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Monsieur le Président,
Le lancement de la consultation régionale du schéma de services collectifs de l'information et de la communication me donne l'occasion de vous apporter des éléments de réponse à vos interrogations légitimes sur les objectifs et les modalités de réalisation des priorités fixées par le Gouvernement, pour bâtir une "Société de l'Information pour tous".
Plusieurs préoccupations sont ressorties de mes différents échanges avec les parlementaires. Parmi celles-ci, j'ai noté en particulier un besoin de mutualisation d'expériences et d'appui technique au niveau local, une attente croissante sur le développement des hauts débits et une demande de conseils pratiques susceptibles de guider les décideurs locaux dans les choix qui s'offrent à eux.
Face à ces attentes, j'ai souhaité vous faire part des éclairages suivants :
La loi du 25 juin 1999 d'orientation d'aménagement et de développement durable du territoire fixe le cadre de la consultation régionale autour du schéma de services collectifs de l'information et de la communication qui se déroulera jusqu'au 15 avril prochain.
Cette consultation peut aisément s'enrichir et se poursuivre par une concertation élargie entre l'ensemble des acteurs du développement local. Ces dialogues devraient permettre de dresser un diagnostic de l'existant en matière d'initiatives concrètes et d'infrastructures de télécommunication, de mieux définir les attentes et les besoins des acteurs, et de mutualiser les expériences au sein d'une région mais également d'une région à l'autre.
Pour offrir un cadre susceptible de valoriser ces échanges et de leur apporter les moyens de se concrétiser rapidement, le schéma de services collectifs propose aux acteurs locaux de réfléchir à l'opportunité de mettre en place des "centres de ressources", dont le cadre géographique pertinent apparaît être le niveau régional, et dont les contours juridiques sont à définir en prenant en compte les réalités locales.
D'ores et déjà, des réunions périodiques sont organisées, sur l'initiative de la DATAR et de la DIGITIP, à destination des responsables NTIC au sein des SGAR, des DRIRE et des associations de collectivités locales, pour évoquer l'ensemble des questions qui relèvent des réseaux, des usages et des services. Plusieurs réunions se tiennent également sur l'initiative des collectivités locales et de leurs associations où chacun peut témoigner de son expérience et faire part de ses interrogations. Ces types de rencontres doivent à mon sens être encouragés pour éclairer les choix qui sont les vôtres. Je souhaite que les services centraux et déconcentrés des ministères directement concernés puissent apporter leurs concours à ces initiatives.
Les bonnes pratiques des collectivités locales sur les technologies de l'information sont actuellement répertoriées par l'observatoire des télécommunications dans la ville et ses partenaires, notamment dans le cadre du programme R3, et elles seront mises en ligne prochainement.
Cette initiative participe à la volonté de constituer des réseaux de compétences et de ressources, au niveau national comme au plan local, qui associeraient l'ensemble des acteurs en région. Cette démarche va être confortée par la nomination au sein des SGAR, décidée lors du Comité Interministériel pour la Société de l'Information du 10 juillet 2000, de correspondants NTIC, spécifiquement dédiés à ces questions, pour assurer auprès de vous une expertise et une assistance à la conduite de projets.
L'accessibilité aux technologies, et en particulier aux réseaux de télécommunications à haut débit, sur l'ensemble des territoires constitue un objectif d'autant plus déterminant pour la société de l'information qu'elle constitue désormais un facteur de compétitivité territoriale de développement local et de choix d'implantation de nouvelles entreprises.
Le schéma de services collectifs de l'information et de la communication a fixé comme objectif, à l'échéance de cinq ans, l'accès aux réseaux à hauts débits (2 Mbits/s) pour tout usager à un coût abordable et équivalent.
Cet objectif est ambitieux, il est non moins nécessaire. Il vise à répondre aux défis du développement des nouveaux services auxquels chacun est en droit de pouvoir accéder pour la culture, la santé, l'éducation, les services administratifs et le commerce.
Pour y parvenir, il importera de tenir compte de la complémentarité des technologies existantes (boucle locale radio, UMTS, fibre optique, ADSL, satellites, etc.) et de maximiser le bénéfice que l'on peut tirer des innovations technologiques, du dégroupage et de la dynamique de marché, notamment par sa pression à la baisse sur les coûts.
Il faudra pour cela veiller à la couverture des populations et des territoires dans les cahiers des charges des opérateurs et des procédures d'appels d'offre et de s'assurer que ceux-ci sont respectés. S'agissant de l'attribution des licences pour la boucle locale radio, ou pour l'UMTS, je vous invite à faire preuve d'une vigilance constructive.
Il vous incombera de définir une stratégie de développement des réseaux hauts débits au niveau régional en distinguant les zones spontanément attractives pour les opérateurs, les zones intermédiaires et les zones fragiles, et d'identifier les mesures d'accompagnement et de soutien nécessaires aux deux dernières catégories. Cette stratégie bénéficiera des synergies résultant des capacités de chaque niveau de collectivité locale en matière de compétence territoriale et donc de réseau.
Cette préoccupation doit à mon sens être la vôtre dans les négociations que vous engagerez avec tout opérateur, dans les efforts que vous pourrez déployer pour dynamiser la demande et dans la planification de vos investissements en achats de services et en infrastructures de télécommunications.
Le Gouvernement a également été sensible à cette question dans le cadre de la préparation du projet de Loi pour la Société de l'Information (LSI). Conscient du rôle essentiel des collectivités locales pour l'aménagement du territoire régional, le Gouvernement souhaite faciliter leur action en matière d'infrastructures de télécommunications pour favoriser l'accès de tous au haut débit. C'était d'ailleurs l'esprit de la rédaction initiale de l'article 17 du projet de LOADDT.
Les collectivités locales auront désormais une faculté plus grande pour inciter les opérateurs de télécommunications à investir rapidement dans les zones les moins actives de leur région, de leur département, de leur agglomération ou de leur ville en créant et mettant à leur disposition des infrastructures de télécommunications.
La procédure sera allégée puisque l'ensemble des collectivités sera désormais dispensé de faire le constat de carence sur les services de télécommunications à haut débit offerts dans les zones concernées et elles pourront amortir leurs infrastructures selon des règles conformes à la réalité économique des projets.
L'Etat reste garant du développement harmonieux des territoires. Les modalités de régulation des technologies de l'information et de la communication retiennent l'exigence d'aménagement du territoire, inscrite dans la loi de réglementation des télécommunications du 26 juillet 1996. Le programme d'action gouvernementale pour la société de l'information réaffirme son rôle de garant de l'accessibilité des technologies et des téléservices sur l'ensemble des territoires. Dans ce sens, il lui appartient, si nécessaire, de témoigner face aux disparités territoriales constatées de la solidarité nationale.
C'est ce qu'il s'est engagé à faire lors du CISI du 10 juillet, s'agissant du bouclage de la couverture du territoire et de la population par les réseaux GSM. J'ai plaidé, à l'heure des mobiles de nouvelles générations qui vont faire émerger de nouveaux usages, pour que cette carence soit comblée de manière rapide. A cette fin, le Secrétariat d'Etat à l'Industrie remettra prochainement au Parlement une étude assortie de propositions concrètes. C'est également l'esprit de l'engagement pris dans le schéma de l'information et de la communication pour une couverture de tous les bassins de vie par les réseaux UMTS.
Au-delà de ces observations, il m'apparaît utile de vous faire part de plusieurs recommandations susceptibles de vous aider dans l'élaboration de vos politiques.
Les usages en matière de débits restant très différenciés, nombre de téléservices ne nécessitent pas aujourd'hui du haut débit en continu. Il en découle selon moi la nécessité de bien identifier les besoins réels que l'on entend satisfaire et leur évolution dans le temps.
Dans ce sens, il me semble particulièrement important de développer les usages de l'Internet notamment au travers des points d'accès publics pour les particuliers et par des actions collectives menées le cas échéant en partenariat avec les DRIRE, pour les entreprises.
Il paraît également souhaitable de maximiser l'utilisation des infrastructures existantes permettant d'activer des réseaux de fibres optiques ou d'utiliser des fourreaux vacants à moindre coût. Dans un souci d'anticipation, les opérations de génie civil, d'urbanisme doivent être l'occasion de déployer des réseaux de fibres optiques ou du moins des fourreaux en quantité suffisante.
Votre stratégie d'investissement doit être décidée en fonction des économies de coûts attendues ou des bénéfices induits pour le tissu économique local. Elle doit également intégrer le facteur temps qui pèse lourdement sur le délai de réalisation des projets publics dans ce domaine où l'offre technologique évolue très vite.
Il me paraît important de prendre en compte les besoins des utilisateurs publics et privés en matière de haut débit et de veiller, dans la mesure du possible, à ce que les initiatives destinées à satisfaire les besoins des premiers produisent un effet d'entraînement sur l'offre à destiner aux seconds.
Enfin, en tant que Ministre de l'Environnement, je ne saurais qu'attirer votre attention sur l'intérêt d'un point de vue paysager d'optimiser la localisation comme le partage des pylônes nécessaires à la couverture mobile, à celle de la boucle locale radio ainsi que pour les radios et télévisions numériques de terre.
Le débat sur le schéma de services collectifs de l'information et de la communication est l'occasion d'engager, de manière ouverte et collective, cette réflexion complexe attachée aux enjeux du développement de la société de l'information dans vos territoires. Je n'ai pas d'inquiétude sur votre mobilisation active sur le sujet.
Je vous prie de croire, Monsieur le Président, à l'assurance de ma considération distinguée.
Dominique VOYNET