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Législation communautaire en vigueur

Structure analytique

Document 397D0745

Chapitres du répertoire où le document peut être trouvé:
[ 08.50 - Application des règles de concurrence aux entreprises publiques ]
[ 08.30 - Positions dominantes ]


397D0745
97/745/CE: Décision de la Commission du 21 octobre 1997 au titre de l'article 90 paragraphe 3 du traité CE relative aux tarifs de pilotage dans le port de Gênes (Le texte en langue italienne est le seul faisant foi.) (Texte présentant de l'intérêt pour l'EEE)
Journal officiel n° L 301 du 05/11/1997 p. 0027 - 0035



Texte:

DÉCISION DE LA COMMISSION du 21 octobre 1997 au titre de l'article 90 paragraphe 3 du traité CE relative aux tarifs de pilotage dans le port de Gênes (Le texte en langue italienne est le seul faisant foi.) (Texte présentant de l'intérêt pour l'EEE) (97/745/CE)
LA COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,
vu le traité instituant la Communauté européenne, et notamment son article 90 paragraphe 3,
vu la plainte de la compagnie Tourship, du 21 juin 1994, contre le système de rabais sur les tarifs de pilotage dans le port de Gênes, retirée le 8 juillet 1997,
après avoir donné aux autorités italiennes, à la Corpo dei piloti del porto di Genova (ci-après «la corporation des pilotes»), à Tirrenia, Viamare di Navigazione, Navarma et Tourship l'occasion de faire connaître leur point de vue concernant les griefs formulés par la Commission au sujet du système de rabais sur les tarifs de pilotage dans le port de Gênes,
considérant ce qui suit:

LES FAITS
La présente procédure concerne le système de rabais sur les tarifs de pilotage dans le port de Gênes.

La mesure étatique en cause
(1) À la suite de plusieurs questions préjudicielles posées par le tribunal de Gênes dans le cadre d'un litige entre Corsica Ferries et la corporation des pilotes, la Cour de justice des Communautés européennes a rendu un arrêt le 17 mai 1994 dans l'affaire C-18/93, Corsica Ferries (1), relatif au tarif de pilotage dans le port de Gênes. La Cour a considéré que «les articles 90 paragraphe 1 et 86 du traité interdisent à une autorité nationale, en approuvant les tarifs arrêtés par une entreprise investie du droit exclusif d'offrir des services de pilotage obligatoire dans une partie substantielle du marché commun, d'amener celle-ci à appliquer des tarifs différents aux entreprises de transport maritime, selon que ces dernières effectuent des transports entre États membres ou entre des ports situés sur le territoire national, dans la mesure où le commerce entre États membres est affecté.»
Le 26 mai 1994, Tourship (ex-Corsica Ferries) a demandé à la corporation des pilotes du port de Gênes à bénéficier des réductions accordées aux navires effectuant du cabotage en application de l'arrêt susmentionné. Le 1er juin 1994, la corporation des pilotes a fait part à Tourship, de l'obligation qui lui est faite d'appliquer les tarifs publiés par le ministère de la marine marchande. Le ministère de la marine marchande n'ayant pas publié de nouveaux tarifs à cette date, la corporation des pilotes avait été contrainte d'appliquer les tarifs mis en cause par la Cour.
Le 21 juin 1994, Tourship a déposé plainte auprès de la Commission à l'encontre du système de réductions sur les tarifs de pilotage dans le port de Gênes, système qui a fait l'objet de l'arrêt précité.
Le 5 octobre 1994, un nouveau tarif a été publié par la circulaire n° 5203904. Conformément à l'article 91 du code de la navigation, les tarifs de pilotage sont approuvés par le ministre de la marine marchande après avis des associations syndicales intéressés. Ces tarifs sont rendus exécutoires dans chaque port par décret de l'autorité maritime compétente. Dans le port de Gênes, le décret 17/94 du 12 octobre 1994 de l'autorité maritime a rendu exécutoire ladite circulaire.
L'article 1er du décret en question fixe le tarif de base calculé en fonction du tonnage de jauge brute du navire.
L'article 4 fixe les majorations tarifaires pour les services fournis hors des heures et des jours de travail normaux, majorations allant de 40 à 50 % du tarif de base.
L'article 10 prévoit le système de rabais suivant sur les tarifs de pilotage:
- une réduction de 65 % du tarif de base de pilotage est consentie aux compagnies maritimes effectuant au moyen de navires passagers au moins trois escales journalières, avec un itinéraire, des horaires et fréquences réguliers,
- une réduction de 50 % du tarif de base de pilotage est consentie aux compagnies maritimes effectuant au moyen de navires passagers au moins quatre escales par semaine, avec un itinéraire, des horaires et fréquences réguliers,
- les compagnies maritimes, qui effectuent dans le trimestre calendrier le nombre d'escales suivant bénéficient du tarif calculé selon le schéma suivant:
>EMPLACEMENT TABLE>
Une escale comprend au sens de la circulaire une entrée et une sortie du port.
Le 4 septembre 1996, un nouveau tarif a été publié par la circulaire n° 5203359. Dans le port de Gênes, le décret 19/96 du 9 septembre 1996 de l'autorité maritime a rendu exécutoire ladite circulaire.
L'article 1er du décret en question fixe le tarif de base calculé en fonction du tonnage de jauge brute du navire. Il y a trois typologies de tarifs de base selon qu'il s'agit de navires pétroliers avec ou sans ballast séparé ou d'autres types de navires. Le paragraphe 2 de l'article 1er établit les tarifs pour les navires jusqu'à 2000 tjb qui ont recours au pilotage par radio et pour les navires admis au pilotage par radio à la sortie du port «Porto Vecchio» au sens du décret ministériel du 2 septembre 1996 (2).
L'article 5 fixe les majorations tarifaires pour les services fournis hors des heures et des jours de travail normaux, majorations allant de 40 à 100 % du tarif de base.
L'article 10 prévoit le système suivant de rabais sur les tarifs de pilotage:
- une réduction de 65 % du tarif de base de pilotage est consentie aux compagnies maritimes effectuant au moyen de navires passagers au moins quatre escales hebdomadaires, avec un itinéraire, des horaires et fréquences réguliers,
- Les compagnies maritimes, qui effectuent dans le trimestre calendrier le nombre d'escales suivant, bénéficient du tarif calculé selon le schéma suivant:
>EMPLACEMENT TABLE>

Les entreprises et les services concernés
(2) La corporation des pilotes du port de Gênes est l'organisation professionnelle regroupant les vingt et un pilotes exerçant dans le port de Gênes. Elle exerce, par le truchement de ses membres, une activité économique à savoir la prestation de service de pilotage. Elle a été investie par les pouvoirs publics du droit exclusif d'effectuer les services de pilotage obligatoire dans le port de Gênes.
(3) Tourship Italia (ex-Corsica Ferries) est une compagnie maritime de droit italien opérant des liaisons régulières entre Gênes et la Corse au moyen de deux ferries. Depuis le mois de juin 1997, Tourship opère également une liaison à grande vitesse. Tourship a obtenu la concession d'un quai à l'intérieur du port de Gênes.
(4) Tirrenia di Navigazione est une entreprise contrôlée à 99 % par la Societa finanziaria marittima Finmare, elle-même contrôlée par IRI (holding public). Elle exploite principalement des services de ferries et de transport de marchandises à destination de la Sicile et de la Sardaigne.
Viamare di Navigazione (absorbé le 18 décembre 1996 par Italia di Navigazione) est une entreprise contrôlée à 99 % par la Societa finanziaria marittima Finmare, elle même contrôlée par IRI (holding public). Italia di Navigazione opère au moyen de six navires porte-conteneurs.
Navarma est une entreprise spécialisée dans le transport de passagers et de véhicules au moyen de ferries à destination de l'île d'Elbe, de la Corse et de la Sardaigne.
(5) Le service de pilotage, dans les ports maritimes italiens, est un service portuaire soumis à l'autorité du commandant du port. Ce service est régi par le code de la navigation (articles 86 à 100) et le règlement d'exécution de ce code (articles 98 à 137). Normalement facultatif, le service de pilotage peut être rendu obligatoire, dans un port, par décret du président de la République. Dans la quasi-totalité des ports italiens, le service de pilotage est devenu obligatoire. Dans le port de Gênes, le décret du ministre des transports et de la navigation du 30 décembre 1992 a rendu le pilotage obligatoire. Le caractère obligatoire de ce service a été réaffirmé dans le décret ministériel du 2 septembre 1996.
Le décret du ministre du transport et de la navigation a prévu la possibilité d'un recours, sous certaines conditions, aux services de pilotage par radio au départ de la partie du port Porto Vecchio.
Conformément à l'article 86 du code de la navigation, une corporation de pilotes, dotée de la personnalité juridique, est instituée par décret du président de la République dans les ports et autres voies d'accès ou de passage des navires où la nécessité d'un service de pilotage a été reconnue.
Dans un port donné, entre la corporation des pilotes et le commandant du navire, représentant l'armateur, s'établit un contrat de prestations de services à titre onéreux en vertu duquel un pilote, associé de la corporation, assiste le commandant du navire dans les manoeuvres nécessaires pour entrer, sortir ou circuler dans le port ainsi que pour les opérations nécessaires pour l'accostage et le départ du quai. L'armateur s'adresse à la corporation qui désigne un pilote qui fournira le service.

APPRÉCIATION JURIDIQUE

Article 90 paragraphe 1
(6) L'article 90 paragraphe 1 prévoit que les États membres ont l'obligation de ne pas édicter ni de maintenir en faveur d'entreprises publiques ou entreprises auxquelles ils accordent des droits spéciaux ou exclusifs aucune mesure contraire aux règles du traité.
La Cour a déclaré dans l'arrêt précité que la corporation des pilotes du port de Gênes est une entreprise investie par les pouvoirs publics du droit exclusif d'effectuer les services de pilotage obligatoire dans le port de Gênes. Elle a, en outre, indiqué que l'approbation des tarifs de pilotage par l'État membre constituait une mesure étatique au sens de l'article 90 paragraphe 1.
Le 2 septembre 1996, le ministre des transports et de la navigation a adopté un décret qui a confirmé le caractère obligatoire du service de pilotage. La circulaire n° 5203359 du ministre des transports et de la navigation approuve les tarifs de ce service dans les ports italiens. Cette circulaire a été rendue exécutoire par le décret 19/96 du 9 septembre 1996 de la direction maritime de Gênes pour le port de Gênes. Cette approbation des tarifs de pilotage constitue donc une mesure étatique au sens de l'article 90 paragraphe 1 du traité comme affirmé dans l'arrêt de la Cour de justice dans l'affaire Corsica Ferries.

Article 86
Le marché en cause
(7) Le marché en cause est celui des services de pilotage dans le port de Gênes (Corsica Ferries) (3).
Par ailleurs, les liaisons maritimes intracommunautaires constituent un marché voisin mais distinct qui est affecté par les effets d'un comportement de la corporation des pilotes sur le marché des services de pilotage.
La position dominante
(8) Selon la jurisprudence de la Cour de justice, une entreprise qui bénéficie d'un monopole légal dans une partie substantielle du marché commun peut être considérée comme occupant une position dominante au sens de l'article 86 du traité (arrêt Höfner, du 23 avril 1991, dans l'affaire C-41/90 (4), arrêt ERT, du 18 juin 1991, dans l'affaire C-260/89 (5) et arrêt Port de Gênes, du 10 décembre 1991, dans l'affaire C-179/90 (6).
La corporation des pilotes du port de Gênes est une entreprise au sens de l'article 90 paragraphe 1 du traité qui détient du fait du droit exclusif octroyé par l'article 96 du code de la navigation une position dominante sur le marché des services de pilotage dans le port de Gênes.
La partie substantielle du marché commun
(9) Compte tenu, notamment, du volume du trafic dans ce port et de l'importance que revêt ce dernier au regard de l'ensemble des activités d'importation et d'exportation maritimes dans l'État membre concerné, ce marché peut être considéré comme constituant une partie substantielle du marché commun (arrêt de la Cour Port de Gênes).
L'abus de position dominante
(10) Le système de rabais sur les tarifs de pilotage mis en place par la circulaire n° 5203359 du ministre des transports et de la navigation du 4 septembre 1996 a pour effet d'appliquer à l'égard des différentes compagnies maritimes des conditions inégales à des prestations équivalentes, concernant les manoeuvres à l'entrée, à l'intérieur ou à la sortie du port en leur infligeant de ce fait un désavantage dans la concurrence.
a) Les conditions inégales
(11) Le système de rabais en question repose sur le nombre d'escales hebdomadaires. Le tableau suivant dresse un historique des bénéficiaires de ces rabais.
>EMPLACEMENT TABLE>
La comparaison de ces différents tarifs fait apparaître une certaine constance en ce qui concerne les bénéficiaires des rabais. Tirrenia obtient, quel que soit le tarif considéré, un rabais de 65 %.
b) Les prestations équivalentes
(12) Pour l'entrée, la sortie ou les manoeuvres à l'intérieur du port de Gênes, le service de pilotage est identique pour un type de navire donné (taille, jauge ou tonnage). Le fait que le navire appartienne à une compagnie maritime plutôt qu'à une autre n'a pas d'influence sur la prestation du service de pilotage.
À cet égard, les autorités italiennes dans leur réponse à la lettre de mise en demeure ont indiqué que la dimension du navire, le type de produit transporté et l'utilisation de remorqueurs sont des facteurs importants qui rendent les prestations de pilotage différentes d'un navire à un autre. Mais, le nombre d'escales dans le port est l'élément déterminant pour la prestation du service qui est très réduite dans le cas d'un commandant qui manoeuvre fréquemment dans le port concerné.
La Commission est d'avis que les facteurs mentionnés par les autorités italiennes influent sur la prestation du service de pilotage. C'est d'ailleurs pour cette raison que le tarif prend en compte certains de ces éléments notamment le poids du navire et la distinction entre pétrolier ou autres navires. L'utilisation ou non de remorqueurs peut également influer sur la prestation du service de pilotage mais force est de constater que les rabais incriminés ne sont pas fonction de cet élément. En ce qui concerne l'argument de la prestation réduite, ce point est abordé en détail au considérant 19.
c) Effet sur la concurrence
(13) Sur une liaison comme Gênes-Bastia où Tourship, Moby Lines (Navarma) et Tirrenia entre autres sont en concurrence, ces compagnies bénéficient d'un rabais important sur leurs frais de pilotage pour une prestation équivalente de la part de la corporation des pilotes infligeant de ce fait un désavantage dans la concurrence à toute autre compagnie active ou désirant entrer sur cette ligne.
(14) Les autorités italiennes ont justifié l'instauration d'un tel système par des économies d'échelle qui seraient réalisées en premier lieu en matière de planification et d'affectation des pilotes et en second lieu par une prestation plus réduite de pilotage dans le cas des ferries.
Économies d'échelle liées à la planification
Selon les autorités italiennes, des économies d'échelle importantes seraient réalisées en matière de planification. Les navires de ligne déposent de façon anticipée leurs horaires pour un trimestre auprès de la corporation des pilotes. La corporation est donc en mesure d'évaluer le nombre de prestations nécessaires, le nombre de pilotes minimal par tranche horaire et les horaires auxquels ils travailleront. Ces prévisions permettent une allocation optimale des pilotes en diminuant au maximum les temps d'inactivité. Les navires non réguliers, qui, par nature, n'ont pas d'horaires préfixés, obligent la corporation des pilotes à avoir un nombre supérieur de pilotes ou à instaurer un système de garde.
Les pilotes ont deux activités principales: coordination/organisation des navires et pilotage à bord ou par radio. Pour un navire non régulier, la première fonction occupe 65 % du temps des pilotes alors que pour un navire qui effectue trois escales journalières le temps consacré à ces fonctions serait quasi nul.
Les autorités italiennes dans leurs deux dernières réponses aux demandes de renseignements de la Commission (lettres du 6 novembre 1995 et du 22 février 1996) ont proposé deux méthodes de calcul pour démontrer l'existence d'économies d'échelle, méthodes qui sont étudiées ci-après.
Première méthode: lettre du 6 novembre 1995
(15) Depuis 1973, le chiffre d'affaires annuel d'une station de pilotage, qui détermine le revenu des pilotes, est défini selon la formule suivante:
F = C +>NUM>n>DEN>32 × Qb × N × 12

F est le chiffre d'affaires annuel d'une station de pilotage,
C est le coût du service (frais généraux, administratifs, réparations, etc.),
n est le nombre d'heures effectuées par semaine et par pilote,
32 est le nombre d'heures légal par semaine et par pilote,
Qb est le quota de base
Qb = Eb ×>NUM>(100 + Kt)>DEN>100

Eb correspond à un revenu minimal garanti par l'État aux pilotes exerçant leur autorité dans les ports italiens
Kt mesure les spécificités (7) de chaque port
N est le nombre de pilotes
Le chiffre d'affaires (F) est l'addition des différents coûts engendrés pour la prestation des services de pilotages (frais généraux, réparations et main d'oeuvre).
Selon les autorités italiennes, le coût du service (C) serait réduit si l'on ne considérait que le trafic régulier qui demande une planification plus réduite:
>EMPLACEMENT TABLE>
Le coefficient (K), qui mesure les spécificités du port, serait en diminution de 12 % puisque le port ne nécessiterait plus un service 24h/24 ni un service en rade.
Le nombre (n) d'heures effectuées par semaine et par pilote serait en diminution de 12 % puisque seul le port commercial demeurerait en activité.
Le chiffre (F) d'affaires annuel s'établirait à 4 005 millions de lires italiennes (ITL) au lieu de 7 954 millions de ITL soit une réduction de 50 %.
Ces 50 % seraient répartis selon le schéma suivant:
- 80 % du trafic bénéficient de 65 % de réduction,
- 20 % du trafic bénéficient de 15 % de réduction.
(16) L'hypothèse de départ du calcul élaboré par les autorités italiennes est erronée. En effet, pour isoler les réductions de coût dues à la nature du trafic (régulier/non régulier), le calcul doit s'effectuer au niveau du trafic constant dans le port et non pas simplement en supprimant le trafic non régulier actuel. C'est pourquoi, les réductions reprises ci-dessus s'expliquent en grande partie par un moindre trafic et non pas par la modification du type de transport (régulier/non régulier). Seuls les coûts relatifs à l'administration et aux communications seraient susceptibles d'engendrer des économies d'échelle lors de la comparaison trafic régulier/non régulier. Ces économies seraient au maximum de l'ordre de 14 % (réduction des coûts d'administration et de communication/total des coûts) et non pas de 65 %. L'économie totale, en reprenant la formule ci-dessus, s'établirait donc entre 15 et 20 %.
Il est intéressant de noter que le calcul compare trafic régulier de passagers et trafic non régulier et non pas trafic engendré par un certain nombre d'escales hebdomadaires et autres. Par conséquent, si le taux de 50 % calculé ci-dessus se justifiait par les économies d'échelle définies par les autorités italiennes, la réduction correspondante devrait s'appliquer au trafic régulier de passagers dans son ensemble.
L'effet d'activité hors et pendant les pics est déjà partiellement pris en compte dans les majorations dues pour des services effectués hors des heures et jours normaux de travail (article 5 du décret).
Deuxième méthode: l'amortissement des coûts fixes. Étude de l'université «Tor vergata» (lettre du 22 février 1996)
(17) Le but de cette étude présentée par les autorités italiennes est de démontrer que le coût de la prestation de services de pilotage pour Tirrenia est bien moindre que celui engendré par la prestation de services de pilotage pour quatre autres compagnies régulières. À cet effet, l'étude compare le coût moyen de la prestation d'une part pour Tirrenia et d'autre part pour les quatre autres compagnies. La différence entre ces deux coûts moyens de prestation représenterait les économies d'échelle réalisées. Le coût moyen de la prestation journalière s'établit pour Tirrenia et pour les quatre compagnies régulières [GNV, Navarma, Compagnie tunisienne de navigation et Tourship (ex-Corsica Ferries)] comme suit:
Hypothèses:
Tirrenia et les quatre compagnies ci-dessus représentent 28,62 % des prestations des pilotes.
Le quota de base mensuel (revenu minimal garanti) généré par le trafic de ces cinq compagnies représente donc 28,62 % du revenu de chaque pilote (Qb × 28,62 %).
Tirrenia a une moyenne de treize escales par jour, les quatre autres compagnies mentionnées ci-dessus prises ensemble ayant neuf escales par jour en moyenne.
Les autres compagnies régulières desservant le port de Gênes (environ vingt-cinq) ne sont pas reprises dans l'échantillon.
Le coût de la prestation journalière (CU) pour la corporation pour les cinq compagnies données (28,62 % de l'activité de la corporation) est fonction du revenu journalier de l'ensemble des vingt et un pilotes. (Qb × >NUM>21>DEN>30) soit la formule:
CU = Qb × 28,62 % × >NUM>21>DEN>30
Le coût moyen de la prestation journalière pour Tirrenia est donc le coût de la prestation journalière pour la corporation divisé par le nombre d'escales journalières (>NUM>CU>DEN>13).
Le coût moyen de la prestation journalière pour le groupe des quatre compagnies s'établit donc à >NUM>CU>DEN>9
, neuf étant le nombre d'escales journalières.
L'écart serait donc l'économie d'échelle réalisée.
(18) De nouveau, le raisonnement est erroné. En effet, d'une part, ce raisonnement signifierait qu'à chaque instant les vingt et un pilotes travaillent uniquement pour Tirrenia. D'autre part, le coût de la prestation est à apprécier par prestation et non pas par groupe de prestation journalière. Ce raisonnement serait fondé si la corporation n'effectuait qu'une prestation pour les treize escales contre une pour neuf escales. Il n'y a aucune raison de considérer qu'une prestation pour un navire de Tirrenia est différente d'une prestation pour un navire de Tourship. Par ailleurs, si la logique retenue dans cette étude était poussée à l'extrême, le coût moyen unitaire calculé de toutes les compagnies sauf Tirrenia serait très inférieur à celui de Tirrenia. Tirrenia serait, par conséquent, la seule à ne pas bénéficier de réductions.
L'étude porte ensuite sur la distribution journalière, mensuelle ou annuelle des escales dans le port de Gênes. Selon l'auteur de l'étude, Tirrenia serait plus régulière que les autres compagnies à la fois au cours de la journée et au cours de l'année. Les réductions seraient donc une prime à la régularité.
Le pilotage étant un service obligatoire, cette approche ne peut être retenue. En effet, on peut concevoir qu'il y ait une tarification heures de pointe/heures creuses ou basse saison/haute saison pour faire face aux problèmes d'allocation des pilotes pendant les périodes de pointe. Cependant, il n'est pas possible de considérer, comme le fait cette étude, que le trafic de Tirrenia est le trafic «normal» et que toutes les autres compagnies engendrent du trafic de pointe. De nouveau, comme dans l'explication précédente, une distinction trafic régulier/non régulier pourrait se justifier pour des raisons d'économies d'échelle liées à la planification.
Prestation réduite
(19) Les autorités italiennes estiment qu'une compagnie maritime effectuant quatre escales par semaine requiert un service de pilotage réduit.
Selon l'étude EU maritime pilotage effectuée par RH& H Consult à la demande de la Commission, tous les États membres, à l'exception de l'Italie, accordent soit un certificat d'exemption de pilotage (agrément ad personam du capitaine) après un certain nombre d'escales dans un port donné, soit une exemption de pilotage pour les navires réguliers de transbordement. Le nombre d'escales demandé pour le certificat d'exemption de pilotage s'échelonne entre six et trente-six selon les États membres et les ports. Ces États membres considèrent donc qu'un capitaine effectuant entre six et trente-six escales par an ne nécessite plus de pilote. On peut donc en tirer la conclusion que les capitaines effectuant ce nombre d'escales requièrent effectivement dans un État membre, qui a rendu le pilotage obligatoire, un service réduit voire nul. À Gênes, il faut quatre escales par semaine (deux cent huit par an) par compagnie pour bénéficier de réductions substantielles. Les réductions sont comptabilisées par compagnie et non pas par capitaine. Un nouveau capitaine d'une compagnie qui possède de nombreux navires donnera droit à une réduction alors que la prestation des pilotes sera complète. Étant donné le nombre de navires des compagnies en cause, les seuils donnant droit à réduction sont sensiblement plus élevés que dans les autres États membres sans qu'il ait été démontré que l'entrée ou la sortie du port de Gênes soit d'une difficulté particulière.
Le 2 septembre 1996, le décret du ministre du transport et de la navigation a prévu que les ferries supérieurs à 15 000 tonnes de jauge brut en service de ligne, avec itinéraires et horaires fixes et fréquences régulières, puissent utiliser les services de pilotage par radio uniquement au départ de la partie du port Porto Vecchio et s'ils ne font pas appel aux services des remorqueurs lorsque le capitaine maîtrise la langue italienne et a effectué à bord du même type de navires dix approches avec un pilote à bord (entrée et sorties du port). Cette possibilité n'est cependant pas offerte à l'entrée du port ou à la sortie des quais autres que Porto Vecchio.
(20) Les différentes études présentées par les autorités italiennes ne montrent pas qu'il existe des économies d'échelle dans la prestation de services de pilotage pour les quatre compagnies bénéficiaires du rabais de 65 % par rapport aux autres compagnies opérant à partir du port de Gênes. Les études montrent, cependant, que le coût de la prestation de services de pilotage pour les compagnies régulières est moins élevé que cette même prestation pour les compagnies non régulières. Cependant, l'économie réalisée pour la prestation de services de pilotage pour l'ensemble des compagnies régulières est loin de représenter 65 % du coût de la prestation. Elle représenterait selon l'étude du 6 novembre 1995 au maximum 20 %. Cette économie devrait donc être équitablement répartie entre toutes les compagnies régulières et non pas uniquement entre les quatre bénéficiaires précités.
Le système actuel, par conséquent, a pour effet d'appliquer à l'égard des différentes compagnies maritimes des conditions inégales à des prestations équivalentes concernant les manoeuvres à l'entrée, à l'intérieur ou à la sortie du port en leur infligeant de ce fait un désavantage dans la concurrence.
(21) Dans leur réponse à la lettre de mise en demeure, les autorités italiennes ont indiqué qu'un opérateur économique même en situation de monopole doit avoir la possibilité de mettre en place une politique incitative pour ses clients les plus importants et de pratiquer ainsi une politique de marketing portuaire.
Selon la jurisprudence de la Cour (8), des comportements commerciaux considérés comme normaux peuvent constituer des abus au sens de l'article 86 du traité s'ils sont le fait d'une entreprise en position dominante.
Une différence de traitement de la part d'une entreprise en position dominante entre ses différents clients doit être justifiée par des raisons objectives.
Le port de Gênes, compte tenu de sa position géographique et du réseau de communications qui y est lié, dispose pour une très grande partie de son trafic d'un monopole naturel, notamment en ce qui concerne le trafic de passagers. Il est le passage obligé pour une compagnie maritime désirant exploiter des liaisons vers les îles de la Méditerranée (Corse, Sicile, Sardaigne).
Les compagnies maritimes n'ont pas d'alternative. Il y a très peu de risque que les compagnies maritimes modifient leurs liaisons maritimes et, par conséquent, changent de port pour répondre à une offre plus intéressante en matière de pilotage d'un port concurrent. Les pilotes ne peuvent, en l'absence de raisons objectives, favoriser certaines compagnies maritimes au détriment d'autres.
L'existence d'économies d'échelle et la protection des fonds marins peuvent, par exemple, être considérées comme des raisons objectives.
Comme expliqué ci-dessus, ces économies d'échelle sont faibles dans le présent cas d'espèce et n'atteignent pas les 65 % de réductions accordées à certaines compagnies maritimes.
Au demeurant, ces réductions ne sont pas assises sur un critère portant sur la protection des fonds marins.
Pour les raisons exposées ci-dessus, le fait pour une entreprise, placée dans la situation de la corporation des pilotes, d'appliquer à l'égard de partenaires commerciaux des conditions inégales à des prestations équivalentes en leur infligeant de ce fait un désavantage dans la concurrence constitue un abus de position dominante au sens de l'article 86 deuxième alinéa point c) du traité.
Dès lors que, dans le présent cas d'espèce, un État membre a approuvé un tel système par voie réglementaire, c'est-à-dire en approuvant formellement les tarifs en cause par voie d'une circulaire, une telle mesure étatique constitue une violation de l'article 90 en liaison avec l'article 86 deuxième alinéa point c) du traité.
La Cour, dans le cadre des anciens tarifs de pilotage dans le port de Gênes, a considéré qu'un État membre enfreint les dispositions des articles 90 et 86 du traité, en approuvant les tarifs arrêtés par l'entreprise lorsqu'il amène celle-ci à exploiter sa position dominante de façon abusive en procédant à l'application aux partenaires commerciaux de conditions inégales pour des prestations équivalentes, au sens de l'article 86 deuxième alinéa point c) du traité (arrêt Corsica Ferries).
Effet sur le commerce entre les États membres
(22) Le système de rabais, tel qu'il est appliqué, grève le prix du transport des transporteurs ne pouvant bénéficier de ce système. En effet, les charges portuaires sont un poste de dépenses important dans les charges d'exploitation d'une compagnie maritime.
Dans son arrêt Corsica Ferries (9), la Cour a reconnu que des pratiques discriminatoires appliquées à des prestations identiques dudit service «sont susceptibles d'affecter le commerce entre États membres en ce qu'elles touchent des entreprises effectuant des transports entre deux États membres.»

Article 90 paragraphe 2
(23) Bien que les autorités italiennes aient indiqué que le service de pilotage avait une forte composante de service public, elles n'ont pas invoqué l'exception prévue à l'article 90 paragraphe 2 du traité pour justifier l'instauration et le maintien du système de rabais. En outre, en l'espèce, l'application des règles de concurrence ne fait pas obstacle à la mission particulière confiée à la corporation des pilotes qui est celle du contrôle et de la sécurité du trafic à l'intérieur du port et de la préservation des fonds marins.
L'exception prévue par l'article 90 paragraphe 2 n'est donc pas d'application.

Conclusion
Compte tenu de ce qui précède, la Commission considère que la mesure étatique visée au considérant 1 constitue une infraction à l'article 90 paragraphe 1 du traité en liaison avec l'article 86,
A ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION:


Article premier
Le système de rabais sur les tarifs de pilotage dans le port de Gênes instauré en dernier lieu par la circulaire n° 5203359 du ministère des transports et de la navigation du 4 septembre 1996 constitue une mesure incompatible avec l'article 90 paragraphe 1 du traité en liaison avec l'article 86 dudit traité.

Article 2
Le gouvernement italien est tenu de mettre fin à l'infraction décrite à l'article 1er et d'informer la Commission, dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision, des mesures prises à cet effet.

Article 3
La République italienne est destinataire de la présente décision.

Fait à Bruxelles, le 21 octobre 1997.
Par la Commission
Karel VAN MIERT
Membre de la Commission

(1) Recueil 1994, p. I-1783.
(2) Pour une description de ce décret, se reporter au considérant 5.
(3) Recueil 1994, p. I-1783, point 41 des motifs.
(4) Recueil 1991, p. I-1979.
(5) Recueil 1991, p. I-2925.
(6) Recueil 1991, p. I-5889.
(7) Les coefficients K se réfèrent à la disponibilité horaire des pilotes, à la charge de travail, au tonnage des navires pilotés, à la proportion de travail de nuit, aux conditions météorologiques, à l'absence ou à la non-adéquation d'autres services portuaires.
(8) Arrêt du Tribunal de première instance du 1er avril 1993, BPB Industries et British Gypsum/Commission, T-65/89, Recueil 1993, p. II-389, point 69 des motifs.
(9) Recueil 1994, p. I-1783, point 44 des motifs.


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Structure analytique Document livré le: 11/03/1999


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