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Législation communautaire en vigueur
Document 380A0383
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[ 01.20 - Dispositions générales ]
380A0383
80/383/CEE: Avis de la Commission, du 17 mars 1980, concernant le projet de convention sur la loi applicable aux obligations contractuelles
Journal officiel n° L 094 du 11/04/1980 p. 0039 - 0041
Texte:
AVIS DE LA COMMISSION du 17 mars 1980 concernant le projet de convention sur la loi applicable aux obligations contractuelles (80/383/CEE) I La convention sur la loi applicable aux obligations contractuelles a été élaborée de 1969 à 1979 par des experts des gouvernements des États membres et de la Commission des Communautés européennes, à la suite d'un commun accord du Conseil et de la Commission. Elle doit être signée, au cours de l'année 1980, par les plénipotentiaires des États membres réunis au sein du Conseil. Le projet de convention constitue le premier pas vers l'unification et la codification des règles générales de conflit de lois à l'intérieur de la Communauté en ce qui concerne le domaine du droit civil. Cette unification a pour objet de faciliter la détermination du droit applicable et d'accroître la sécurité juridique. Elle doit également assurer que tous les tribunaux de la Communauté appliquent constamment le même droit matériel au même litige entre les mêmes parties. Lorsque les parties auront le choix entre les tribunaux de divers États membres, ce choix ne pourra avoir aucune influence sur le droit applicable au litige et, par conséquent, empêchera le forum shopping. Le projet de convention est le complément logique de la convention du 27 septembre 1968 concernant la compétence judiciaire et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale (1), amendée par la convention du 9 octobre 1978 relative à l'adhésion du royaume du Danemark, de l'Irlande et du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord à la convention du 27 septembre 1968 (2). II La convention est appelée à avoir un champ d'application très étendu, puisque les tribunaux des États contractants doivent l'appliquer chaque fois qu'il s'agit de désigner le droit matériel régissant le cas d'espèce, que le choix porte soit sur le droit de plusieurs États contractants, soit sur le droit de plusieurs États non contractants, soit sur le droit d'États contractants et d'États non contractants. Les règles uniformes de conflit créées par le projet de convention visent en principe tous les types de contrats. Elles sont complétées par des règles particulières pour certains contrats, règles qui, d'une part, figurent déjà dans le projet lui-même, par exemple en matière de contrats de transport, ou qui, d'autre part, sont prévues ou seront introduites ultérieurement dans des actes de la Communauté ou dans des accords internationaux bilatéraux ou multilatéraux. Le contenu du projet prend largement en considération les principes juridiques qui prévalent dans les États membres. De plus, il tient compte de l'évolution acquise par la jurisprudence, la doctrine et les réformes, y compris dans des pays tiers. La règle fondamentale est que les parties peuvent choisir elles-mêmes la loi applicable à un contrat, sauf lorsque tous les éléments de la situation sont localisés dans un seul et même pays. Dans ce cas, le choix d'une loi étrangère ne peut exclure les dispositions impératives de la loi de ce pays. Lorsque les parties n'ont pas choisi la loi applicable, le contrat est normalement régi par la loi du pays avec lequel il présente les liens les plus étroits. Il y a présomption simple que ce pays est celui où la partie qui doit fournir la prestation caractéristique a, au moment de la conclusion du contrat, sa résidence habituelle ou, s'il s'agit d'une personne morale, son administration centrale. III La Commission se félicite de l'unification juridique envisagée dans le domaine du droit international privé et peut souscrire aux principes du projet de convention. Elle regrette néanmoins qu'il n'ait pas été possible d'étendre cette première convention de droit international privé aux obligations non contractuelles. En effet, il est fréquent que des droits contractuels et des droits non contractuels fassent l'objet d'un seul et même litige. Dans d'autres cas encore, la question de savoir si un droit est contractuel ou non contractuel (fondé sur la responsabilité délictuelle ou quasi-délictuelle) dépendra de la qualification. Ainsi, lorsque le projet de convention sera mis en oeuvre dans sa version actuelle, il se pourrait qu'un litige soit tranché (1) JO nº L 304 du 30.10.1978, p. 77 (dans la version de la convention d'adhésion). (2) JO nº L 304 du 30.10.1978, p. 1. selon la convention dans un État contractant, alors que, dans un autre, il le serait selon les règles de conflit non encore uniformisées de la lex fori. Toutefois, cet inconvénient ne présente pas une gravité telle que la Commission estime devoir s'opposer à la signature de la convention dans sa version actuelle. IV En revanche, il est beaucoup plus préoccupant de constater que, sur plusieurs points, le projet de convention ne revêt pas le caractère d'un droit qui serait commun à tous les États membres. 1. L'entrée en vigueur de la convention dans tous les États membres n'est pas assurée, puisque la convention entrera en vigueur après cinq ratifications (article 28). 2. Sa durée n'est pas illimitée ; elle peut être ramenée à dix ans par dénonciation (article 29). 3. L'interprétation uniforme de la convention n'est pas non plus assurée puisqu'aucun accord n'a pu être réalisé jusqu'à présent sur l'introduction, dans la convention, d'une disposition s'inspirant de l'article 177 du traité CEE ou sur un protocole analogue à celui du 3 juin 1971 relatif à l'interprétation de la convention concernant la compétence judiciaire et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale (1). Un tel texte habiliterait la Cour de justice des Communautés européennes à statuer, à titre préjudiciel, sur l'interprétation de la convention.
Les inconvénients relevés aux points 1 et 2 sont de nature à empêcher la constitution et le maintien d'un espace juridique unique au sein de la Communauté. Ces deux carences sont d'une importance capitale. Il en résulte que la convention ne peut pas contribuer au fonctionnement du marché commun ou ne peut le faire que temporairement. Il en résulte encore que les droits et les obligations des ressortissants des États membres dans les échanges et dans les transactions juridiques sur le plan intracommunautaire et international continuent à différer. Le forum shopping reste possible. La convention perd tout caractère de convention communautaire. En outre, l'étroitesse des liens entre cette convention et la convention concernant la compétence judiciaire et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale exige que le champ d'application géographique de l'une et de l'autre coïncident. Il est également nécessaire que la convention soit en vigueur dans tous les États membres pour en assurer l'uniformité d'interprétation par la Cour de justice des Communautés européennes. Sans doute n'est-il ni inconcevable ni impossible que la Cour de justice interprète des actes qui ne sont en vigueur que dans certains États membres, mais il serait souhaitable que la juridiction suprême de la Communauté puisse, dans l'interprétation d'une règle, tenir compte de la situation juridique existant dans tous les États membres. Il est permis de se demander si c'est encore possible lorsqu'une règle n'est pas applicable dans l'ensemble de ces États. Néanmoins, l'absence de dispositions visant à assurer une interprétation uniforme de la convention et attribuant les compétences requises à cet effet à la Cour de justice des Communautés européennes constitue la lacune la plus inacceptable dans un système juridique dont la finalité est aussi de réaliser une application et une évolution uniformisées des règles uniformes qui auront été mises en place. Cette uniformité d'interprétation, la convention sur la loi applicable aux obligations contractuelles la réclame plus que toute autre en raison du nombre de dispositions-cadres qu'elle énonce et des nombreuses notions juridiques indéfinies auxquelles elle fait appel. L'expérience acquise avec d'autres conventions a montré que sans l'intervention de la Cour de justice, il est inévitable que, à bref délai, le même texte soit appliqué différemment par les tribunaux des divers États contractants. Aussi la Commission n'a-t-elle pas cessé de déclarer par la voix de ses représentants qu'elle considère l'insertion d'une disposition s'inspirant de l'article 177 du traité CEE comme nécessaire en vue de garantir l'uniformité d'interprétation et d'application de la convention à dater de son entrée en vigueur. La Commission pourrait éventuellement se rallier à l'idée d'un protocole analogue à celui du 3 juin 1971 pour que certaines juridictions nationales au moins aient le pouvoir ou l'obligation de demander à la Cour de justice de statuer à titre préjudiciel sur une question d'interprétation. En revanche, la Commission estime qu'il serait insuffisant de prévoir que les juridictions nationales dont les décisions ne sont pas susceptibles d'un recours juridictionnel de droit interne ne soient pas tenues de saisir la Cour de justice et qu'elles puissent apprécier librement l'opportunité de lui demander de statuer sur une question d'interprétation. L'uniformité de la jurisprudence et de l'application du droit ne peut être assurée dans tous les États contractants que si ces juridictions sont tenues de saisir la Cour de justice. Seule cette obligation pourra empêcher que, en interprétant différemment le droit commun aux États contractants, les tribunaux nationaux n'en provoquent l'éclatement. (1) JO nº L 304 du 30.10.1978, p. 97 (dans la version de la convention d'adhésion). Par ailleurs, la Commission considère qu'il serait tout à fait insuffisant de limiter la compétence de la Cour de justice des Communautés européennes à une interprétation «dans l'intérêt de la loi», qui reste sans effet sur les décisions qui ont donné lieu à la saisine de la Cour de justice. V En conclusion, la Commission, se fondant sur le traité instituant la Communauté économique européenne, et notamment sur son article 155 deuxième tiret, formule l'avis ci-après. 1. La Commission est favorable à la signature et à la ratification de la convention sur la loi applicable aux obligations contractuelles par l'ensemble des États membres des Communautés européennes, pour autant que, au moment de la signature de la convention, les gouvernements des États membres se déclarent au moins prêts à négocier sans délai un protocole attribuant compétence à la Cour de justice des Communautés européennes pour assurer l'uniformité d'interprétation et d'application de la convention dans tous les États membres. 2. À défaut, la Commission se réserve de proposer au Conseil d'adopter un acte fondé sur le traité CEE en vue de réaliser l'unification recherchée dans le domaine du droit international privé et d'éliminer ainsi les lacunes exposées au point IV. 3. Les États membres sont destinataires du présent avis.
Fait à Bruxelles, le 17 mars 1980. Par la Commission Étienne DAVIGNON Membre de la Commission
Fin du document
Document livré le: 23/07/2001
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