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Document 394D0291

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394D0291
94/291/CE: Décision de la Commission, du 27 avril 1994, relative à une procédure d'application du règlement (CEE) n° 2408/92 du Conseil [Affaire VII/AMA/IV/93 - TAT-Paris (Orly)-Marseille et Paris (Orly)-Toulouse] (Le texte en langue française est le seul faisant foi)
Journal officiel n° L 127 du 19/05/1994 p. 0032 - 0037



Texte:

DÉCISION DE LA COMMISSION du 27 avril 1994 relative à une procédure d'application du règlement (CEE) no 2408/92 du Conseil [Affaire VII/AMA/IV/93 - TAT - Paris (Orly)-Marseille et Paris (Orly)-Toulouse] (Le texte en langue française est le seul faisant foi.) (94/291/CE)
LA COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,
vu le traité instituant la Communauté européenne,
vu le règlement (CEE) no 2408/92 du Conseil, du 23 juillet 1992, concernant l'accès des transporteurs aériens communautaires aux liaisons aériennes intracommunautaires (1), et notamment son article 8 paragraphe 3,
après consultation du comité consultatif,
considérant ce qui suit:
LES FAITS I Le 28 septembre 1993, la compagnie aérienne TAT European Airlines, dont le siège est situé au 47, rue Christiaan Huygens - 37100 Tours, France, a adressé à la Commission une demande tendant notamment à ce que cette dernière:
i) constate que, en refusant à TAT European Airlines l'autorisation d'exploiter les liaisons Paris-Toulouse et Paris-Marseille au départ et à destination de l'aéroport d'Orly, les autorités françaises et le groupe Air France enfreignent le règlement (CEE) no 2408/92;
ii) prenne toutes les mesures nécessaires afin de faire cesser ces violations et abus répétés des autorités et du groupe concerné et afin de rendre son effet utile aux dispositions en cause.
Par lettre, du 21 juin 1993, le directeur général de la compagnie TAT European Airlines a demandé au directeur général de l'aviation civile, du ministère français des transports, de lui préciser la position de son administration quant à une exploitation des liaisons Paris (Orly)-Toulouse et Paris (Orly)-Marseille par TAT European Airlines, celle-ci étant candidate à cette exploitation. Cette demande faisait explicitement référence aux dispositions du règlement (CEE) no 2408/92 applicables depuis le 1er janvier 1993, et en particulier à l'article 8 de ce règlement.
Par correspondance du 21 juillet suivant, le directeur général de l'aviation civile a répondu qu'il n'était pas en mesure de donner une suite favorable à la demande d'exploitation de TAT European Airlines. Le refus était fondé sur les dispositions de l'article 5 du règlement précité. À cet égard, le directeur général de l'aviation civile indiquait: « En effet, l'article 5 de ce règlement permet de maintenir, pendant trois ans à compter du 1er janvier 1993, la concession d'exclusivité accordée sur ces liaisons par la convention entre l'État et la compagnie Air Inter. À ce stade, le Ministre a décidé de faire usage de cette possibilité sur une partie substantielle du réseau d'Air Inter, incluant notamment les liaisons indiquées. Je ne suis donc pas en mesure de donner une suite favorable à votre demande. »
La plainte adressée à la Commission par TAT European Airlines le 28 septembre 1993, enregistrée le 29 septembre suivant dans les services de la direction générale des transports de la Commission est dirigée à l'encontre de ce refus, du 21 juillet 1993, des autorités françaises.
II À l'appui de sa plainte auprès de la Commission, la compagnie TAT European Airlines fait valoir à la fois une violation de l'article 3 point f) et des articles 86 et 90 du traité, la méconnaissance de l'accord, du 30 octobre 1990, passé entre la Commission des Communautés européennes, le gouvernement français et la compagnie Air France à la suite du rachat par celle-ci de la compagnie UTA, ainsi qu'une infraction aux dispositions du règlement (CEE) no 2408/92. Parmi les différents moyens soulevés, TAT European Airlines invoque les arguments suivants, utiles dans le cadre de la présente décision:
- les droits de trafic intérieur français à partir de Paris sont, en général, octroyés par les autorités françaises pour tous les aéroports du système aéroportuaire parisien affectés à l'exploitation des droits de trafic régulier, soit les aéroports d'Orly et Charles-de-Gaulle. Les autorités françaises souhaitent en effet, en ce qui concerne les services intérieurs, favoriser la double desserte Orly/Charles-de-Gaulle afin de permettre aux compagnies qui le souhaitent d'améliorer leur desserte de Paris. En refusant cette flexibilité aux liaisons les plus importantes, telles que Paris-Marseille et Paris-Toulouse, les autorités françaises réservent au seul groupe Air France, en particulier à la compagnie Air Inter, le marché aérien réellement rentable en France,
- le monopole du groupe Air France sur les liaisons Paris (Orly)-Toulouse et Paris (Orly)-Marseille aurait dû cesser dès le 1er mars 1992 puisque le point 1.1.1. de l'accord du 30 octobre 1990 précité disposait: « en fonction des demandes présentées, les autorités françaises désigneront au moins une compagnie extérieure au groupe Air France et établie en France, sur les routes domestiques suivantes: . . . Paris-Marseille; Paris-Toulouse . . . Ces . . . lignes sont ouvertes à la multidésignation à compter de la date d'entrée en vigueur du présent arrangement . . . les autorités françaises délivreront les autorisations nécessaires au plus tard le 1er mars 1992 ». L'article 5 du règlement (CEE) no 2408/92 n'a pas modifié l'interprétation qui doit être faite de ces énonciations,
- l'article 5 du règlement (CEE) no 2408/92 ne s'applique pas aux liaisons Paris (Orly)-Marseille et Paris (Orly)-Toulouse car:
- soit le terme « liaisons » sur lequel porte l'exclusivité au sens de l'article 5 vise les liaisons avec le système aéroportuaire de Paris: alors, Air Inter ne bénéficie pas d'une concession « exclusive » selon cet article 5 sur les liaisons Paris-Toulouse et Paris-Marseille, puisque précisément TAT European Airlines dessert les lignes Charles-de-Gaulle-Toulouse et Charles-de-Gaulle-Marseille en application de l'accord du 30 octobre 1990,
- soit les lignes Orly-Toulouse et Orly-Marseille doivent être regardées comme les liaisons à prendre en considération aux termes de l'article 5: alors, d'autres formes de transport peuvent assurer « un service adéquat et continu », par exemple les services d'Air Inter et de TAT European Airlines sur les lignes Charles-de-Gaulle-Toulouse et Charles-de-Gaulle-Marseille. Dans ce cas, le maintien de l'exclusivité n'est pas davantage possible,
- le traitement discriminatoire dont est l'objet TAT European Airlines ne peut être justifié par les dispositions du paragraphe 1 de l'article 8 du règlement (CEE) no 2408/92.
Par lettre en date du 13 octobre 1993 adressée au directeur général de la direction générale des transports de la Commission, la compagnie TAT European Airlines a complété ses arguments précédents. Elle a précisé que l'application erronée de l'article 5 du règlement (CEE) no 2408/92 par les autorités françaises aboutissait et visait en l'espèce à maintenir des règles discriminatoires de répartition du trafic à l'intérieur du système aéroportuaire parisien en ce qui concerne les deux liaisons Paris-Marseille et Paris-Toulouse. Selon la plaignante, l'application de l'article 5 est d'autant plus injustifiée en l'espèce que cet article est seulement susceptible de s'appliquer aux liaisons de ville à ville et non d'aéroport à aéroport. TAT European Airlines demandait en conséquence à la Commission d'adopter une décision sur la base de l'article 8 paragraphe 3 du même règlement, sans préjudice des autres procédures susceptibles d'être utilisées par la Commission à l'encontre des autorités françaises.
III Par lettre du 22 octobre 1993, le directeur général des transports de la Commission a fait connaître aux autorités françaises sa position dans cette affaire en l'état du dossier en sa possession. Il était explicitement précisé dans cette correspondance que les dispositions de l'article 5 du règlement (CEE) no 2408/92 n'étaient pas applicables sur les deux liaisons Paris-Marseille et Paris-Toulouse dès lors que celles-ci auraient du être ouvertes à la multidésignation au plus tard le 1er mars 1992 et que la compagnie Air Inter, filiale de la compagnie Air France, ne pouvait plus en conséquence être regardée comme bénéficiant d'une concession exclusive sur ces deux liaisons. Il était également indiqué que le refus des autorités françaises d'accorder à TAT European Airlines des droits de trafic sur les deux liaisons en cause au départ ou à l'arrivée de l'aéroport d'Orly aboutissait à une répartition discriminatoire du trafic à l'intérieur du système aéroportuaire parisien et contraire aux dispositions de l'article 8 paragraphe 1 dudit règlement (CEE) no 2408/92.
Par ailleurs, dans le cadre de l'instruction de cette même affaire au regard des règles communautaires de la concurrence, la direction générale de la concurrence de la Commission a, le 20 octobre 1993, transmis une copie de la plainte de TAT European Airlines aux autorités françaises et à la compagnie Air France en vue de recueillir leurs observations éventuelles. Les deux procédures font l'objet d'un traitement totalement distinct.
En réponse aux correspondances précédentes, la représentation permanente de la France auprès des Communautés européennes a, par lettre du 21 décembre 1993 enregistrée auprès du secrétariat général de la Commission le 23 décembre 1993, transmis à cette dernière les observations des autorités françaises se référant au contenu de la plainte de TAT European Airlines. S'agissant plus particulièrement de l'application de l'article 5 du règlement (CEE) no 2408/92, les autorités françaises ont tout d'abord indiqué que l'accord du 30 octobre 1990 ne prévoyait l'ouverture à la multidésignation de certaines liaisons intérieures françaises qu'au départ ou à l'arrivée du seul aéroport de Charles-de-Gaulle, à l'exception du cas de la liaison Paris-Nice. Elles ont ensuite précisé que sont réunies, pour les deux liaisons Paris (Orly)-Marseille et Paris (Orly)-Toulouse, les différentes conditions prévues pour l'application de l'article 5 en question, à savoir le caractère domestique de ces liaisons, l'exclusivité de la concession accordée à Air Inter par un support juridique clairement identifié faisant explicitement référence aux deux liaisons en question, enfin l'absence sur ces deux liaisons d'autres formes de transport susceptibles d'assurer un service adéquat et continu. Il convient de souligner que les autorités françaises n'ont fait, à ce stade, aucune mention des dispositions de l'article 8 du règlement (CEE) no 2408/92.
IV Afin de lui permettre d'instruire en toute connaissance de cause la présente affaire dans le cadre de la procédure prévue par l'article 8 paragraphe 3 du règlement (CEE) no 2408/92 et afin de sauvegarder les droits de la défense, la Commission a, le 21 janvier 1994, adressé aux autorités françaises un nouveau courrier. Celui-ci explicitait de la manière suivante les moyens présentés par TAT European Airlines à l'égard de la méconnaissance alléguée des dispositions de l'article 8 paragraphe 1 du règlement (CEE) no 2408/92: « TAT European Airlines soutient qu'en faisant une application erronée de l'article 5 sur les deux liaisons en cause au départ et à l'arrivée du seul aéroport d'Orly, les autorités françaises ont en réalité procédé à une répartition discriminatoire, au profit de la compagnie Air Inter, du trafic entre les aéroports situés à l'intérieur du système aéroportuaire parisien. Dans ce contexte, TAT European Airlines rappelle que l'article 5 vise des liaisons de ville à ville et non d'aéroport à aéroport. Elle demande en conséquence à la Commission de prendre une décision sur la base du troisième paragraphe de l'article 8 du même règlement. » En conclusion à cette correspondance, la Commission demandait aux autorités françaises de lui faire parvenir, dans un délai de quinze jours, leurs observations sur les arguments de TAT European Airlines ainsi résumés, accompagnées de toutes les informations qu'elles jugeraient utiles.
En réponse à la lettre du 21 janvier 1994, les autorités françaises ont transmis à la Commission, le 16 février 1994, une note contenant les éléments suivants:
- le document intitulé « principes d'interprétation concernant l'application de l'article 5 », élaboré par les services de la Commission et transmis aux États membres le 23 septembre 1993, ne représente pas l'état du droit applicable mais la seule opinion de la Commission,
- le système français de transport aérien intérieur est principalement organisé depuis plus de trente ans autour de la péréquation interne pratiquée par la compagnie Air Inter entre liaisons rentables et non rentables, pour l'exploitation desquelles elle a reçu une exclusivité. Le passage trop rapide de ce système à un autre mettrait en péril l'existence de nombreuses dessertes intérieures françaises et irait ainsi à l'encontre du souci de l'administration française de préserver une développement homogène et équilibré de l'espace national,
- la notion de liaison au sens de l'article 5 du règlement (CEE) no 2408/92 vise des liaisons d'aéroport à aéroport et non de ville à ville, comme tend à le démontrer d'autres articles dudit règlement,
- la Commission n'est pas fondée à engager une procédure sur la base de l'article 8 paragraphe 3 du règlement (CEE) no 2408/92 dès lors qu'il n'y a pas lieu d'invoquer, dans cette affaire, le non-respect des dispositions dudit article 8 paragraphe 1,
- l'article 5 du règlement (CEE) no 2408/92 est applicable aux liaisons Paris (Orly)-Marseille et Paris (Orly)-Toulouse car, d'une part le mot « forme » employé dans cet article fait référence à d'autres modes de transport que l'avion, d'autre part l'accord du 30 octobre 1990 passé entre la Commission, la compagnie Air France et les autorités françaises ne prévoit une ouverture à la concurrence des liaisons en cause qu'au départ et à l'arrivée de l'aéroport Charles-de-Gaulle.
V Il importe ici d'indiquer que le ministre français des transports a pris, le 6 décembre 1993, un arrêté relatif à la répartition du trafic intracommunautaire au sein du système aéroportuaire parisien. Aux termes de l'article 3 de cet arrêté publié au Journal officiel de la République française du 10 décembre 1993: « Les services aériens à destination ou en provenance des aéroports français, de métropole et des départements d'outre-mer, peuvent être exploités sur les aéroports d'Orly et Charles-de-Gaulle, sous réserve que l'exercice des droits de trafic correspondants ait été autorisé en application des dispositions du règlement (CEE) no 2408/92 susvisé. »
APPRÉCIATION JURIDIQUE VI En matière de répartition du trafic entre les aéroports situés à l'intérieur d'un système aéroportuaire, la Commission dispose des pouvoirs qui lui sont conférés par les dispositions de l'article 8 paragraphe 3 du règlement (CEE) no 2408/92. Au regard notamment de la plainte déposée par la compagnie TAT European Airlines, la Commission estime nécessaire d'utiliser ses pouvoirs et de décider si la France peut continuer à refuser aux transporteurs communautaires, et plus particulièrement à TAT European Airlines, l'exercice de droits de trafic sur les liaisons régulières Paris (Orly)-Marseille et Paris (Orly)-Toulouse au motif que l'exploitation des liaisons Paris-Marseille et Paris-Toulouse n'est autorisée qu'au départ et à l'arrivée de l'aéroport Charles-de-Gaulle, les autorités françaises faisant application des dispositions de l'article 5 dudit règlement à ces deux liaisons au départ et à l'arrivée de l'aéroport d'Orly.
Aux termes de l'article 8 paragraphe 1 du règlement (CEE) no 2408/92, « le présent règlement n'affecte pas le droit d'un État membre de réglementer, sans discrimination fondée sur la nationalité ou l'identité du transporteur aérien, la répartition du trafic entre les aéroports situés à l'intérieur d'un système aéroportuaire ».
Ainsi que la Commission l'a déjà expressément indiqué dans sa décision 93/347/CEE (2) non contestée par la France, l'application de ces dispositions peut entraîner une restriction au principe général de liberté d'accès aux liaisons et aux aéroports communautaires prévue par l'article 3 paragraphe 1 dudit règlement. Cette éventuelle restriction doit, comme toute exception à un tel principe, être interprétée de façon stricte et reposer sur des critères transparents, objectifs, constants sur une certaine période et non discriminatoire. Il appartient, à cet égard, aux États membres d'apporter toutes justifications utiles. Celles-ci doivent reposer sur des éléments non erronés, objectifs et liés à des exigences impérieuses d'intérêt général, en proportion avec l'étendue de la mesure et son caractère restrictif.
S'agissant plus particulièrement du principe de non-discrimination une distinction s'impose entre la discrimination fondée sur la nationalité du transporteur aérien et celle fondée sur son identité.
L'interdiction de toute discrimination exercée en raison de la nationalité du transporteur, reprise dans le règlement (CEE) no 2408/92, est prévue par l'article 6 du traité. Elle a donné lieu à une abondante jurisprudence de la Cour de justice.
En adoptant le règlement (CEE) no 2408/92, le Conseil a cependant estimé que l'absence de discrimination fondée sur la nationalité du transporteur n'était pas suffisante, compte tenu de la structure du transport aérien dans la Communauté, pour assurer un fonctionnement satisfaisant du marché intérieur de l'aviation civile et garantir le respect du principe du libre accès au marché prévu par l'article 3 paragraphe 1 dudit règlement. Il a, en conséquence, ajouté le principe de non-discrimination fondée sur l'identité du transport aérien.
La Commission est d'avis que le principe de la non-discrimination en fonction de l'identité du transporteur aérien empêche un État membre, sans justifications objectives et fondées en fait ou en droit, soit de refuser à un ou plusieurs transporteurs, que ceux-ci exploitent déjà une liaison ou demandent à l'exploiter, des droits de trafic accordés à un nombre limité d'autres transporteurs précisément identifiés ou identifiables pour l'exploitation d'un même service dans des conditions comparables, soit, à l'inverse, d'accorder à un ou plusieurs transporteurs des droits de trafic refusés à un nombre limité d'autres transporteurs précisément identifiés ou identifiables pour l'exploitation d'un même service dans des conditions comparables. Le nombre limité et l'identité des transporteurs communautaires bénéficiaires, ou, au contraire, victimes de la mesure discriminatoire peuvent ressortir directement de cette mesure ou découler indirectement des circonstances de fait.
C'est au regard de ces considérations qu'il convient de procéder à l'examen de la mesure par laquelle les autorités françaises continuent à refuser aux transporteurs communautaires, notamment à TAT European Airlines, l'exercice de droits de trafic sur les liaisons Paris (Orly)-Marseille et Paris (Orly)-Toulouse.
Force est tout d'abord de constater que cette mesure constitue une méconnaissance du principe de non-discrimination fondée sur l'identité du transporteur tel qu'il est explicité ci-dessus. En effet, les autorités françaises ont indiqué que l'exploitation de services réguliers par des compagnies communautaires entre Paris et Marseille d'une part, Paris et Toulouse d'autre part, était pleinement autorisée au départ et à l'arrivée de l'aéroport Charles-de-Gaulle, conformément aux dispositions de l'article 3 paragraphe 1 du règlement (CEE) no 2408/92. De fait, TAT European Airlines exploite de façon régulière les liaisons Paris (Charles-de-Gaulle) Toulouse et Paris (Charles-de-Gaulle) Marseille. Il en est de même de la compagnie Air Inter. Par contre, les autorités françaises maintiennent au titre de l'article 5 dudit règlement l'existence d'une concession exclusive au profit d'Air Inter sur ces mêmes liaisons au départ et à l'arrivée de l'aéroport d'Orly. Ce faisant, elles s'opposent à ce que toute compagnie communautaire autre qu'Air Inter desserve l'aéroport d'Orly dans le cadre de l'exploitation de services aériens réguliers entre le système aéroportuaire parisien d'une part, Toulouse et Marseille d'autre part. Il s'agit bien d'une répartition, discriminatoire au bénéfice de la seule compagnie Air Inter, du trafic entre les aéroports situés à l'intérieur du système aéroportuaire parisien.
Par ailleurs, il est nécessaire d'examiner la question de savoir si la France pourrait légalement déroger au principe de non-discrimination prévu par l'article 8 paragraphe 1 du règlement (CEE) no 2408/92 en faisant application des dispositions de l'article 5 dudit règlement. Sur ce point, la Commission considère qu'une application correcte de cet article 5 ne saurait aucunement aboutir à une discrimination en fonction de l'identité du transporteur telle qu'elle est prohibée par l'article 8. Ainsi qu'il va être montré ci-dessous, le maintien de la concession exclusive en cause constitue en réalité une mesure d'affectation du trafic à l'intérieur du système aéroportuaire parisien prise par la voie détournée d'une application erronée de l'article 5 du règlement (CEE) no 2408/92.
Aux termes de l'article 5 du règlement (CEE) no 2408/92: « Sur les liaisons intérieures pour lesquelles, lors de l'entrée en vigueur du présent règlement, une concession exclusive a été accordée par voie législative ou contractuelle et sur lesquelles d'autres formes de transport ne peuvent assurer un service adéquat et continu, cette concession peut subsister jusqu'à son échéance ou pendant trois ans, selon la date la plus proche. »
La Commission estime que ces dispositions, en prévoyant une période d'adaptation préalable au libre jeu des forces du marché sur certaines liaisons régulières exploitées jusqu'à présent de façon exclusive, visent à assurer la pérennité et la continuité de services de transport adéquats entre deux points (villes ou régions) situés à l'intérieur d'un même État membre. Aussi, les autres formes de transport auxquelles il est fait référence à l'article 5 sont-elles toutes les autres possibilités, y compris intermodales, de transport entre deux villes considérées. Il s'agit principalement du transport par train ou par autobus. Il peut également s'agir de transport par avion dans le cas de vol indirect ou de l'existence d'un aéroport de substitution. Il importe, à cet égard, de remarquer que le texte de l'article 5 utilise l'expression « formes de transport » et non pas « modes de transports ». En d'autres termes, une exclusivité ne peut être maintenue au titre de l'article 5 que s'il n'existe pas d'autre possibilité de se rendre d'une ville à l'autre de façon adéquate et continue. Dans ce contexte, lorsqu'il existe un système aéroportuaire desservant une même ville ou une même région, une exclusivité sur une liaison aboutissant à ce système aéroportuaire n'a de sens que si elle s'applique à tous les aéroports de ce système. En conséquence, elle ne peut être maintenue au titre de l'article 5 que si elle concerne expressément l'ensemble du système aéroportuaire et non pas un seul aéroport.
En l'espèce, du reste, la convention du 5 juillet 1985 par laquelle l'État français a accordé des concessions à la compagnie Air Inter sur certaines liaisons, dont les deux liaisons en cause, définit elle-même celles-ci comme des liaisons de point à point et non d'aéroport à aéroport, sans faire aucunement mention des différents aéroports du système aéroportuaire parisien.
Dans ces conditions, en autorisant TAT European Airlines à exploiter les deux liaisons Paris-Marseille et Paris-Toulouse au départ et à l'arrivée de l'aéroport de Charles-de-Gaulle à compter du 1er mars 1992 et, plus récemment, en ne mettant aucun obstacle à l'exploitation des mêmes liaisons par d'autres compagnies communautaires, les autorités françaises ont mis fin à l'exclusivité dont aurait bénéficié la compagnie Air Inter entre Paris d'un côté, Marseille et Toulouse d'un autre côté. En définitive, la mesure opposée à TAT European Airlines, fondée sur l'article 5 non applicable en l'espèce, apparaît uniquement comme une règle de répartition du trafic entre les aéroports d'Orly et Charles-de-Gaulle.
Au surplus, la Commission considère que l'article 5 du règlement (CEE) no 2408/92 est inapplicable en l'espèce dès lors que la compagnie Air Inter ne disposait pas au 1er janvier 1993, date de l'entrée en vigueur dudit règlement, d'une concession exclusive sur les deux liaisons Paris-Marseille et Paris-Toulouse, quel que soit l'aéroport d'affectation au sein du système aéroportuaire parisien. S'agissant en premier lieu de la liaison Paris-Marseille, la convention du 5 juillet 1985 a expressément permis aux compagnies UTA et Air Afrique d'exploiter la liaison ainsi définie concurremment avec Air Inter, ce qui ôte tout caractère exclusif à la concession dont cette compagnie a bénéficié. S'agissant en second lieu de la liaison Paris-Toulouse, et subsidiairement de la liaison Paris-Marseille, il résulte des énonciations du point 1.1.1. de l'accord du 30 octobre 1990 citées au point II ci-dessus, lequel ne mentionne pas davantage d'affectation aéroportuaire, que l'exclusivité dont bénéficiait la compagnie Air Inter sur cette liaison a pris fin au plus tard le 1er mars 1992.
Au regard de l'ensemble des considérations qui précèdent, la Commission est d'avis que les autorités françaises ont procédé à une répartition discriminatoire du trafic à l'intérieur du système aéroportuaire parisien et ont ainsi violé les dispositions de l'article 8 paragraphe 1 du règlement (CEE) no 2408/92 en faisant à tort usage de l'article 5 dudit règlement et en maintenant une concession exclusive au profit de la compagnie Air Inter sur les liaisons Paris-Marseille et Paris-Toulouse au départ et à l'arrivée du seul aéroport d'Orly.
À titre subsidiaire, il importe de noter que, en l'espèce, une interprétation différente de la notion de liaison au sens de l'article 5 aboutirait en tout état de cause à la même conclusion. En effet, en supposant qu'une concession exclusive puisse être régulièrement définie au titre de l'article 5 sur les services aériens réguliers entre l'aéroport d'Orly d'une part, Marseille et Toulouse d'autre part, approche qui n'est pas acceptée par la Commission, il existe des formes de transports, autres que ces lignes aériennes, susceptibles d'assurer un service adéquat et continu entre Paris et Marseille d'une part, Paris et Toulouse d'autre part: les services aériens directs existant entre Paris (Charles-de-Gaulle) et Marseille d'une part, Paris (Charles-de-Gaulle) et Toulouse d'autre part, qui comprennent au moins chacun cinq fréquences quotidiennes aller-retour, remplissent cette condition de continuité et d'adéquation. Cette constatation, qui s'oppose à l'usage de l'article 5 au départ ou à l'arrivée du seul aéroport d'Orly sur les deux liaisons en cause, démontre d'ailleurs l'impossibilité d'utiliser cet article à l'égard de ces deux liaisons autrement que sur l'ensemble du système aéroportuaire parisien.
Il importe enfin de souligner que les effets de la discrimination en cause sont importants. L'aéroport d'Orly a les faveurs de la clientèle et concentre entre 85 et 90 % du trafic intérieur français au départ de et à l'arrivée à Paris. Le pourcentage de répartition de ce trafic intérieur entre les aéroports d'Orly et Charles-de-Gaulle s'avère stable depuis plusieurs années. Il s'établit respectivement à quelque 85 et 82 % en faveur d'Orly pour les liaisons Paris-Marseille et Paris-Toulouse. Avec chacune un trafic régulier annuel de l'ordre de deux millions de passagers, celles-ci figurent, en outre, parmi les liaisons les plus importantes de la Communauté. De plus, l'exploitation de ces deux liaisons est plus coûteuse à partir de l'aéroport Charles-de-Gaulle qu'à partir de l'aéroport d'Orly, en partie pour des raisons géographiques.
En conclusion, les autorités françaises ont méconnu les dispositions de l'article 8 paragraphe 1 du règlement (CEE) no 2408/92 en refusant aux transporteurs communautaires l'exercice de droits de trafic sur les liaisons Paris-Marseille et Paris-Toulouse au départ et à l'arrivée de l'aéroport d'Orly. Il en résulte qu'il y a lieu de décider, conformément au même article 8 paragraphe 3, que les autorités françaises ne peuvent continuer à appliquer la mesure en cause de répartition du trafic entre les aéroports d'Orly et Charles-de-Gaulle. La présente décision ne s'oppose cependant pas, dans son principe, au maintien d'une concession exclusive au profit de la compagnie Air Inter, sur les liaisons remplissant les conditions prévues par l'article 5 telles que précisées ci-dessus. Il importe également de rappeler que les dispositions du règlement (CEE) no 2408/92, notamment celles de l'article 4 relatives à l'imposition d'obligations de service public, permet d'assurer la continuité des services sur l'ensemble des réseaux internes des États membres et de répondre aux objectifs d'une politique d'aménagement du territoire. Toutefois, compte tenu de ce que, dans les circonstances particulières de l'espèce, la présente décision risque d'entraîner des conséquences importantes sur la structure et l'organisation des lignes en cause, la Commission estime opportun de prévoir un délai d'adaptation expirant au plus tard le 27 octobre 1994,
A ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION:

Article premier
La France ne peut plus refuser aux transporteurs aériens communautaires l'exercice de droits de trafic sur les liaisons Paris (Orly)-Marseille et Paris (Orly)-Toulouse au motif que les autorités françaises feraient usage, sur ces liaisons, des dispositions de l'article 5 du règlement (CEE) no 2408/92.

Article 2
La république française est destinataire de la présente décision. Elle est communiquée à TAT European Airlines, au Conseil de l'Union européenne, aux États membres et aux royaumes de Norvège et de Suède.

Article 3
La France est tenue d'exécuter la présente décision au plus tard le 27 octobre 1994.
Fait à Bruxelles, le 27 avril 1994.
Par la Commission
Abel MATUTES
Membre de la Commission

(1) JO no L 240 du 24. 8. 1992, p. 8.
(2) JO no L 140 du 11. 6. 1993, p. 51.

Fin du document


Structure analytique Document livré le: 11/03/1999


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