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Document 378D0163

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378D0163
78/163/CEE: Décision de la Commission, du 20 décembre 1977, relative à une procédure d'application de l'article 85 du traité CEE (IV/28.282 - The Distillers Company Limited - Conditions de vente et conditions de prix) (Le texte en langue anglaise est le seul faisant foi)
Journal officiel n° L 050 du 22/02/1978 p. 0016 - 0033



Texte:

DÉCISION DE LA COMMISSION du 20 décembre 1977 relative à une procédure d'application de l'article 85 du traité CEE (IV. 28.282 - The Distillers Company Limited - Conditions de vente et conditions de prix) (Le texte en langue anglaise est le seul faisant foi.) (78/163/CEE)
LA COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,
vu le traité instituant la Communauté économique européenne, et notamment son article 85,
vu le règlement nº 17 du Conseil du 6 février 1962 (1), et notamment ses articles 3, 4, 5, 15 et 25,
vu la notification effectuée le 30 juin 1973, conformément aux articles 5 paragraphe 1 et 25 du règlement nº 17, par The Distillers, Company Limited de Londres au Royaume-Uni, concernant les conditions de vente appliquées par 38 de ses filiales à leurs acheteurs-revendeurs établis au Royaume-Uni,
vu la demande présentée à la Commission le 18 mai 1976, conformément à l'article 3 du règlement nº 17, au nom de
A. Bulloch & Co de Eaglesham,
A. Bulloch (Agencies) Ltd de Catrine, Ayrshire,
John Grant (Blenders) Ltd de Larkhall,
Inland Fisheries Ltd de Eaglesham,
Classic Wines Ltd de Glasgow,
et le 7 mars 1977 par Madison Benson et Carter Ltd de Londres, les précitées étant toutes domiciliées au Royaume-Uni, et concernant les conditions de prix appliquées par les 38 sociétés filiales susmentionnées,
vu la décision de la Commission du 31 mars 1977 d'engager une procédure dans cette affaire, après avoir entendu les entreprises et personnes intéressées conformément aux dispositions de l'article 19 du règlement nº 17 et au règlement nº 99/63/CEE du 25 juillet 1963 (2),
vu l'avis du comité consultatif en matière d'ententes et de positions dominantes, recueilli, conformément à l'article 10 du règlement nº 17, le 21 octobre 1977,
considérant que les faits sont les suivants:
I. EXPOSÉ DES FAITS
La présente procédure concerne les conditions de vente et les conditions de prix appliquées par 38 filiales de «The Distillers Company Limited (ci-après dénommée «DCL») aux ventes de whisky écossais, de gin, de vodka et de Pimm's à leurs acheteurs-revendeurs établis au Royaume-Uni (ci-après dénommés «revendeurs britanniques»). 1. The Distillers Company Limited et ses filiales 1.1. Le groupe DCL
Créée en 1877, par la fusion de six distillateurs de whisky écossais, The Distillers Company Limited compte aujourd'hui plus de 70 filiales principales, établies au Royaume-Uni et ailleurs, qui exercent des activités non seulement dans le secteur de l'industrie des boissons spiritueuses, mais également dans celui de l'industrie de la levure et de l'industrie chimique, ainsi que dans la fabrication de produits alimentaires. (1)JO nº 13 du 21.2.1962, p. 204/62. (2)JO nº 127 du 20.8.1963, p. 2268/63.
Le 30 juin 1969, cette société a acquis des actions de United Glass Company Ltd et, depuis 1972, possède une participation de 50 % dans cette dernière. La production et la distribution de spiritueux constituent l'essentiel des activités du groupe DCL.
Les 38 filiales de DCL en cause, dont la liste figure à l'annexe I de la présente décision, sont toutes établies au Royaume-Uni et sont des entreprises productrices de spiritueux. Trente-deux d'entre elles produisent du whisky écossais, quatre du gin, une de la vodka et une du Pimm's. Ce sont les principales filiales de DCL et elles assument à elles seules l'ensemble des activités de DCL dans le domaine des spiritueux au Royaume-Uni.
Au cours de l'exercice qui s'est terminé au 31 mars 1977, le chiffre d'affaires total du groupe DCL s'est élevé à 847 172 000 livres sterling. Le chiffre d'affaires total du groupe DCL pour les ventes de whisky écossais, de gin, de vodka et d'autres boissons spiritueuses a atteint 732 053 000 livres. Après suppression de l'incidence des taxes, le chiffre d'affaires de DCL se répartit comme suit : les ventes en Europe représentent 55,7 % du chiffre d'affaires (1) et dans les seuls pays de la CEE autres que le Royaume-Uni et l'Irlande, ... % environ ; 27,2 % proviennent des ventes en Amérique du Nord et en Amérique du Sud, et 17,1 % des ventes en Afrique, Asie et Australie.
Le groupe DCL est le plus important distillateur mondial de whisky écossais. Au cours des quatre dernières années, sa part de marché pour la production et les ventes au Royaume-Uni a été de 40 à 50 %. Parmi les producteurs de whisky écossais, ce groupe est de loin celui qui vend le plus à travers le monde. Pour les pays de la CEE autres que le Royaume-Uni, DCL indique qu'en 1975 sa part du marché s'est élevée à ... % en Belgique et au Luxembourg, à ... % au Danemark, à ... % en France, à ... % en Italie et en Allemagne, à ... en Irlande et ... % aux Pays-Bas. Le groupe DCL met sur le marché des marques connues de whisky écossais telles que Johnnie Walker, Haig, Black and White, Vat 69, White Horse et Dewar's.
Quant au gin, DCL a produit, au cours des années 1973, 1974 et 1975, environ ... % de la production totale au Royaume-Uni. Au cours de cette même période, DCL a réalisé environ 70 % de l'ensemble des ventes de gin au Royaume-Uni. Elle exporte d'importantes quantités de gin et, dans les pays de la CEE autres que le Royaume-Uni, DCL estime que sa part de marché varie entre ... % en Irlande et ... % en Belgique et au Luxembourg. Parmi les marques de gin de DCL, on peut citer High and Dry, Gordon's Special Dry London Gin et Booth's Finest Dry Gin.
Le groupe DCL réalise environ le quart des ventes de vodka au Royaume-Uni. Sur ce marché, la marque «Cossack Vodka» de DCL occupe la seconde place.
1.2. Distribution des spiritueux de DCL
Chacune des 38 filiales de DCL assure la distribution et la commercialisation de ses spiritueux en y apposant sa propre marque. Les réseaux de distribution dans les pays de la CEE sont organisés comme suit: a) Au Royaume-Uni, la plupart des filiales de DCL vendent directement leurs marques de spiritueux à des grossistes. Quelques filiales seulement disposent de leurs propres distributeurs.
Le commerce de gros comprend deux grands secteurs: - le «commerce lié» (tied trade) composé essentiellement de groupes de brasseries qui possèdent des points de vente au détail autorisés à vendre des boissons alcoolisées (licensed) et où les produits sont vendus soit à la bouteille, soit à l'unité de mesure. La plupart de ces brasseries agissent également comme grossistes dans les secteurs du «commerce libre» (free trade). Les achats par ces brasseries représentent environ la moitié des ventes totales de spiritueux réalisées au Royaume-Uni par les filiales de DCL,
- le commerce libre est constitué par un large éventail de revendeurs, comprenant des établissements commerciaux aussi divers que des négociants établis à leur compte et autorisés à vendre des boissons alcoolisées, des chaînes de détaillants n'appartenant pas aux brasseries (notamment certaines chaînes de supermarchés) et des revendeurs «multiples» (c'est-à-dire des entreprises de gros qui possèdent également leurs propres points de vente au détail, mais qui ne sont pas contrôlées par des brasseries). Tous vendent en général à la bouteille. Des chaînes hôtelières autorisées à vendre des boissons alcoolisées peuvent également vendre à l'unité de mesure dans leurs locaux.


Les filiales de DCL vendent leurs spiritueux à environ un millier de grossistes du Royaume-Uni (désignés dans ce texte «revendeurs britanniques»);
b) Dans les autres pays du marché commun, la plupart des filiales de DCL ont chacune leurs propres distributeurs exclusifs qui, dans le territoire qui leur est alloué, importent et distribuent en vue de la revente une ou plusieurs marques de spiritueux des filiales de DCL. Les spiritueux livrés aux distributeurs exclusifs sont en général revendus à des grossistes. On compte environ 200 distributeurs exclusifs de spiritueux DCL dans le marché commun.
c) Les filiales de DCL vendent également, directement à des avitailleurs, des spiritueux destinés uniquement à la consommation hors taxe. Le nombre des avitailleurs dans le marché commun s'élève à environ un millier. (1)Dans la version publiée de cette décision, quelques données chiffrées ont été supprimées ci-après, conformément aux dispositions de l'article 21 du règlement nº 17 concernant les secrets d'affaires.




2. Conditions de vente et conditions de prix de DCL 2.1. Les conditions de vente notifiées
Le 30 juin 1973, DCL a notifié à la Commission, au nom des 38 filiales précitées, les conditions de vente (Seller's Conditions of Sale) appliquées par chacune de ses filiales uniquement aux ventes de spiritueux aux revendeurs britanniques. DCL demandait une exemption au titre de l'article 85 paragraphe 3.
Les conditions de vente comportaient essentiellement: - des dispositions relatives aux conditions de livraison et de paiement,
- une clause (5 b) imposant à ces revendeurs et à leurs acheteurs ultérieurs une interdiction d'exporter : «Si les produits sont vendus en bouteille par le vendeur pour livraison en Grande-Bretagne, ils ne seront pas revendus pour livraison en dehors de la Grande-Bretagne ... Cette condition doit être stipulée lors de toute vente ultérieure»,
- une clause (6) interdisant la revente sous douane : «Les produits vendus sous douane ne seront ni revendus ni transférés de toute autre manière par l'acheteur, si ce n'est dédouanés et après que les droits d'accise (ou de douane) (au taux normal en vigueur pour des produits de même désignation destinés à être consommés au Royaume-Uni) auront été acquittés par l'acheteur sur ces produits lors de leur dédouanement».


Le 8 juillet 1975, en réponse à une demande de la Commission du 2 juin 1975, DCL lui a communiqué un nouveau texte des conditions de vente précédemment notifiées, sans spécifier la date à laquelle il prenait effet.
Les principales modifications en étaient les suivantes: - modification de la clause 5 b) limitant désormais l'interdiction d'exporter aux territoires situés en dehors de la Communauté et rédigée comme suit : «si les produits sont vendus en bouteille par le vendeur pour être livrés dans le Royaume-Uni, ceux-ci ne pourront être revendus pour livraison en dehors du territoire de la Communauté européenne tel que constitué à la date de la vente. Cette condition doit être stipulée lors de toute vente ultérieure»,
- suppression de la clause 6 concernant l'interdiction de revente sous douane.


La Commission apprit ultérieurement que ces modifications étaient entrées en vigueur le 24 juin 1975, date à laquelle DCL avait adressé aux acheteurs de ses filiales établis au Royaume-Uni une lettre circulaire à laquelle était jointe en annexe I le nouveau texte des conditions de vente.
2.2. Lettre circulaire de DCL du 24 juin 1975 relative aux conditions de vente sur le marché national et conditions de prix
Le 11 juillet 1975, DCL communiqua à la Commission le texte de la lettre circulaire du 24 juin 1975 et de ses deux annexes (annexe I et annexe II), en réponse à une demande de renseignements adressée par la Commission le 4 juillet 1975, conformément à l'article 11 du règlement nº 17 du Conseil, et reçue par DCL le 9 juillet 1975. Le 25 février 1977, DCL informa la Commission de modifications apportées à l'annexe II en date du 23 février 1977.
La lettre circulaire du 24 juin 1975 porte le titre «Conditions de vente sur le marché national et conditions de prix». Elle avait été adressée par DCL, au nom de ses filiales, à tous leurs acheteurs établis au Royaume-Uni pour les informer des modifications apportées aux conditions de vente des spiritueux par ces sociétés ainsi que pour clarifier et confirmer les conditions d'octroi des divers remises, rabais et réductions.
Le premier paragraphe, intitulé «conditions de vente», précise : les conditions de vente qui ont été appliquées sur le marché national depuis une date antérieure à l'adhésion du Royaume-Uni au marché commun, comportent une interdiction d'exporter. Ces conditions, y compris cette interdiction, ont été notifiées aux autorités de la CEE ... À la suite du référendum, nous modifions les conditions de vente afin d'autoriser les revendeurs sur le marché national à exporter vers d'autres pays du Marché commun ... les exportations en dehors du marché commun restent toujours interdites». Ce même paragraphe se réfère, également de manière expresse à l'annexe I de la lettre circulaire de DCL.
L'annexe I de la lettre circulaire de DCL constitue la nouvelle version des conditions de vente.
La lettre circulaire du 24 juin 1975 comporte un second paragraphe intitulé «conditions de prix» qui précise: a) «Bien que les conditions de vente modifiées autorisent les exportations de produits destinés à être consommés dans d'autres pays du marché commun, les divers rabais, réductions et remises visent à répondre aux exigences particulières du marché national et les acheteurs n'y ont droit que lorsque les produits sont en fait consommés au Royaume-Uni».
b) «En conséquence, si vous souhaitez acheter en vue d'une exportation vers d'autres pays du marché commun, vous devez en faire mention dans votre commande et l'achat doit être effectué au "prix brut" (gross price)»;
c) «Nous espérons pouvoir compter sur la coopération de tous nos acheteurs pour que ce système simple et pratique puisse fonctionner correctement. Toutefois, si un acheteur obtient ou réclame des rabais, des réductions ou des remises dont l'octroi est réservé en cas de revente sur le marché national et qu'une quantité quelconque des produits achetés est écoulée dans tout autre pays que le Royaume-Uni, toutes les filiales du groupe DCL ont le droit de ne vendre ultérieurement à cet acheteur qu'au prix brut». «Vous trouverez ci-joint (en annexe II) un texte de certaines dispositions contractuelles qui entérinent et développent les principes précités et qui, jusqu'à nouvel ordre, feront partie de tout contrat conclu dorénavant entre toute société du groupe DCL et tout acheteur national en vue de l'achat de spiritueux par ce dernier».


L'annexe II à la lettre circulaire de DCL est intitulée «Certaines dispositions contractuelles (relatives aux prix) complétant les conditions de vente». Elle précise notamment que: - les dispositions de cette annexe feront partie de tout contrat conclu entre un acheteur et une filiale du groupe DCL pour l'achat de n'importe quelle marque de spiritueux et complètent les conditions de vente (objet de l'annexe I),
- tous les rabais, remises et réductions (ci-après désignés sous le terme «rabais», sont destinés à tenir compte des conditions particulières du marché national.


Elle précise également que toute filiale de DCL sera autorisée à appliquer lors d'une vente le prix brut sans aucune déduction au titre des rabais: - au cas où une filiale de DCL peut raisonnablement croire que tout ou partie des produits achetés par l'acheteur en cause auprès d'une des filiales de DCL a été ou sera consommé en dehors du Royaume-Uni,
- même lorsque l'exportation est effectuée par un acheteur ultérieur,
- quelles que soient les quantités commandées, jusqu'à ce que et dans la mesure ou l'acheteur apporte à la filiale de DCL dont il désire livraison, une preuve suffisante que les produits achetés seront consommés au Royaume-Uni,
- étant entendu que, sur présentation de cette preuve, l'acheteur reçoit, à bref délai, les rabais auxquels il a droit, majorés d'un intérêt raisonnable.


Le 23 février 1977, DCL a adressé, au nom de ses filiales, à leurs revendeurs britanniques, une lettre circulaire les informant de modifications apportées à l'annexe II de la lettre circulaire du 24 juin 1975. Le seul changement consiste en ce que le prix appliqué aux spiritueux destinés à l'exportation et défini précédemment comme étant «le prix brut sans déduction au titre des rabais» est désormais désigné «prix brut exportation CEE». Ce «prix brut exportation CEE» est le prix brut appliqué aux distributeurs exclusifs dans les autres pays de la CEE avant déduction des rabais qui leur sont accordés.
Les dispositions de l'annexe II, explicitées dans le second paragraphe de la lettre circulaire de DCL en date du 24 juin 1975 et modifiées le 23 février 1977, sont mentionnées ci-après sous le terme de «conditions de prix».
2.3. Plaintes
Le 18 mai 1976, les entreprises suivantes ont présenté à la Commission, conformément à l'article 3 du règlement nº 17, une demande visant à l'engagement d'une procédure afin qu'il soit mis fin aux infractions aux dispositions des articles 85 et 86 du traité CEE résultant des conditions de prix de DCL du 24 juin 1975:
A. Bulloch & Co d'Eaglesham,
A. Bulloch (Agencies) Ltd de Catrine, Ayrshire,
John Grant (Blenders) Ltd de Larkhall,
Inland Fisheries Ltd de Eaglesham,
Classic Wines Ltd de Glasgow.
Ces entreprises sont liées entre elles et toutes établies dans la région de Glasgow. Elles achètent d'importantes quantités de whisky DCL en vue de la revente et ont traité, au cours des années récentes, avec les filiales de DCL par l'intermédiaire d'une société à laquelle la lettre circulaire du 24 juin 1975 fut adressée.
Certaines quantités de whisky que les plaignants avaient achetées sous douane au prix intérieur et vendues à un autre négociant en whisky au Royaume-Uni furent par la suite retrouvées dans des supermarchés en France et en Belgique par des agents de DCL. DCL exigea alors des requérants un paiement supplémentaire et refusa de leur vendre du whisky sous douane sauf au prix brut. Les requérants font valoir que l'application du prix brut rend impossible toute exportation parallèle.
Le 7 mars 1977, une autre demande en application de l'article 3 du règlement nº 17 fut présentée par Madison Benson and Carter Ltd de Londres, Royaume-Uni, soulevant aussi les difficultés d'approvisionnement en whisky écossais DCL pour l'exportation.


3. Prix et rabais pratiqués par DCL 3.1. Rabais accordés aux revendeurs britanniques
Les divers rabais, remises et réductions (rabais) accordés par les filiales de DCL à leurs revendeurs britanniques de spiritueux et qui, conformément aux conditions de prix, sont accordés uniquement pour les ventes de spiritueux destinés à être consommés au Royaume-Uni, sont les suivants : - la «remise de grossiste» (wholesale allowance) est accordée en fonction des activités de vente en gros assurées par certains négociants ; elle est accordée aux revendeurs britanniques qui achètent une quantité minimale, 1 000 caisses de whisky écossais par an, par exemple. Ce rabais consiste en une somme fixe par caisse,
- le «rabais de quantité globale» (aggregate quantity rebate) est accordé en fonction des quantités de spiritueux achetées auprès des filiales de DCL pendant une certaine période,
- le «rabais spécial différé» (deferred special allowance) est en fait une remise de fidélité, applicable uniquement pour l'achat de whisky écossais. Elle n'est accordée qu'aux clients qui achètent un minimum de 1 000 caisses par an, lorsque les quantités de whisky écossais achetées auprès des filiales de DCL représentent au moins 60 % de la totalité des achats de whisky écossais par l'acheteur en cause,
- la «remise prime de rendement» (performance bonus rebate) qui s'applique uniquement aux achats de whisky écossais effectués entre mars 1977 et mars 1978 est une prime de rendement accordée lorsque les achats des diverses marques DCL au cours d'une année donnée atteignent 95 % au moins du niveau atteint l'année précédente,
- l'escompte pour «paiement comptant» (cash discount) n'est accordé que pour les achats de spiritueux sur lesquels les droits d'accises et taxes ont été acquittés et que les revendeurs britanniques règlent à la commande,
- des réductions promotionnelles sont accordées occasionnellement par certaines filiales de DCL sous forme d'une contribution financière lors de promotion spéciales de leurs marques.


3.2. Prix et rabais appliqués aux revendeurs britanniques : par exemple, pour le whisky écossais
On trouvera ci-après, à titre d'exemple, les prix et rabais appliqués aux revendeurs britanniques par les filiales de DCL pour une caisse de 12 bouteilles de Johnnie Walker Red Label au 24 juin 1975 et au 1er mars 1977. Toutes les filiales de DCL pratiquent les mêmes conditions de prix pour les mêmes catégories de whisky écossais. Johnnie Walker Red Label est un whisky écossais assemblé, de qualité standard et d'au moins trois ans d'âge. Un tableau complet des prix pratiqués depuis le 1er janvier 1973 figure à l'annexe II. Le tableau complet des prix facturés pour le Gordon's Special Dry London Gin et la Cossack Vodka depuis le 24 juin 1975 figure aux annexes III et IV.
Le «prix brut» (gross price) est un prix indicatif auquel les grossistes sont censés revendre à leurs détaillants. Les prix bruts d'une caisse de 12 bouteilles de Johnnie Walker Red Label ont été les suivants: >PIC FILE= "T0012763">
Les rabais qui, conformément aux conditions de prix, sont accordés aux revendeurs britanniques uniquement lorsque le whisky écossais DCL est consommé au Royaume-Uni, atteignent les montants suivants: >PIC FILE= "T0012764">
Les prix nets payés au Royaume-Uni par les revendeurs britanniques pour du whisky écossais consommé dans le Royaume-Uni s'établissent comme suit: >PIC FILE= "T0012765">
Les prix exigés de ces revendeurs lors de l'achat d'une caisse de Johnnie Walker Red Label destiné à être consommé dans un pays de la CEE autre que le Royaume-Uni ont été les suivants:
le 24 juin 1975 : 10,65 £ (prix brut),
le 1er mars 1977 : 13,51 £ (prix brut exportation CEE).
Tous les renseignements sus-indiqués ont été fournis par DCL.
Le prix en cas d'exportation du produit vers les États membres de la CEE était, le 24 juin 1975, de 10,65 livres, soit 99 % plus élevé que le prix du même produit destiné à être consommé dans le Royaume-Uni, c'est-à-dire 5,35 livres sterling. Au 1er mars 1977, les chiffres correspondants étaient de 13,51 livres sterling et de 7,06 £ (ou ... £) (1) respectivement, soit un écart de 92,7 ... % (ou de ... %).
3.3. Contrôle des prix et système des accises au Royaume-Uni
Tous les prix des spiritueux livrés sur le marché national du Royaume-Uni, à l'exception de ceux destinés à l'exportation, sont soumis au contrôle de la commission des prix, instituée par le Counter-Inflation Act (loi anti-inflationniste de 1973). Les prix ne peuvent être majorés qu'à intervalles minimaux de trois mois, si le producteur apporte la preuve qu'une telle majoration de prix correspond à une augmentation des coûts sans relever le niveau des marges bénéficiaires nettes fixé par référence aux deux meilleurs exercices précédant le 31 mars 1973.
Les prix à l'exportation appliqués par DCL à ses revendeurs britanniques et à ses distributeurs exclusifs ne sont pas soumis au contrôle de la commission des prix.
Le droit d'accise britannique doit être acquitté au moment du dédouanement des spiritueux. Les spiritueux destinés à l'exportation peuvent circuler sous douane jusqu'au moment où ils passent la douane ; le système d'accise en vigueur au Royaume-Uni ne prévoit pas le paiement de l'accise sur les spiritueux destinés à l'exportation, ni son remboursement si elle a été acquittée.
3.4. Ventes de DCL dans des pays de la CEE autres que le Royaume-Uni
Dans les pays du marché commun autres que le Royaume-Uni, les filiales de DCL vendent leurs spiritueux directement à des distributeurs exclusifs.
Les prix appliqués aux distributeurs exclusifs dans tous ces États membres, pour une caisse de douze bouteilles de Johnnie Walker Red Label ont été les suivants: >PIC FILE= "T0012766">
En plus des rabais susmentionnés, les filiales de DCL participent dans certains cas aux frais assumés par des distributeurs exclusifs pour la publicité ou la promotion de leurs marques.
Au 24 juin 1975, les prix appliqués aux revendeurs britanniques de DCL pour des produits destinés à être consommés dans des pays du marché commun autres que le Royaume-Uni étaient de ... % plus élevés que les prix payés par les distributeurs exclusifs ; au 1er mars 1977, la majoration était de ... %. Entre le 24 juin 1975 et le 1er février 1977, le prix payé par les (1)Les chiffres ci-avant indiqués entre parenthèses correspondent au prix moyen calculé en prenant en compte les rabais moyens qui sont, selon DCL, ordinairement obtenus par les acheteurs. distributeurs exclusifs dans les pays du marché commun était du même ordre que le prix que pouvaient obtenir les revendeurs pour les produits destinés à être consommés au Royaume-Uni, mais depuis le 1er mars 1977, il a été de ... % supérieur (ou ... % si on le compare au prix moyen facturé aux revendeurs britanniques).


4. Évolution des exportations parallèles
Selon des renseignements fournis par DCL, les exportations parallèles de whisky écossais de DCL du Royaume-Uni vers les autres pays de la Communauté se sont élevées approximativement à 100 000 caisses en 1973, 400 000 caisses en 1974 et 550 000 caisses en 1975, malgré la clause de non-exportation figurant dans les conditions de vente.
Entre le 24 juin 1975, date de la lettre circulaire, et le 12 juillet 1976, un seul acheteur a informé les filiales de DCL qu'il désirait passer commande en vue d'exporter vers d'autres pays de la Communauté et a acheté 1 400 caisses au prix brut. La quantité globale de whisky écossais répertoriée sur des commandes pour laquelle les filiales de DCL ont acquis la preuve que le whisky acheté au Royaume-Uni avait été revendu dans d'autres pays de la CEE et ont éxigé un paiement complémentaire s'élevait à un peu plus de 6 000 caisses.
Entre juillet 1976 et juillet 1977, 250 000 caisses environ furent achetées au prix brut.


II. PROCÉDURE ET POINTS SOULEVÉS 1. Déroulement de la procédure
Par lettres de demandes de renseignements adressées à DCL, conformément à l'article 11 du règlement nº 17, en date du 4 juillet 1975 et du 15 août 1975, la Commission a indiqué que les conditions de prix du 24 juin 1975 semblaient destinées à prévenir ou empêcher les exportations parallèles de produits de DCL à partir du Royaume-Uni et constituer ainsi une infraction aux dispositions de l'article 85 paragraphe 1 du traité CEE.
DCL répondit que les conditions de prix existaient depuis très longtemps et qu'elles étaient certainement antérieures à la pratique des exportations parallèles du Royaume-Uni vers d'autres pays du marché commun et que, dans ces circonstances, il était difficile de prétendre que ces conditions étaient destinées à empêcher ces exportations. Elle insistait également sur la nécessité de protéger les distributeurs exclusifs contre des exportations parallèles effectuées à des prix moins élevés. La Commission a rappelé alors à DCL les dispositions du règlement 67/67/CEE ainsi que la position constante de la Commission en ce qui concerne la prévention des exportations parallèles.
Après examen et plusieurs demandes de renseignements, la Commission a explicité sa première appréciation dans une communication de griefs adressée à DCL le 22 avril 1977 et une audition eut lieu le 23 juin 1977. Dans ses réponses écrites et orales aux griefs de la Commission, DCL admit que les conditions de prix constituaient une infraction aux dispositions de l'article 85 paragraphe 1. Elle demandait également que ces conditions de prix fassent l'objet d'une exemption au titre de l'article 85 paragraphe 3, ne serait ce que pour une période limitée, jusqu'à expiration du «monopole des brasseurs» au Royaume-Uni et/ou des discriminations fiscales nationales dans les autres pays de la CEE.
Dans la communication des griefs du 22 avril 1977, la Commission a indiqué que les conditions de vente, notifiées le 30 juin 1973, violaient les dispositions de l'article 85 paragraphe 1 et ne pouvaient faire l'objet d'une exemption. DCL n'a pas contesté cette constatation.
2. La question de la notification des conditions de prix
Les conditions de prix en tant que telles n'ont pas été notifiées conformément aux dispositions du règlement nº 27 de la Commission du 3 mai 1962 (1).
DCL a prétendu que la notification des conditions de prix n'était pas nécessaire. En premier lieu, ces conditions devaient être considérées comme faisant partie d'un système général de commercialisation qui avait fait l'objet de notifications ; en second lieu, elles ne pouvaient être considérées que comme une «amélioration» de l'interdiction absolue et formelle d'exporter, notifiée avec les conditions de vente le 30 juin 1973. Du fait de cette interdiction d'exporter, les rabais n'étaient accordés que pour les ventes de spiritueux destinés à être consommés au Royaume-Uni. Il s'ensuivit qu'aucun changement ne fut apporté le 24 juin 1975 au système d'octroi de rabais aux revendeurs britanniques. Mais la réservation des rabais aux ventes des produits destinés à la consommation au Royaume-Uni prit toute sa signification après la suppression de la clause de non-exportation et instaura un système moins restrictif que l'interdiction absolue d'exporter antérieurement en vigueur. Dans la mesure où la Commission considérait que les conditions de prix affectaient les exportations vers le reste de la CEE, elle devait reconnaître qu'elles entraient dans le cadre de l'interdiction d'exporter contenue dans les conditions de vente qui avaient fait l'objet d'une notification et qu'elles étaient couvertes par celle-ci.
3. Arguments de DCL pour une exemption des conditions de prix
À l'appui de sa demande d'exemption des conditions de prix, DCL a fait valoir les avantages du système de distribution exclusive, dont les consommateurs recevaient une part équitable du profit qui en résulte. DCL soutenait que les conditions de prix constituaient une restriction indispensable pour éviter la destruction du système de distribution exclusive. Ces conditions de prix viseraient seulement à assurer une concurrence loyale entre les distributeurs exclusifs et les importateurs parallèles, compte tenu de leurs obligations différentes et des conditions de marché qui varient selon les pays du marché commun. Ces circonstances particulières, plus (1)JO nº 35 du 10.5.1962, p. 1118/62.
amplement développées ci-dessous, justifieraient l'octroi d'une exemption individuelle, nonobstant les dispositions du règlement nº 67/67/CEE (1).
Les différences entre les conditions et besoins du marché au Royaume-Uni d'une part, et dans les autres pays de la CEE d'autre part, telles que les a décrites DCL, peuvent être résumées comme suit.
Le marché britannique des spiritueux est unique en son genre, en particulier en ce qui concerne le whisky écossais. Cette boisson traditionnelle représente environ 50 % du marché des spiritueux au Royaume-Uni. Dans ce pays, la concurrence entre les diverses marques doit jouer presque exclusivement sur les prix.
Au Royaume-Uni, les réseaux de commercialisation sont très concentrés : les achats par les cinq principaux clients de DCL, dont trois sont des brasseurs, représentent à eux seuls plus de 40 % des ventes du groupe. Les principaux brasseurs, en tant que propriétaires des «tied houses» (débits de boisson astreints à ne vendre que les produits d'une certaine brasserie) vendant des spiritueux, exercent, du fait de leur potentiel d'achat, une grande pression sur les producteurs de spiritueux et obtiennent ainsi d'importants avantages en matière de prix.
DCL a effectivement accordé d'importants rabais pour reconnaître la puissance commerciale de ses gros revendeurs britanniques et pour contrecarrer la faculté dont disposent ces revendeurs d'exclure les marques des sociétés de DCL des points de vente au détail qu'ils contrôlent.
La lettre circulaire de DCL du 24 juin 1975 et les deux versions de son annexe II précisaient que ces rabais étaient «destinés à répondre aux exigences particulières du marché britannique». Selon DCL, «ces exigences particulières du marché national concernaient les procédés de commercialisation particuliers au Royaume-Uni, comparés à ceux utilisés par les filiales de DCL dans les autres pays du marché commun», où des distributeurs exclusifs avaient été désignés pour répondre aux exigences de ces marchés.
Selon DCL, contrairement à la situation au Royaume-Uni, le whisky écossais ne représente dans les autres pays de la CEE qu'une très petite part de l'ensemble du marché des spiritueux (en Allemagne, par exemple, elle n'est que de ... % environ), et doit faire l'objet d'efforts importants pour gagner sur d'autres boissons comme l'aquavit, les eaux-de-vie ou cognacs, le rhum ou d'autres whisky. Sans être un produit nouveau dans ces pays, le whisky écossais n'est cependant pas une boisson traditionnelle et bien établie. Les gins anglais représentent une part encore moindre du marché des spiritueux (en Allemagne par exemple, ... %, et ... % pour le gin de DCL). La vodka Cossack de DCL n'y est commercialisée que depuis une quinzaine d'années environ et ne progresse que difficilement, malgré d'importants efforts de promotion. En ce qui concerne le Pimm's, la société Pimm's Limited, qui fabrique ce produit seul en son genre, éprouve des difficultés considérables à s'implanter sur ces marchés.
De plus, les conditions de concurrence du whisky écossais vis-à-vis des autres spiritueux dans ces États membres seraient encore aggravées par des taxes discriminatoires et une législation protectionniste destinée à favoriser les spiritueux nationaux et à les protéger de la concurrence du whisky écossais. C'est ainsi qu'en France, par exemple, les droits d'accise sur le whisky écossais sont pratiquement deux fois plus élevés que sur le rhum.
Aussi DCL fit-elle valoir que les distributeurs exclusifs étaient essentiels pour assurer la pénétration et la promotion nécessaire des spiritueux de DCL sur ces marchés. Ils contribuent à l'amélioration de la distribution, en particulier en régularisant l'approvisionnement et en contribuant à garantir la qualité, par la prévention et le contrôle des ventes des spiritueux portant des labels usurpés. Contrairement aux grossistes établis dans le Royaume-Uni, les distributeurs exclusifs doivent investir dans l'intérêt à long terme de la marque. Comme ils revendent eux-mêmes à des grossistes, ces distributeurs exclusifs se trouvent dans une certaine mesure en amont dans la chaîne de distribution par rapport aux grossistes du Royaume-Uni.
Selon DCL, les activités de promotion assurées par les distributeurs exclusifs leur coûtent en moyenne 5 livres par caisse. La structure des prix dans la CEE doit leur permettre d'assumer ces frais sans risquer de sous-cotations de la part d'importateurs parallèles. C'est la raison pour laquelle, après avoir supprimé la clause de non-exportation dans les conditions de vente, DCL avait confirmé que les divers rabais ne seraient pas accordés en cas d'exportation vers d'autres pays de la CEE.


III. APPLICABILITÉ DE L'ARTICLE 85 DU TRAITÉ CEE
L'article 85 paragraphe 1 du traité CEE interdit comme incompatible avec le marché commun tout accord entre entreprises susceptible d'affecter le commerce entre États membres et ayant pour objet ou pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence à l'intérieur du marché commun.
DCL (y compris ses filiales) et tous leurs clients au Royaume-Uni qui achètent pour revendre sont des entreprises au sens de l'article 85 paragraphe 1.
Les conditions de vente et les conditions de prix ci-après s'appliquent aux ventes de spiritueux (whisky écossais, gin, vodka et Pimm's) par les 38 filiales de DCL, énumérées à l'annexe 1 de la présente décision, à leurs revendeurs britanniques: (1)Voir l'article 3 sous b) point 2) du règlement nº 67/67/CEE qui retire le bénéfice de l'exemption par catégories des accords de distribution exclusive quand les exportations parallèles sont empêchées (JO nº 57 du 25.3.1967, p. 849/67). a) les conditions de vente qui, ayant été notifiées le 30 juin 1973, sont en tout état de cause appliquées depuis le 1er janvier 1973 (1) et ont été modifiées par l'annexe I de la lettre circulaire de DCL du 24 juin 1975, et
b) les conditions de prix énoncées dans la lettre circulaire de DCL du 24 juin 1975 et son annexe II, à savoir certaines dispositions contractuelles (relatives aux prix) complétant les conditions de vente, modifiée le 23 février 1977, et appliquées depuis le 24 juin 1975 ou aux environs de cette date.


Ces conditions de vente et conditions de prix constituent une partie essentielle des contrats types de vente conclus entre les filiales de DCL et leurs revendeurs britanniques. Ces contrats types sont des accords entre entreprises au sens de l'article 85 paragraphe 1. 1. Les conditions de vente 1.1. Application de l'article 85 paragraphe 1 du traité CEE a) Les dispositions suivantes qui figurent dans les conditions de vente notifiées, ont eu pour objet et pour effet de restreindre la concurrence dans le marché commun depuis le 1er janvier 1973 jusqu'au 24 juin 1975 ou jusqu'aux environs de cette dernière date, jour auquel ces dispositions ont été supprimées: - l'interdiction de revendre hors de Grande-Bretagne les spiritueux vendus pour livraison en Grande-Bretagne, interdiction devant être stipulée lors de toute vente ultérieure [clause 5 b)], visait à empêcher et a en fait empêcher les revendeurs britanniques des filiales de DCL et leurs acheteurs ultérieurs de revendre les spiritueux de DCL et d'exercer ainsi une concurrence dans les autres pays du marché commun,
- l'interdiction de revente sous douane (clause 6) tendait à empêcher toute concurrence de la part des revendeurs britanniques de DCL dans d'autres pays du marché commun. Cette disposition obligeait en fait tout acheteur de spiritueux provenant des filiales de DCL de payer les droits d'accise au Royaume-Uni avant de revendre ces spiritueux. Le prix de revente de ces spiritueux dans un autre pays du marché commun se serait donc trouvé grevé du montant élevé des droits d'accise britanniques, non remboursables, ce qui empêchait toute revente dans ce pays.
Par exemple, un revendeur britannique qui achetait une caisse de 12 bouteilles de Johnnie Walker Red Label au prix de 5,35 livres (1) devait payer 30,93 livres de droits d'accise au Royaume-Uni avant de pouvoir la revendre. Ce revendeur, ainsi que ses acheteurs ultérieurs, ne pouvaient donc entrer en concurrence avec les distributeurs exclusifs dans d'autres pays du marché commun qui étaient approvisionnés en produits identiques sous douane au prix de ... livres (2). D'autres droits d'accise devaient, évidemment, encore être acquittés sur les spiritueux importés par les distributeurs exclusifs ainsi que sur les spiritueux achetés auprès de revendeurs britanniques, dans le pays de la CEE où ils étaient consommés.
Cette interdiction constituait en fait une interdiction indirecte d'exporter.
Étant donné la position de DCL sur le marché britannique du whisky écossais, du gin, de la vodka et du Pimm's, ces deux clauses restreignaient d'une manière sensible le jeu de la concurrence.
Ces interdictions directes et indirectes d'exporter imposées aux revendeurs britanniques de DCL étaient susceptibles d'affecter le commerce entre États membres, car elles entravaient le commerce entre le Royaume-Uni et les autres États membres de la CEE, entraînaient un cloisonnement artificiel du marché commun et étaient de nature à empêcher l'établissement d'un marché unique entre États membres.
Les interdictions d'exporter vers les pays de la CEE et de revendre sous douane ont donc constitué une infraction aux dispositions de l'article 85 paragraphe 1 depuis le 1er janvier 1973 jusqu'au 24 juin 1975 ou jusqu'aux environs de cette date.


b) Les conditions de vente telles qu'elles ont été notifiées le 30 juin 1973 puis modifiées le 24 juin 1975 contiennent une interdiction d'exporter en dehors des pays du marché commun [clause 5 b)]. Cette interdiction empêche que des spiritueux achetés au Royaume-Uni soient exportés vers un pays tiers, puis réimportés dans un autre pays du marché commun. Une telle interdiction est susceptible de restreindre le jeu de la concurrence à l'intérieur du marché commun et d'affecter le commerce entre États membres, lorsque, par exemple, le niveau des prix, des droits de douane et des coûts de transports concernant les produits en question est de nature à permettre des réimportations dans des pays de la CEE.
En l'espèce cependant, l'application de droits de douane sur des spiritueux franchissant les frontières extérieures de la Communauté économique européenne tend à rendre de telles réimportations improbables. Par conséquent, l'interdiction d'exporter en dehors des pays du marché commun contenue dans les conditions de vente n'est pas à l'heure actuelle susceptible de restreindre la concurrence dans le marché commun ni d'affecter le commerce entre États membres de manière sensible. (1)Date de l'adhésion du Royaume-Uni à la CEE. (2)Prix en vigueur au 24.6.1975 et immédiatement avant cette date.


1.2. Inapplicabilité de l'article 85 paragraphe 3 du traité CEE
Aux termes de l'article 85 paragraphe 3, les dispositions de l'article 85 paragraphe 1 peuvent être déclarées inapplicables à tout accord entre entreprises qui contribue à améliorer la production ou la distribution des produits ou à promouvoir le progrès technique ou économique tout en réservant aux utilisateurs une partie équitable du profit qui en résulte et qui a) n'impose pas aux entreprises intéressées des restrictions qui ne sont pas indispensables pour atteindre ces objectifs;
b) ne donne pas à ces entreprises la possibilité, pour une partie substantielle des produits en cause, d'éliminer la concurrence.


Dans la notification des conditions de vente du 30 juin 1973, DCL a fait valoir que les conditions de vente contribuaient à améliorer la distribution et à promouvoir le progrès économique en permettant que les produits soient distribués avec une efficacité maximale ; selon DCL, les consommateurs bénéficiaient de la totalité du profit résultant de cette amélioration et de ce progrès.
Or les restrictions constatées ci-dessus n'ont apporté aucune amélioration concrète et perceptible de la distribution pouvant compenser leur incidence néfaste sur la concurrence et sur la libre circulation des produits dans le marché commun. Les conditions du marché et la nature des produits en question ne justifaient pas un cloisonnement absolu entre le marché britannique et le reste du marché commun.
À la suite de la communication des griefs de la Commission, DCL a d'ailleurs admis que les conditions de vente en cause ne pouvaient pas être exemptées au titre de l'article 85 paragraphe 3.
En conséquence, la demande présentée par DCL au nom de ses 38 filiales, en vue d'une exemption des conditions de vente telles qu'elles ont été notifiées le 30 juin 1973, est rejetée.


2. Les conditions de prix 2.1. Application de l'article 85 paragraphe 1 du traité CEE
Les conditions de prix appliquées aux ventes de spiritueux entre les filiales de DCL et leurs revendeurs britanniques figurent dans la lettre circulaire du 24 juin 1975 de DCL, sous la rubrique «conditions de prix», et dans son annexe II, modifiée le 23 février 1977. a) Les conditions de prix ont pour objet de restreindre et de fausser la concurrence dans le marché commun.
Aux termes de ces conditions de prix, les revendeurs britanniques de DCL doivent informer la filiale DCL, fournisseur, de leur intention d'exporter vers d'autres pays de la CEE ; les achats doivent alors s'effectuer au prix brut.
Jusqu'au 22 février 1977, le prix brut était le prix avant déduction de tous rabais, remises ou réductions normalement accordés aux revendeurs britanniques. Depuis le 23 février 1977, il s'agit du prix appliqué aux distributeurs exclusifs dans les autres pays de la CEE avant déduction de tous rabais ou réductions. Dans les deux cas, les revendeurs britanniques doivent payer des prix différents pour des marchandises identiques selon qu'ils les revendent dans le Royaume-Uni ou dans un autre pays du marché commun.
Les conditions de prix tendent à restreindre la concurrence dans les pays de la CEE autres que le Royaume-Uni et constituent une interdiction indirecte d'exporter.
Comme les conditions de prix prévoient l'application aux revendeurs britanniques de DCL, pour les spiritueux exportés vers d'autres pays de la CEE, d'un prix différent du prix facturé lorsque les spiritueux sont revendus pour être consommés dans le Royaume-Uni et qu'elles réservent l'octroi de rabais de prix aux spiritueux destinés à être revendus et consommés dans le Royaume-Uni, elles limitent les possibilités qu'ont ces revendeurs de revendre dans des pays de la Communauté autres que le Royaume-Uni. Elles rendent à tout le moins plus difficiles les activités des revendeurs britanniques de DCL et de leurs acheteurs ultérieurs dans les pays de la CEE autres que le Royaume-Uni. Dans ces pays, la concurrence exercée par les revendeurs britanniques de DCL et par leurs acheteurs s'en trouve donc restreinte.
DCL a admis que ses conditions de prix étaient destinées, après la suppression de l'interdiction d'exporter, à protéger les distributeurs exclusifs de DCL de la concurrence de négociants qui achèteraient les produits à des revendeurs britanniques de DCL et les revendraient en vue de leur consommation dans les territoires concédés aux distributeurs exclusifs.
La non-applicabilité des rabais aux spiritueux destinés à l'exportation et l'application aux mêmes clients de prix différents selon que les spiritueux sont destinés à être exportés ou bien à être consommés dans le Royaume-Uni, ont de toute évidence pour but d'empêcher les importations parallèles au départ du Royaume-Uni dans les pays de la CEE autres que le Royaume-Uni. Ces mesures ont le même objet qu'une interdiction formelle d'exporter et peuvent être considérées comme un moyen plus efficace de décourager ces exportations.
En effet, DCL oblige ses revendeurs britanniques d'indiquer qu'eux-mêmes ou leurs clients ont l'intention d'exporter vers d'autres pays de la CEE. De plus, les conditions de prix prévoient des sanctions en cas d'inobservation de cette règle. Un client qui n'a pas respecté les conditions de prix ou dont on présume qu'il ne les a pas respectées, peut être contraint de payer le prix brut, même sur des spiritueux destinés à être consommés au Royaume-Uni. Il peut par la suite obtenir le remboursement, majoré d'un intérêt raisonnable, du montant correspondant aux réductions de prix, dans la mesure où il apporte la preuve que les marchandises ont été consommées au Royaume-Uni. Néanmoins, l'application de cette disposition peut affecter sérieusement la situation commerciale d'un tel client ; elle équivaut à une sanction et constitue une incitation efficace au respect des conditions de prix convenues.
DCL a fait valoir que ces conditions de prix qui limitent l'octroi des rabais aux ventes de spiritueux destinés à être consommés au Royaume-Uni, n'ont pu avoir eu pour objet d'empêcher les importations dans d'autres pays de la CEE puisqu'elles sont pratiquées depuis très longtemps et qu'elles sont notoirement antérieures à la date à laquelle ces importations ont commencé. Cet argument ne change rien au fait que les conditions de prix ont pour objet de restreindre la concurrence dans les pays de la CEE autres que le Royaume-Uni, mais pourvu que, puisque l'existence de ces conditions de prix était une simple conséquence de la clause de non-exportation, les éclaircissements apportés le 24 juin 1975 étaient de toute évidence destinés à maintenir les effets de cette clause de non-exportation.
Ces conditions de prix ont également eu pour objet de fausser le jeu de la concurrence en empêchant que les prix avantageux, dus à la concurrence existant au Royaume-Uni, affectent la structure de la concurrence dans le reste du marché commun.
Comme il est dit dans la circulaire du 24 juin 1975 et dans son annexe II, les rabais «sont destinés à répondre aux exigences particulières du marché national». DCL a expliqué que ces réductions de prix devaient permettre une adaptation aux conditions de concurrence prévalant sur le marché britannique des spiritueux, caractérisé par une position de force des acheteurs et une vive concurrence sur les prix entre les différentes marques de spiritueux.
En réservant les rabais aux ventes de spiritueux destinés à être consommés au Royaume-Uni, on empêche d'étendre aux pays du marché commun autres que le Royaume-Uni dans lesquels DCL vend ces produits, le bénéfice de la situation favorable du Royaume-Uni en matière de prix. Ceci revient à isoler le marché du Royaume-Uni en ce qui concerne les avantages attribuables aux conditions de concurrence dans ce pays, et aboutit à empêcher que ces prix affectent les conditions de concurrence dans d'autres pays du marché commun. Les consommateurs de ces pays ne peuvent donc bénéficier des prix plus favorables pratiqués au Royaume-Uni.
b) Comme les conditions de prix visent expressément à restreindre et à fausser la concurrence dans le marché commun, il n'est pas nécessaire de mettre en évidence leurs répercussions concrètes pour conclure à l'applicabilité de l'article 85 paragraphe 1 du traité CEE. On notera toutefois, à titre subsidiaire, que les conditions de prix ont pour effet de restreindre et de fausser considérablement la concurrence dans le marché commun.
Les prix au 24 juin 1975 et au 1er mars 1977 d'une caisse de 12 bouteilles de Johnnie Walker Red Label servent ci-après d'exemple. Du fait de l'application des conditions de prix, un acheteur britannique désireux d'exporter a dû payer un prix d'achat dépassant de 99 % et de 92,7 % (ou de ... % ; prix moyen) celui qu'il aurait payé si ces conditions ne lui avaient pas été imposées. Une augmentation de cet ordre fausse considérablement la concurrence dans le marché commun.
En outre, en raison de ces conditions de prix, les revendeurs britanniques de DCL désirant exporter ont dû payer un prix dépassant de ... % et de ... % celui payé pour le même produit par les distributeurs exclusifs dans les autres pays du marché commun. Il est vrai que les distributeurs exclusifs assument des coûts plus élevés puisqu'ils sont tenus d'assurer la promotion de ces spiritueux. On a fait valoir que ces coûts sont à peu près du même ordre que la différence entre le prix d'achat facturé à l'importateur parallèle et celui qui est facturé au distributeur exclusif. Cependant, de telles différences au niveau des prix d'achat rendent notoirement difficile pour les revendeurs britanniques de DCL et encore plus pour leurs acheteurs ultérieurs toute concurrence avec les distributeurs exclusifs dans les autres États membres de la CEE, ou, tout au moins, font perdre tout intérêt à des exportations parallèles.
DCL a fait respecter strictement ses conditions de prix et a effectivement poursuivi ceux qui les violaient. C'est ainsi que DCL a réclamé les différences de prix lorsque des spiritueux achetés au prix du marché intérieur ont été retrouvés ensuite dans des pays de la CEE autres que le Royaume-Uni, ou a appliqué le prix brut à certains acheteurs pour des achats suspectés d'être destinés à l'exportation. Pareils acheteurs pouvaient ensuite fournir la preuve d'une mise en consommation effective au Royaume-Uni, ce qui leur donnait le droit de se faire rembourser. Au cours de l'année qui a suivi l'entrée en vigueur des conditions de prix du 24 juin 1975, aucune caisse de spiritueux achetés au prix brut n'a été exportée sauf dans le seul cas où un revendeur britannique avait acheté quelque 1 400 caisses de whisky écossais au prix brut dans l'intention de les exporter dans d'autres pays de la CEE.
DCL a fait valoir que, de juillet 1976 à juillet 1977, des revendeurs britanniques ont acheté environ 250 000 caisses de whisky écossais au prix brut. Toutefois, ce chiffre laisse entière la question de savoir combien de ces caisses ont été exportées puisque le prix brut est aussi appliqué à certains achats, même lorsque l'acheteur n'a pas nécessairement l'intention d'exporter.
De toute façon, ce volume d'exportations parallèles reste même inférieur à celui d'avant le 24 juin 1975 (550 000 caisses), au montant où une clause formelle de non-exportation était imposée aux acheteurs de DCL. On peut raisonnablement estimer que les exportations auraient atteint un niveau sensiblement plus élevé en l'absence de la restriction découlant des conditions de prix.
Les plaignants ont souligné les difficultés auxquelles ils ont à faire face dans leur commerce de spiritueux en raison des pratiques de prix de DCL. Ils se trouvent eux-mêmes pratiquement empêchés d'exporter dans d'autres pays de la CEE après avoir acheté au prix brut. Les filiales de DCL sont amenées à leur appliquer systématiquement le prix brut avec la conséquence qu'une charge supplémentaire est imposée à leurs activités de vente au Royaume-Uni.
De plus, ces conditions de prix permettent à DCL de maintenir les prix facturés aux distributeurs exclusifs à un niveau quelque peu plus élevé ou tout au moins semblable à celui qui est facturé aux revendeurs britanniques, bien que ces distributeurs exclusifs se situent en amont dans la chaîne de distribution et qu'ils assument des frais de promotion commerciale que les grossistes britanniques n'ont pas à supporter.
En conséquence, compte tenu de la position de DCL sur les marchés du whisky écossais, du gin, de la vodka et du Pimms' au Royaume-Uni, les conditions de prix restreignent et faussent de manière sensible la concurrence à l'intérieur du marché commun.
c) Les conditions du prix sont de nature à affecter le commerce entre États membres ; elles entravent ou, tout au moins, rendent plus difficiles les exportations de spiritueux de DCL par les revendeurs britanniques vers les autres pays du marché commun, alors que ceux-ci pourraient y procéder sur une grande échelle en l'absence de telles conditions. Ces dernières tendent donc à cloisonner le marché commun en entravant les échanges entre le Royaume-Uni et les autres pays de la CEE pour une part importante des produits en cause et nuisent à l'établissement d'un marché unique entre les États membres.
En conséquence, les conditions de prix du 24 juin 1975 constituent une infraction à l'article 85 paragraphe 1. DCL n'a pas contesté cette constatation.


2.2. Inapplicabilité de l'article 85 paragraphe 3 du traité CEE 2.2.1. La question de la notification
Les conditions de prix ne peuvent bénéficier d'une exemption au titre de l'article 85 paragraphe 3 puisqu'elles n'ont pas été correctement notifiées en conformité de l'article 4 du règlement nº 17 et des dispositions du règlement nº 27 de la Commission. Les conditions de prix n'étaient pas dispensées de l'obligation de notification sur la base de l'article 4 paragraphe 2 point 1 du règlement nº 17 car, bien que constituant un accord entre entreprises d'un même État membre, le Royaume-Uni, elles concernent des échanges entre États membres.
Les conditions de prix ne sont pas couvertes par la notification des conditions de vente du 30 juin 1973 puisque cette notification ne comportait aucune mention de la structure des prix. De plus, la lettre circulaire du 24 juin 1975 et son annexe II contiennent des dispositions qui vont plus loin que celles de l'accord notifié. DCL les a elle-même considérées comme des mesures distinctes, puisqu'elle a répondu, le 8 juillet 1975, à une demande de renseignements de la Commission sur les conditions de vente, en ne lui adressant que la nouvelle version de ces conditions de vente contenue dans l'annexe I de la circulaire du 24 juin 1975 et en omettant de mentionner cette lettre circulaire et son annexe II.
L'envoi, le 11 juillet 1975, d'une copie des conditions de prix à la demande de la Commission, ne peut être considérée comme une notification. DCL a néanmoins demandé, tant dans ses observations écrites en réponse à la communication des griefs de la Commission que lors de l'audition, que les conditions de prix appliquées par DCL au Royaume-Uni soient autorisées au titre de l'article 85 paragraphe 3.
2.2.2. Les conditions de l'article 85 paragraphe 3
Ces conditions de prix ne pourraient de toute façon pas bénéficier d'une exemption, même si elles avaient été notifiées correctement, puisqu'elles ne satisfont pas aux conditions prévues par l'article 85 paragraphe 3. a) DCL a invoqué les arguments suivants à l'appui de ses affirmations selon lesquelles les conditions de prix remplissent les conditions prévues à l'article 85 paragraphe 3:
Le système de distribution en vertu duquel un distributeur était désigné aux fins de promouvoir les ventes et d'assurer une distribution efficace des spiritueux, présentait de nombreux avantages et avait des effets bénéfiques dans les pays du marché commun autres que le Royaume-Uni ; les conditions de prix faisaient partie d'un système global de distribution au sein duquel le système de distribution exclusive contribuait à améliorer la distribution tout en réservant aux utilisateurs une part équitable du profit ; les conditions de prix constituaient une restriction indispensable pour permettre aux distributeurs exclusifs de concurrencer les importateurs parallèles tout en faisant face aux dépenses résultant de leurs obligations en matière de promotion commerciale ; deux circonstances particulières justifiaient cette mesure : premièrement, le fait qu'une promotion des ventes s'imposait dans les pays de la CEE autres que le Royaume-Uni, car bien que les spiritueux de DCL ne fussent pas des produits nouveaux, ils n'y étaient pas encore bien implantés ; deuxièmement, les prix des spiritueux sur le marché britannique étaient maintenus à un niveau artificiellement bas en raison de la puissance des acheteurs de DCL, principalement les brasseurs.
b) Toutefois, l'accord qui, dans la procédure actuelle, doit être apprécié à la lumière de l'article 85 paragraphe 3, n'est pas un accord de distribution exclusive mais une série d'accords qui sont constitués par les contrats de vente conclus entre des filiales de DCL et des revendeurs britanniques et dont les conditions de prix constituent une partie essentielle. Il ne s'agit pas ici de déterminer si les accords de distribution exclusive ont des effets bénéfiques, mais d'établir si les conditions de prix qui ne font pas partie de ces accords, quoiqu'elles y soient économiquement reliées, peuvent ou non bénéficier d'une exemption au titre de l'article 85 paragraphe 3.
Ces contrats de vente ne sont pas en eux-mêmes de nature à contribuer directement à une amélioration de la distribution dans les États membres de la CEE. Les conditions de prix concernent exclusivement l'application de prix qui diffèrent dans le but de freiner les exportations par les revendeurs britanniques. De plus, elles privent les consommateurs des pays de la CEE autres que le Royaume-Uni de la possibilité d'acheter des spiritueux de DCL à un prix moins élevé ainsi que des avantages découlant de la concurrence sur le marché britannique des spiritueux.
Dès lors, les conditions de prix ne remplissent pas les conditions de l'article 85 paragraphe 3.
c) Même si l'on devait considérer les conditions de prix en liaison avec le système de distribution exclusive établi par DCL, elles ne pourraient faire l'objet d'une exemption.
La Commission reconnaît que, souvent, la désignation de distributeurs exclusifs dans les pays de la CEE, chargés de promouvoir les ventes pour un producteur situé dans un autre État membre, apporte des avantages. Quant aux accords de distribution exclusive conclus par les filiales de DCL avec des distributeurs établis dans les États membres autres que le Royaume-Uni, la Commission a indiqué son intention d'adopter une décision favorable (1).
Si l'on admet que la désignation d'un distributeur exclusif contribue à une amélioration de la distribution, il ne peut cependant être établi que les conditions de prix constituent une restriction indispensable pour atteindre cet objectif.
Dans la mesure où, selon DCL, ses spiritueux ne sont pas aussi bien implantés dans les autres pays du marché commun qu'au Royaume-Uni, les ventes et la promotion occasionnent des frais plus importants dans ces pays. Cependant, les spiritueux de DCL ne sont pas des produits nouveaux nécessitant une introduction sur le marché qui exigerait des efforts de promotion extraordinaires. Les conditions du marché dans ces pays ne sont pas de nature à requérir une protection de ces marchés contre la concurrence de la part de négociants achetant les spiritueux de DCL au Royaume-Uni.
Selon DCL, la concurrence entre les marques et la puissance de négociation de certains acheteurs, tels que les brasseurs, ont conduit à l'établissement de ses prix au Royaume-Uni à un niveau bas, ce qui rend très difficile toute augmentation des prix au Royaume-Uni par les filiales de DCL. (1)Voir publication au Journal officiel nº C 9 du 2.2.1971 d'une communication, conformément à l'article 19 paragraphe 3 du règlement nº 17, dans l'affaire IV/10.469 - White Horse Distillers - BAP CORIMA.
Cependant DCL est en mesure, par d'autres moyens que des entraves aux exportations parallèles, de faire en sorte que les distributeurs exclusifs remplissent efficacement leurs fonctions. DCL pourrait, par exemple, comme elle le fait sur le marché britannique, assurer elle-même la promotion des ventes sur les autres marchés de la CEE ou tenir compte du coût des activités de promotion assurées par les distributeurs exclusifs, dans les prix qu'elle leur facture. Actuellement, DCL applique des prix semblables tant aux grossistes britanniques qu'aux distributeurs exclusifs, tout en leur imposant des obligations différentes ; cette structure des prix peut avoir contribué aux difficultés auxquelles les distributeurs exclusifs se trouvent confrontés. Il n'a pas été prouvé que les conditions du marché décrites par DCL ne permettent pas d'avoir recours à d'autres systèmes de prix qui n'auraient pas pour effet de limiter la concurrence.
Aussi les conditions de prix de DCL ne remplissent-elles pas les conditions fixées à l'article 85 paragraphe 3 et la demande de DCL en vue de l'obtention d'une exemption pour une période limitée jusqu'à la disparition du pouvoir de monopole des brasseurs ne saurait dès lors être accueillie.








IV. APPLICABILITÉ DE L'ARTICLE 3 PARAGRAPHE 1 DU RÈGLEMENT Nº 17 DU CONSEIL
L'article 3 paragraphe 1 du règlement nº 17 du Conseil dispose que si la Commission constate, sur demande ou d'office, une infraction aux dispositions de l'article 85 du traité, elle peut, par voie de décision, obliger les entreprises intéressées à mettre fin à l'infraction constatée.
Compte tenu de l'incidence grave des conditions de prix sur la concurrence dans le marché commun, le groupe DCL doit être contraint de mettre fin sans délai à l'infraction que constituent les conditions de prix et The Distillers Company Ltd doit être tenue de veiller à ce que cette obligation soit respectée. Le groupe DCL devra en particulier s'abstenir de tous nouveaux agissements visant à limiter l'exportation, du Royaume-Uni vers d'autres pays de la CEE, de ses spiritueux achetés par des revendeurs britanniques.
V. APPLICABILITÉ DE L'ARTICLE 15 DU RÈGLEMENT Nº 17 DU CONSEIL
Aux termes de l'article 15 paragraphe 2 du règlement nº 17, «la Commission peut, par voie de décision, infliger aux entreprises des amendes de mille unités de compte au moins et d'un million d'unités de compte au plus, ce dernier montant pouvant être porté à dix pour cent du chiffre d'affaires réalisé au cours de l'exercice social précédent par chacune des entreprises ayant participé à l'infraction, lorsque, de propos délibéré ou par négligence: a) elles commettent une infraction aux dispositions de l'article 85 paragraphe 1 ... du traité ...


Pour déterminer le montant de l'amende, il y a lieu de prendre en considération, outre la gravité de l'infraction, la durée de celle-ci».
Le paragraphe 5 de l'article 15 du règlement nº 17 précise:
«Les amendes prévues au paragraphe 2 ne peuvent pas être infligées pour des agissements: a) postérieurs à la notification à la Commission et antérieurs à la décision par laquelle elle accorde ou refuse l'application de l'article 85 paragraphe 3 du traité, pour autant qu'ils restent dans les limites de l'activité décrite dans la notification, ...»


Les dispositions de l'article 15 paragraphe 2 du règlement nº 17 sont applicables aux conditions de prix de DCL du 24 juin 1975.
En offrant et en appliquant ces conditions de prix, DCL a violé les dispositions de l'article 85 paragraphe 1 et a commis une infraction d'une particulière gravité, aux conséquences importantes pour la libre circulation des produits et les activités commerciales de nombreux négociants en spiritueux de DCL dans le marché commun.
Ces conditions de prix ne peuvent bénéficier des dipositions de l'article 15 paragraphe 5 du règlement no 17. En premier lieu, elles n'ont pas été notifiées conformément à l'article 4 du règlement nº 17 et aux dispositions du règlement nº 27 de la Commission. En second lieu, elles n'entrent pas dans le cadre des activités décrites dans la notification des conditions de vente effectuée le 30 juin 1973. En décrivant ses activités dans ces conditions notifiées, DCL n'a fait aucune référence à ses systèmes de prix dans la CEE. Bien que les conditions de prix, d'une part, et les interdictions d'exporter contenues dans les conditions de vente notifiées, d'autre part, affectent toutes deux les exportations, il s'agit de mesures bien distinctes.
Néanmoins, la Commission prend en considération le fait que, dans les circonstances de la présente affaire, le défaut de notification des conditions de prix peut avoir résulté du fait que DCL a pu croire de bonne foi que, dans la mesure où les conditions de prix avaient été communiquées à la Commission dans le cadre de la correspondance relative aux conditions de vente, la notification antérieure des conditions de vente s'étendrait aux conditions de prix et qu'une notification séparée des conditions de prix n'était pas nécessaire.
La Commission s'abstient d'infliger une amende dans la présente affaire.

A ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION:

Article premier
L'interdiction d'exporter du Royaume-Uni vers les autres États membres de la CEE et l'interdiction de revente sous douane contenues dans les conditions de vente qui ont été notifiées à la Commission le 30 juin 1973 et qui font partie des contrats de vente de spiritueux conclus entre 38 filiales de The Distillers Company Limited et leurs revendeurs établis au Royaume-Uni ont constitué une infraction aux dispositions de l'article 85 paragraphe 1 du traité instituant la Communauté économique européenne, du 1er janvier 1973 jusqu'au 24 juin 1975 ou jusqu'aux environs de cette date.

Article 2
La demande tendant à faire déclarer inapplicable, en vertu de l'article 85 paragraphe 3, les dispositions de l'article 85 paragraphe 1 en ce qui concerne les clauses et la période visées à l'article 1er ci-dessus est rejetée.

Article 3
Les conditions de prix qui font partie des contrats visés à l'article 1er ci-dessus et qui sont formulées dans l'annexe II des lettres circulaires de DCL en date du 24 juin 1975 et du 23 février 1977 constituent une infraction aux dispositions de l'article 85 paragraphe 1 du traité instituant la Communauté économique européenne et une application de l'article 85 paragraphe 3 à leur égard n'est pas justifiée.

Article 4
The Distillers Company Limited, destinataire de la présente décision, est tenue de veiller à ce qu'il soit mis fin sans délai à l'infraction visée à l'article 3 ci-dessus. The Distillers Company Limited et ses filiales s'abstiendront en particulier de tous nouveaux agissements mettant en oeuvre leurs conditions de prix et visant à limiter l'exportation à partir du Royaume-Uni vers d'autres pays de la CEE de leurs spiritueux achetés par des revendeurs établis au Royaume-Uni.

Article 5
The Distillers Company Limited, 21, St James's Square, Londres, Royaume-Uni, est destinataire de la présente décision, qu'elle notifiera à ses filiales énumérées à l'annexe I de la présente décision.


Fait à Bruxelles, le 20 décembre 1977.
Par la Commission
Raymond VOUEL
Membre de la Commission



ANNEXE I Liste des filiales de Distillers Company Limited visées par la présente décision
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Fin du document


Structure analytique Document livré le: 11/03/1999


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