Paris, le 16 février 1999.
Le garde des sceaux, ministre de la justice, à M. le procureur général près la Cour de cassation, MM. les procureurs généraux près les cours d'appel, Mmes et MM. les procureurs de la République près les tribunaux de grande instance, Mmes et MM. les magistrats du parquet (pour attribution) ; M. le premier président de la Cour de cassation, Mmes et MM. les premiers présidents, Mmes et MM. les présidents des tribunaux de grande instance, Mmes et MM. les magistrats du siège, M. le directeur de l'Ecole nationale de la magistrature, M. le directeur de l'Ecole nationale des greffes (pour information).
Texte abrogé : circulaire du 6 juillet 1979 relative à l'adoption en France d'enfants étrangers.
La question de l'adoption internationale est particulièrement sensible. Elle concerne d'abord des enfants dont l'intérêt doit primer toute autre considération, mais aussi leur famille biologique dont les droits ne sauraient être ignorés, et enfin les adoptants dont l'engagement affectif et moral est important.
Elle revêt en outre un aspect diplomatique non négligeable. En effet :
Elle met en jeu l'application par la France de conventions internationales ;
Les procédures visant au recueil des enfants et à leur sortie du territoire sont mises en oeuvre dans le pays d'origine des adoptés et requièrent donc une coopération des autorités locales ;
Les Etat d'origine des enfants sont soucieux de voir respecter leur souveraineté.
Les circulaires no 76-8 du 28 juillet 1976 et no 79-13 du 6 juillet 1979 s'étaient attachées, à une époque où l'adoption internationale commençait à prendre une certaine ampleur, à élaborer un cadre juridique applicable à la matière, alors que le droit conventionnel restait parcellaire, que le droit positif ne comportait aucune règle spécifique et que la jurisprudence n'avait apporté que des solutions embryonnaires.
L'évolution de la situation, comme du contexte juridique général dans lequel se développe l'adoption internationale, rendent nécessaires une mise à jour des orientations définies par ces circulaires.
LES REGLES INTERNATIONALES
La communauté internationale s'est mobilisée pour mettre en place des instruments internationaux susceptibles de faire échec aux pratiques très contestables constatées dans un certain nombre de pays où la détresse des familles biologiques est parfois exploitée.
Deux conventions ont été adoptées, l'une plus générale, la convention de l'ONU du 20 novembre 1989 relative aux droits de l'enfant, et l'autre spécialement consacrée à cette question, la convention de La Haye du 29 mai 1993 sur la protection des enfants et la coopération en matière d'adoption internationale :
La convention du 20 novembre 1989 met l'accent sur la responsabilité qui incombe aux Etats de pourvoir à la protection des enfants privés de leur milieu familial en instituant des mesures de remplacement, au nombre desquelles l'adoption internationale ne constitue qu'une solution de dernier recours. Elle insiste par ailleurs sur la nécessité de prévenir l'enlèvement, la vente ou la traite d'enfants ainsi que de prendre en compte l'origine ethnique, religieuse, culturelle et linguistique du mineur privé de son milieu familial dans le choix de la mesure de protection dont il fera l'objet.
La convention du 29 mai 1993, dont le préambule se réfère à la convention précitée et affiche un souci de moralisation de l'adoption, met en place un système de coopération entre autorités centrales des Etats d'origine et des Etats d'accueil des enfants, qui doivent s'assurer lors des différentes étapes de la procédure que les droits de l'enfant et de sa famille biologique sont respectés.
Ces conventions reflètent l'évolution des idées en matière de protection des enfants et, en les ratifiant, la France s'est engagée à assurer le respect des principes qu'elles posent.
LE DROIT INTERNE FRANÇAIS
Cadre général
Celui-ci a connu dernièrement un mouvement de réforme visant à rendre plus aisées mais aussi plus sûres l'adoption interne comme l'adoption internationale et à mettre en place les organes chargés de la mise en oeuvre de la convention de La Haye du 29 mai 1993.
Ont ainsi été adoptés la loi no 96-604 du 5 juillet 1996 relative à l'adoption, qui modifie le code civil, le code de la famille et de l'aide sociale, le code de la sécurité sociale et le code du travail, le décret no 98-771 du 1er septembre 1998 relatif à l'agrément des personnes qui souhaitent adopter une pupille de l'Etat ou un enfant étranger, le décret no 98-863 du 23 septembre 1998 relatif à l'autorité centrale pour l'adoption internationale et l'arrêté du 2 décembre 1998 portant création d'une mission de l'adoption internationale au ministère des affaires étrangères.
Par ailleurs, des mesures susceptibles de faciliter les démarches qui s'imposent aux parents adoptifs d'enfants avec lesquels a été créé un lien d'adoption simple ont été prises par le décret no 97-853 du 16 septembre 1997 modifiant le décret no 74-449 du 15 mai 1974 relatif au livret de famille.
En revanche, les règles françaises de solution des conflits de lois applicables en matière d'adoption internationale ne résultent ni de la loi ni, sauf exception, de dispositions conventionnelles, mais d'une construction jurisprudentielle. Celle-ci s'est élaborée progressivement depuis quelques années, parfois de manière erratique compte tenu de la variété des règles de droit étrangères et des divergences importantes de conceptions qu'elles traduisent. La jurisprudence actuelle souffre d'une absence d'unité. Cette situation conduit à une inégalité de traitement des dossiers individuels qui est la source d'une insécurité juridique particulièrement regrettable dans un domaine où toute décision est lourde de conséquences.
Le rôle du parquet
Il paraît par conséquent nécessaire que le ministère public s'attache à susciter une unification de la jurisprudence, en faisant prévaloir sur l'ensemble du territoire une même conception des principes qui doivent régir la matière.
S'agissant d'une matière qui touche à l'ordre public, il appartient au parquet de jouer pleinement le rôle qui lui est dévolu à cet égard et de rappeler, notamment, que seul le respect des principes de droit permet de lutter contre les pratiques illicites qui se développent dans le domaine de l'adoption internationale.
Il convient de rappeler en outre que l'article 1168 du nouveau code de procédure civile charge le procureur de la République de transmettre au tribunal les demandes d'adoption plénière qui lui sont adressées par les requérants.
Enfin, l'article 425 du même code dispose qu'il doit avoir communication des affaires relatives à la filiation.
Le rôle du parquet a par ailleurs été élargi, puisque la loi du 5 juillet 1996 a modifié l'article 370 du code civil afin de lui ouvrir l'action en révocation de l'adoption simple, possibilité qui ne doit être exercée que dans le seul intérêt de l'enfant sans que l'adoptant puisse par ce biais se dégager de ses responsabilités.
Les critères de son action
En matière d'adoption internationale comme d'adoption interne, c'est l'intérêt de l'enfant qui doit constituer le souci principal des autorités chargées de prendre les décisions.
La détermination de l'intérêt de l'enfant originaire d'un pays étranger doit toutefois s'effectuer au regard de la situation particulière de celui-ci.
L'adoption ne saurait en effet être présumée favorable dans tous les cas à l'enfant étranger au seul motif qu'il a été recueilli en France, cette institution ne constituant pas le seul cadre juridique susceptible de lui offrir la stabilité dont il a besoin. Il importe aussi d'attacher une attention particulière au respect des ses origines.
Il appartient au parquet, garant du respect de l'ordre public, et à ce titre des engagements internationaux de la France, de s'attacher à faire valoir ces considérations chaque fois qu'il est saisi d'une affaire d'adoption internationale, et ce à tous les stades de la procédure, que l'adoption soit demandée en France ou qu'il s'agisse de faire produire en France ses effets à une décision prononcée à l'étranger.
1. CONDITIONS DU PRONONCE DE L'ADOPTION
L'accueil en France, en vue de son adoption, d'un enfant originaire d'un pays étranger est subordonné à l'accomplissement d'un certain nombre de démarches dont la régularité devra être vérifiée par le parquet.
1.1. Phase administrative
Lorsqu'elles ont obtenu l'agrément pour adopter, les personnes concernées peuvent engager la procédure à l'étranger, suivant les cas, en s'adressant à la mission de l'adoption internationale, uniquement lorsque l'enfant est originaire d'un pays partie à la convention de La Haye de 1993, ou en confiant la réalisation de leur projet à un organisme autorisé pour l'adoption et habilité pour l'adoption internationale, ou en entreprenant une procédure individuelle. L'intervention des intermédiaires est réglementée et susceptible de sanctions pénales.
La procédure visant au recueil de l'enfant une fois achevée à l'étranger, la délivrance d'un visa de long séjour sur le territoire français doit enfin être accordé à celui-ci.
1.1.1. L'agrément pour adopter
En règle générale, la loi du 5 juillet 1996 a mis l'accent sur l'importance du contrôle de l'aptitude des requérants à offrir à l'enfant les meilleurs chances d'adaptation dans leur foyer préalablement à l'accueil en vue de son adoption. Une disposition rappelant le caractère impératif de ce contrôle a en effet été introduite dans le code civil, dont le nouvel article 353-1 pose le principe d'une obtention, préalable au prononcé de l'adoption, de l'agrément prévu par l'article 63 du code de la famille et de l'aide sociale.
Afin de ne pas lier la décision des juges, le législateur a toutefois prévu que le tribunal pourrait prononcer l'adoption bien que la mise en oeuvre de la procédure d'agrément n'ait pas abouti dans les délais ou n'ait pas donné lieu à une réponse positive, s'il estime que les requérants présentent les qualités nécessaires et que l'adoption est conforme à l'intérêt de l'enfant.
En matière d'adoption d'un enfant originaire de l'étranger, en particulier, il a paru indispensable de s'assurer, avant même le recueil de l'enfant en France, que les futurs adoptants aient obtenu l'agrément pour adopter. L'article 100-3 du code de la santé publique, de la famille et de l'aide sociale a été modifié en ce sens.
1.1.2. Les conditions d'engagement
de la procédure à l'étranger
Il convient d'opérer une distinction à cet égard suivant que l'enfant dont l'adoption est envisagée est ou non originaire d'un Etat partie à la convention de La Haye de 1993.
1.1.2.1. Etats parties à la convention de La Haye
La liste des Etats parties à cette convention figure en annexe.
Cette convention, entrée en vigueur à l'égard de la France le 1er octobre 1998, prévoit la mise en place, dans les pays d'origine comme dans les pays d'accueil des enfants, d'autorités centrales chargées de l'accomplissement de l'ensemble des procédures visant à l'adoption.
L'autorité centrale française, placée auprès du Premier ministre, est composée, outre son président, de représentants des ministères de la justice, des affaires étrangères ainsi que de l'emploi et de la solidarité et des conseils généraux.
Le traitement des dossiers individuels, qui revient en principe aux autorités centrales, peut être délégué à des autorités publiques ou à des organismes agréés à cet effet.
En application de l'article 6 du décret no 98-863 du 23 septembre 1998 susvisé, cette tâche est assumée en France soit par la mission de l'adoption internationale, soit par des organismes autorisés pour l'adoption et spécialement habilités pour l'adoption internationale d'enfants originaires d'un ou plusieurs pays parties à la convention.
La mission de l'adoption internationale, dont la composition est interministérielle, est installée au sein de la sous-direction de la coopération en droit de la famille du ministère des affaires étrangères.
La liste des organismes autorisés pour l'adoption interne et habilités pour l'adoption internationale peut être communiquée par le bureau du droit européen et international en matière civile et commerciale (L 1) du service des affaires européennes et internationales.
1.1.2.2. Etats non parties à la convention de La Haye
L'article 348-5 du code civil exclut, sauf dans un cadre intrafamilial, l'adoption d'un enfant âgé de moins de deux ans, s'il n'a pas été effectivement remis au service de l'aide sociale à l'enfance ou à un organisme autorisé pour l'adoption.
Ainsi, seule la remise d'un enfant de moins de deux ans par une autorité ou un organisme agréés pour l'adoption dans son pays d'origine, ou par un organisme français autorisé et habilité pour l'adoption d'enfants originaires de ce pays, remplit les conditions fixées par l'article 348-5.
Dans ce cadre international, les notions de « service de l'aide sociale à l'enfance » et d' « organisme autorisé pour l'adoption » doivent s'entendre aussi bien des services ou organismes français que de leurs homologues étrangers, publics ou privés, dès lors qu'ils sont habilités au recueil d'enfants en vue de leur adoption.
La liste des autorités étrangères compétentes, établissements ou services habilités dans le pays d'origine des enfants dont l'adoption est sollicitée peut être fournie sur leur demande aux parquets par le bureau du droit européen et international en matière civile et commerciale.
Ces dispositions, qui visent à prévenir toute possibilité de pression de la part des adoptants, ou de leur mandataire, sur la famille biologique de l'enfant, revêtent une importance particulière en matière d'adoption internationale.
En effet, le droit d'un certain nombre de pays permet à des requérants étrangers d'obtenir que des enfants leur soient confiés directement par l'organisme qui les a recueillis, voire par leurs parents, dans le cadre d'une procédure diligentée par les soins des adoptants eux-mêmes ou d'un mandataire.
Or le recueil par les adoptants eux-mêmes ou par un mandataire personne physique, professionnel ou bénévole, d'un enfant de moins de deux ans confié directement par ses parents, de même que le recueil de l'enfant auprès d'un organisme non habilité localement, vicie le consentement au regard du droit français.
Il ne devrait donc pas permettre le prononcé de l'adoption par les juridictions françaises. Il s'oppose également à la reconnaissance en France d'une décision étrangère d'adoption prononcée dans ces conditions en application de la loi locale, dès lors que la loi française ne l'aurait pas permis.
1.1.3. Les intermédiaires : dispositions pénales
L'article 100-1 du code de la famille et de l'aide sociale dispose que les personnes qui entendent jouer un rôle d'intermédiaire en matière d'adoption internationale doivent avoir obtenu une autorisation préalable d'exercer une telle activité du président du conseil général du département intéressé ainsi qu'une habilitation du ministre des affaires étrangères.
Les articles 99 et 100-2 du même code punissent le non-respect de ces dispositions de trois mois d'emprisonnement et 25 000 F d'amende.
Par ailleurs, l'article 227-12 du code pénal punit d'un an d'emprisonnement et 100 000 F d'amende le fait de s'entremettre, dans un but lucratif, entre une personne désireuse d'adopter un enfant et un parent désireux d'abandonner son enfant né ou à naître.
La responsabilité pénale des personnes morales est prévue pour cette infraction par l'article 227-14 du code pénal.
Je vous serais obligé de m'aviser de la commission de telles infractions afin de me permettre d'en informer, s'il y a lieu, les autres départements ministériels intéressés.
1.1.4. La délivrance aux enfants
des visas d'entrée sur le territoire français
La délivrance des visas ressortit à la compétence du ministère des affaires étrangères.
A ce titre, c'est la mission de l'adoption internationale qui donne toutes instructions utiles au consulat de France dans le pays d'origine de l'enfant aux fins de délivrance d'un visa de long séjour.
L'existence d'un visa délivré sur instructions de la mission permet dans la plupart des cas de présumer la régularité apparente de la procédure suivie à l'étranger.
L'absence de visa doit au contraire vous conduire à vous interroger sur les conditions et les circonstances dans lesquelles l'enfant est entré sur le territoire français, les hypothèses dans lesquelles aucun visa n'est exigible pour l'enfant (enfant originaire d'un Etat partie à la convention d'application de l'accord de Schengen) étant très rares. Une entrée irrégulière est en effet susceptible de laisser penser que l'enfant a été recueilli dans des conditions illicites ou que son adoption est juridiquement impossible.
1.2. Procédure judiciaire d'adoption
En vertu des articles 424 et 425 du nouveau code de procédure civile, il importe que le parquet fasse valoir son point de vue sur les demandes d'adoption internationale dont le tribunal de son siège est saisi.
Il doit par conséquent développer des moyens juridiques, fondés notamment sur les règles de solution des conflits de lois, à l'appui des conclusions qu'il est amené à prendre.
L'article 1168 du même code lui confiant la tâche de transmettre au tribunal les demandes d'adoption plénière, il lui revient d'instruire le dossier de manière à permettre au tribunal de disposer de l'ensemble des informations qui lui seront nécessaires pour prendre sa décision.
1.2.1. Solutions en matière de conflits de lois
L'adoption internationale, qui met en présence un adopté et un ou deux adoptants de nationalités différentes, est la source d'un conflit entre deux ou plusieurs lois susceptibles d'être appliquées par la juridiction saisie.
En l'absence de règles écrites, la Cour de cassation donne compétence, d'une part, à la loi de l'adoptant en ce qui concerne les conditions et les effets de l'adoption, et, d'autre part, à la loi personnelle de l'adopté pour ce qui a trait à la forme du consentement et à la détermination des personnes ou autorités habilitées à consentir.
Cette solution permet de donner en France à l'enfant un statut juridique aux contours parfaitement délimités tout en respectant la volonté de ses parents ou des autorités de tutelle de son pays d'origine.
1.2.1.1. Conditions et effets de l'adoption
La loi de l'adoptant est déterminée de manière différente suivant que l'adoption est demandée par une personne seule ou par un couple.
Lorsque l'adoption est demandée par une personne seule, c'est naturellement la loi personnelle de celle-ci, c'est-à-dire la loi de l'Etat dont elle a la nationalité, qui est applicable.
Lorsqu'elle est demandée par un couple, cette loi sera celle qui régit les effets du mariage, c'est-à-dire la loi de la nationalité commune des époux, ou si tous les deux sont de nationalités différentes, la loi du pays dans lequel ils ont leur résidence habituelle commune. Ainsi, la loi des effets du mariage de deux époux dont un seul est français, mais qui résident tous deux en Fance, est la loi française.
Par ailleurs, il résulte de l'application de cette règle que le prononcé de l'adoption est juridiquement impossible lorsque la loi de l'adoptant prohibe cette institution, par exemple lorsque l'adoption est demandée par deux époux de nationalité algérienne ou marocaine.
Enfin, l'application de la loi de l'adoptant aux effets de l'adoption permet aux juridictions françaises de révoquer, en application de la loi française, l'adoption simple d'un enfant étranger par un Français, même lorsque celle-ci a été prononcée à l'étranger en application d'une loi étrangère.
1.2.1.2. Consentement à l'adoption
Conditions de recueil du consentement
Le consentement doit être recueilli dans le pays d'origine de l'enfant et selon les formes applicables localement.
A cet égard, la plupart des enfants recueillis en France ont été l'objet au préalable dans leur pays d'origine d'une mesure les confiant à un Français ou à une personne résidant en France, qu'il s'agisse d'une adoption, d'une tutelle ou de toute autre mesure de protection prévue par la loi étrangère et emportant transfert de l'autorité parentale. Le principe d'efficacité substantielle immédiate des décisions rendues à l'étranger en matière d'état et de capacité des personnes s'oppose au prononcé en France d'une autre décision qui ignorerait les effets du titre étranger.
Il ne saurait par conséquent y avoir en France à l'ouverture d'une tutelle, lorsqu'un enfant a déjà fait l'objet à l'étranger d'une adoption, sauf si les conditions habituelles de l'ouverture de la tutelle, telles que le décès de l'adoptant, se trouvent réunies postérieurement à l'adoption, ou s'il s'agit de conférer un statut juridique protecteur à un enfant dont l'adoption prononcée à l'étranger ne remplit pas les conditions nécessaires à sa reconnaissance. De même, si l'enfant a été confié au futur adoptant dans le cadre d'une tutelle, d'une délégation d'autorité parentale ou de toute autre institution similaire prévue par le droit étranger, l'ouverture d'une nouvelle tutelle ne saurait se justifier dès lors que la personne qui a recueilli l'enfant est investie de l'autorité parentale à son égard en application de la décision étrangère.
Ainsi, l'ouverture d'une tutelle en France à la seule fin de recueillir un consentement à l'adoption constituerait un détournement de procédure, dès lors qu'elle aurait pour effet d'éluder les effets de la règle de solution du conflit de lois et d'écarter le principe du respect de la volonté des parents de l'enfant ou des autorités de tutelle de son pays d'origine.
Les dispositions de l'article 425 du nouveau code de procédure civile, selon lequel toutes les demandes relatives à l'organisation de la tutelle des mineurs dont sont saisis les tribunaux d'instance de votre ressort doivent vous être communiquées, devraient vous permettre de prendre des conclusions de rejet des demandes qui contreviendraient aux principes rappelés ci-dessus.
Par ailleurs, et sous réserve de l'appréciation des juridictions, il ne paraît pas possible, sauf si la loi en application de laquelle la décision étrangère a été rendue ouvre cette possibilité, de faire produire aux décisions judiciaires d'abandon prononcées à l'étranger, en application d'une loi étrangère, les effets de dispense de consentement à l'adoption que la jurisprudence déduit de l'article 347 (3o) du code civil.
Une telle interprétation paraît en effet éluder la règle renvoyant à l'application de la loi personnelle de l'adopté en matière de consentement.
Portée du consentement
Le souci du respect de la volonté de la famille biologique ou des autorités de tutelle du pays d'origine de l'enfant doit conduire à une appréciation rigoureuse de la portée du consentement qui a été donné à l'adoption de l'enfant.
Si la demande porte sur une adoption plénière, il conviendra par conséquent de s'assurer que le consentement a bien été donné à une adoption emportant rupture complète des liens antérieurs de l'enfant et création d'un lien de filiation adoptive irrévocable.
Peu de législations étrangères instituant une adoption comportant ces deux critères, un consentement à l'adoption prévue par la loi personnelle de l'enfant, par exemple, ne peut ainsi être considéré comme une adhésion à l'adoption plénière du droit français, lorsque la loi étrangère ne connaît pas d'institution comparable.
Il n'y a pas lieu toutefois d'exiger que le consentement porte expressément sur une adoption plénière du droit français, si les termes utilisés dans l'acte établissent que la situation résultant d'une telle adoption a bien été envisagée et acceptée par la personne ou l'autorité qui a consenti.
En revanche, il ne paraît pas possible de déduire du seul fait que le départ de l'enfant pour un pays lointain a été autorisé qu'une rupture complète de tous les liens avec lui a été envisagée et admise.
De la même façon, la décision de confier l'enfant à un tiers n'est pas suffisante ; il est nécessaire que le consentement comporte un accord sur une modification de la situation juridique de l'enfant d'une ampleur telle qu'elle puisse substituer une filiation nouvelle à sa filation biologique.
Ne saurait être considérée comme un consentement à l'adoption le fait de confier l'enfant dans le cadre d'une tutelle, ou d'une « kafala », terme parfois traduit en français par « recueil légal », ou, improprement, par « adoption ».
Cette institution du droit musulman, qui se limite à confier la prise en charge et l'éducation de l'enfant à la personne qui le recueille, se rapproche en réalité de la délégation d'autorité parentale du droit français.
Cas des enfants dont la loi personnelle prohibe l'adoption
Un certain nombre de lois étrangères, et notamment les lois algérienne et marocaine, prohibent l'adoption en tant qu'institution créant un lien juridique de filiation indépendant de tout rapport de filiation biologique.
La règle de solution du conflit de lois qui renvoie à la loi personnelle de l'adopté en matière de consentement conduit à considérer que l'adoption n'est pas possible lorsque cette loi interdit l'adoption. Compte tenu de la prohibition qu'elle pose, la loi étrangère ne comporte en effet aucune désignation des personnes habilitées à consentir, ni des formes selon lesquelles le consentement doit être recueilli.
La conformité à l'ordre public international français des droits étrangers qui prohibent ainsi l'adoption ne paraît pas faire de doute. En effet, en ratifiant la convention sur les droits de l'enfant la France a reconnu qu'il appartenait aux Etats d'assurer, conformément à leur législation nationale, la protection de leurs ressortissants mineurs privés de milieu familial. De même, la convention de La Haye sur la protection des enfants et la coopération en matière d'adoption internationale précise que les adoptions ne peuvent avoir lieu que si les autorités compétentes de l'Etat d'origine de l'enfant ont établi que l'enfant est adoptable.
En outre, l'application du droit international privé français, respectueux des législations étrangères et des décisions prononcées à l'étranger, sous réserve de leur conformité à l'ordre public international, s'oppose à la constitution en France de rapports juridiques non susceptibles d'être reconnus dans le pays d'origine des intéressés.
Ainsi un consentement donné en violation de la loi étrangère apparaît sans valeur, quelles que soient les conditions dans lesquelles il a été donné.
Dès lors, il appartient aux parquets d'appeler l'attention des requérants qui solliciteraient la transmission au tribunal d'une demande d'adoption d'enfants dont la loi personnelle prohibe l'adoption sur cette difficulté et de leur recommander de s'orienter vers une autre solution. En cas de saisine de la juridiction de leur siège d'une telle demande, ils doivent s'opposer au prononcé de l'adoption en faisant valoir les moyens et arguments exposés ci-dessus.
Cas des enfants dont la loi personnelle
ne connaît pas l'adoption
La loi personnelle de l'enfant n'est pas forcément une loi écrite et certains pays n'ont pas de législation relative à l'adoption. La prise en charge des enfants privés de leur milieu familial s'effectue en général dans le cadre de la coutume ou de pratiques mises en place par l'administration pour pallier les difficultés résultant d'un vide juridique temporaire.
Compte tenu de l'ouverture de ces pays aux échanges internationaux, un certain nombre d'enfants qui en sont originaires sont confiés aujourd'hui à des personnes qui résident à l'étranger. Le recueil d'un enfant dans de tels contextes ne doit pas toutefois conduire à écarter les principes généraux applicables en matière d'adoption internationale.
Il conviendra par conséquent de s'assurer que la famille mais aussi les autorités locales, seules à même d'établir que l'adoption n'est pas contraire à leur droit, ont été dûment avisées du recueil de l'enfant ainsi que du projet d'adoption à l'étranger et qu'elles ont manifesté leur accord. Dans un tel cas, la forme du consentement n'étant pas prévue par la loi personnelle de l'enfant, celui-ci devra être donné selon des modalités soit fixées par les autorités locales, soit agréées par elles et offrant suffisamment de garanties, à la fois en termes de preuve et d'information des personnes qui ont consenti.
1.2.2. Instruction du dossier par le parquet
Le procureur de la République, en application de l'article 1168 du nouveau code de procédure civile, est chargé de transmettre les demandes d'adoption plénière au tribunal. Je rappelle qu'il doit le faire même si les conditions du prononcé d'une telle décision ne lui paraissent pas être remplies.
Il devra toutefois, dans un tel cas, attirer l'attention des requérants sur les difficultés auxquelles ils risquent de se trouver confrontés lorsque leur demande sera examinée par le tribunal et leur rappeler la possibilité de s'assurer, s'ils le souhaitent, le concours d'un avocat.
1.2.2.1. Constitution des dossiers
Le procureur devant transmettre la requête au tribunal et donner son avis, il lui appartient d'instruire les dossiers de demande d'adoption qui lui sont adressés. Il doit s'assurer qu'ils comportent l'ensemble des pièces qui lui sont nécessaires pour prendre ses conclusions et qui sont indispensables au tribunal pour prononcer sa décision.
Des informations relatives au contenu de la loi ou des lois étrangères applicables peuvent être demandées au bureau du droit européen et international en matière civile et commerciale.
1.2.2.2. Authenticité et force probante des pièces
En ce qui concerne les pièces relatives à la procédure suivie à l'étranger et qui sont produites par les requérants, la question se pose parfois de leur authenticité, de leur contenu exact et de leur portée.
Compte tenu de l'importance des décisions qui doivent être prises sur la base des actes établis à l'étranger, j'appelle votre attention sur la nécessité de procéder à un contrôle rigoureux de l'authenticité des pièces produites par les requérants.
Il convient de rappeler à cet égard que les documents officiels provenant de pays étrangers doivent, sauf disposition conventionnelle contraire, faire l'objet d'une légalisation. En ce qui concerne les règles applicables en matière de légalisation d'actes publics étrangers, il convient de se reporter aux numéros 591 à 599 de l'instruction générale relative à l'état civil.
Je rappelle par ailleurs que la légalisation, comme l'apostille, n'ont pour effet que de certifier l'authenticité de la signature apposée sur le document et la fonction du signataire, mais non le contenu même de l'acte.
Dans ces conditions, si une traduction paraît sujette à caution, par exemple lorsqu'elle ne semble pas correspondre au texte original, le fait qu'elle soit légalisée ou apostillée n'interdit pas qu'il soit demandé aux requérants de faire procéder à une nouvelle traduction en France par un traducteur assermenté. Il en sera de même évidemment lorsque la qualité de la traduction qui est fournie est tellement mauvaise que le sens des énonciations du document, ou tout au moins des parties les plus importantes de celui-ci, telles que celle qui a trait au consentement, ne peut être déterminé de manière indubitable.
1.2.2.3. Acte de consentement
Compte tenu de l'importance du document étranger établissant qu'un consentement a été donné au prononcé d'une adoption, et lorsque la teneur du consentement ne ressort pas du jugement étranger lui-même, les parquets doivent veiller à ce que cette pièce soit versée au dossier par les requérants.
Lorsque ceux-ci ne sont pas en mesure de la produire, ils doivent être invités à entreprendre les démarches nécessaires à son obtention.
Le contenu du document ainsi obtenu devra en outre permettre de déterminer s'il a été consenti à une adoption assimilable à l'adoption simple ou à l'adoption plénière du droit français.
Dans un grand nombre de cas, les enfants dont l'adoption est sollicitée en France ont déjà fait l'objet d'une adoption dans leur pays d'origine. Il y a lieu, dès lors, d'examiner les conséquences qui peuvent résulter aussi bien des décisions rendues en France que des décisions étrangères.
2. CONSEQUENCES DU PRONONCE DE L'ADOPTION
Les jugements d'adoption rendus en France ne sont pas les seuls à produire leurs effets sur le territoire national, les décisions étrangères étant susceptibles d'y être reconnues.
Par ailleurs, outre leurs effets en matière de filiation, les décisions prononçant l'adoption, qu'elles aient été rendues en France ou à l'étranger, peuvent emporter certaines conséquences en matière de nationalité. En outre, selon les effets qui leur seront reconnus, celles-ci pourront ou non donner lieu à inscription sur les registres d'état civil et les livrets de famille.
2.1. Reconnaissance des décisions
d'adoption prononcées à l'étranger
Il convient de rappeler que les décisions étrangères relatives à l'état des personnes, quelle que soit la nature de l'autorité ayant statué au nom de l'Etat étranger, bénéficient en France, conformément à une jurisprudence bien établie, d'une reconnaissance de plein droit tant que leur régularité internationale n'a pas été contestée avec succès devant un tribunal français.
Ce principe n'interdit pas qu'une juridiction française soit saisie, dans les conditions prévues à l'article 311-11 du code de l'organisation judiciaire, d'une demande de reconnaissance ou d'exequatur, notamment aux fins de rendre juridiquement incontestable l'adoption prononcée à l'étranger mais aussi de prévenir toute difficulté que pourraient rencontrer les parents adoptifs dans les démarches de la vie courante.
Il conduit en revanche à considérer que l'effet constitutif d'un état nouveau produit par la décision régulièrement rendue à l'étranger constitue une fin de non-recevoir de la demande visant au prononcé en France d'une décision similaire. Ainsi, la demande d'adoption plénière d'un enfant ayant déjà bénéficié à l'étranger soit d'une adoption plénière prononcée en application de la loi française, soit d'une adoption emportant des effets similaires prévue par une autre loi, pourrait être déclarée d'office irrecevable pour défaut d'intérêt à agir.
A l'occasion de ces différentes procédures, la régularité internationale de la décision étrangère doit par conséquent être examinée par la juridiction saisie, mais il est en outre admis qu'elle peut être contrôlée par le parquet, notamment lorsque celui-ci est requis de donner à l'officier d'état civil compétent les instructions nécessaires à la mention ou à la transcription du jugement étranger sur les registres dont il assure la tenue.
Par ailleurs, compte tenu des différences de conceptions existant entre le droit français et la plupart des droits étrangers en matière d'adoption, l'insertion dans l'ordre juridique français des décisions étrangères rend nécessaire leur qualification.
Il convient toutefois d'opérer une distinction entre, d'une part, les décisions rendues dans des pays non parties à la convention de La Haye du 29 mai 1993, soumises aux règles de droit commun du droit international privé français et, d'autre part, dans des Etats contractants, cette convention comportant des règles particulières.
2.1.1. Règles de droit commun
2.1.1.1. Conditions de la régularité internationale
des décisions étrangères
L'examen de la régularité internationale des jugements étrangers d'adoption s'effectue au regard des mêmes critères que pour toute autre décision étrangère.
S'agissant de la compétence : l'autorité étrangère qui a prononcé la décision étant, dans la plupart des cas, celle du pays d'origine de l'enfant, sa compétence n'est pas contestable.
S'agissant de la loi applicable : la règle de l'équivalence des résultats permettra de reconnaître en France les effets d'une décision étrangère prononcée sur le fondement d'une loi différente de celle désignée par la règle française de conflit de lois, si l'application de celle-ci a permis d'atteindre un résultat similaire.
La décision étrangère ne doit pas être contraire à l'ordre public, c'est-à-dire porter atteinte aux principes fondamentaux du droit français.
Elle ne doit pas avoir été obtenue par suite d'une fraude à la loi, c'est-à-dire de la création délibérée d'une situation entraînant l'application d'une loi étrangère normalement incompétente. Ainsi, il semble qu'une décision rendue à l'étranger au profit d'un requérant dépourvu d'agrément pour adopter et dont il s'avérerait que, prétendument installé dans ce pays, il réside en réalité habituellement en France et y accueillera l'enfant, pourrait se voir opposer un refus de reconnaissance.
2.1.1.2. Portée des décisions étrangères d'adoption
Les décisions rendues à l'étranger ne peuvent par principe produire en France plus d'effets qu'elles n'en comportent au regard de la loi sur le fondement de laquelle elles ont été rendues.
Toutefois, compte tenu des conséquences particulières qu'entraînent les décisions d'adoption notamment en matière de nationalité et d'état civil et du fait qu'un grand nombre de droits étrangers ne prévoient pas les mêmes formes d'adoption, il est nécessaire de déterminer à quelle catégorie d'adoption du droit français la décision rendue à l'étranger peut être assimilée.
Selon la jurisprudence de la Cour de cassation, il convient d'opérer une comparaison entre les effets de l'adoption telle qu'elle est prévue par la loi étrangère qui a été appliquée et ceux de l'adoption plénière du droit français, au regard des deux caractères essentiels de celle-ci, à savoir la rupture complète des liens antérieurs de l'enfant et l'irrévocabilité de la filiation adoptive.
Si l'adoption prononcée à l'étranger comporte ces deux caractères, elle sera assimilée à l'adoption plénière.
Si en revanche ces deux caractères, ou l'un d'entre eux, font défaut, la décision étrangère sera assimilée à l'adoption simple du droit français. Le tableau joint en annexe est destiné à faciliter cet exercice de qualification des adoptions étrangères.
2.1.2. Cas particulier des décisions rendues dans les pays
parties à la convention de La Haye du 29 mai 1993
La convention de La Haye comporte des dispositions dérogatoires au droit commun français, aussi bien en matière de reconnaissance des jugements étrangers que de portée des décisions étrangères d'adoption.
2.1.2.1. Conditions de la régularité internationale
La convention institue un régime particulièrement favorable de reconnaissance, applicable aux décisions rendues dans les Etats contractants dans le cadre de la coopération prévue par cet instrument.
En effet, ces décisions font l'objet d'une reconnaissance de plein droit qui ne peut être remise en cause qu'en cas de contrariété manifeste à l'ordre public, envisagée de surcroît au regard de l'intérêt supérieur de l'enfant.
L'examen de la régularité internationale de la décision étrangère ne doit être effectué que dans ce cadre.
La reconnaissance des décisions dans les Etats contractants est par ailleurs facilitée par l'établissement, par l'autorité compétente de l'Etat où elles ont été prononcées, d'un certificat de conformité de l'adoption aux dispositions de la convention.
2.1.2.2. Portée des décisions
L'article 26 de la convention prévoit que « si l'adoption a pour effet de rompre le lien préexistant de filiation, l'enfant jouit, dans l'Etat d'accueil et dans tout autre Etat contractant où l'adoption est reconnue, des droits équivalant à ceux résultant d'une adoption produisant cet effet dans chacun de ces Etats ».
Dans ces conditions, chaque fois qu'une décision d'adoption aura été prise, après l'entrée en vigueur de la convention, dans un Etat contractant dont la loi prévoit que cette mesure emporte rupture des liens antérieurs de l'enfant, cette adoption sera assimilée en France à l'adoption plénière du droit français.
2.2. Conséquences de l'adoption
en matière de nationalité et d'état civil
2.2.1. Nationalité
Il convient d'opérer une distinction à cet égard entre l'adoption plénière et l'adoption simple.
2.2.1.1. Adoption plénière
Conformément aux termes du deuxième alinéa de l'article 20 du code civil, la nationalité française de l'enfant qui a fait l'objet d'une adoption plénière pendant sa minorité est régie par les mêmes règles que celles qui s'appliquent aux enfants légitimes ou naturels.
Possède par conséquent la nationalité française, d'une part, quel que soit son lieu de naissance, l'enfant adopté plénièrement par un Français, d'autre part, lorsqu'il est né en France, l'enfant adopté plénièrement soit par des apatrides, soit par un seul étranger ou par des conjoints étrangers dont la loi ne lui attribue pas la nationalité, soit par une personne née en France.
En application du principe d'efficacité de plein droit en France des décisions régulièrement rendues à l'étranger en matière d'état et de capacité des personnes, il n'y a pas lieu de distinguer, en ce qui concerne les effets qu'elles sont susceptibles de produire en matière de nationalité, entre les décisions d'adoption plénière rendues en France et les décisions rendues à l'étranger et prononçant une adoption assimilable à l'adoption plénière du droit français, qu'il s'agisse des décisions rendues dans le cadre des procédures mises en place en application de la convention de La Haye ou dans des Etats non parties à cet instrument.
L'article 20 du code civil dispose en outre que l'enfant qui se voit attribuer la nationalité française dans ces conditions est réputé avoir été français dès sa naissance.
Par ailleurs, l'article 22-1 du code civil, dans sa nouvelle rédaction issue de la loi no 98-170 du 16 mars 1998 relative à la nationalité, prévoit que l'enfant adopté plénièrement par une personne qui acquiert la nationalité française devient français de plein droit, s'il a la même résidence habituelle que ce parent ou s'il réside alternativement avec lui dans le cas de séparation ou de divorce.
2.2.1.2. Adoption simple
Selon l'article 21 du code civil, « l'adoption simple n'exerce de plein droit aucun effet sur la nationalité de l'adopté ».
L'article 21-12 du même code prévoit toutefois que l'enfant qui a fait l'objet d'une adoption simple par une personne de nationalité française peut réclamer la nationalité française par simple déclaration devant le juge d'instance à la condition qu'il réside en France.
Cette condition de résidence a toutefois été supprimée par l'article 7 de la loi no 98-170 du 16 mars 1998 précitée pour les enfants qui ont fait l'objet d'une adoption simple par une personne de nationalité française n'ayant pas elle-même sa résidence habituelle en France.
Selon les termes de l'article 17-3 du code civil, la déclaration peut être faite par le mineur intéressé lui-même dès l'âge de seize ans, sans autorisation de son représentant légal. L'enfant plus jeune doit en revanche être représenté par celui ou ceux qui exercent à son égard l'autorité parentale, et par conséquent par l'adoptant ou les adoptants.
Si la décision d'adoption simple a été prononcée à l'étranger, elle devra, préalablement à la déclaration, faire l'objet d'une décision d'exequatur de la juridiction française compétente, conformément aux termes de l'article 16 (3o) du décret no 93-1362 du 30 décembre 1993.
2.2.2. Etat civil
L'adoption d'un enfant étranger par un Français ou par une personne étrangère résidant en France n'entraîne pas dans tous les cas la modification ou l'établissement d'actes de l'état civil.
Sous certaines conditions, toutefois, l'adoption pourra avoir des incidences en matière d'acte de naissance et de livret de famille.
2.2.2.1. Actes de naissance
Décisions d'adoption plénière
Les dispositions du premier alinéa de l'article 354 du code civil sont applicables, s'agissant du principe de transcription sur les registres du lieu de naissance de l'adopté, aussi bien aux décisions d'adoption plénière prononcées en France qu'aux décisions étrangères prononçant une adoption assimilable à l'adoption plénière du droit français, dès lors que l'adopté étant né en France, son acte de naissance y a été dressé.
Lorsque la décision a été prononcée à l'étranger, il appartient, ainsi qu'il a été indiqué plus haut, au procureur de la République du lieu d'établissement de l'acte de naissance de l'enfant d'examiner la régularité internationale de la décision étrangère et d'en apprécier la portée au regard des deux catégories d'adoption prévues par le droit français, afin de donner, s'il y a lieu, instruction à l'officier d'état civil de transcrire le jugement étranger.
En revanche, lorsque la décision, prononcée à l'étranger, concerne un enfant étranger né à l'étranger, la transcription du jugement d'adoption plénière ne sera effectuée que si l'enfant est devenu français, et par conséquent s'il a été adopté par un Français.
La transcription est effectuée dans ce cas, sur réquisitions du procureur de la République près le tribunal de grande instance de Nantes et après vérification par celui-ci de la régularité internationale et de la portée de la décision étrangère, sur les registres du service central d'état civil.
Conformément aux termes de l'article 354 du code civil, la transcription de la décision d'adoption plénière prononcée en France tient lieu d'acte de naissance à l'enfant. Ces dispositions sont applicables également, par analogie, lorsque la décision a été prononcée à l'étranger.
J'appelle votre attention sur le fait que dans les deux cas l'acte tenant lieu d'acte de naissance à l'enfant est l'acte de transcription de la décision d'adoption établi sur un registre de l'état civil français. Des modèles de réquisitions aux fins de transcription figurent dans l'instruction générale relative à l'état civil.
Ainsi, le nouvel acte de naissance susceptible d'avoir été dressé à l'étranger en application de la loi locale par suite de la décision d'adoption et mentionnant les adoptants en qualité de parents de l'enfant ne doit en aucun cas donner lieu à transcription directe sur les registres de l'état civil français.
Aucun certificat de nationalité française ne doit non plus être dressé sur la base d'un tel acte étranger.
Un certain nombre d'éléments, comme la date à laquelle il a été établi, généralement éloignée dans le temps de la date de naissance de l'enfant, permettent le plus souvent de déterminer au seul vu de l'acte que celui-ci a été dressé par suite d'une décision d'adoption.
Décisions d'adoption simple
Selon l'article 362 du code civil, la décision prononçant l'adoption simple est mentionnée ou transcrite sur les registres de l'état civil à la requête du procureur de la République.
La mention de l'adoption simple est portée en marge des actes de naissance des adoptés dressés sur un registre français.
Il peut s'agir par conséquent des adoptés, français ou étrangers, qui sont nés en France, ou des adoptés français nés à l'étranger, dont l'acte de naissance est conservé sur les registres du service central d'état civil, ou des enfants adoptés plénièrement dont le jugement d'adoption a été transcrit sur les registres français de l'état civil puis qui sont l'objet, en application du deuxième alinéa de l'article 360 du code civil, d'une adoption simple.
La transcription est effectuée sur le registre spécial tenu par le service central d'état civil prévu par l'article 3 du décret no 65-422 du 1er juin 1965, lorsque la décision a été rendue en France et concerne des enfants dont les actes de naissance ne sont pas conservés sur des registres français. En pratique, il ne devrait s'agir que des jugements concernant des adoptés nés à l'étranger et ne possédant pas la nationalité française.
Cette transcription constitue une simple mesure de publicité et ne tient pas lieu d'acte de naissance à l'adopté. Elle ne présente par conséquent qu'un intérêt limité pour l'intéressé.
Aucune transcription ni mention des décisions d'adoption simple prononcées à l'étranger et concernant des enfants nés à l'étranger et qui n'ont pas acquis la nationalité française n'est en revanche effectuée.
2.2.2.2. Livret de famille
Il convient de rappeler qu'hors le cas particulier prévu à l'article 8 du décret no 74-449 du 15 mai 1974 relatif au livret de famille, qui permet la mention de leurs enfants, restés étrangers, sur le livret de famille de personnes qui ont obtenu la nationalité française, ne peuvent être mentionnés sur les livrets de famille délivrés par les autorités françaises que les enfants dont l'acte de naissance est conservé à l'état civil français.
Les enfants adoptés ne peuvent par conséquent figurer sur le livret de famille délivré par un officier d'état civil français que s'ils sont nés en France ou si, bien que nés à l'étranger, ils possèdent la nationalité française.
Les enfants adoptés qui remplissent ces conditions peuvent être portés sur le livret de famille de leurs parents adoptifs, qu'ils aient été l'objet d'une adoption plénière ou d'une adoption simple.
Les enfants adoptés plénièrement sont en effet mentionnés sur le livret de leurs parents adoptifs comme s'il s'agissait d'enfants biologiques par l'officier d'état civil qui conserve la transcription de la décision étrangère tenant lieu d'acte de naissance.
Quant aux enfants adoptés simples, j'appelle votre attention sur le fait que plus aucune distinction n'est opérée à leur égard selon que leur filiation biologique est ou non établie. En effet, le décret no 97-853 du 16 septembre 1997 modifiant le décret du 15 mai 1974 susvisé a supprimé la condition d'absence de filiation d'origine, qui s'opposait auparavant à ce que certains enfants adoptés simples soient portés sur le livret de famille de leurs parents adoptifs.
Vous voudrez bien me faire connaître, sous le timbre du service des affaires européennes et internationales, toute difficulté que pourrait susciter la présente circulaire.