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Siné encore mais plus : la liberté de dire et d'écrire

7 septembre 2008 à 11h27
Mes camarades du mensuel Afrique Asie m’ont demandé mon point de vue abyssal et transcendantal sur la liberté au pays de Voltaire, c’est à dire celui de Philippe Val.

Après avoir publié la traduction française de son livre « L’Industrie de l’Holocauste », Norman G. Finkelstein, un universitaire américain a constaté avec effroi et étonnement, que le pays de Voltaire et Hugo, celui de Zola, que cette patrie qu’il croyait toujours être celle des écrivains libres était devenue, dans le débat d’idées, « le pays le plus fermé du monde occidental ». Juif, membre de la « gauche » américaine, Finkelstein dans son bouquin s’est étonné que les rescapés de sa famille, victimes du génocide nazi, aient touché quelques dollars des divers fonds d’indemnisation créés dans le monde, alors que des responsables de sa communauté roulaient dans de longues limousines, payées par ces même fonds dont nous parlons.

A partir de cette constatation toute simple, Finkelstein enquête, analyse le fonctionnement de ce qu’il baptise « industrie ». Aux Etats-Unis, son ouvrage lui attire, à part égale, haine et sympathie. Personne ne l’assigne devant un tribunal et aucun flic new-yorkais n’est contraint à passer ses nuits en bas de la porte de l’écrivain pour le protéger. Mais dès que le texte a été diffusé en France, Finkelstein a été harcelé, injurié, ravalé au rang de ceux que Finkielkraut nomme « ces juifs qui collent l’étoile jaune aux autres juifs ».

Je vais en venir à l’affaire Siné, qui est notre préoccupation actuelle, mais je pense que ce qui est arrivé à Finkelstein, ce qui est arrivé à Edgar Morin, ce juif- résistant traîné devant un tribunal français pour « antisémitisme »- est un évènement assez fort pour nous n’ayons plus qu’à constater : maintenant en France, on veut mettre les idées en prison. Et bientôt ceux qui les ont dans la tête.

La loi Gayssot et autres textes de la juridiction d’Etat qui veulent définir, au cœur de l’histoire, une fois pour toute le vrai et le faux (comme « les bienfaits de la colonisation » décrétés par l’Assemblée nationale), le bien et le mal sont des armes de destruction massives du débat et de la recherche. Tout simplement de la vérité et de la démocratie.

Un jour, Giscard d’Estaing, alors à l’Elysée, se pose en hélicoptère au sommet du Buet, montagne française interdite d’accès à ce type d’engin. Scandale chez les écolos. Que fait VGE ? Il interdit désormais tout atterrissage sur toutes les montagnes de France.

Vous trouvez que je m’égare ? Non. Giscard pond ce texte pour soulager sa mauvaise conscience, comme Mitterrand a soutenu des lois liberticides et autres « devoirs de mémoire » pour se faire pardonner Vichy et la guillotine pendant la Guerre d’Algérie, Jospin pour oublier un père qui, au nom de la paix, s’est en 1940 un peu égaré sur le chemin de la force occupante. Sans oublier l’axiome qui montre que rogner la liberté, là où elle peut faire mal, n’est jamais en France un mauvais calcul électoral. Avec l’arrivée de Sarkozy, le pli est pris et on a le sentiment qu’il navigue avec l’histoire et la religion selon un principe qui met en jeu le marketing, l’ignorance et la sincérité.

L’affaire Siné n’est qu’une marche de plus dans l’escalier. Escalier roulant puisque Richard Labévière, journaliste à RFI, naguère banni de l’antenne à la demande de l’ambassadeur d’Israël, est tout simplement licencié par Pouzhillac, un pubard devenu grand maître de la CNN à la française, avec Christine Ockrent, femme de Kouchner, comme porte coton. Le 23 juin, alors que Sarkozy se rend en Israël, Libération rapporte les propos de Patrick Gaubert, patron de la Ligue Contre le Racisme et l’Antisémitisme, la Licra : « Le fils de Nicolas Sarkozy, Jean, vient de se fiancer avec une juive, héritières des fondateurs de Darty, et envisagerait de se convertir eu judaïsme ».

Très bien. Quelque temps plus tard, après que le dossier ait traîné trois ans dans un placard d’un tribunal, le même Jean Sarkozy, accusé d’avoir heurté, en scooter, la voiture d’un conducteur d’origine arabe et pris la fuite, comparaît enfin devant des juges. Siné, dans Charlie Hebdo, relie ces deux éléments de la vie du prince Jean. Il écrit : «  Jean Sarkozy, digne fils de son paternel et déjà conseiller général UMP, est sorti sous les applaudissements de son procès en correctionnelle pour délit de fuite en scooter. Le parquet (encore lui) a même demandé sa relaxe ! Il faut dire que le plaignant était arabe ! Ce n’est pas tout : il vient de déclarer vouloir se convertir au judaïsme avant d’épouser sa fiancée, juive et héritière des fondateurs de Darty. Il fera du chemin dans la vie ce petit ! » Pour avoir écrit cette phrase, Philippe Val, le propriétaire de Charlie Hebdo a viré Siné pour antisémitisme.

Pas plus de commentaires à faire. C’est, en France la marche de l’histoire. La météo, maussade, de la libre parole. Je me souviens, au cœur du Kosovo durant la guerre, avoir entendu dans une radio que Philippe Val était de ceux qui demandaient « une intervention terrestre de l’armée française pour libérer les albanophones… » Suffisamment enrichi par son métier de chansonnier dans les Maisons des Jeunes, Val a eu, au moment opportun, assez de fonds pour prendre le contrôle du journal, comme un vulgaire Dassault. Depuis, ce type autoproclamé « d’extrême gauche » est, sur ce flanc-là, le chien de garde de la bien-pensance. Vigile de BHL, Finkielkraut, Bruckner, Adler, et des idéologues de ce genre, type Joffrin, qui font la sentinelle à Libé et au Figaro. Pour avoir écrit la vérité il fallait donc que Siné soit exécuté.

Militant pendant la Guerre d’Algérie aux côtés du FLN, anticolonial compulsif, voyageur à Cuba, enragé de Mai 68 : il n’y a plus de place pour un Siné dans la presse convenable et convenue. En France, on ferme le Siné. Mais à toute chose malheur est bon puisque, selon Alexandre Adler, avec Val « un nouveau Zola » nous est né. Le philosophe Pierre Tevanian, auteur du parfait « Voile Médiatique » est quand même là pour nous rappeler que, dans Charlie le 5 janvier 2005, Val a signé ceci : [Les otages français, Christian Chesnot et Georges Malbrunot] «  ont été enlevés par des terroristes islamiques qui adorent égorger des Occidentaux, sauf les Français, parce que la politique arabe de la France a des racines profondes qui s’enfoncent jusqu’au régime de Vichy, dont la politique antijuive est, par défaut, une politique arabe. » Disons que Siné a été viré « par défaut ».

Siné : QUAND LE VIRE DEVIENT VIREUR La liberté d’expression est toujours en hausse

7 Messages de forum

  • Citation : « Pour avoir écrit la vérité il fallait donc que Siné soit exécuté ».

    Ben non, justement, Siné n’avait pas écrit « la vérité », il avait fait une vanne idiote dénuée de fondement et reposant sur un ragot. C’est peu, mais c’est incontestable.

    • Sine encore mais plus : la liberté de de dire et d’écrire. 8 septembre 2008 10:45, par PIT LE CHIEN
      "ragot".. ?? Quelle insolence envers une déclaration de M. GAUBERT/LICRA et LIBERATION qui a fidèlement rapporté ce "ragot"…
    • Sémite ? antisémite ? tout cela n’est que de la manipulation des idées… Ben oui on voudrait nous faire croire qu’il y a deux mondes : le monde musulman et le monde juif… car tous les documents d’actualités tournent sur ces choses là… alors moi je dis que tout cela est manipulation ! Comment peut on accuser des gens qui se battent pour une laïcité, les libertées individuelles se fassent accuser d’antisémitisme ???? tout cela n’est que mauvais procès, comme existaient les procès en sorcellerie !!! On brûle les idoles d’hiers au nom du libéralisme et du nouvel ordre mondial décrêté par l’administration américaine et quelques pays valets des états unis ( sont en manque d’idées et d’actions européennes ). Tout le monde sait que pour exporter " la démocratie", l’amérique a choisi la guerre, choisi aussi Israël ( qu’elle considére comme un pays démocratique ) mais nous savons aussi que les intêrets financiers et energétiques sont aussi les causes pour "voler" les pays sans défense… (irak, afghanistan, iran, etc… ) Il n’y a pas plus d’antisémitisme dans l’oeil d’un chien que de racisme dans l’oeil d’un chat ; cependant nous savons qu’ils sont différents et que pour l’instant il ne faut pas les mettre ensemble… lol
  • ….et son demandé….çà donnerait quoi ?

    Vive Siné

  • Siné est un emmerdeur mais le droit d’être un emmerdeur est un des droits de l’homme. Le droit de virer un pigiste est un droit du rédacteur en chef ceci dit : quelle idée a eu celui-ci de se faire passer pour le vertueux et de faire passer Siné pour un salaud ? La mauvaise conscience, encore. Le manque de courage de celui qui aurait juste du se dire : Siné m’emmerde, Siné n’a rien à voir avec le journal que je veux faire, je vire Siné. Non, il a eu besoin d’un prétexte, d’accuser le chien à noyer d’avoir la gale. C’est lâche. Nouveau Zola, mon œil. Un bon patron de presse a le droit d’être un méchant employeur, ça s’est vu. Il a le droit de se tromper aussi. Mais utiliser le chantage à l’antisémitisme comme moyen ? Pas très digne.
  • "Mitterrand a soutenu des lois liberticides et autres « devoirs de mémoire »"

    Ah bon ? Lesquelles ?

  • Monsieur le modérateur, bonjour !

    Je viens d’envoyer un commentaire suite à ce présent article, mais, je crois l’avoir transmis, par erreur, pour publication, suite à un article qui n’a aucun rapport avec mon envoi.

    Merci d’y remédier.