Lu dans le journal du soir : "Le président de la République envisage de rendre l’hébergement des SDF obligatoire par grand froid" [1].
La Boutin, aussitôt, "a confirmé" le truc "en annonçant "une étude de façon à ce qu’on examine l’hébergement obligatoire lorsqu’on sera en dessous de - 6°C"" [2].
(Pour le régime réactionnaire qui prétend régner sur nos vies : le grand froid commence à "- 6°C".)
Naturellement : le chef de l’État français n’a strictement rien à branler que des indigents (sur)vivent dans les sous-bois (de Vincennes).
Le régime réactionnaire qui prétend régner sur nos vies se contrefout totalement des miséreux des encoignures - sans quoi, non moins naturellement, il aurait, de longue date, fait procéder au déblocage des petits fonds (publics) nécessaires à leur (prompt) sauvetage : on sait qu’il sait, fût-ce au Fouquet’s, requinquer le nécessiteux.
Au lieu de quoi, ainsi qu’on a vu : il a plutôt filé 320.000.000.000 (320 milliards) d’euros pour l’apaisement des gras gorets de la finance.
(Pour qui douterait de ma franche détermination à déclarer une guerre totale contre la pauvreté : je veux rappeler ici, mâme Chabot, que je n’aurai de cesse (que) de remporter sur les pauvres une victoire écrasante.)
Quoiqu’en disent les jités où se fabrique l’opinion, ce n’est pas qu’aux frimas, que des va-nu-pieds crèvent : il en périt tous les mois, dans une complète indifférence.
Mais qu’un banquier souffre d’une démangeaison à la Bourse ?
D’une passagère asthénie, pauvre petit poulet fourré ?
Cela est insupportable au régime né de l’épouvantable restauration du mois de mai 2007 - et cela (du moins) justifie que des centaines de milliards d’euros soient délocalisés : de nos poches vers les tirelires des pansu(e)s possédant(e)s à qui ledit a fait la promesse tacite que durant son règne, l’argent continuerait d’aller aux déjà(-)fortuné(e)s.
Nobstant : le chef de l’État français, qui a tellement de fidèles ami(e)s dans la presse, est bien forcé de considérer que l’hiver n’est pas seulement la saison des châtaignes - mais qu’on y trouve aussi les traditionnels marronniers de la presse quotidienne barbichue, pleins de sans-rien dont le sort désolant pourrait toucher le coeur de la ménagère de moins de fifty years [3].
Bien forcé, par conséquent, de composer avec une réalité dont il n’a, disais-je, que foutre.
C’est pour ça qu’il présente sa proposition "de rendre l’hébergement des SDF obligatoire par grand froid" comme une action humanitaire, et va jusqu’à dire, sans rire, "mercredi 26 novembre lors du conseil des ministres", que : "Les pouvoirs publics ont une responsabilité et un devoir, c’est de ne pas laisser mourir les gens".
Et, bon, tu me connais : tu sais parfaitement que je n’ai rien contre un petit foutage de gueule régimaire de temps à autre - mais là ?
Tout de même ?
S’il y bien une chose que nous savons désormais par coeur ?
C’est que "les pouvoirs publics", depuis la restauration de mai 2007, "laissent mourir" des "gens" avec une froideur qui fait penser qu’ils aiment à se maintenir "en dessous de -6°C".
Oh oui, bordel : ça, nous le savons.
Je veux parler, bien sûr, des 265 "sans abris" morts en 2008 - quand le régime ficelait de jolis paquets fiscaux (mais pas que) pour les nanti(e)s.
Je veux parler bien sûr des 90 taulards (déjà) suicidés en 2008 - quand le régime réclame plus d’incarcérations.
Je veux parler bien sûr des sans-papiers que la peur a tué(e)s - que la terreur sans nom d’être chartérisés vers un enfer du bout du monde a si efficacement tué(e)s : remember Chunlan Liu, John Maïna, Baba Traoré…
"Ne pas laisser mourir les gens" : voilà qui, pour le coup, ferait bien de la rupture.
[1] Le chef de l’État français ne dit pas comment il va s’y prendre, ni à qui sera confiée la (noble) mission de contraindre les "sans-abri", mais un vieux dicton berrichon dit comme ça que dès que tu as des menaces de coercition, tu as des keufs à gros bâtons : j’espère très fort que le chef de l’État français n’envisage pas de rafler aussi les SDF.
[2] Je ne suis pas (du tout) sûr que cette locution, "une étude de façon à ce qu’on examine", resterait impunie dans une copie de CM2. Mais bon, je suppose que mâme Boutin parlait sous le coup de la rude émotion née de la mort d’(encore) un gueux.
[3] Libé consacrait ce matin sa une à un (grand) "reportage aux portes de Paris", dans "le monde caché des SDF". Dans le même temps, Libé consacrait ce matin sa dernière page à un certain Mark Zuckerberg, retrouvé "dans la suite d’un grand hôtel parisien", qui "pèse 1,5 milliard de dollars". Trop de pauvres nuiraient au confort de lecture.