Dispositions générales.
- Art. 1er. -
- Sont soumis aux dispositions de la présente loi les usines,
ateliers, dépôts, chantiers, carrières et d'une manière générale les
installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale,
publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit
pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité
publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature et de
l'environnement, soit pour la conservation des sites et des monuments.
- Art. 2. -
- Les installations visées à l'article 1er sont définies dans la
nomenclature des installations classées établie par décret en Conseil d'Etat,
pris sur le rapport du ministre chargé des installations classées, après avis du
conseil supérieur des installations classées. Ce décret soumet les
installations à autorisation ou à déclaration suivant la gravité des dangers ou
des inconvénients que peut présenter leur exploitation.
- Art. 3. -
- Sont soumises à autorisation préfectorale les installations qui
présentent de graves dangers ou inconvénients pour les intérêts visés à
l'article 1er.
L'autorisation ne peut être accordée que si ces dangers ou inconvénients
peuvent être prévenus par des mesures que spécifie l'arrêté préfectoral.
La délivrance de l'autorisation, pour ces installations, peut être
subordonnée notamment à leur éloignement des habitations, immeubles
habituellement occupés par des tiers, établissements recevant du public, cours
d'eau, voies de communication, captages d'eau, ou des zones destinées à
l'habitation par des documents d'urbanisme opposables aux tiers.
Sont soumises à déclaration les installations qui, ne présentant pas de tels
dangers ou inconvénients, doivent néanmoins respecter les prescriptions
générales édictées par le préfet en vue d'assurer dans le département la
protection des intérêts visés à l'article 1er.
- Art. 4. -
- L'exploitant est tenu d'adresser sa demande d'autorisation ou sa
déclaration en même temps que sa demande de permis de construire.
Il doit renouveler sa demande d'autorisation ou sa déclaration soit en cas de
transfert, soit en cas d'extension ou de transformation de ses installations, ou
de changement dans ses procédés de fabrication, entraînant des dangers ou
inconvénients mentionnés à l'article 1er.
Dispositions applicables aux installations soumises à autorisation.
- Art. 5. -
- L'autorisation prévue à l'article 3 est accordée par le préfet,
après enquête publique relative aux incidences éventuelles du projet sur les
intérêts mentionnés à l'article 1er et après avis des conseils municipaux
intéressés ainsi que du conseil départemental d'hygiène. Elle est accordée par
le ministre chargé des installations classées, après avis du conseil supérieur
des installations classées, dans le cas où les risques peuvent concerner
plusieurs départements ou régions.
Un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions d'application de
l'alinéa précédent. Il fixe, en outre, les conditions dans lesquelles il devra
être procédé à une consultation des conseils généraux régionaux et les formes de
cette consultation.
- Art. 6. -
- Les conditions d'installation et d'exploitation jugées
indispensables pour la protection des intérêts mentionnés à l'article 1er de la
présente loi, les moyens d'analyse et de mesure et les moyens d'intervention en
cas de sinistre sont fixés par l'arrêté d'autorisation et, éventuellement, par
des arrêtés complémentaires pris postérieurement à cette autorisation.
- Art. 7. -
- Pour la protection des intérêts mentionnés à l'article 1er
ci-dessus, le ministre chargé des installations classées peut fixer par arrêté,
après consultation des ministres intéressés et du conseil supérieur des
installations classées, des règles techniques visant certaines catégories
d'installations soumises aux dispositions de la présente loi. Ces arrêtés
s'imposent de plein droit aux installations nouvelles. Ils précisent, après
avis des organisations professionnelles intéressées, les délais et les
conditions dans lesquels ils s'appliquent aux installations existantes.
Ils fixent également les conditions dans lesquelles certaines de ces règles
peuvent être adaptées aux circonstances locales par l'arrêté préfectoral
d'autorisation.
- Art. 8. -
- Les autorisations sont accordées sous réserve des droits des tiers.
- Art. 9. -
- Dans les communes comportant une aire de production de vins
d'appellation d'origine, l'avis du ministre de l'agriculture doit être demandé
en vue de l'autorisation prévue au premier alinéa de l'article 4 ci-dessus. Cet
avis est donné après consultation, le cas échéant, de l'institut national des
appellations d'origine.
Le ministre de l'agriculture est en outre consulté, sur sa demande, lorsqu'un
établissement soumis à l'autorisation visée ci-dessus doit être ouvert dans une
commune limitrophe d'une commune comportant une aire de production de vins
d'appellation d'origine.
Le ministre de l'agriculture dispose d'un délai de trois mois pour donner son
avis. Ce délai court à partir de la date à laquelle il a été saisi par le
préfet du dossier auquel est joint son avis.
Dispositions applicables aux installations soumises à déclaration.
- Art. 10. -
- Les prescriptions générales prévues à l'article 3, dernier alinéa,
sont édictées par arrêtés préfectoraux, pris après avis du conseil départemental
d'hygiène. Elles s'appliquent automatiquement à toute installation nouvelle ou
soumise à nouvelle déclaration.
Les modifications ultérieures de ces prescriptions générales peuvent être
rendues applicables aux installations existantes selon les modalités et selon
les délais prévus dans l'arrêté préfectoral qui fixe également les conditions
dans lesquelles les prescriptions générales peuvent être adaptées aux
circonstances locales.
Les établissements soumis à déclaration sous le régime de la loi du 19
décembre 1917 et ayant obtenu, en vertu de l'article 19, alinéa 1er ou 4 de
ladite loi, la suppression ou l'atténuation d'une ou plusieurs prescriptions
résultant d'arrêtés préfectoraux, conservent le bénéfice de ces dérogations. Il
peut toutefois y être mis fin par arrêté préfectoral pris après avis du conseil
départemental d'hygiène, selon les modalités et dans le délai fixés par ledit
arrêté.
- Art. 11. -
- Si les intérêts mentionnés à l'article 1er de la présent loi ne
sont pas garantis par l'exécution des prescriptions générales contre les
inconvénients inhérents à l'exploitation d'une installation soumise à
déclaration, le préfet, éventuellement à la demande des tiers intéressés et
après avis du conseil départemental d'hygiène, peut imposer, par arrêté, toutes
prescriptions spéciales nécessaires.
- Art. 12. -
- Les installations qui, soumises à déclaration en vertu de la
présente loi, bénéficiaient d'une autorisation régulière avant la date d'entrée
en vigueur de la loi du 19 décembre 1917, sont dispensées de toute déclaration;
elles sont soumises aux dispositions des articles 10 et 11.
Dispositions applicables à toutes les installations classées.
- Art. 13. -
- Les personnes chargées de l'inspection des installations classées
ou d'expertises sont assermentées et astreintes au secret professionnel dans les
conditions et sous les sanctions prévues à l'article 378 du code pénal et,
éventuellement, aux articles 70 et suivants du même code.
Elles peuvent visiter à tout moment les installations soumises à leur
surveillance.
- Art. 14. -
- Les décisions prises en applications des articles 3, 6, 11, 12,
16, 23, 24 et 26 de la présente loi peuvent être déférées à la juridiction
administrative:
1° Par les demandeurs ou exploitants, dans un délai de deux mois qui commence
à courir du jour où lesdits actes leur ont été notifiés;
2° Par les tiers, personnes physiques ou morales, les communes intéressées ou
leurs groupements, en raison des inconvénients ou des dangers que le
fonctionnement de l'installation présente pour les intérêts visés à l'article
1er, dans un délai de quatre ans à compter de la publication ou de l'affichage
desdits actes, ce délai étant, le cas échéant, prolongé jusqu'à la fin d'une
période de deux années suivant la mise en activité de l'installation.
Les tiers qui n'ont acquis ou pris à bail des immeubles ou n'ont élevé des
constructions dans le voisinage d'une installation classée que postérieurement à
l'affichage ou à la publication de l'arrêté autorisant l'ouverture de cette
installation ou atténuant les prescriptions primitives ne sont pas recevables à
déférer ledit arrêté à la juridiction administrative.
Le permis de construire et l'acte de vente, à des tiers, de biens fonciers et
immobiliers doivent, le cas échéant, mentionner explicitement les servitudes
afférentes instituées en application de l'article L. 421-7 nouveau du code de
l'urbanisme.
- Art. 15. -
- Un décret en Conseil d'Etat, pris après avis du conseil supérieur
des installations classées, peut ordonner la suppression de toute installation,
figurant ou non à la nomenclature, qui présente, pour les intérêts mentionnés à
l'article 1er, des dangers ou inconvénients tels que les mesures prévues par la
présente loi ne puissent les faire disparaître.
- Art. 16. -
- Les installations existantes soumises aux dispositions de la
présente loi et qui, avant l'entrée en vigueur de celle-ci, n'entraient pas dans
le champ d'application de la loi modifiée du 19 décembre 1917 relative aux
établissements dangereux, insalubres ou incommodes peuvent continuer à
fonctionner sans l'autorisation ou la déclaration prévue à l'article 4
ci-dessus. Toutefois, avant une date fixée par décret et dans un délai que ne
pourra excéder deux ans à compter de l'entrée en vigueur de la présente loi,
l'exploitant doit se faire connaître au préfet, qui peut lui imposer les mesures
propres à sauvegarder les intérêts mentionnés à l'article 1er ci-dessus.
Dispositions financières.
- Art. 17. - I. -
- - Les établissements industriels et commerciaux et les
établissements publics à caractère industriel ou commercial, dont certaines
installations sont classées, sont assujettis à une taxe unique perçue lors de
toute autorisation ou déclaration au titre de la présente loi.
En outre, une redevance annuelle est perçue sur ceux desdits établissements
qui, en raison de la nature ou du volume de leurs activités, font courir des
risques particuliers à l'environnement et requièrent de ce fait des contrôles
approfondis et périodiques.
II. -- Les taux de la taxe unique sont fixés comme suit:
3 000 F pour les établissements dont une installation au moins est soumise à
autorisation;
1 000 F pour les établissements dont une installation au moins est soumise à
déclaration.
Toutefois, ces taux sont réduits à 750 F et 250 F pour les artisans
n'employant pas plus de deux salariés et à 1 950 F et 650 F pour les autres
entreprises inscrites au répertoire des métiers.
Une pénalité dont le taux est fixé au double du montant de la taxe est
appliquée à l'exploitant qui, en vue de la détermination du taux de la taxe et
de sa mise en recouvrement, ne donne pas les renseignements demandés ou fournit
des informations inexactes.
Le montant de la taxe est majoré de 10 p. 100 lorsque le paiement des sommes
correspondantes n'est pas effectué dans les délais prescrits.
III. -- Les établissements visés au deuxième alinéa du paragraphe I ci-dessus
sont ceux dans lesquels sont exercées une ou plusieurs des activités figurant
sur une liste établie par décret en Conseil d'Etat, après avis du conseil
supérieur des installations classées.
Le taux de base de ladite redevance est fixé à 500 F.
Le décret prévu ci-dessus fixe, pour chacune des activités retenues en
fonction de sa nature et de son importance, un coefficient multiplicateur
compris entre 1 et 6. Le montant de la redevance effectivement perçue par
établissement au titre de chacune de ces activités est égal au produit du taux
de base et du coefficient multiplicateur.
Les entreprises inscrites au répertoire des métiers sont exonérées de ladite
redevance.
Les majorations et pénalités prévues aux quatrième et cinquième alinéas du
paragraphe II ci-dessus s'appliquent à la redevance.
IV -- Le recouvrement de la taxe unique et de la redevance est poursuivi
comme en matière de contributions directes.
Sanctions pénales.
- Art. 18. -
- Quiconque exploite une installation sans l'autorisation requise
sera puni d'une amende de 2 000 à 20 000 F.
En cas de récidive, il sera prononcé une peine d'emprisonnement de deux à six
mois et une amende de 20 000 F à 500 000 F ou l'une de ces deux peines.
- Art. 19. -
- En cas de condamnation à une peine de police pour infraction aux
dispositions des arrêtés préfectoraux ou ministériels prévus par la présente loi
ou par les règlements pris pour son application, le jugement fixe, s'il y a lieu
et, le cas échéant, sous astreinte, le délai dans lequel devront être respectées
les dispositions auxquelles il a été contrevenu. En cas de non-exécution dans le
délai prescrit, une amende de 5 000 F à 500 000 F peut être prononcée.
Le tribunal peut prononcer l'interdiction d'utiliser les installations
jusqu'à l'achèvement des travaux. Il peut en outre ordonner que ces derniers
soient exécutés d'office aux frais du condamné.
- Art. 20. -
- Quiconque fait fonctionner une installation en infraction à une
mesure de fermeture ou de suspension de fonctionnement prise en application de
la présente loi, ou à une mesure d'interdiction prononcée en vertu de l'article
précédent, sera puni d'une peine d'emprisonnement de deux mois à six mois et
d'une amende de 5 000 F à 500 000 F ou de l'une de ces deux peines seulement.
- Art. 21. -
- Quiconque met obstacle à l'exercice des fonctions des personnes
chargées de l'inspection ou de l'expertise des installations classées sera puni
d'une peine d'emprisonnement de dix jours à trois mois et d'une peine d'amende
de 2 000 F à 50 000 F ou de l'une de ces deux peines seulement.
- Art. 22. -
- Les infractions sont constatées par les procès-verbaux des
officiers de police judiciaire et des inspecteurs des installations classées.
Ces procès-verbaux sont dressés en double exemplaire dont l'un est adressé au
préfet et l'autre au procureur de la République. Ils font foi jusqu'à preuve
contraire.
Sanctions administratives.
- Art. 23. -
- Indépendamment des poursuites pénales qui peuvent être exercées et
lorsqu'un inspecteur des installations classées ou un expert désigné par le
ministre chargé des installations classées a constaté l'inobservation des
conditions imposées à l'exploitant d'une installation classée, le préfet met en
demeure ce dernier de satisfaire à ces conditions dans un délai déterminé.
Si, à l'expiration du délai fixé pour l'exécution, l'exploitant n'a pas
obtempéré à cette injonction, le préfet peut:
Soit faire procéder d'office, aux frais de l'exploitant, à l'exécution des
mesures prescrites;
Soit obliger l'exploitant à consigner entre les mains d'un comptable public
une somme répondant du montant des travaux à réaliser, laquelle sera restituée à
l'exploitant au fur et à mesure de l'exécution des travaux; il est, le cas
échéant, procédé au recouvrement de cette somme comme en matière de créances
étrangères à l'impôt et aux domaines;
Soit suspendre par arrêté, après avis du conseil départemental d'hygiène, le
fonctionnement de l'installation, jusqu'à exécution des conditions imposées.
- Art. 24. -
- Lorsqu'une installation classée est exploitée sans avoir fait
l'objet de la déclaration ou de l'autorisation requise par la présente loi, le
préfet met l'exploitant en demeure de régulariser sa situation dans un délai
déterminé en déposant suivant le cas une déclaration ou une demande
d'autorisation. Il peut, par arrêté motivé, suspendre l'exploitation de
l'installation jusqu'au dépôt de la déclaration ou jusqu'à la décision relative
à la demande d'autorisation.
Si l'exploitant ne défère pas à mise en demeure de régulariser sa situation
ou si sa demande d'autorisation est rejetée, le préfet peut, en cas de
nécessité, ordonner la fermeture ou la suppression de l'installation. Si
l'exploitant n'a pas obtempéré dans le délai fixé, le préfet peut faire
application des procédures prévues à l'article 23 (3e et 4e alinéas).
Le préfet peut faire procéder, par un agent de la force publique, à
l'apposition des scellés sur une installation qui est maintenue en
fonctionnement soit en infraction à une mesure de suppression, de fermeture ou
de suspension prise en application de l'article 15, de l'article 23 ou des deux
premiers alinéas du présent article, soit en dépit d'un arrêté de refus
d'autorisation.
- Art. 25. -
- Pendant la durée de la suspension de fonctionnement prononcée en
application de l'article 23 ou de l'article 24 ci-dessus l'exploitant est tenu
d'assurer à son personnel le paiement des salaires, indemnités et rémunérations
de toute nature auxquels il avait droit jusqu'alors.
Dispositions diverses.
- Art. 26. -
- Lorsque l'exploitation d'une installation non comprise dans la
nomenclature des installations classées présente des dangers ou des
inconvénients graves pour les intérêts mentionnés à l'article 1er de la présente
loi, le préfet, après avis -- sauf cas d'urgence -- du maire et du conseil
départemental d'hygiène, met l'exploitant en demeure de prendre les mesures
nécessaires pour faire disparaître les dangers ou les inconvénients dûment
constatés. Faute par l'exploitant de se conformer à cette injonction dans le
délai imparti, il peut être fait application des mesures prévues à l'article 23
ci-dessus.
- Art. 27. -
- En ce qui concerne les installations appartenant aux services et
organismes dépendant de l'Etat qui seront inscrites sur une liste établie par
décret, les pouvoirs attribués au préfet par la présente loi seront exercés soit
par le ministre chargé des établissements classés, soit par le ministre chargé
de la défense pour les installations qui relèvent de son département.
Les pénalités prévues au titre VI sont applicables aux justiciables des
juridictions militaires des forces armées conformément au code de justice
militaire et notamment en ses article 2, 56 et 100.
- Art. 28. -
- Les modalités d'application de la présente loi seront fixées par
décrets en Conseil d'Etat.
Ces décrets détermineront en outre:
1° Pour les installations visées à l'article 27 ci-dessus, les procédures
d'enquête et d'autorisation, ainsi que les conditions de surveillance et de
contrôle;
2° Pour les autres services de l'Etat, ainsi que pour les collectivités
locales et les établissements publics à caractère administratif:
a) Les conditions d'application des mesures prévues aux articles 19, 23, 24,
25 et 26;
b) Les personnes qui seront regardées comme pénalement responsables des
infractions commises.
- Art. 29. -
- Les dispositions de la présente loi entrent en vigueur le 1er
janvier 1977. A cette date, sont abrogés la loi modifiée du 19 décembre 1917
relative aux établissements dangereux, insalubres ou incommodes, le décret-loi
validé du 1er avril 1939 instaurant une procédure d'urgence pour l'instruction
des demandes de construction de dépôts d'hydrocarbures, et les dispositions
applicables aux installations soumises à la présente loi et qui lui sont
contraires.
La référence à la présente loi est substituée à la référence à la loi du 19
décembre 1917 dans tous les textes contenant une telle disposition.
La présente loi sera exécutée comme loi de l'Etat.
Fait à Paris, le 19 juillet 1976.