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Document 394D1071

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[ 08.60 - Aides accordées par les États et autres subventions ]


394D1071
94/1071/CE: Décision de la Commission, du 13 décembre 1994, concernant le projet du Royaume-Uni d'accorder une aide à la société Carpets International (UK) plc (anciennement Abingdon Carpets plc), comté de Gwent (Le texte en langue anglaise est le seul faisant foi) (Texte présentant de l'intérêt pour l'EEE)
Journal officiel n° L 385 du 31/12/1994 p. 0024 - 0030



Texte:

DÉCISION DE LA COMMISSION
du 13 décembre 1994
concernant le projet du Royaume-Uni d'accorder une aide à la société Carpets International (UK) plc (anciennement Abingdon Carpets plc), comté de Gwent
(Le texte en langue anglaise est le seul faisant foi.)
(Texte présentant de l'intérêt pour l'EEE)
(94/1071/CE)

LA COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,
vu le traité instituant la Communauté européenne, et notamment son article 93 paragraphe 2 premier alinéa,
vu l'accord instituant l'Espace économique européen, et notamment son article 62 paragraphe 1 point a),
après avoir mis, conformément aux dispositions desdits articles, les intéressés en demeure de présenter leurs observations,
considérant ce qui suit:
I
Par lettre du 23 septembre 1993, les autorités du Royaume-Uni ont, en vertu de l'article 93 paragraphe 3 du traité et de l'encadrement applicable aux aides au secteur des fibres synthétiques (1), notifié à la Commission un projet d'aide, avec effet rétroactif, à Abingdon Carpets plc en faveur d'un programme d'investissement déjà achevé d'un coût d'environ 4 900 000 livres sterling (UKL) (639 millions d'écus) pour une nouvelle installation de production en continu de fils gonflants de polypropylène (ci-après «PP-BCF») sur le site de la société à Crumlin, comté de Gwent. Ce fil entre dans la fabrication des tapis produits par la société. Celle-ci a été rachetée par Shaw Industries Inc. en septembre 1993 et, le 1er janvier 1994, son activité ainsi que celle de Kosset Carpets Ltd ont été transférées à Carpets International (UK) plc (ci-après «CIP»), une nouvelle filiale à 100 % de Shaw Industries Inc.
L'aide envisagée serait accordée sous la forme d'une subvention de 750 000 UKL (0,98 million d'écus) dans le cadre du régime d'aides au développement régional (Regional Development Grant - ci-après «RDG») approuvé par la Commission en 1984.
Il convient de noter que l'entreprise avait sollicité une aide le 29 mars 1988 et que, selon les dispositions du régime RDG, les candidats pouvaient entreprendre les investissements pour lesquels ils avaient demandé une aide avant de recevoir l'accord des autorités britanniques. Ce projet avait fait l'objet d'une correspondance en septembre 1990 entre la Commission et les autorités britanniques et, en décembre 1991, entre la Commission et la société. Toutefois, comme mentionné ci-dessus, les autorités britanniques n'ont officiellement notifié le projet d'accorder une aide à cette entreprise que le 23 septembre 1993.
Le 14 décembre 1993, la Commission a décidé d'ouvrir la procédure prévue à l'article 93 paragraphe 2 du traité à l'égard du projet d'aide.
En prenant cette décision, la Commission a estimé que, sur la base des informations fournies par les autorités britanniques, l'aide envisagée était susceptible de fausser la concurrence et d'affecter les échanges entre États membres dans une mesure contraire à l'intérêt commun, car elle entraînerait une augmentation des capacités de production du bénéficiaire de l'aide et ne pourrait, par conséquent, respecter l'encadrement qui dispose que seule une aide entraînant une réduction significative des capacités productives du bénéficiaire peut être autorisée. Par conséquent, l'aide envisagée a été considérée comme incompatible avec le marché commun.
Par lettre du 27 janvier 1994, la Commission a informé le Royaume-Uni de sa décision d'ouvrir à l'égard de l'aide envisagée en faveur de la société CIP la procédure prévue à l'article 93 paragraphe 2. Les autres États membres et parties intéressées en ont été informés par la publication de cette lettre au Journal officiel des Communautés européennes (2).
II
Par lettre du 7 mars 1994, le Royaume-Uni a présenté ses observations dans le cadre de la procédure susmentionnée.
Les autorités britanniques ont fait valoir que la Commission doit apprécier le projet d'aide d'après la version de l'encadrement en vigueur au moment où les investissements ont été entrepris, c'est-à-dire l'encadrement 1987-1989 (3), car ceux-ci ont été effectués en 1988, et non d'après la version actuelle de l'encadrement, entrée en vigueur le 1er janvier 1993. À l'appui de cet argument, les autorités britanniques ont cité la décision de la Commission d'autoriser un projet d'aide à la société Crimpfil plc.
Par ailleurs, les autorités britanniques ont affirmé qu'il serait très difficile techniquement et non rentable d'adapter les équipements concernés pour produire autre chose que du fil PP-BCF et elles ont expliqué les problèmes qui apparaîtraient si l'on tentait de produire des fibres coupées de polypropylène sur ces machines ou de passer à la production de fil de polyester ou de nylon. En outre, elles ont indiqué que la société n'a pas l'intention de produire autre chose que du fil PP-BCF et qu'elle est disposée à prendre un engagement en ce sens, que les autorités britanniques se déclarent prêtes à contrôler.
Les autorités britanniques ont déclaré qu'elles ne disposent pas de statistiques sur le marché du fil PP-BCF, mais qu'à l'évidence la croissance de ce marché et de celui des fibres coupées de polypropylène est rapide, les prévisions pour la production de PP-BCF en Europe occidentale s'établissant à 6 % de croissance annuelle d'ici 1996.
>EMPLACEMENT TABLE>

Les autorités britanniques ont également rappelé qu'elles ont fourni à la Commission des statistiques attestant que, en 1989, lorsque l'entreprise a commencé sa production de fil PP-BCF à la suite de l'investissement en question, en Europe occidentale, la demande de PP-BCF destinée à la production de tapis touffetés dépassait de 11 400 tonnes les capacités existantes. Les autorités britanniques ont cité des sources indiquant que la production de fil PP-BCF en Europe continuerait à souffrir d'une sous-capacité et elles ont signalé que de gros investissements avaient été réalisés récemment pour transformer les équipements en vue de la production de fil PP-BCF, notamment en Belgique et dans les autres pays du Benelux. Par ailleurs, elles ont estimé que, l'encadrement étant destiné essentiellement à traiter les problèmes de surcapacité, il ne devait pas s'appliquer aux projets d'aide à des sous-secteurs de l'industrie des fibres synthétiques dans lesquels la demande dépasse les capacités de production et où le déficit est comblé par des importations.
L'investissement réalisé par la société CIP pour produire du fil PP-BCF présentant les caractéristiques requises lui a permis de diminuer progressivement ses importations de fils en provenance des États-Unis d'Amérique, auparavant seule source d'approvisionnement en type de fil PP-BCF demandé, qui n'était disponible auprès d'aucun fournisseur communautaire. Les capacités de production créées grâce à cet investissement ayant remplacé des importations, l'aide envisagée n'aurait aucun effet défavorable sur les échanges au sein de l'Espace économique européen (ci-après «EEE») en PP-BCF et, en tout état de cause, les autorités britanniques ont estimé que la part de marché de la société CIP n'était pas suffisamment importante pour affecter de manière sensible les échanges au sein de l'EEE.
Les autorités britanniques ont par ailleurs indiqué que l'utilisation accrue de fil de filaments de polypropylène dans la production «intégrée» de tapis présente des avantages écologiques; ainsi, alors que la coloration de certaines fibres consomme de grandes quantités d'énergie et entraîne d'importants déversements d'effluents aqueux, la coloration du fil de filaments de polypropylène n'en génère pas. Par ailleurs, en permettant à l'entreprise d'optimiser les couleurs et d'exploiter le potentiel de mélange du fil, cet investissement a donné lieu à un travail significatif en matière de développement de produits innovants et contribué à la recherche-développement en Europe.
À ce jour, l'investissement a créé 122 nouveaux emplois (50 directement et 72 indirectement) contre 97 nouveaux emplois (33 directement et 64 indirectement) créés lorsque les autorités britanniques ont notifié le projet d'aide à la Commission. Onze nouveaux postes supplémentaires seront créés au cours de 1994. L'investissement est situé à Crumlin (comté de Gwent), dans le bassin d'emploi de Merthyr et Rhymney, classé comme zone en développement dans le cadre du régime RDG que la Commission a estimé compatible avec le marché commun en vertu de l'article 92 paragraphe 3 point c) du traité. Cette zone peut également bénéficier de l'aide prévue dans le cadre de l'objectif n° 2 des Fonds structurels et enregistre l'un des taux de chômage les plus élevés du pays de Galles et de l'ensemble du Royaume-Uni, car elle a été durement touchée par le démantèlement des industries minières et sidérurgiques du sud du pays de Galles, qui constituaient autrefois les principaux employeurs de la région. Si l'on prend en compte l'investissement en question, le taux de chômage a baissé dans ce bassin d'emploi, puisqu'il a été ramené de 17,1 % en mars 1988, lorsque l'entreprise a demandé cette aide, à 14 %; à titre de comparaison, d'après les estimations les plus récentes, le taux de chômage atteint 10,1 % au pays de Galles et 9,9 % dans l'ensemble du Royaume-Uni.
Les autorités britanniques ont estimé que ce projet a eu par conséquent une incidence significative sur la région et ont fait observer que la diversification et les investissements dans d'autres industries ont joué un rôle essentiel dans le redressement de la région et dans la réduction de sa dépendance économique.
III
Dans ses observations présentées en vertu de la procédure prévue à l'article 93 paragraphe 2 du traité, le Comité international de la rayonne et des fibres synthétiques (ci-après «CIRFS») s'est déclaré opposé à cette aide au motif qu'elle ne respecterait pas l'encadrement et que, le fil PP-BCF et le fil gonflant continu de polyamide (ci-après «PA-BCF») étant en concurrence sur certains marchés, la création de nouvelles capacités de production de fil PP-BCF aurait une incidence non seulement sur les autres producteurs de ce type de fil, mais également sur les producteurs de PA-BCF, pour lesquels le taux moyen d'utilisation des capacités était en 1993 de 76 % environ dans l'EEE. Le CIRFS a également fait remarquer que, même si le produit de la société CIP constituait une amélioration par rapport aux générations précédentes de PP-BCF, les caractéristiques techniques du produit de la société CIP et les processus de fabrication ne pouvaient être considérés comme uniques. Enfin, le CIRFS a indiqué que les capacités de production de fil PP-BCF avaient récemment augmenté de manière sensible au sein de l'EEE et que d'autres hausses étaient en cours ou prévues qui entraîneront une surcapacité importante.
La Fédération danoise des industries textiles et de l'habillement (ci-après «FDTCI») s'est, elle aussi, opposée au projet d'aide. Elle a affirmé que, comme il n'est pas difficile d'adapter les machines en question pour produire du fil de filaments ordinaire de polypropylène, cet investissement entraînerait en fait un accroissement des capacités productives au sein de l'EEE pour ce type de fil, pour lequel il existerait déjà, selon elle, une surcapacité. La FDTCI a fait valoir que l'aide envisagée aurait, par conséquent, un effet défavorable sur les autres producteurs de fil de filaments de polypropylène et sur les fabricants danois de tapis, avec lesquels la société CIP est en concurrence sur le marché des tapis touffetés.
Selon l'Association européenne des textiles polyoléfins (ci-après «EATP»), il y a insuffisance des capacités de production de PP-BCF parce que la demande est élevée, essentiellement grâce au marché russe des tapis, mais il n'est pas certain que cette demande se maintiendra à son niveau élevé actuel. Cette situation a entraîné des investissements importants en PP-BCF dans la Communauté, qui sont ou ont été réalisés sans aide d'État et qui auront pour effet d'accroître les capacités, de sorte que d'ici la fin de 1994, ce secteur enregistrera une surcapacité.
Toutefois, l'Association britannique des textiles polyoléfins s'est déclarée en faveur de l'autorisation du projet d'aide et a notamment soutenu l'argument des autorités britanniques selon lequel celui-ci doit être apprécié en fonction de l'encadrement de 1987-1989 tel qu'il était en vigueur lorsque l'entreprise a réalisé l'investissement pour lequel elle a sollicité une aide avec effet rétroactif.
Par lettre du 3 mai 1994, les observations présentées dans le cadre de la procédure ont été adressées aux autorités britanniques, qui y ont répondu par lettre du 19 juillet 1994. Les autorités britanniques ont réaffirmé les avantages au niveau régional de l'investissement en question. Elles ont aussi insisté sur le fait que, à leur avis, il n'est actuellement pas rentable d'adapter ces équipements pour produire du PA-BCF; elles ont rappelé que l'entreprise est disposée à prendre un engagement à cet égard et que les autorités britanniques sont prêtes à contrôler le respect dudit engagement. Par ailleurs, elles ont contesté que le PP-BCF et le PA-BCF se trouvent en concurrence pour certaines utilisations finales et ont expliqué les raisons pour lesquelles ces deux types de fibres doivent être considérés comme complémentaires en termes de conception. Enfin, elles ont noté que les CIRFS et l'EATP ont confirmé l'insuffisance actuelle des capacités de production de PP-BCF en Europe et ont ajouté que ce déficit était encore plus marqué au moment où la CIP a réalisé cet investissement.
IV
En ouvrant la procédure prévue à l'article 93 paragraphe 2 à l'égard du projet d'aide à la société CIP, la Commission a déclaré qu'elle admettait «que, les spécifications techniques nécessaires n'ayant pas été établies avant la construction des équipements, les équipements utilisés pour produire du fil gonflant de polypropylène ne pourraient servir à la fabrication de fil de polyamide ou de polyester». Dans leurs observations présentées dans le cadre de la procédure, les autorités britanniques ont décrit en détail les raisons pour lesquelles les équipements en question ne peuvent être facilement adaptés pour produire des fibres coupées de polypropylène ou transformés pour produire du polyester ou du polyamide, mais elles n'ont avancé aucun argument pour réfuter l'avis de la Commission, selon lequel il est relativement aisé d'aménager ces équipements pour qu'ils puissent produire du fil de filaments de polypropylène en général; elles se sont contentées d'indiquer qu'il existe des différences marquées entre le PP-BCF et les autres types de fil de filaments de polypropylène.
La Commission n'a jamais affirmé que les machines concernées peuvent être utilisées pour produire du fil gonflant continu de polyamide ou de polyester ou des fibres coupées de polypropylène, pas plus qu'elle n'a jamais mis en doute le fait qu'il existe des différences entre le PP-BCF et les autres types de fil de filaments de polypropylène. Par conséquent, et en l'absence d'éléments concrets ou d'arguments prouvant le contraire, la Commission maintient que, comme elle l'a déclaré en ouvrant la procédure, «il est relativement aisé, sans qu'il soit nécessaire d'établir au préalable des spécifications, d'aménager ces équipements pour qu'ils puissent produire du fil de filaments de polypropylène». Toutefois, étant doné que l'entreprise est disposée à prendre l'engagement qu'elle ne produira que du PP-BCF sur les machines concernées et que les autorités britanniques sont prêtes à surveiller le respect de cet engagement, la Commission est disposée à apprécier l'aide envisagée comme étant destinée uniquement à soutenir les capacités de production de fil PP-BCF. Toutefois, le PP-BCF ayant aussi des utilisations finales autres que la production de tapis touffetés, ce serait une erreur de considérer seulement les échanges de PP-BCF destiné à ce secteur.
Le fil PP-BCF fait l'objet d'échanges entre États membres et au sein de l'EEE (45 000 tonnes environ en 1992) de sorte que, en favorisant la société CIP, l'aide envisagée renforcerait sa position par rapport aux autres producteurs qui doivent s'adapter aux changements sans bénéficier d'une aide ou avec une aide considérée comme compatible avec le marché commun et, depuis le 1er janvier 1994, avec l'application de l'accord EEE. L'importance de la part de la société CIP dans le marché du PP-BCF et la mesure dans laquelle l'entreprise exporte vers les autres pays au sein de l'EEE est sans rapport avec la question de savoir si une aide à cette entreprise aurait une incidence sur les échanges au sein de l'EEE. Étant donné que l'aide envisagée permettrait à la société CIP de réaliser l'investissement en question sans devoir supporter l'intégralité des coûts et que plus d'une entreprise est présente sur le marché concerné, cette aide constitue incontestablement une aide au sens de l'article 92 paragraphe 1 du traité et de l'article 61 paragraphe 1 de l'accord EEE et menace de fausser la concurrence et d'affecter les échanges entre États membres.
Le projet d'aide a été dûment notifié à la Commission conformément à l'article 93 paragraphe 3 du traité et de la version actuelle de l'encadrement applicable aux aides au secteur des fibres synthétiques.
La Commission a donc pu présenter ses observations et procéder à l'examen du projet d'aide.
L'article 92 paragraphe 1 établit le principe selon lequel, sauf dérogation, sont incompatibles avec le marché commun, dans la mesure où elles affectent les échanges entre États membres, les aides qui faussent ou qui menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions. Toutefois, l'article 92 paragraphes 2 et 3 expose dans quels cas de telles aides sont ou peuvent être autorisées.
L'article 92 paragraphe 2 précise quelles sont les catégories d'aide qui sont compatibles avec le marché commun. En raison de son caractère, de sa localisation et de son objectif, l'aide en question n'entre dans aucune de ces catégories.
L'article 92 paragraphe 3 énumère les aides qui peuvent être considérées comme compatibles avec le marché commun. Cette compatibilité doit être appréciée au niveau communautaire et non au niveau d'un seul État membre. Pour garantir le bon fonctionnement du marché commun et compte tenu du principe énoncé à l'article 3 point g) du traité, les dérogations au principe défini à l'article 92 paragraphe 1, qui sont énumérées à l'article 92 paragraphe 3, doivent être interprétées de manière stricte lorsqu'un régime d'aides ou un cas individuel d'aide est examiné.
Elles ne sont applicables, en particulier, que si la Commission est à même d'établir que, sans l'aide, le jeu de forces du marché ne permettrait pas d'obtenir à lui seul du bénéficiaire potentiel qu'il adopte un comportement qui contribue à la réalisation de l'un des objectifs visés par ces dérogations.
L'application de ces dérogations dans des cas où elle ne contribue pas à la réalisation d'un tel objectif, ou lorsque celui-ci peut être atteint sans aide, avantagerait injustement des industries ou entreprises de certains États membres, dont les situations financières seraient simplement renforcées, affectant ainsi les conditions des échanges entre États membres et faussant la concurrence.
La dérogation prévue à l'article 92 paragraphe 3 point a) concerne les aides destinées à favoriser le développement économique de certaines régions. Étant donné que le niveau de vie du bassin d'emploi de Merthyr et Rhymney n'est pas anormalement bas et qu'un grave sous-emploi n'y sévit pas au sens de l'article 92 paragraphe 3 point a), cette dérogation n'est pas applicable dans ce cas.
La dérogation prévue à l'article 92 paragraphe 3 point b) concerne les aides destinées à promouvoir la réalisation d'un projet important d'intérêt européen commun ou à remédier à une perturbation grave de l'économie d'un État membre. Les autorités britanniques n'ont pas avancé de véritables arguments à cet égard ni fait valoir que l'aide doit être considérée comme compatible avec le marché commun en vertu de cette dérogation, mise à part l'affirmation, sans référence à l'article 92 paragraphe 3 point b), que ce projet a contribué à la recherche-développement en Europe, car il a permis à la société CIP d'optimiser l'utilisation de la couleur et d'exploiter le potentiel de mélange de fils, deux de ses produits devenant de ce fait leaders sur leur marché. La Commission estime qu'il ne s'agit pas d'une justification suffisante pour conclure que ce projet est «un projet important d'intérêt européen commun». D'autre part, il n'y a pas de «perturbation grave de l'économie» du Royaume-Uni. Par conséquent, la dérogation prévue à l'article 92 paragraphe 3 point b) n'est pas applicable.
La dérogation prévue à l'article 92 paragraphe 3 point c) concerne les aides destinées à faciliter le développement de certaines activités ou de certaines régions économiques, quand elles n'altèrent pas les conditions des échanges dans une mesure contraire à l'intérêt commun.
En créant au moins 122 emplois, l'investissement en question a facilité le développement du bassin d'emploi de Merthyr et Rhymney, région qui peut bénéficier de l'aide régionale en vertu de l'article 92 paragraphe 3 point c). L'intensité et les autres éléments du projet d'aide, avec effet rétroactif, à la société CIP dans le cadre du RDG sous la forme d'une subvention d'environ 750 000 UKL (0,98 million d'écus), soit 15 % des dépenses de capital nécessaires pour l'acquisition de nouveaux actifs, respectent les conditions sur la base desquelles ce régime avait été approuvé par la Commission en 1984.
Toutefois, les effets sectoriels des aides régionales au secteur des fibres synthétiques doivent faire l'objet d'un contrôle, même pour les régions les moins développées de la Communauté - dont le bassin d'emploi de Merthyr et Rhymney ne fait pas partie - et l'aide en question doit donc être examinée dans le cadre de l'intérêt communautaire.
Depuis 1977, les conditions dans lesquelles les aides peuvent être accordées au secteur des fibres synthétiques sont fixées par un encadrement dont les termes et le champ d'application font l'objet d'une révision périodique, la dernière en 1992.
Les autorités britanniques ont fait valoir que l'aide envisagée doit être appréciée au regard de l'encadrement de 1987-1989, qui était en vigueur à la date à laquelle l'entreprise a réalisé l'investissement en cause. À l'appui de cette affirmation, elles ont cité la décision de la Commission d'autoriser un projet notifié d'accorder une aide, avec effet rétroactif, dans le cadre du RDG, aux investissements de Crimpfil Ltd, producteur de fibres synthétiques situé dans la même région que la société CIP.
Dans son approbation du projet d'accorder une aide, avec effet rétroactif, à Crimpfil Ltd, la Commission a estimé que, à la date à laquelle l'entreprise a réalisé les investissements en cause - et, ce faisant, est devenue habilitée à bénéficier d'une aide, sous réserve de l'autorisation de la Commission - aucun des investissements n'entrait dans le champ d'application de la version de l'encadrement alors en vigueur.
Dans le cas présent, il n'a jamais été dit que l'aide envisagée en faveur de la société CIP n'entre pas dans le champ d'application de l'encadrement actuel, ni même qu'elle n'entrait pas dans le champ d'application de l'encadrement de 1987-1989, en vigueur à la date à laquelle l'entreprise a effectué l'investissement en cause. Par conséquent, le programme d'investissement concerné entrait et entre dans le champ d'application de l'encadrement et les autorités britanniques étaient tenues d'obtenir une autorisation. Toutefois, malgré des contacts informels avec la Commission en 1990 et 1991, les autorités britanniques n'ont notifié le projet d'aide que le 23 septembre 1993. Ce projet doit donc être apprécié à la lumière de l'encadrement actuel, en vigueur depuis le 31 décembre 1992.
L'encadrement actuel exige la notification de tout projet d'aide, quelle qu'en soit la forme, destiné à des entreprises productrices de fibres synthétiques et visant ce type d'activités; depuis son introduction, cet encadrement a toujours été interprété comme s'appliquant à tous les projets d'aides de cette nature, que l'aide à la production soit directe ou indirecte, c'est-à-dire même si elle concerne des activités en aval de la production, telles que le traitement ou la commercialisation, par le bénéficiaire de l'aide ou une entreprise affiliée, de fibres et de fils produits dans l'EEE en vue de fabriquer des produits secondaires ou finis. Toutefois, l'encadrement établit que, «en ce qui concerne les aides qui relèvent des encadrements de la recherche et du développement et de l'environnement, l'examen quant au fond des aides notifiées se fait conformément aux dispositions de ces encadrements».
Les autorités britanniques ont affirmé que l'utilisation accrue de PP-BCF présente des avantages en matière d'environnement, découlant essentiellement du concept de production matérielle «intégrée» de tapis. Le recyclage mécanique, sans séparation, en produits convertis secondaires est beaucoup plus aisé et la récupération d'énergie par combustion sert à l'incinération de matières dangereuses. Par ailleurs, la production de fils de polypropylène colorés ne génère pas d'effluents aqueux, celle-ci étant réalisée par ajout direct de pigments encapsulés. Toutefois, les autorités britanniques n'ont jamais affirmé que l'aide envisagée devait être appréciée au regard de l'encadrement communautaire des aides d'État pour la protection de l'environnement (1), pas plus qu'elles n'ont déclaré que la disponibilité ou le montant de l'aide envisagée était de quelque façon que ce soit déterminé par les caractéristiques écologiques du produit ou du processus de fabrication.
Par ailleurs, et comme indiqué ci-dessus, les autorités britanniques ont affirmé que le projet a contribué à la recherche-développement en Europe, car il a permis à la société CIP d'optimiser l'utilisation de la couleur et d'exploiter le potentiel de mélange des fils, permettant à deux de ses produits de devenir leaders sur leur marché. Par conséquent, une partie intégrante du projet a été constituée par le travail important réalisé en matière de développement de produits. Cependant, les autorités britanniques n'ont jamais fait valoir que l'aide envisagée aurait dû être appréciée au regard de l'encadrement communautaire des aides d'État à la recherche-développement (2), et, sur la base des informations communiquées par les autorités britanniques, la Commission ne peut être amenée à conclure que l'aide envisagée doit être appréciée au regard de cet encadrement.
Par conséquent, l'aide envisagée en faveur du programme d'investissement de la société CIP doit être appréciée au regard de la version actuelle de l'encadrement applicable aux aides au secteur des fibres synthétiques.
Cet encadrement définit les critères à appliquer lorsque la Commission examine ces projets et, entre autres, précise que l'autorisation d'aides à l'investissement est dans tous les cas subordonnée à une réduction significative des capacités productives du bénéficiaire potentiel, et que les entreprises ont la charge de pourvoir par leurs moyens propres aux investissements visant à augmenter ou à maintenir les capacités qu'elles estimeraient nécessaires pour adapter leur production à l'évolution du marché et des technologies. L'investissement en cause concerne la mise en place d'une nouvelle capacité productive et les autorités britanniques ont informé la Commission que l'augmentation consécutive de capacités ne serait pas plus que compensée par des réductions parallèles de capacités réalisées au sein de l'EEE par la société CIP ou le groupe auquel elle appartient désormais. En conséquence, l'aide envisagée ne remplit pas l'exigence fondamentale de l'encadrement selon laquelle elle doit entraîner une réduction nette des capacités de production.
Comme l'a indiqué la Commission lors de l'ouverture de la procédure selon l'article 93 paragraphe 2 concernant l'aide envisagée à la société CIP, l'encadrement dispose que, si la Commission n'est pas, en général, hostile aux aides à l'investissement qui sont destinées à remédier aux handicaps structurels dont souffrent les régions défavorisées de la Communauté, l'obligation d'une réduction significative des capacités de production est absolue et l'emporte sur toutes autres considérations. Par conséquent, lorsque la Commission apprécie si un projet d'accorder une aide à l'investissement à une entreprise entraîne ou non une réduction importante des capacités de production, elle prend en compte les spécificités du projet, notamment le volume et la localisation de l'investissement en question. Toutefois, l'encadrement établit clairement que si, comme dans le cas présent, une entreprise augmente ou maintient ses capacités, la Commission rendra un avis défavorable sur le projet.
De même, lorsqu'elle examine s'il y aura ou non une réduction importante des capacités de production du bénéficiaire potentiel de l'aide, la Commission prend en considération l'évolution du taux moyen d'utilisation des capacités de production de la ou des fibres spécifiques concernées et l'état du marché du produit fini en question; la prise en considération de ces aspects n'affecte toutefois en rien l'obligation de réduction prévue dans l'encadrement.
Par conséquent, étant donné que l'encadrement n'autorise pas que l'aide en faveur de la production de fibres couvertes par cet encadrement soit exemptée de l'obligation de respecter ledit encadrement au motif que la demande actuelle ou future d'une fibre spécifique est supérieure à l'offre actuelle, il n'est pas nécessaire que la Commission, en appréciant l'aide envisagée à l'entreprise CIP, examine si la demande de PP-BCF dépasse les capacités de production au sein de l'EEE et s'il est vraisemblable qu'il en sera ainsi pendant quelque temps ou si les capacités productives seront bientôt supérieures à la demande.
Il convient de noter que, si cet encadrement autorisait les aides en faveur de la production de fibres au motif que les capacités productives sont ou seront probablement insuffisantes au sein de l'EEE, il est vraisemblable que cette situation aboutirait rapidement à une surcapacité. C'est la raison pour laquelle l'encadrement exige que les producteurs de fibres synthétiques s'adaptent aux variations de la demande soit sans aides, soit avec des aides déclarées par la Commission compatibles avec le marché commun et l'application de l'accord instituant l'EEE. Dans ce contexte, la Commission note que les autorités britanniques et deux des tiers intéressés qui ont présenté leurs observations conformément à la procédure prévue à l'article 93 paragraphe 2 ont fait état de nombreux investissements effectués récemment pour créer de nouvelles capacités de production de fil PP-BCF, qui tous doivent être réalisés sans aides ou avec des aides autorisées par la Commission.
Par ailleurs, comme cela est indiqué dans la communication de l'ouverture de la procédure prévue à l'article 93 paragraphe 2, la décision de la Commission d'autoriser un projet d'aide à l'entreprise Filature du Hainaut au motif que le produit fini entraînerait la création de marchés entièrement nouveaux ne s'applique pas à l'appréciation du projet d'aide à la société CIP car, dans le cas précédent, le projet d'aide a été apprécié en fonction d'une version précédente de l'encadrement qui, contrairement à l'encadrement actuel, ne subordonnait pas expressément l'autorisation d'octroi d'aides à une réduction significative des capacités de production du bénéficiaire de l'aide. Par conséquent, bien que les autorités britanniques aient affirmé que le produit fini de la société CIP - un tapis fabriqué à partir de fils PP-BCF dotés de qualités particulières (résistance aux taches et ressemblance avec la laine) - soit un nouveau produit innovateur, la Commission n'a pas à se prononcer sur le point de savoir si l'entreprise CIP est en concurrence uniquement avec les autres producteurs de tapis fabriqués à partir de PP-BCF, ou avec les fabricants de tapis produits à partir de toute fibre dont la production entre dans le champ d'application de l'encadrement, comme le PA-BCF. De toute façon, sur la base des éléments d'information présentés à la Commission par les autorités britanniques, il est manifeste que la société CIP n'est pas le seul fabricant de tapis produits à partir de PP-BCF installé dans l'EEE, et elle ne l'était pas non plus au moment où l'investissement a été réalisé. Par conséquent, on ne saurait en aucun cas parler de création d'un marché entièrement nouveau, comme c'était le cas pour l'aide proposée à l'entreprise Filature du Hainaut.
En favorisant la société CIP de sorte que sa position sur le marché ne sera plus déterminée par son efficacité, sa solidité et sa puissance financière propres et, partant, en augmentant les difficultés des autres producteurs de fibres synthétiques qui s'adaptent aux changements sans bénéficier d'aides ou avec des aides déclarées compatibles avec le marché commun, le projet d'accorder une aide en faveur de la production de PP-BCF ne saurait être considéré comme susceptible de faciliter une évolution qui, dans une perspective communautaire, serait suffisante pour compenser la distorsion des échanges qui en résulterait.
En conséquence, même si l'aide envisagée facilite, au sens de l'article 92 paragraphe 3 point c), le développement du bassin d'emploi de Merthyr et Rhymney, elle altère les conditions des échanges dans une mesure contraire à l'intérêt commun et les conditions auxquelles est subordonnée la dérogation prévue à l'article 92 paragraphe 3 point c) ne sont pas réunies.
La dérogation prévue à l'article 92 paragraphe 3 point d) concerne les aides destinées à promouvoir la culture et la conservation du patrimoine. Étant donné la nature du projet, cette dérogation n'est pas applicable.
Compte tenu de ce qui précède, l'aide envisagée en faveur de l'investissement de la société CIP dans de nouvelles capacités de production de PP-BCF ne remplit pas les conditions auxquelles est subordonnée l'application d'une des dérogations prévues à l'article 92.
L'aide est donc incompatible avec le marché commun et avec l'application de l'accord instituant l'EEE,
A ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION:


Article premier

L'aide d'un montant total d'environ 750 000 UKL, que les autorités britanniques se proposent d'accorder à la société Carpets International (UK) plc (anciennement Abingdon Carpets plc) dans le cadre du régime d'aides au développement régional (Regional Development Grant) pour soutenir la production en continu de fils gonflants de polypropylène sur son site du bassin d'emploi de Merthyr et Rhymney (comté de Gwent), est incompatible avec le marché commun au sens de l'article 92 du traité CE et avec l'application de l'accord EEE et ne peut, par conséquent, être versée.

Article 2

Le Royaume-Uni informe la Commission, dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision, des mesures prises pour s'y conformer.

Article 3

Le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord est destinataire de la présente décision.

Fait à Bruxelles, le 13 décembre 1994.
Par la Commission
Karel VAN MIERT
Membre de la Commission

(1) JO n° C 346 du 30. 12. 1992, p. 2. JO n° C 224 du 12. 8. 1994, p. 4.
(2) JO n° C 79 du 16. 3. 1994, p. 8.
(3) JO n° C 183 du 11. 7. 1987, p. 4.
(1) JO n° C 72 du 10. 3. 1994, p. 3.
(2) JO n° C 83 du 11. 4. 1986, p. 2.

Fin du document


Structure analytique Document livré le: 11/03/1999


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