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Législation communautaire en vigueur

Structure analytique

Document 395D0364

Chapitres du répertoire où le document peut être trouvé:
[ 08.50 - Application des règles de concurrence aux entreprises publiques ]
[ 08.30 - Positions dominantes ]


395D0364
95/364/CE: Décision de la Commission, du 28 juin 1995, au titre de l'article 90 paragraphe 3 du traité CE (Les textes en langues française et néerlandaise sont les seuls faisant foi) (Texte présentant de l'intérêt pour l'EEE)
Journal officiel n° L 216 du 12/09/1995 p. 0008 - 0014



Texte:

DÉCISION DE LA COMMISSION du 28 juin 1995 au titre de l'article 90 paragraphe 3 du traité CE (Les textes en langues française et néerlandaise sont les seuls faisant foi.) (Texte présentant de l'intérêt pour l'EEE) (95/364/CE)
LA COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,
vu le traité instituant la Communauté européenne, et notamment son article 90 paragraphe 3,
vu la plainte de la compagnie British Midland, du 8 février 1993, contre le système de rabais sur les redevances d'atterrissage mis en place à l'aéroport Bruxelles-National (Zaventem),
après avoir donné aux autorités belges, à la Régie des voies aériennes et aux compagnies aériennes Sabena et Sobelair l'occasion de faire connaître leur point de vue concernant les griefs formulés par la Commission au sujet du système de rabais sur les redevances d'atterrissage mis en place à l'aéroport Bruxelles-National (Zaventem),
considérant ce qui suit:

LES FAITS
La présente procédure concerne le système de rabais sur les redevances d'atterrissage mis en place à l'aéroport Bruxelles-National (Zaventem):
British Midland (BM) estime que le système de rabais progressif en fonction du volume de trafic favorise les compagnies ayant un fort trafic à partir de l'aéroport de Bruxelles en infligeant de ce fait un désavantage aux petites compagnies concurrentes. En outre, selon BM, il n'y a aucune justification objective pour accorder ce type de rabais puisque le service à apporter à un appareil atterrissant ou décollant est le même, quel que soit le nombre de prestations fournies.
BM fait remarquer que, bien qu'elle opère 144 mouvements par semaine, elle n'est pas en mesure d'atteindre le montant minimal mensuel de redevances donnant lieu à rabais. Elle ne bénéficie donc d'aucune réduction de ses charges aéroportuaires alors que Sabena, sa principale concurrente, obtient une diminution de 74 millions de francs belges (FB) par an de ses charges aéroportuaires.

La mesure étatique en cause
(1) L'article 1er de l'arrêté royal du 22 décembre 1989 (1) indique que « la Régie des voies aériennes est autorisée à percevoir, pour l'utilisation de l'aéroport de Bruxelles National, les redevances fixées au présent arrêté ». L'article 2 de ce même arrêté fixe les redevances d'atterrissage à un certain montant par tonne selon le type d'aéronef - tout cargo ou autre. En son paragraphe 2, il instaure un système de rabais selon le schéma suivant:
Les redevances dues pour un mois civil sont diminuées de:
- 7,5 % sur la partie du montant dû comprise entre 5 et 10 millions de FB,
- 15 % sur la partie du montant dû comprise entre 10 et 15 millions de FB,
- 20 % sur la partie du montant dû comprise entre 15 et 20 millions de FB,
- 30 % sur la partie du montant dû supérieure à 20 millions de FB.
En 1991 comme en 1992, trois compagnies seulement ont pu bénéficier de ces diminutions pour les montants annuels suivants:
>EMPLACEMENT TABLE>

Les entreprises et les services concernés
(2) La Régie des voies aériennes (RVA) est un organisme de droit public belge qui a été chargé par l'État de deux missions de service public, dans l'intérêt général et selon les principes commerciaux, à savoir i) la construction, l'aménagement, l'entretien et l'exploitation de l'aéroport de Bruxelles-National et des infrastructures qui y sont liées et ii) la sécurité du transport aérien dans l'espace aérien belge. Elle exerce à cet égard, tout au moins pour les activités reprises sous i), une activité à caractère économique susceptible d'être exercée, du moins en principe, par une entreprise privée et dans un but lucratif.
(3) Sabena est un groupe belge détenu à 62,11 % par l'État belge et à 37,58 % par Finacta (Groupe Air France). Un accord a, cependant, été conclu le 4 mai 1995 entre l'État belge et Swissair, pour une prise de participation de cette dernière à hauteur de 49,5 % du capital de Sabena. Des négociations sont actuellement en cours concernant le retrait d'Air France du capital de Sabena. La principale activité de Sabena est le transport régulier de passagers et de fret. Il est également présent dans les secteurs du transport aérien non régulier par l'intermédiaire de sa filiale Sobelair, de l'hôtellerie, du tourisme et des services d'assistance en escale. Sabena transporte 38 % des passagers utilisateurs de l'aéroport de Bruxelles (2).
(4) L'OACI (Organisation de l'aviation civile internationale), dans son Manuel sur l'économie des aéroports, recommande à ses membres de calculer les redevances d'atterrissage en fonction de la masse maximale au décollage. Elle définit ainsi la redevance d'atterrissage:
droits et redevances perçus pour l'usage des pistes, voies de circulation et aires de trafic, y compris le balisage lumineux correspondant, ainsi que pour les services de contrôle d'approche et d'aérodrome.
La redevance correspond à l'imputation des « coûts d'exploitation et de maintenance ainsi que les frais d'administration imputables à ces aires, ainsi qu'aux véhicules et au matériel associés, y compris les dépenses afférentes à la main-d'oeuvre, au véhicule d'entretien, à l'électricité et aux carburants » (3).
(5) L'aéroport de Bruxelles dessert un grand nombre de destinations dans le monde. Selon l'étude de l'université de Cranfield (4), en 1992, 15 % des passagers ont utilisé l'aéroport de Bruxelles comme aéroport de correspondance. Les compagnies aériennes desservent principalement l'aéroport de Bruxelles pour répondre aux attentes des 85 % de passagers pour lesquels Bruxelles constitue la destination finale de leur voyage ou leur point de départ réel. Sur les distances court- et moyen-courriers (moins de 2 heures de vol) intracommunautaires comme, par exemple, les liaisons entre le sud de l'Union européenne et la zone d'attraction de Bruxelles, il n'y a pas d'alternative réaliste à l'aéroport de Bruxelles. En effet, les seuls autres aéroports internationaux de la zone géographique sont situés à plus de 100 kilomètres de Zaventem. C'est pourquoi les compagnies aériennes n'ont pas d'autre alternative pour répondre à cette demande des passagers que d'opérer à partir de l'aéroport de Bruxelles.
(6) L'aéoport de Bruxelles peut donc être considéré comme un aéroport peu substituable aux autres aéroports pour les liaisons moyen-courrier à destination ou en provenance de la zone d'attraction de Bruxelles.

L'APPRÉCIATION DE LA COMMISSION

Article 90 paragraphe 1
(7) L'article 90 paragraphe 1 prévoit que les États membres ont l'obligation de ne pas édicter ni maintenir en faveur d'entreprises publiques ou entreprises auxquelles ils accordent des droits spéciaux ou exclusifs aucune mesure contraire aux règles du traité.
La RVA est une entreprise publique au sens de l'article 90 paragraphe 1 du traité CE.
L'arrêté royal du 22 décembre 1989 fixant les redevances dues pour l'utilisation de l'aéroport de Bruxelles National, et notamment son article 2 paragraphe 2, définissant un système de rabais sur les redevances d'atterrissage tel que visé au considérant 1 est une mesure étatique au sens de l'article 90 paragraphe 1.

Article 86
Le marché en cause (8) Le premier marché en cause est celui des services liés à l'accès aux infrastructures aéroportuaires pour lesquels la redevance est due, c'est-à-dire l'exploitation et la maintenance des pistes, des voies de circulation et aires de trafic et le guidage d'approche.
Ainsi que la Cour de justice l'a indiqué, l'organisation, pour le compte de tiers, d'opérations portuaires dans un seul port peut constituer un marché pertinent au sens de l'article 86 [arrêt « Port de Gênes » du 10 décembre 1991, affaire C-179/90, point 15 des motifs (1)]. De même, la Cour a considéré le marché du service du pilotage dans le port de Gênes comme le marché pertinent dans son arrêt du 17 mai 1994 dans l'affaire C-18/93, Corsica Ferries (2).
La Cour fondait son raisonnement sur le fait que, dès lors qu'un opérateur souhaite offrir un service de transport sur une route maritime donnée, l'accès aux installations portuaires situées de part et d'autre de cette liaison constitue une condition indispensable pour la réalisation de celui-ci.
Ce raisonnement peut aisément se transposer au secteur du transport aérien et à l'accès aux aéroports.
Dans le cas d'espèce, il n'existe pas de véritable alternative présentant des avantages tels que ceux offerts par l'aéroport de Bruxelles pour les transports aériens court- et moyen-courriers à destination ou au départ de la zone d'attraction de Bruxelles.
(9) Par ailleurs, les liaisons aériennes court- et moyen-courriers intracommunautaires constituent un marché voisin mais distinct qui est affecté par les effets d'un comportement de l'entreprise sur le marché des services liés à l'atterrissage et au décollage.
Ainsi qu'il ressort des explications fournies au considérant 5, l'aéroport de Bruxelles pour les liaisons court- et moyen-courriers intracommunautaires au départ ou à destination de la zone d'attraction de Bruxelles est peu interchangeable avec les autres liaisons disponibles et ne subit leur concurrence que d'une manière peu sensible [arrêt rendu le 11 avril 1989 dans l'affaire 66/86, Ahmed Saeed (3)].
La partie substantielle du marché commun (10) L'aéroport de Bruxelles a traité 10 millions de passagers et 313 137 tonnes de fret en 1993. Il se situe à la onzième place en termes de passagers transportés dans l'Union et cinquième en termes de fret. L'aéroport de Bruxelles a été considéré par la Commission dans le cadre du réseau aéroportuaire transeuropéen comme une composante communautaire (4). L'aéroport de Bruxelles constitue donc une partie substantielle du marché commun.
La position dominante (11) Selon la jurisprudence de la Cour de justice, une entreprise qui détient un monopole légal pour la prestation de certains services détient une position dominante au sens de l'article 86 du traité [arrêt rendu le 3 octobre 1985 dans l'affaire 311/84, Telemarketing (5)].
Tel est le cas pour RVA, entreprise publique, qui détient du fait du droit exclusif octroyé par l'article 1er de l'arrêté royal du 5 octobre 1970, en sa qualité d'autorité aéroportuaire, une position dominante sur le marché des services liés à l'atterrissage et au décollage des avions pour lesquels est perçue la redevance en question.
L'abus de position dominante (12) Le système de rabais sur les redevances d'atterrissage mis en place par l'arrêté royal du 22 décembre 1989 a pour effet d'appliquer à l'égard de compagnies aériennes des conditions inégales à des prestations équivalentes, liées à l'atterrissage et au décollage en leur infligeant de ce fait un désavantage dans la concurrence.
(13) Le système de rabais en question, défini à partir du montant mensuel de redevances dues, repose donc, d'une part, sur le nombre de mouvements mensuels et, d'autre part, sur le poids de l'appareil.
En tenant compte de ces deux paramètres, le tableau ci-après reprend le nombre de fréquences quotidiennes (un décollage et un atterrissage) nécessaires pour bénéficier des rabais de la première tranche (7,5 %), de la troisième tranche (20 %) et de la dernière tranche (30 %) à calculer sur le montant mensuel dépassant les 5 millions de FB pour quatre types d'avions différents.
>EMPLACEMENT TABLE>
>EMPLACEMENT TABLE>
Le seuil de 5 millions de FB de redevances mensuelles qu'il faut atteindre pour bénéficier d'un rabais est tellement élevé que cette réduction ne peut bénéficier qu'à un transporteur basé dans cet aéroport au détriment des autres transporteurs communautaires. En effet, le nombre de fréquences quotidiennes minimal à atteindre est très élevé. À titre d'exemple, s'agissant de liaisons communautaires, les compagnies aériennes utilisent des petits ou moyens porteurs (de 50 à 200 places; type DC9, A320 ou 757). Cela signifie que, pour atteindre le montant de redevances de 5 millions de FB donnant lieu à un rabais de 7,5 %, une compagnie moyenne doit effectuer plus de sept fréquences quotidiennes (exemple d'un DC9 à 110 sièges). Or, le samedi et le dimanche, le nombre de fréquences est plus faible, augmentant de ce fait le nombre de fréquences nécessaires les jours de semaine à huit ou neuf. En moyenne, une liaison à fort trafic s'effectue au rythme de quatre fréquences quotidiennes alors qu'une desserte régionale s'effectue au moyen de deux fréquences. Pour obtenir une réduction de 7,5 % sur le montant de redevances dépassant 5 millions de FB, une compagnie effectuant des dessertes régionales doit effectuer plus de trois liaisons quotidiennes vers Bruxelles avec des avions de moyenne ou grande taille. À titre d'exemple, Lufthansa, bien qu'elle desserve directement Bruxelles à partir de six villes allemandes, ait réalisé en 1992 plus de 2 % des mouvements sur l'aéroport et ait transporté 3,3 % des passagers partant ou arrivant à l'aéroport de Bruxelles, n'atteint pas les montants de redevances donnant lieu à réduction. De même, les compagnies utilisant des gros porteurs du type Boeing 747 doivent réaliser plus d'un vol quotidien (principalement un vol intercontinental) pour obtenir un rabais.
Ce système étant conçu avec un seuil élevé et par paliers progressifs n'est pas linéaire. Les réductions de redevances offertes augmentent plus que proportionnellement au nombre de décollages/atterrissages, ce qui accentue d'autant plus les différences entre les transporteurs à fort trafic et les autres. De plus, il défavorise les transporteurs régionaux qui, bien qu'effectuant un grand nombre de mouvements par mois, utilisent, d'une part, des petits avions et, d'autre part, desservent généralement Bruxelles au moyen d'une seule liaison.
Sabena bénéficie de rabais dans la dernière tranche (30 %) équivalents en 1992 à une réduction globale de 18 % sur le montant de ses redevances alors que les autres compagnies (Sobelair et BA) se situent dans la première tranche (7,5 %). Aucune autre compagnie aérienne présente à l'aéroport de Bruxelles ne bénéficie de réduction de ses redevances d'atterrissage.
Sur une liaison comme Bruxelles-Londres où Sabena et BM entre autres sont en concurrence et pour un même type d'avion, Sabena reçoit un rabais de 18 % environ sur ses frais de décollage et d'atterrissage pour une prestation équivalente de la part de RVA infligeant de ce fait un désavantage dans la concurrence à BM.
Pour les raisons exposées ci-dessus, le fait pour une entreprise placée dans la situation de RVA d'appliquer à l'égard de partenaires commerciaux des conditions inégales à des prestations équivalentes en leur infligeant de ce fait un désavantage dans la concurrence constitue un abus de position dominante au sens de l'article 86 deuxième alinéa point c). Dès lors que, dans le cas d'espèce, un État membre a mis en place un tel système par voie réglementaire, une telle mesure étatique constitue une violation de l'article 90 en liaison avec l'article 86 deuxième alinéa point c) du traité.
(14) RVA, bien que chargée des services liés à l'atterrissage et au décollage pour lesquels la redevance est due, n'en maîtrise ni la fixation ni les éventuels rabais. La Cour a considéré qu'un État membre enfreint les dispositions des articles 90 et 86 du traité lorsqu'il amène l'entreprise à exploiter sa position dominante de façon abusive en procédant à l'application aux partenaires commerciaux, de conditions inégales pour des prestations équivalentes, au sens de l'article 86 deuxième alinéa point c) du traité (arrêt du 17 mai 1994, Corsica Ferries).
(15) Ce raisonnement s'applique également quand la mesure étatique laisse une marge de manoeuvre réduite, voire nulle aux entreprises au moyen desquelles les États membres exercent eux-mêmes une influence sur la structure de la concurrence dans le marché commun (1). Cette doctrine a été élaborée par la Cour dans l'arrêt du 4 mai 1988 dans l'affaire 30/87, Bodson (2), où la Cour a déclaré que l'article 90 paragraphe 1 du traité doit être interprété en ce sens qu'il interdit aux autorités publiques d'imposer aux entreprises auxquelles elles ont accordé des droits exclusifs des conditions de prix contraires aux dispositions des articles 85 et 86.
(16) RVA a donné les justifications suivantes pour l'instauration d'un tel système:
- droit d'une entreprise d'instaurer un système de réduction dans le cadre de sa politique commerciale,
- droit de consentir des rabais plus importants à des clients loyaux en particulier en tenant compte de la sécurité financière qu'ils apportent,
- économies d'échelle: il coûte moins cher (en termes d'administration et de personnel) de fournir des services à un transporteur national avec un volume important de trafic dans l'aéroport,
- caractère plus attractif de l'aéroport du fait de la présence d'un transporteur national avec un réseau étendu de destinations.
Au premier et au deuxième arguments, il peut être répondu que la Cour a en plusieurs occasions déclaré que, s'ils sont le fait d'une entreprise en position dominante, pouvaient constituer des abus au sens de l'article 86 du traité des comportements commerciaux considérés comme normaux. De plus, comme il a été mentionné ci-dessus, une compagnie aérienne ne choisira pas de desservir Bruxelles plutôt qu'un autre aéroport environnant en raison de la politique commerciale de fidélisation de l'aéroport de Bruxelles. S'il s'agissait d'attirer les compagnies aériennes à la recherche d'un aéroport pouvant servir d'aéroport de correspondance régional, les seuils auraient été choisis de façon à ce que ces compagnies soient en mesure de bénéficier de ce système, ce qui n'est pas le cas.
En ce qui concerne le troisième argument, la Commission estime qu'un tel système ne pourrait se justifier que par des économies d'échelle qui seraient réalisées par RVA. Dans le cas d'espèce, tel n'est pas le cas. RVA n'a pas démontré à la Commission que le traitement d'un décollage ou d'un atterrissage d'un appareil appartenant à une compagnie plutôt qu'à une autre engendre des économies d'échelle. En effet, le traitement d'un atterrissage ou d'un décollage d'un avion requiert le même service quel que soit son propriétaire et quel que soit le nombre d'avions appartenant à une même compagnie. Tout au plus, RVA pourrait invoquer des économies d'échelle dans l'établissement des factures, une facturation unique pour un transporteur à fort trafic reprenant un grand nombre de mouvements contre une multitude de factures avec peu de mouvements. Ces économies d'échelle sont, cependant, d'un montant négligeable.
S'agissant du dernier argument, il n'a pas de lien avec le système en question.
(17) Si la plupart des abus commis par des entreprises en position dominante le sont dans le but de maximiser leurs profits ou de renforcer leur dominance, l'article 86 s'applique aussi aux cas où l'entreprise en position dominante opère des discriminations à l'égard de ses partenaires pour d'autres motifs que son intérêt propre. Il peut s'agir par exemple de favoriser une autre entreprise du même Etat ou poursuivant une même politique générale. On peut citer parmi les abus commis pour d'autres motifs que le propre intérêt de l'entreprise en position dominante l'affaire des pilotes du port de Gênes qui favorisaient les entreprises de transport maritime qui effectuaient des transports entre des ports situés sur le territoire national (Corsica Ferries) en leur appliquant des tarifs préférentiels approuvés par l'Etat.
C'est ainsi que, dans le cas d'espèce, à la différence des systèmes de rabais dits de fidélité examinés par la Cour [arrêt rendu le 13 février 1979 dans l'affaire 85/76, Hoffmann-Laroche (1), arrêt rendu le 9 novembre 1983 dans l'affaire 322/81, Michelin (2)], la RVA ne tente pas de fidéliser sa clientèle ou d'attirer une nouvelle clientèle comme cela a été montré aux considérants 13, 14 et 15, mais l'État, par son intermédiaire, favorise une entreprise spécifique, en l'occurance la compagnie nationale Sabena.
(18) Les autorités belges ont à cet égard indiqué que « la politique en matière de redevances d'atterrissage telle qu'imposée par l'Arrêté royal en question va même à l'encontre des intérêts de RVA, en ce que les ristournes prévues diminuent les revenus que RVA pourrait tirer des redevances ». Le système a donc été mis en place pour favoriser certaines compagnies aériennes, puisque seules Sabena, Sobelair et dans une moindre mesure British Airways sont en mesure d'en bénéficier, cela en violation de l'article 86.
Effet sur le commerce entre les États membres (19) Le système de rabais tel qu'il est appliqué grève le prix du transport court- et moyen- courriers intracommunautaires des transporteurs ne pouvant bénéficier de ce système. En effet, les charges aéroportuaires sont un poste de dépenses important dans les charges d'exploitation d'une compagnie. Ces charges ont été évaluées par le comité des sages de l'aviation civile (y compris taxe de contrôle aérien) entre 4 et 6 % des coûts d'exploitation des compagnies aériennes communautaires. Des réductions allant jusqu'à 18 % du montant des redevances pour des liaisons intracommunautaires sont susceptibles d'affecter le commerce entre les États membres en donnant un avantage sensible aux entreprises qui en bénéficient, s'agissant d'un aéroport tel que celui de Bruxelles qui a transporté en 1993 10 millions de passagers dont 75 % à destination ou en provenance des villes de l'Union.
Dans son arrêt « Corsica Ferries », la Cour a reconnu que des pratiques discriminatoires appliquées à des prestations identiques « sont susceptibles d'affecter le commerce entre États membres en ce qu'elles touchent des entreprises effectuant des transports entre deux États membres » (3).

Article 90 paragraphe 2
(20) Les autorités belges n'ont pas invoqué l'exception prévue à l'article 90 paragraphe 2 du traité pour justifier l'instauration et le maintien d'un tel système de rabais. En outre, la Commission considère qu'en l'espèce d'application des règles de concurrence ne fait pas obstacle à la mission particulière confiée à RVA qui est celle de la construction, de l'aménagement, de l'entretien et de l'exploitation de l'aéroport de Bruxelles. Elle ne ferait pas non plus obstacle à une mission particulière de service public qui serait confiée à une compagnie aérienne. En effet, les conditions et les modalités dans lesquelles un État membre peut imposer des obligations de service public sur des services aériens réguliers intracommunautaires sont précisément définies à l'article 4 du règlement (CEE) n° 2408/92 du Conseil (4).
L'exception prévue par l'article 90 paragraphe 2 n'est donc pas d'application.

Conclusion
Compte tenu de ce qui précède, la Commission considère que la mesure étatique visée au considérant 1 constitue une infraction à l'article 90 paragraphe 1 du traité en liaison avec l'article 86,
A ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION:


Article premier
Le système de rabais sur les redevances d'atterrissage institué par l'article 2 paragraphe 2 de l'arrêté royal du 22 décembre 1989 constitue une mesure incompatible avec l'article 90 paragraphe 1 du traité CE en liaison avec l'article 86 dudit traité.

Article 2
Le gouvernement belge est tenu de mettre fin à l'infraction décrite à l'article 1er et d'informer la Commission, dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision, des mesures qu'il aura prises à cet effet.

Article 3
Le royaume de Belgique est destinataire de la présente décision.

Fait à Bruxelles, le 28 juin 1995.
Par la Commission Karel VAN MIERT Membre de la Commission
(1) Conclusions de l'avocat général Van Gerven. Arrêt du 12 février 1992, affaires C-48/90 et C-66/90 - PTT néerlandais, Recueil 1992, p. I-565.
(2) Recueil 1988, p. 2479.
(1) Recueil 1979, p. 461.
(2) Recueil 1983, p. 3461.
(3) Point 44 des motifs.
(4) JO n° L 240 du 24. 8. 1992, p. 8.

Fin du document


Structure analytique Document livré le: 11/03/1999


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