivement le développement régional, de nature à justifier la dérogation en question. Elles n'apparaissent pas non plus comme des aides à la création d'emploi dans une région assistée. L'examen du dossier révèle qu'il s'agit au contraire de mesures ponctuelles destinées à permettre le maintien en activité des entreprises encore contrôlées par Enirisorse et en particulier Pertusola Sud, à n'importe quel prix. En ce qui concerne enfin la compatibilité éventuelle des nouvelles aides avec les dispositions de l'article 92, paragraphe 3, point c), du traité, la Commission tient à souligner que l'Italie n'en a pas directement réclamé l'application dans la procédure en cours. À toutes fins utiles, la Commission répète que les aides de l'État ne peuvent bénéficier de la dérogation précitée que pour autant qu'elles n'affectent pas les conditions des échanges dans une mesure contraire à l'intérêt commun. En ce qui concerne les aides à la restructuration, les seules qui pourraient éventuellement être invoquées dans le cas présent, les lignes directrices communautaires pour les aides d'État au sauvetage et à la restructuration des entreprises en difficulté(7) soulignent, notamment, que les aides de ce type doivent constituer une opération exceptionnelle qui ne doit pas être renouvelée en dehors de cas particuliers le justifiant. Or, dans le cas présent, les aides litigieuses, aides nouvelles par rapport à celles qu'autorisait la décision 98/212/CE, ont été accordées en violation de ce principe de non-renouvellement en l'absence de faits nouveaux à caractère exceptionnel éventuellement susceptibles d'en justifier l'autorisation par la Commission. VIII À la lumière de ce qui précède, la Commission considère que les aides, sous la forme d'apports en capital d'un montant de 133 milliards de lires, à l'égard desquelles il a été décidé d'ouvrir la présente procédure à l'encontre de l'Italie, ne peuvent bénéficier d'aucune des dérogations prévues à l'article 92, paragraphe 3, points a) à c), du traité dans la mesure où elles ne visent pas à favoriser le développement économique de régions ayant un niveau de vie anormalement bas ni la restructuration d'entreprises dont la fermeture est imminente et, en tout cas, non postérieure au 31 décembre 1998. Au moment de l'ouverture de la procédure, la Commission a attiré l'attention des autorités italiennes sur le fait que toute aide accordée illégalement peut faire l'objet d'une décision obligeant l'État membre à récupérer l'aide versée et, en l'occurrence, il est indispensable de récupérer l'aide pour rétablir les conditions égales de concurrence qui existaient avant son octroi, A ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION:
Article premier Les aides d'État accordées par l'Italie en 1997 à Enirisorse SpA sous la forme d'une recapitalisation d'un montant de 133 milliards de lires italiennes sont incompatibles avec le marché commun.
Article 2 1. L'Italie prend toutes les mesures nécessaires pour récupérer auprès d'Enirisorse SpA les aides visées à l'article 1er qu'elle a déjà mises illégalement à la disposition de celle-ci. 2. Les aides sont récupérées suivant les modalités prescrites par la législation italienne relatives à la récupération des aides d'État. Les sommes à récupérer produisent des intérêts à compter de la date à laquelle elles ont été mises à la disposition d'Enirisorse SpA jusqu'à la date de leur récupération. Les intérêts sont calculés sur la base du taux utilisé par la Commission pour le calcul de l'équivalent-subvention net dans le cadre des aides à finalité régionale.
Article 3 L'Italie informe la Commission des mesures prises pour se conformer à la présente décision dans les deux mois suivant sa notification.
Article 4 La République italienne est destinataire de la présente décision.
Fait à Bruxelles, le 25 novembre 1998.
Par la Commission Karel van Miert Membre de la Commission
(1) JO C 70 du 6.3.1998, p. 5. (2) JO L 80 du 18.3.1998, p. 34. (3) Voir la note 1 de bas de page. (4) JO C 307 du 13.11.1993, p. 3. (5) Rec. 1973, p. 1471. (6) Recueil 1998, p. II-3437, point 101. (7) JO C 283 du 19.9.1997, p. 2.
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Document livré le: 14/07/2000
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