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Document 387D0406

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[ 08.20.10 - Accords interdits ]


387D0406
87/406/CEE: Décision de la Commission du 10 juillet 1987 relative à une procédure d'application de l'article 85 du traité CEE (IV/31.192 - Tipp-Ex) [IV/31.507 - Tipp-Ex (contrat type)] (Les textes en langues allemande, anglaise, française et néerlandaise sont les seuls faisant foi)
Journal officiel n° L 222 du 10/08/1987 p. 0001 - 0011



Texte:

DÉCISION DE LA COMMISSION du 10 juillet 1987 relative à une procédure d'application de l'article 85 du traité CEE (IV/31.192 - Tipp-Ex) [IV/31.507 - Tipp-Ex (contrat type)] (Les textes en langues allemande, anglaise, française et néerlandaise sont les seuls faisant foi.) (87/406/CEE)
LA COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,
vu le traité instituant la Communauté économique européenne,
vu le règlement no 17 du Conseil, du 6 février 1962, premier règlement d'application des articles 85 et 86 du traité CEE(1), modifié en dernier lieu par l'acte d'adhésion de l'Espagne et du Portugal, et notamment son article 3 paragraphe 1 et son article 15 paragraphe 2,
vu les plaintes de la société ISA France Sàrl de Bar-le-Duc (France) du 30 mars 1984 et de la société M. Visser's Industrie & Handelsonderneming - VIHO BV, Eijsden (Pays-Bas), du 24 juillet 1984, contre la société Tipp-Ex Vertrieb GmbH & Co KG de Francfort (république fédérale d'Allemagne),
vu la demande que Tipp-Ex a introduite le 7 mars 1985, en application des articles 2 et 4 du règlement no 17, en vue de la délivrance d'une attestation négative pour le contrat-type dit « contrat de distributeur agréé », et la notification effectuée,
vu la décision de la Commission du 10 avril 1986 d'engager la procédure,
après avoir mis les entreprises concernées en demeure de se prononcer sur les griefs retenus par la Commission, conformément à l'article 19 paragraphe 1 du règlement no 17 et au règlement no 99/63/CEE de la Commission, du 25 juillet 1963, relatif aux auditions prévues à l'ar- ticle 19 paragraphes 1 du règlement no 17(2),
après consultation du comité consultatif en matière d'en- tentes et de positions dominantes,
considérant ce qui suit :
I. LES FAITS (1)La présente procédure a pour objet les accords et pratiques concertés par lesquels Tipp-Ex et ses concessionnaires exclusifs dans plusieurs pays de la Communauté ont cherché à empêcher les importations et exportations parallèles de produits Tipp-Ex à l'intérieur du marché commun. Elle a été engagée à la suite d'une plainte qu'ISA France a déposée le 30 mars 1984. Le contrat-type de distributeur agréé notifié le 7 mars 1985 a été inclus dans la procédure en raison du rapport étroit qu'il présente avec les autres faits.
A. Les entreprises a) Tipp-Ex (2)Les activités de Tipp-Ex Vertrieb GmbH & Co KG de Francfort consistent essentiellement à commercialiser des produits correcteurs. L'entreprise achète à Stadler GmbH & Co KG, Francfort, les produits qui sont distribués sous la marque « Tipp-Ex ». Les associés et les gérants étant les mêmes dans les deux sociétés, la Commission considère que Tipp-Ex et Stadler sont des entreprises liées.
En 1984, Tipp-Ex a réalisé un chiffre d'affaires total de (...)(1), dont (...) en république fédérale d'Allemagne et (...) dans l'ensemble de la Com- munauté.
b) Beiersdorf (3)Beiersdorf AG fabrique un grand nombre de produits pharmaceutiques, cosmétiques et chimiques, dont les produits du programme « tesa ». Le chiffre d'affaires consolidé de Beiersdorf AG et de ses filiales en république fédérale d'Allemagne s'est élevé à (...) en 1984. La même année, le chiffre d'affaires mondial du groupe Beiersdorf a atteint (...).
À partir du 4 janvier 1982, Beiersdorf a repris la distribution exclusive des produits Tipp-Ex en France, après la cessation des rapports contractuels entre Tipp-Ex et (...)(2).
(4)BDF tesa SA du Plessis- Robinson est l'une des trois filiales de Beiersdorf en France. Elle distribue notamment les produits « tesa » et Tipp-Ex en France.
c) Les autres concessionnaires exclusifs concernés par la décision sont les suivants :
(5)-Burotex SA de Bruxelles (Belgique),
-(...) (jusqu'au 31 décembre 1981),
-Esveha-Rijam (précédemment Rijam Jade) d'Alphen a. d. Rijn, Pays-Bas,
-Tipp-Ex (Leslie McLean) Ltd de Camberley, Surrey, Royaume-Uni.
d) ISA France (6)ISA France Sàrl, de Bar-le-Duc, est une impor- tante entreprise d'importation et d'exportation d'articles de bureau. Elle écoule ses produits en France, aux Pays-Bas, dans la république fédérale d'Allemagne et en Afrique. En 1984, le chiffre d'affaires d'ISA France s'est élevé à (...) dont (...) étaient imputables aux produits Tipp-Ex.
e) VIHO (7)M. Visser's Industrie & Handelsonderneming-VIHO B. V. d'Eijsden, Pays-Bas, est une entreprise d'importation et d'exportation d'articles de bureau, principalement active dans les pays de la Communauté. En 1984, son chiffre d'affaires a atteint (...), dont (...) se rapportaient aux produits Tipp-Ex.
B. Le produit et le marché des produits correcteurs (8)La procédure porte sur des produits correcteurs, qui sont essentiellement des papiers correcteurs, des liquides correcteurs (dits « fluides ») et des rubans correcteurs.
(9)La Commission estime que la société Tipp-Ex occupe une position solide sur le marché des produits correcteurs. Elle n'a cependant pas du constater que Tipp-Ex occuperait une position dominante. Tipp-Ex est certes de loin le principal fournisseur de papier et fluide correcteurs dans la Communauté, mais il n'en va pas de même pour les rubans correcteurs, qui représentent le segment du marché dont la croissance est la plus rapide. Les principaux fournisseurs de rubans correcteurs sont les fabricants de machines à écrire et de rubans pour celles-ci. Tipp-Ex n'est qu'un parmi huit petits fournisseurs, qui se partagent environ 30 % du marché.
Pour apprécier la position de Tipp-Ex sur le marché, il faut garder présent à l'esprit qu'il s'agit d'une entreprise de taille moyenne en concurrence avec de grandes entreprises et qu'il n'existe pas d'obstacles substantiels à l'accès au marché des produits correcteurs.
C. Le système de distribution de Tipp-Ex (10)Tipp-Ex distribue ses produits dans l'ensemble de la Communauté, ainsi que dans de nombreux pays tiers. Dans la république fédérale d'Allemagne, elle vend aux commerces spécialisés (de gros et détail), aux grands magasins, ainsi qu'à deux distributeurs dits « agréés ».
Dans les autres États membres de la Communauté, Tipp-Ex distribue ses produits par l'intermédiaire des distributeurs exclusifs précités (voir para- graphes 3 à 5), qui les revendent aux commerces spécialisés.
(11)La coopération entre Tipp-Ex et les distributeurs exclusifs repose, à deux exceptions près, sur des accords verbaux. Par ces accords, Tipp-Ex s'est engagée, envers chacun de ces distributeurs, à ne livrer qu'à lui seul certains produits destinés à être revendus dans un territoire délimité du marché commun et, réciproquement, chacun de ces distributeurs s'est engagé à assumer vis-à-vis de Tipp-Ex, en matière de promotion des ventes, des obligations typiques d'un distributeur exclusif.
(12)Des contrats écrits de distributeur agréé existent uniquement avec Tipp-Ex (Leslie McLean) et Beiersdorf. Le contrat avec Tipp-Ex (Leslie McLean) a été conclu et est entré en vigueur le 1er octobre 1983 et le contrat avec Beiersdorf a été signé en décembre 1983 et est entré en vigueur rétroactivement au 4 janvier 1982. Antérieurement, les relations contractuelles de ces deux entreprises avec Tipp-Ex faisaient l'objet d'un accord verbal, comme dans le cas des autres distributeurs exclusifs. Le 7 mars 1985, c'est-à-dire après la fin de l'enquête, Tipp-Ex a introduit, au titre de l'article 2 du règlement no 17, une demande d'attestation négative pour un contrat type correspondant aux contrats de distributeur agréé et notifié cet accord type « à toutes fins utiles » conformément aux articles 4 et 5 dudit règlement.
(13)Le contrat type contient notamment les clauses suivantes, qui ont de l'importance en l'espèce :
« ...
Article 14 - Vente en dehors du territoire concédé 1. Le distributeur agréé s'engage à ne pas vendre les produits faisant l'objet du présent contrat à des clients établis en dehors du territoire concédé, sauf dans les pays membres de la Communauté. Les demandes émanant de clients établis dans ces pays doivent être transmises par le distributeur agréé au fournisseur attitré. Le distributeur agréé s'engage également à ne pas vendre les produits faisant l'objet du contrat à des clients dont il sait qu'ils ont l'intention de les revendre dans des territoires situés en dehors du territoire concédé.
2. En ce qui concerne les pays membres de la Communauté non compris dans le territoire concédé, le distributeur agréé s'engage à s'abstenir de toute politique de vente active. Cela signifie qu'il lui est interdit dans ces pays de prospecter la clientèle, de créer des succursales, de maintenir des dépôts de distribution et de faire de la publicité pour les produits faisant l'objet du contrat.
... »
« ...
Article 20 - Protection territoriale (14)1. Le fournisseur ne livrera pas les produits faisant l'objet du contrat à des distributeurs indépendants dont il sait qu'ils ont l'intention de les revendre dans le territoire concédé. Il est tenu de vérifier avec toute la diligence requise s'il y a des raisons de craindre que le distributeur indépendant en question ne revende les produits dans le territoire concédé.
2. Le fournisseur s'engage à imposer aux distributeurs qui sont parties à ses autres contrats de distributeur agréé les mêmes obligations que celles que le distributeur agréé a assumées au chapitre II article 14 du présent contrat.
... ».
D. Mesures prises par Tipp-Ex pour empêcher les importations et exportations parallèles (15)Selon les constatations de la Commission, Tipp-Ex a pris, de 1979 à 1982, des mesures actives pour empêcher les importations et exportations parallèles dans la Communauté. En outre, elle a exercé des pressions sur ses concessionnaires exclusifs pour obtenir leur assentiment et leur appui à cet égard.
Par ailleurs, les conventions orales entre Tipp-Ex et (...), Burotex, Esveha-Rijam et Tipp-Ex (Leslie McLean) avaient pour objet d'empêcher les importations et exportations parallèles. Cela ressort du comportement des intéressés.
a) Comportement vis-à-vis d'ISA France (16)Au début de 1979, ISA France achète des produits à Tipp-Ex pour la première et dernière fois. Étant donné que ces produits sont, contrairement à ce qui était entendu, vendus dans un pays tiers et qu'une partie d'entre eux finissent par réapparaître sur le marché allemand, Tipp-Ex exige, pour toute nouvelle livraison à ISA France, que cette entreprise lui remette un relevé détaillé des destinataires et lieux de destination des marchandises.
(17)Le 11 avril 1979, Tipp-Ex adresse un télex à ISA France, notamment pour lui reprocher de vendre des produits Tipp-Ex dans la république fédérale d'Allemagne et d'informer ses clients sur ses sources d'approvisionnement et les prix qu'elle paie. Tipp-Ex ajoute que, en conséquence, elle met fin aux relations commerciales. Effectivement, Tipp-Ex n'a plus livré de produits à ISA France par la suite.
(18)Toujours en 1979, ISA France achète à plusieurs reprises des produits Tipp-Ex à (...) et les revend en République fédérale d'Allemagne. Lorsque Tipp-Ex l'apprend, elle adresse plusieurs télex non seulement à (...) mais aussi à Burotex, à Esveha- Rijam et à Tipp-Ex (Leslie McLean), pour inciter les distributeurs exclusifs à se conformer à sa politique commerciale, qui consiste à ne pas effectuer de livraisons aux entreprises qui procèdent à des importations parallèles, afin de protéger de façon tout à fait sûre les territoires de distribution. À cet égard, la Commission a constaté les faits résumés dans les paragraphes 19 à 24.
(19)Le 29 août 1979, Tipp-Ex se plaint par télex auprès de ses distributeurs exclusifs en Belgique, en France, au Royaume-Uni et aux Pays-Bas de réimportations par des clients allemands à des prix de loin inférieurs aux prix locaux et souligne que ceci entraînera pour le distributeur concerné des conséquences immé- diates. En outre, Tipp-Ex précise dans ce télex, d'une part, qu'elle ne fournit à aucun exportateur en république fédérale d'Allemagne s'il ne certifie, par la production des documents de transport, que la marchandise a effectivement été expédiée dans le pays en question, et, d'autre part, qu'elle a décidé, à cause des importations parallèles, d'appliquer à chaque expédition un code spécial par pays.
(20)Le 31 août 1979, Tipp-Ex demande à [...] de trouver la source d'approvisionnement d'ISA France pour les produits Tipp-Ex. Son télex se termine par la phrase suivante : « We hope that you are able to help us to cut out the parallel market ».
(21)Le 5 octobre 1979, Tipp-Ex fait savoir aux distributeurs exclusifs que (...) a fourni des produits Tipp-Ex à ISA France et que cette société, connue pour pratiquer des sous-cotations, a revendu à un distributeur allemand. Dans ce télex, Tipp-Ex pose la question de savoir s'il est sage pour un conces- sionnaire exclusif de mettre ainsi son droit de repré- sentation en péril et termine en annonçant des représailles.
(22)Dans un télex complétant celui dont il vient d'être question, Tipp-Ex annonce à (...) qu'elle met fin à ses livraisons. Le 12 octobre 1979, Tipp-Ex revient provisoirement sur cette décision, mais supprime une remise en nature de 10 % sur le prix de vente qu'elle accordait précédemment à (...). Dette dernière société réagit en augmentant de 10 à 20 % les prix offerts à ISA France.
(23)Cela provoque des contestations entre (...) et ISA France, celle-ci considérant que l'augmentation de prix procède d'une pratique concertée entre (...) et Tipp-Ex, visant à empêcher ISA France de poursuivre ses importations parallèles. Par la suite, ISA France interrompt ses achats auprès de (...) pendant une période qui, selon les informations dont la Commission dispose, s'étend sur toute l'année 1980. Pendant ce temps, ISA France réussit à obtenir des produits Tipp-Ex d'un grossiste allemand, qui, par crainte de sanctions de la part de Tipp-Ex, effectue les livraisons de façon dissimulée.
(24)Ce n'est qu'au début de 1981 que des négociations concrètes ont lieu entre (...) et ISA France. (...) refuse de livrer elle-même à ISA France, mais signale qu'elle ne voit pas d'inconvénient à ce qu'ISA France se procure de grandes quantités de produits Tipp-Ex auprès d'une entreprise approvisionnée par (...) Cependant, aucune affaire n'est conclue, car ISA France juge trop élevé le prix qui lui est offert.
(25)Le 20 novembre 1981, Tipp-Ex retire finalement à (...) la concesssion de distribution exclusive en France au 31 décembre 1981 et la transfère à Beiersdorf à compter du 4 janvier 1982. D'après les déclarations d'ISA France, l'un des motifs essentiels de cette décision est la fourniture de produits à ISA France par (...). Pour sa part, Tipp-Ex déclare qu'elle a retiré cette concession parce que (...) n'avait pas rempli convenablement ses obligations en matière de promotion des ventes et avait réalisé un chiffre d'affaires beaucoup trop bas avec les grossistes français. Il ressort des pièces d'un procès civil intenté par Tipp-Ex en 1982 contre (...) que les résultats insuffisants obtenus par (...) constituaient en tout cas l'une des raisons du retrait de la concession.
(26)La Commission conclut du comportement de (...) qui vient d'être exposé que, cédant à des pressions considérables exercées par Tipp-Ex, (...) a dû en octobre 1979 s'associer au moins partiellement aux mesures que Tipp-Ex voulait prendre contre ISA France.
En octobre 1979, (...) majore fortement son offre de prix à ISA France et cesse temporairement, notamment en 1980, ses livraisons à ISA France. Le fait qu'au début de 1981 (...) se déclare disposé à tolérer qu'ISA France achète de grandes quantités de produits auprès d'autres commerçants prouve, en outre, que (...) continue de se conformer à la volonté de Tipp-Ex, en s'abstenant de livrer elle-même à des entreprises connues pour pratiquer des importations parallèles. En effet, l'approvisionnement auprès d'un autre commerçant est différent d'un achat direct auprès d'un concessionnaire exclusif, car une marge bénéficiaire supplémentaire vient s'ajouter. Enfin, la cessation des rapports contractuels par Tipp-Ex à la fin de 1981 n'est pas en contradiction avec le fait que (...) a soutenu temporairement, à savoir d'octobre 1979 au début de 1981, la politique commerciale de Tipp-Ex, qui vise au cloisonnement du marché.
(27)De 1982 à février 1984, ISA France achète des produits Tipp-Ex auprès de BDF tesa. La plaignante affirme que BDF tesa lui a appliqué des prix discriminatoires et que, depuis le 2 mars 1984, elle n'a plus pu obtenir de produits Tipp-Ex de BDF tesa.
(28)L'enquête révèle cependant que BDF tesa n'a pas rompu les relations commerciales avec ISA France, mais les a suspendues temporairement par lettre du 2 mars 1984, après qu'ISA France, lui reprochant de ne pas l'avoir informée d'une offre promotionnelle particulièrement avantageuse, l'eut menacée de faire intervenir « une instance européenne ». Effectivement, à la suite de demandes ultérieures d'ISA France, BDF tesa lui présente, en particulier en avril et en juin 1984, des offres à des conditions qu'elle n'accorde qu'aux grossistes les plus productifs. ISA France n'a pourtant pas fait usage de ces offres.
(29)Il n'a pas non plus pu être établi que BDF tesa ait appliqué à ISA France des prix discriminatoires par rapport aux autres grossistes. Lorsque BDF tesa reprend la commercialisation des produits Tipp-Ex à partir du 4 janvier 1982, cette entreprise se rend compte qu'elle dépend fortement d'ISA France. C'est pourquoi elle offre d'abord à ISA France, comme (...) l'avait fait précédemment, des prix particulièrement favorables (dont une remise de 25 % pour grossiste spécialisé, bien qu'ISA France n'assure pas les prestations habituelles d'un grossiste, ce qui place ISA France dans une position plus avantageuse que celle d'autres grossistes comparables. En outre, ISA France n'achète que 3 des 65 articles de la gramme Tipp-Ex, à savoir les produits à vente rapide.
(30)En raison de cette situation, constatée au cours des premiers mois de 1982, Beiersdorf juge souhaitable de supprimer à moyen terme l'avantage concurrentiel d'ISA France par rapport aux autres grossistes et donc d'aligner les conditions spéciales accordées à ISA France sur les conditions habituelles faites aux grossistes spécialisés. Lorsque BDF tesa réussit à réduire sa dépendance vis-à-vis d'ISA France en élargissant son système de distribution, les conditions accordées à ISA France sont alignées, fin 1982 début 1983, sur celles offertes aux autres grossistes.
(31)L'enquête de la Commission a cependant permis d'établir que les mesures prises par BDF tesa, du moins au cours du deuxième semestre de 1982, avaient également pour but d'empêcher ISA France de procéder à des réimportations en république fédérale d'Allemagne.
(32)Cette conclusion découle des documents suivants de Beiersdorf :
Dans un télex du 13 mai 1982, Beiersdorf commu- nique à BDF tesa ce qui suit : « Comme vos livraisons à ISA mettent gravement en péril la collaboration et les relations avec Tipp-Ex, une solution doit être trouvée sans délai. S'il n'est pas possible, pour des raisons juridiques, d'arrêter les livraisons, il faut cesser d'appliquer des prix spéciaux ... ».
Par lettre du 15 juin 1982 à BDF tesa, Beiersdorf constate que sa filiale n'a pas encore corrigé ses prix et exige une hausse de prix immédiate, étant donné que la collaboration avec Tipp-Ex serait fondamentalement remise en cause si ISA France gardait la possibilité d'exporter grâce aux prix pratiqués par BDF tesa.
Le 2 août 1982, Beiersdorf donne enfin à sa filiale l'ordre formel de ne plus approvisionner ISA France à des conditions spéciales, étant donné que ce client n'a pas tenu sa promesse de ne pas exporter de produits Tipp-Ex. Les conditions spéciales ne peuvent être accordées qu'aux gros clients dont il est sûr qu'ils n'exportent pas.
(33)L'un des documents susvisés permet de conclure que Tipp-Ex est intervenue à plusieurs reprises auprès de Beiersdorf en vue d'empêcher les importations parallèles effectuées par ISA France. Il apparaît également que Beiersdorf s'était déclaré disposée à aider Tipp-Ex à atteindre cet objectif. Cet accord ressort également du fait que Beiersdorf a transmis au propriétaire de Tipp-Ex une copie de la lettre précitée adressée le 2 août 1982 à BDF tesa.
(34)En janvier 1984, ISA France demande au distributeur exclusif belge Burotex de lui faire une offre pour certains articles Tipp-Ex. Elle envoie une demande similaire à Tipp-Ex (Leslie McLean), le distributeur exclusif britannique. Burotex renvoie ISA France à BDF tesa. La société britannique ne répond pas.
La Commission n'a pu établir si Tipp-Ex est alors intervenue pour inciter ses distributeurs exclusifs à adopter une telle attitude.
(35)En mai 1984, ISA France demande à Tipp-Ex de lui faire offre pour une quantité importante d'articles Tipp-Ex « départ usine Francfort ». Tipp-Ex refuse de donner suite à cette commande, en faisant état du contrat de distribution exclusive conclu avec Beiersdorf.
b) Comportement à l'égard de VIHO (36)Le 24 juillet 1984, VIHO s'associe à la plainte d'ISA France et déclare avoir éprouvé des difficultés à s'approvisionner en produits Tipp-Ex et être coupée de toute source d'approvisionnement en dehors du territoire national.
(37)Cette déclaration est sujette à caution puisque, dans sa réponse à la demande d'information de la Commission du 11 décembre 1984, la plaignante reconnaît s'approvisionner en produits Tipp-Ex depuis 1982 auprès d'une filiale du distributeur exclusif néerlandais de Tipp-Ex, Esveha-Rijam, ainsi que de distributeurs néerlandais, belges, allemands, français et britanniques qui ne sont pas distributeurs exclusifs Tipp-Ex.
(38)Cependant, Esveha-Rijam met fin aux livraisons à VIHO en 1984. La Commission n'a cependant pu établir avec une certitude suffisante s'il existait alors un accord à cet égard entre Tipp-Ex et Esveha- Rijam.
(39)En mai 1984, VIHO demande à Tipp-Ex de lui faire offre pour une grande quantité de produits, livraison départ usine. Tipp-Ex renvoie VIHO d'abord au distributeur exclusif néerlandais. Dans la correspondance qui est ensuite échangée, VIHO déclare que le fabricant est tenu de l'approvisionner conformément au règlement (CEE) no 1983/83 de la Commission(1) ainsi qu'à l'information à la presse, émanant de la Commission, dans l'affaire « La maison des bibliothèques » du 12 janvier 1984. En novembre 1984, Tipp-Ex fait finalement une offre, dans laquelle elle communique à VIHO le prix auquel elle approvisionne un acquéreur avec lequel elle n'a pas conclu de contrat de distributeur agréé. VIHO ne donne toutefois pas suite à cette offre, parce que les prix lui paraissent trop élevés.
(40)VIHO reçoit des réponses négatives à plusieurs demandes de fourniture adressées de mai à octobre 1984 à différents distributeurs exclusifs de Tipp-Ex. Burotex renvoie VIHO au distributeur exclusif néerlandais. Tipp-Ex (Leslie McLean) ne répond pas et BDF tesa signale qu'elle représente Tipp-Ex en France et n'exporte pas.
En ce qui concerne le comportement de ces distributeurs exclusifs, la Commission n'est pas en possession d'éléments suffisants pour conclure qu'à l'occasion des demandes de VIHO, Tipp-Ex serait intervenue pour inciter les distributeurs exclusifs à ne pas présenter d'offres.
E. Éléments essentiels de l'argumentation des parties mises en cause a) Tipp-Ex (41)Tipp-Ex déclare que, jusqu'en 1982, elle n'a pas eu connaissance de l'article 85 du traité ni du règlement no 67/67/CEE de la Commission(2), ni des décisions publiées par la Commission et la Cour de justice européenne. Ses connaissances juridiques se résumaient à ce quelle s'estimait civilement tenue, vis-à-vis de ses distributeurs exclusifs, de préserver les contrats de distribution exclusive.
(42)En 1982, lorsque commencent les relations avec Beiersdorf, Tipp-Ex charge un avocat d'élaborer un contrat-type, afin d'asseoir ses rapports avec ses distributeurs exclusifs sur des « bases juridiques irréprochables ». C'est par les explications fournies par cet avocat et par la correspondance échangée avec Beiersdorf à ce sujet que Tipp-Ex prend connais- sance pour la première fois des problèmes qui pouvaient se poser sur le plan du droit des ententes.
(43)Jusqu'à la publication de la Communication de la Commission relative aux règlements (CEE) no 1983/83 et (CEE) no 1984/83 de la Commission, du 22 juin 1983, en ce qui concerne l'application de l'article 85 paragraphe 3 du traité respectivement à des catégories d'accords de distribution exclusive et d'accords d'achat exclusif(3), Tipp-Ex est d'avis que le contrat type en question relève du réglement (CEE) no 67/67/CEE. Des doutes lui venant à l'esprit après avoir pris connaissance de cette communication, elle décide de soumettre le contrat de distributeur agréé à la Commission, mais reporte cette notification à une date ultérieure, eu égard aux vérifications auxquelles la Commission doit procéder un peu plus tard.
(44)Par ailleurs, Tipp-Ex fait valoir que rien ne peut lui être reproché, étant donné qu'elle s'en est remis à l'avis d'un avocat, qui a consacré un temps considérable, avec les honoraires élevés que cela suppose - à l'étude des questions juridiques qui se posaient. Elle était convaincue d'agir de façon totalement légale et en vue de la sauvegarde d'intérêts légitimes. Pendant l'élaboration du contrat de distribution exclusive et les négociations avec BDF tesa, son avocat lui avait affirmé que les articles 14 et 20 incriminés du contrat-type, étaient licites.
b) Beiersdorf (45)Beiersdorf soutient qu'en ce qui concerne la version actuelle du contrat de distributeur agréé, qui ne comporte des limitations expresses des livraisons dans les États membres de la Communauté qu' à l'article 14 paragraphe 1 première phrase, mais non dans la troisième phrase ni à l'article 20, il s'est produit une erreur de rédaction, qui n'a été constatée qu'au cours de la présente procédure. L'entreprise a prouvé que son service juridique a apporté des ajouts identiques à l'article 14 paragraphe 1 troisième phrase et à l'article 20 paragraphe 1 des projets de contrat du 5 novembre 1982 et du 8 février 1983 proposés par Tipp-Ex. Dans le projet de contrat définitif envoyé par Tipp-Ex à Beiersdorf, ne figuraient pas les additions aux articles 14 et 20 proposées par Beiersdorf. Ce fait a cependant échappé aux employés de Beiersdorf. La Commission n'a pas été convaincue par cette explication, que Beiersdorf a donnée dans sa réponse à l'exposé des griefs en date du 2 juin 1986 et lors de l'audition du 18 septembre 1986. Comme cela ressort du procès-verbal de cette audition, les personnes qui ont signé le texte définitif du contrat au nom de Beiersdorf connaissaient bien la teneur du document qu'elles ont signé.
(46)Beiersdorf présente finalement, lors de l'audition du 18 septembre 1986, l'accord additionnel au contrat de distributeur agréé qui a été conclu dans l'inter- valle et par lequel les dispositions critiquées des articles 14 et 20 ont été modifiées. Le 11 septembre 1986, Tipp-Ex annonce son intention d'introduire à nouveau une demande d'attestation négative.
c) Les autres entreprises concernées (47)Burotex, Esveha-Rijam et Tipp-Ex (Leslie McLean) font valoir pour l'essentiel que, dans la mesure où ils n'ont pas réagi aux commandes d'ISA France ou de VIHO, ils ont transmis ces commandes à Tipp-Ex, qu'ils n'ont contracté aucune obligation envers Tipp-Ex à propos de ces clients et que, à l'avenir, ils respecteront pleinement les dispositions communautaires en matière de concurrence.
II. APPRÉCIATION JURIDIQUE A. Article 85 paragraphe 1 Les accords (48)Tipp-Ex et ses distributeurs exclusifs et distributeurs dans la Communauté [(...), Beiersdorf, Burotex, Esveha-Rijam, Tipp-Ex (Leslie McLean)] sont des entreprises au sens de l'article 85. Les accords oraux et écrits, passés entre Tipp-Ex et ces distributeurs (y compris les contrats de distributeur agréé), sont des accords au sens dudit article. Les accords écrits ont été conclus sous la forme décrite aux articles 14 et 20. Les signataires connaissaient la teneur du contrat et voulaient faire une déclaration conforme à celle-ci. Les mesures prises par Tipp-Ex au moins depuis 1979 en application et sur la base de ses relations contractuelles avec les distributeurs pour empêcher les importations parallèles dans les pays de la Communauté s'intègrent dans ces accords.
(49)Ainsi que la Cour de justice des Communautés l'a déclaré à diverses reprises [voir notamment l'arrêt du 25 octobre 1983, affaire 107-82, AEG Telefunken(1) et l' arrêt du 17 septembre 1985, affaires 25-84 et 26-84, Fordwerke(2)], le comportement d'une entreprise ne constitue pas une mesure unilatérale, soustraite à l'application de l'article 85, lorsqu'il s'intègre dans la relation contractuelle entre un fabricant et ses distributeurs. Une convention a été passée entre Tipp-Ex et ses distributeurs agréés. Tous les distributeurs agréés ont accepté la politique de Tipp-Ex en ce qui concerne la protection territoriale mutuelle, et celle-ci fait donc partie intégrante du contrat. À cet égard, il est indifférent que cette politique commerciale soit conforme aux intérêts propres des distributeurs.
(50)Ce comportement de Tipp-Ex et de ses distributeurs constitue à tout le moins une pratique concertée au sens de l'article 85 paragraphe 1.
Les restrictions de la concurrence (51)Les accords et pratiques concertées restreignent la concurrence dans la mesure où ils ont pour objet d'empêcher les acheteurs d'effectuer des exportations. Dans le cas des accords écrits, ceci ressort déjà du libellé des articles 14 et 20 des contrats de distributeur agréé, et, en ce qui concerne les contrats oraux, de leur application au moins depuis 1979.
(52)Tipp-Ex a subordonné l'approvisionnement de ses distributeurs dans la république fédérale d'Allemagne ainsi que de ses distributeurs exclusifs en France, en Belgique, aux Pays-Bas et en Grande-Bretagne à la condition qu'ils ne fournissent pas de produits à des clients dont ils savent ou peuvent supposer, compte tenu des circonstances, qu'ils les revendent dans d'autres pays membres de la Communauté. Tipp-Ex a manifesté à diverses occasions et à plusieurs reprises sa volonté de mener une politique commerciale visant à assurer une protection territoriale absolue à ses distributeurs exclusifs. En outre, Tipp-Ex a exercé de fortes pressions sur certains distributeurs, en particulier sur (...), et les a menacés de sanctions, qu'il a même parfois appliquées, pour qu'ils s'abstiennent d'approvisionner la plaignante ISA France, dont ils connaissaient les activités d'importations parallèles. (...) a au moins partiellement cédé à ces pressions. Tipp-Ex a également exercé des pressions indirectes sur les autres distributeurs exclusifs en les informant de ce fait. Ceux-ci devaient interpréter les communications de Tipp-Ex concernant l'affaire (...)/ISA France comme une mise en garde sévère contre toute vente aux distributeurs effectuant des importations ou des exportations parallèles. La poursuite des relations contractuelles entre Tipp-Ex et les distributeurs exclusifs Burotex, Esveha-Rijam et Tipp-Ex (Leslie McLean) prouve que ces entreprises étaient disposées à se conformer aux souhaits de Tipp-Ex.
(53)Depuis qu'elle a repris la distribution exclusive des produits Tipp-Ex en France à compter du 4 janvier 1982, Beiersdorf a elle aussi soutenu, au moins pour un temps, les mesures de cloisonnement des marchés émanant de Tipp-Ex, et ceci en particulier au deuxième semestre de 1982.
(54)La Commission ne met pas en doute le fait que la suppression des conditions particulières faites à ISA France ait également été justifiée par des considérations touchant à la politique de distribution. Beiersdorf avait l'intention de rapprocher les conditions particulièrement favorables dont bénéficiait ISA France des conditions faites aux grossistes comparables, afin de ne pas désavantager ces derniers et d'établir les ventes en France sur une base plus large. ISA France n'avait et n'a aucun droit, en vertu de la législation communautaire et du fait de ses activités dans le commerce international, à être mieux traité que d'autres distributeurs ayant un niveau de vente comparable.
(55)Toutefois, selon Beiersdorf, il ne fallait procéder à cette adaptation que de manière progressive, étant donné qu'au début de l'année 1982, ISA France était un acheteur important de produits Tipp-Ex en France. C'est pourquoi Beiersdorf était disposée a continuer dans un premier temps à approvisionner ISA France aux mêmes conditions particulièrement favorables, mais ce contre la promesse de ne pas exporter vers la république fédérale d'Allemagne et les secteurs concédés à d'autres distributeurs exclusifs. Ce n'est que lorsqu'ISA France ne respectait manifestement plus cette restriction que Beiersdorf a contraint sa filiale française à supprimer immédiatement et radicalement les conditions spéciales qu'elle lui faisait (voir ci-dessus, le paragraphe 32).
(56)Lors de l'audition, Beiersdorf a indiqué que la suppression des conditions spéciales se justifiait exclusivement par des considérations touchant à la poli- tique de vente. La Commission n'a pas pu la suivre sur ce point. Compte tenu des diverses interventions du propriétaire de la firme, Beiersdorf savait que Tipp-Ex avait un intérêt majeur à supprimer les « perturbations du marché » émanant d'ISA France. Étant donné que Beiersdorf tenait beaucoup à avoir de bonnes relations avec son nouveau partenaire contractuel, les parties étaient convenues qu'ISA France ne devait plus avoir la possibilité d'exporter vers d'autres États membres de la Communauté. Cet accord ressort en outre du fait que Beiersdorf a transmis au propriétaire de la firme Tipp-Ex une copie des instructions internes adressées à BDF tesa (voir ci-dessus le paragraphe 33).
(57)Le fait que la suppression des conditions spéciales se fonde sur une politique de distribution apparemment justifiée à moyen terme n'exclut pas que les mesures prises de mai 1982 au début de 1983 faisaient également l'objet d'un accord ou d'une pratique concertée entre Beiersdorf et Tipp-Ex. Il s'agit en l'espèce non d'un but secondaire purement subjectif des mesures en question, mais d'un objectif qui touche à la concurrence, sur lequel les parties étaient d'accord et qui revêt une signification propre, abstraction faite des considérations de politique de distribution dont ces mesures étaient inspirées.
(58)Un autre moyen utilisé par Tipp-Ex pour réaliser une protection territoriale absolue consistait à exiger la fourniture d'indications détaillées sur le destina- taire final de la marchandise livrée et la réalisation de contrôles demandés par Tipp-Ex après la livraison. Tipp-Ex l'a clairement exprimé vis-à-vis de ses distributeurs exclusifs (voir ci-dessus le para- graphe 19).
(59)Les constatations de la Commission quant aux entraves exercées effectivement permettent de conclure que les accords et pratiques concertées ont eu non seulement pour objet, mais également pour effet, de restreindre de manière sensible la concurrence dans le marché commun.
Les contrats de distributeur exclusif en particulier (60)Conformément à l'article 20 paragraphe 1 des contrats de distributeur exclusif passés avec Beiersdorf et Tipp-Ex (Leslie McLean), Tipp-Ex s'engage à ne pas fournir les produits faisant l'objet du contrat à des distributeurs autonomes dont elle sait ou peut admettre, eu égard aux circonstances, qu'ils ont l'intention de les revendre sur le territoire concédé à un distributeur exclusif. Ceci revient en fait à une obligation pour Tipp-Ex d'interdire à ses distributeurs autonomes d'exporter les produits qu'elle leur livre. Conformément au paragraphe 2 de cet article, Tipp-Ex s'engage à imposer à ses distributeurs exclusifs toutes les obligations prévues par l'article 14 du contrat-type.
(61)Conformément à cet article 14, les distributeurs exclusifs s'engagent « à ne pas vendre les produits visés au contrat à des clients qui ont leur siège en dehors du territoire concédé, sauf dans un des États membres de la Communauté » (paragraphe 1). En ce qui concerne les États membres situés en dehors du territoire concédé, les deux sociétés s'engagent à ne pas pratiquer une politique de vente active dans ces pays (paragraphe 2). En outre, la troisième phrase du paragraphe 1 est libellée comme suit : « Le distributeur agréé s'engage en outre à ne pas vendre les produits visés au contrat à des acheteurs dont il sait qu'ils ont l'intention de les revendre en dehors du territoire concédé ». Cette obligation supplémentaire vise de toute évidence, suivant sa lettre et suivant l'esprit de l'article 14 paragraphe 1, tant les pays tiers que les États membres de la Communauté. Elle revient elle aussi, en définitive, à obliger le distributeur exclusif à interdire à ses clients d'exporter les produits qu'il leur fournit.
(62)Les dispositions des articles 20 et 14 du contrat type ont manifestement pour objet d'assurer une protection territoriale absolue, d'une part à Tipp-Ex dans la république fédérale d'Allemagne et d'autre part aux distributeurs exclusifs dans les territoires qui leur ont été concédés. Elles visent à ce que ne soient pas approvisionnés en produits Tipp-Ex les distributeurs, comme la plaignante, dont il est connu qu'ils veulent les revendre dans d'autres territoires concédés. Enfin, ces dispositions ont pour objet d'empêcher les importateurs parallèles de couvrir leurs besoins directement auprès d'autres distributeurs exclusifs ou auprès des revendeurs de la république fédérale d'Allemagne.
Entraves aux échanges entre les États membres (63)Les accords et pratiques concertées entre Tipp-Ex et ses distributeurs exclusifs de la Communauté, ainsi que les contrats de distributeur agréé passés en 1983 avaient et ont pour objet d'entraver de manière sensible les échanges entre les États membres en limitant les importations et exportaions parallèles.
(64)L'article 85 paragraphe 1 est par conséquent appli- cable tant aux accords et pratiques concertées entre Tipp-Ex et ses distributeurs exclusifs, tels qu'ils ont été appliqués au moins depuis 1979, qu'aux contrats de distributeur agréé de l'année 1983.
B. Règlement no 67/67/CEE (65)Conformément à l'article 1er paragraphe 1 du règlement no 67/67/CEE, les accords de distribution exclusive sont d'une manière générale exemptés de l'interdiction édictée à l'article 85 paragraphe 1 lorsqu'ils répondent aux conditions prévues dans ce règlement. Ce règlement n'est plus en vigueur depuis le 1er juillet 1983, mais conformément à l'article 7 du règlement (CEE) no 1983/83, les règles qui y sont énoncées restent applicables jusqu'au 31 décembre 1986 au plus tard aux accords passés avant le 1er janvier 1984.
(66)Les accords de distribution exclusive tels qu'ils sont appliqués au moins depuis 1979 ne bénéficient pas de l'exemption prévue par le règlement no 67/67/CEE étant donné qu'ils imposent aux parties à l'accord des obligations, de nature à restreindre la concurrence, allant au-delà des restrictions autorisées par l'article 1er paragraphe 1 et l'article 2 paragraphe 1 dudit règlement.
En outre, ces accords sont de nature à restreindre la possibilité, pour les intermédiaires et les utilisateurs finals, de se procurer les produits Tipp-Ex auprès d'autres revendeurs à l'intérieur du marché commun, ce qui, conformément à l'article 3 point b) dudit règlement, exclut qu'ils soient applicables.
(67)Les contrats de distributeur agréé de 1983 ne répondent pas non plus aux conditions du règlement no 67/67/CEE. Les dispositions de l'article 20 para- graphes 1 et 3 et de l'article 14 paragraphe 1 troisième phrase ont pour but d'assurer aux parties une protection territoriale étendue non prévue dans le règlement no 67/67/CEE. Conformément à l'ar- ticle 1er paragraphe 1 point a) dudit règlement,
l'exemption qu'il prévoit s'applique à l'obligation assumée par le fabricant de n'approvisionner que le distributeur exclusif dans le territoire concédé à ce dernier, mais non à l'obligation imposée au distributeur agréé dans le contrat conclu avec celui-ci de protéger le distributeur exclusif et le fabricant contre la concurrence même indirecte d'entreprises commerciales effectuant des importations parallèles.
(68)En revanche, on ne peut déduire de ce qui précède, contrairement à ce qu'affirme la plaignante, que tous les distributeurs auraient droit à être approvisionnés par le fabricant. La décision du fabricant de ne pas approvisionner directement un revendeur établi dans le territoire concédé à un distributeur exclusif n'est pas critiquable en soi, dans la mesure où le revendeur peut recourir à d'autres sources de livraison dans le marché commun [voir aussi l'article 3 point b) du règlement no 67/67/CEE].
C. Article 85 paragraphe 3 (69)Ce n'est que le 7 mars 1985, c'est-à-dire après l'enquête de la Commission, que Tipp-Ex a introduit une demande d'attestation négative au titre de l'article 2 du règlement no 17 et qu'elle a notifié à toutes fins utiles le contrat-type de distributeur agréé conformément à l'article 4 de ce règlement. Aux termes de l'article 6 dudit règlement, une déclaration d'exemption éventuelle ne peut être délivrée pour la période préalable à la notification.
(70)De plus, le contrat type notifié le 7 mars 1985 ne répond pas non plus aux conditions d'exemption prévues par l'article 85 paragraphe 3. Ainsi, il n'est pas démontré que la limitation des possibilités de concurrence d'entreprises commerciales effectuant des importations ou exportations parallèles (voir ci-dessus les paragraphes 60 à 62) est indispensable pour que l'amélioration souhaitée de la distribution des produits soit réalisée.
C. Article 3 du règlement no 17 (71)Conformément à l'article 3 paragraphe 1 du règlement no 17, la Commission peut, si elle constate une infraction aux dispositions de l'article 85, obliger par voie de décision les entreprises intéressées à mettre fin à l'infraction constatée.
(72)Il paraît nécessaire d'obliger Tipp-Ex et ses distribu- teurs exclusifs en France, en Belgique, au Royaume- Uni et aux Pays-Bas, d'une part à mettre fin aux infractions constatées et d'autre part, à ne pas prendre de mesures ayant le même objet ou le même effet. La décision obligeant les intéressés à mettre fin aux infractions ne s'applique pas aux accords et pratiques concertées entre Tipp-Ex et (...), étant donné que ceux-ci avaient pris fin le 31 décembre 1981 avec le retrait de (...). C'est pourquoi cette décision n'a pas été adressée à (...).
D. Article 15 paragraphe 2 du règlement no 17 (73)Conformément à l'article 15 paragraphe 2 du règlement no 17, la Commission peut, par voie de décision, infliger à des entreprises des amendes de 1 000 Écus au moins et d'un million d'unités de compte au plus, ce dernier montant pouvant être porté à 10 % du chiffre d'affaires réalisé au cours de l'exercice social précédent par chacune des entre- prises ayant participé à l'infraction lorsque, de propos délibéré ou par négligence, elles commettent une infraction aux dispositions de l'article 85 para- graphe 1 du traité. Pour déterminer le montant de l'amende, il y a lieu de prendre en considération, outre la gravité de l'infraction, la durée de celle-ci.
(74)La Commission estime que l'application d'une amende à Tipp-Ex est justifiée dans le cas d'espèce. L'infraction à l'article 85 paragraphe 1 a été commise de propos délibéré. En effet, Tipp-Ex savait que les accords et pratiques concertées avaient pour objet d'empêcher les importations ou exportations parallèles et d'assurer une protection territoriale absolue. Elle n'ignorait donc pas que les conditions maté- rielles de l'interdiction de l'article 85 paragraphe 1 étaient réunies. Ce fait doit être considéré comme établi, d'autant plus que, dans une jurisprudence constante, la Commission et la Cour de justice ont établi le caractère illicite de tels accords.
(75)En fixant l'amende pour Tipp-Ex, la Commission a tenu compte en particulier des éléments suivants :
a)les pratiques qui font l'objet de la décision envisagée constituent une infraction grave aux règles de concurrence du traité CEE, étant donné qu'elles entravent dans une mesure considérable l'intégration des marchés de la Communauté ;
b)l'infraction constatée, consistant en une politique active de cloisonnement des marchés, a duré au moins de 1979 à 1982 ;
c)Tipp-Ex est une entreprise moyenne qui, au prix d'efforts et de dépenses financières considérables, s'est implantée sur les marchés européens ;
d)Tipp-Ex s'est efforcée dès 1982 d'établir sa relation avec ses distributeurs exclusifs sur une base juridique inattaquable, puisqu'elle a chargé un conseiller juridique d'élaborer un contrat de distributeur exclusif qui a été conclu pour la première fois fin 1983.
En revanche, Tipp-Ex n'a pas tenu compte des modifications apportées à diverses reprises par Beiersdorf au projet de contrat concernant les restrictions complémentaires dans l'article 14 paragraphe 1 troisième phrase et l'article 20 paragraphe 1 à l'égard des États membres de la Communauté ;
e)dès l'enquête, Tipp-Ex s'est déclarée disposée à mettre fin aux pratiques manifestement incompatibles avec les règles de concurrence du traité CEE et à modifier le cas échéant les dispositions litigieuses de ses contrats de distributeur agréé.
(76)Il y a lieu également d'infliger une amende à Beiersdorf. Cette société a certainement, au cours du second semestre de 1982, participé de manière active à la politique de cloisonnement des marchés de Tipp-Ex. Les personnes responsables savaient manifestement que les mesures prises n'étaient pas compatibles avec l'article 85 et avaient en tout cas également pour objet d'empêcher les importations et exportations parallèles par ISA France. Cette constatation n'est affectée en rien par le fait que Beiersdorf ait eu elle-même un intérêt majeur à augmenter progressivement le prix de vente appliqué à ISA France (voir ci-dessus les paragraphes 29 et 30), ce qui devait indirectement réduire en fin de compte la marge de manoeuvre dont ISA France disposait pour des exportations parallèles. En effet, il ressort de ses propres documents que Beiersdorf a pris ces mesures à la demande de Tipp-Ex et en accord avec cette dernière, et que ces mesures avaient également pour but immédiat d'empêcher ISA France de procéder à des exportations parallèles.
(77)Ces constatations ne sont en rien modifiées par le fait que, au cours des négociations sur le contrat de distributeur agréé, Beiersdorf ait proposé d'adapter celui-ci aux dispositions du règlement no 67/67/CEE. D'abord, le contrat de distributeur agréé n'a été conclu qu'en décembre 1983 et, ensuite, les parties n'ont pas agi en se prévalant du contrat de distribution à conclure, mais dans le cadre d'une concertation concrète entre le propriétaire de la firme Tipp-Ex et la direction du département des produits Tesa chez Beiersdorf.
(78)Par ailleurs, la Commission ne méconnaît pas que la responsabilité propre de Beiersdorf dans la mise en oeuvre des restrictions de concurrence est considérablement atténuée par le fait que, en pratique, cette entreprise s'est inclinée devant les pressions exercées par Tipp-Ex.
En raison de ce rôle subordonné, la Commission considère que l'amende qu'il convient d'infliger à cette entreprise doit être très sensiblement inférieure à celle infligée à Tipp-Ex.
(79)La Commission n'entend pas infliger d'amendes aux autres distributeurs exclusifs. Il 'sagit de petites entreprises qui ne sont ralliées à la politique suivie par Tipp-Ex que partiellement et avec réticence, et uniquement sous l'effet de pressions considérables. Eu égard à l'insistance avec laquelle Tipp-Ex a lutté contre le commerce parallèle, ces entreprises avaient de bonnes raisons de redouter que, en cas de refus de leur part, Tipp-Ex leur aurait retiré la distribution exclusive, comme elle l'a d'ailleurs fait dans le cas de (...). Du reste, au-delà de leur assentiment général à la politique suivie par Tipp-Ex, la Commission n'a pu constater que ces distributeurs exclusifs se soient concertés concrètement avec Tipp-Ex pour ne pas approvisionner les deux plaignantes,

A ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION :

Article premier
Les accords et pratiques concertées par lesquels Tipp-Ex, d'une part, et ses distributeurs exclusifs Beiersdorf, Burotex, (...), Esveha-Rijam et Tipp-Ex (Leslie McLean), d'autre part, se sont engagés à ne pas vendre à des clients qui revendent les produits visés par les contrats dans d'autres États membres constituent des infractions à l'article 85 paragraphe 1 du traité CEE.

Article 2
Les entreprises concertées doivent mettre fin immédiatement aux infractions décrites à l'article 1er, si elles ne l'ont pas encore fait, et s'abstenir de prendre des mesures qui ont le même objet ou le même effet.

Article 3
Une exemption au titre de l'article 85 paragraphe 3 du traité CEE en faveur du contrat tpye de distributeur agréé notifié le 7 mars 1985 est refusée.

Article 4
Les amendes suivantes sont infligées aux entreprises ci-après :
-Tipp-Ex Vertrieb GmbH & Co KG : une amende de 400 000 Écus,
-Beiersdorf AG : une amende de 10 000 Écus.
Ces amendes sont à verser dans un délai de trois mois à compter de la notification de la présente décision aux comptes suivants de la Commission des Communautés européennes :
a)no 262.00.64910 Sal. Oppenheim & Cie Untersachsenhausen 4 5000 Koeln;Commission des Communautés européennes Bruxelles - Écu (pour les versements en Écus) ;
b)no 260.00.64910 Sal. Oppenheim & Cie Untersachsenhausen 4 5000 Koeln(pour les versements en marks allemands) L'amende porte intérêt de plein droit à compter de l'expiration du délai précité. Le taux d'intérêt correspond au taux d'intérêt, majoré de trois points et demi, appliqué par le Fonds européen de coopération monétaire à ses opérations en Écus le premier jour ouvrable du mois au cours duquel la présente décision est arrêtée ; il est donc de 10 %.
En cas de paiement dans la monnaie du pays des deux entreprises susmentionnées, la conversion sera effectuée au taux du jour précédant le jour du versement.

Article 5
Les entreprises :
1.Tipp-Ex Vertrieb GmbH & Co KG,
Eschborner Landstrasse 135,
D-6000 Frankfurt/M. 94 2.Beiersdorf AG,
Unnastrasse 48,
D-2000 Hamburg 20 3.Burotex SA,
Tollaan/Av. du Péage 65,
B-1940 St. Stevens-Woluwe 4.Esveha-Rijam BV,
NL-2400 AE Alphen a/d Rijn 5.Tipp-Ex (Leslie McLean) Limited,
5, Crawley Hill GB-Camberley-Surrey GU 15 2DD sont destinataires de la présente décision.

La présente décision forme titre exécutoire au sens de l'article 192 du traité CEE.
Bruxelles, le 10 juillet 1987.
Par la CommissionPeter SUTHERLANDMembre de la Commission
(1)JO no 43 du 21. 2. 1962, p. 204/62.
(2)JO no 127 du 20. 8. 1963, p. 2268/63.
(1)Dans la version publiée de la présente décision, certains chiffres ne sont pas mentionnés, en application de l'article 21 du règlement no 17 concernant la protection des secrets d'affaires.
(2)Dans la version publiée de la présente décision, le nom de cette entreprise, non destinataire de celle-ci, ni des griefs, n'est pas mentionné et a été remplacé par l'indication « ... ».
(1)JO no L 173 du 30. 6. 1983, p. 1.
(2)JO no 57 du 25. 3. 1967, p. 849/67.
(3)JO no C 101 du 13. 4. 1984, p. 2.
(1)Recueil de la jurisprudence de la Cour 1983, p. 3151.
(2)Non encore publié.

Fin du document


Structure analytique Document livré le: 11/03/1999


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