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ADICE : Réseau Pédagogique

par François BERTHET, 5. 02. 1996


RESEAU PEDAGOGIQUE

En 1995, l'ADICE a rédigé les projets "Multimédia Pédagogique Interactif" et "Employ".

Le projet "Multimédia Pédagogique Interactif", réponse de la Ligue Française de l'Enseignement et de l'Education Permanente (LFEEP) à l'appel à propositions gouvernemental relatif aux autoroutes de l'information figure parmi les 49 propositions retenues et labellisées "expérimentations d'intérêt public".

Le projet "Employ" est la réponse de six organismes européens et de deux industriels à l'appel d'offres TELEMATICS de la Commission de l'Union Européenne (DG XIII). Le projet, qui a démarré le 2 janvier 1996, reçoit un financement communautaire de 1,738 Mécus sur trois ans.

Ces projets visent à utiliser, à des fins pédagogiques, les possibilités offertes par les réseaux de télécommunication. Il ne s'agit pas des énièmes expérimentations tentant d'identifier les capacités pédagogiques des outils en réseaux. De nombreux acquis existent en ce domaine. Il s'agit plutôt, à partir de quelques sites-pilote, et d'une stratégie basée sur l'essaimage, de promouvoir progressivement la généralisation de leur usage par les publics de l'éducation et de la formation.

1. Contexte psychosociologique:

Les milieux de l'éducation et de la formation présentent des caractéristiques assez particulières, notamment en ce qui concerne l'appropriation des nouvelles technologies.

En France, sur plus d'un million d'enseignants, d'éducateurs et de formateurs, il sera toujours possible d'identifier quelques milliers de fanatiques de l'informatique. Ils sont malheureusement loin d'être représentatifs de l'ensemble. Dans sa grande majorité ce public nourrit encore une tenace appréhension à l'égard des nouvelles technologies. Dans le primaire, l'échec du plan "Informatique pour Tous", a laissé quelques souvenirs amers à bon nombre d'enseignants.

Mais les choses évoluent, certes lentement, mais sûrement. Les outils ont considérablement progressé. Leur ergonomie, notamment logicielle, est maintenant si avancée que personne ne songe plus à demander à des enseignants d'apprendre à programmer...

Le Ministère de l'Education Nationale a su, pour sa part, fédérer les énergies, grâce à la promotion d'actions basées généralement sur le volontariat. Du fait des lois de décentralisation, les coopérations qu'il a engagées avec les Collectivités Locales se sont avérées fructueuses.

De nombreuses expériences positives ont maintenant contribué à améliorer l'image des nouvelles technologies aux yeux des enseignants.

Les nouvelles générations d'enseignants, d'éducateurs et de formateurs, éprouvent beaucoup moins de réticences que leurs aînés. Enfin, la pression sociale devient telle, qu'elle finit par motiver même les plus réfractaires: les enseignants vivent mal, par exemple, de découvrir des compétences chez leurs élèves, qu'ils ne possèdent pas eux mêmes.

Quant à la pression médiatique, le moins que l'on puisse dire, c'est qu'elle est devenue aussi constante qu'intense. Elle contribue à convaincre de la nécessité d'utiliser les nouveaux médias (sons, images fixes ou animées) pour structurer la pensée des jeunes, au même titre que le média inventé par Gutenberg.

2. Contexte industriel:

2.1 Micro informatique:

Les fournisseurs de micro informatique estiment généralement que le marché hors entreprise (éducation, famille etc.) va connaître une croissance significative au cours des trois années à venir. Certains, se basant sur l'évolution constatée aux Etats Unis, affirment que la proportion des ventes (environ 70% dans les entreprises, 30% hors entreprises) devrait s'inverser. Le marché des entreprises devenant progressivement un marché de renouvellement, les constructeurs vont inévitablement accentuer leur pression en direction de l'important gisement de ventes que représentent l'éducation et la famille. Les accords avec la grande distribution ont déjà largement anticipé cette évolution. Dans ces conditions, la croissance du parc installé dans les établissements scolaires, universitaires, les centres de formation, et les familles, constitue d'ores et déjà un fait de société, même si elle n'atteint pas, en France, le rythme espéré par les industriels. La notion d'outils multimédia vient désormais compléter la micro informatique. Beaucoup plus adaptés aux besoins des acteurs de l'éducation et de la formation, ces outils offrent, dès aujourd'hui, des possibilités multiples. Leur connexion aux réseaux de télécommunication préfigure les bouleversements annoncés par le vocable "autoroutes de l'information ".

2.2 Réseaux:

En matière de réseaux, le RTC (Réseau Téléphonique Commuté) et le RNIS (Réseau Numérique à Intégration de Services) sont actuellement les seuls produits susceptibles d'être utilisés à grande échelle par les milieux de l'éducation et de la formation. Les écoles françaises ne sachant pas aujourd'hui utiliser le téléphone, attendre l'apparition des réseaux à grand débit ne fera qu'accroître le fossé déjà creusé entre les futurs usagers et leurs outils.

Le réseau universitaire et scientifique RENATER pourrait éventuellement jouer un rôle, mais il n'atteindra vraisemblablement jamais l'ensemble des établissements scolaires. Il risque ainsi de conforter l'inégalité d'accès aux nouveaux outils de la connaissance.

La mode qui préconise l'attente de la déréglementation des télécommunications en rêvant d'un monde meilleur pour l'usager, risque d'engendrer de cruelles déconvenues. Plus précisément, on voit mal ce que, par exemple, le service public de l'éducation pourrait attendre de British Telecom, d'ATT ou de Microsoft.

Il semble plus réaliste de coopérer étroitement avec l'opérateur national, favorisant ainsi la qualité de son offre vis à vis des jeunes (ses futurs clients) et sa qualification sur son marché intérieur.

2.3. Carte à puce:

Le système carte à puce, invention française, est maintenant passé dans les moeurs (carte téléphonique, carte bancaire, carte jeune, etc.). Comme il est peu probable qu'apparaissent un jour des autoroutes de l'information sans péage, son utilisation pour gérer l'accès à un réseau pédagogique répond aux impératifs suivants :

L'enjeu industriel de ce nouveau marché du système carte à puce, explique le partenariat engagé par GEMPLUS avec les projets français et européens de l'ADICE. Un partenariat avec CARTE JEUNE SA est actuellement envisagé pour la distribution des cartes.

Une carte limitée à l'autorisation d'accès est utilisée dès l'ouverture des sites. Les différentes fonctionnalités du système carte à puce seront progressivement élaborées au cours des expérimentations.

3. Contenus:

Un réseau à vocation pédagogique ne se développera que s'il rend un service de qualité à ses utilisateurs.

La définition des différents services sera précisée ou élaborée au cours des 3 années d'expérimentation.

Les conditions et hypothèses de départ sont les suivantes :

Le réseau sera animé par ses gestionnaires. Il accueillera des fournisseurs de services, quel que soit leur statut (société, association, enseignant, particulier, etc.). Une charte permettra de réguler les offres de services ou de produits, et de conserver le caractère dédié exclusivement à la pédagogie de ce réseau.

Les utilisateurs du réseau pourront, en respectant la charte, devenir eux même producteurs de services (cours, formation, informations, soutien scolaire, etc.). A terme, le code de la carte à puce orientera directement l'usager vers les services adaptés à son niveau.

En ce qui concerne les cours, la formation professionnelle et le soutien scolaire, le système TELESITE de tutorat à distance, présenté par MEDIACONCEPT (Groupe FRANCE TELECOM) constituera une des ossatures du réseau.

Ce système valorise et structure l'action pédagogique de l'enseignant ou du formateur. Il semble particulièrement adapté aux besoins et pourra évoluer en tenant compte des expérimentations.

Son utilisation pour le programme Employ nécessite sa traduction en anglais, allemand et espagnol. MEDIACONCEPT est partenaire des projets français et européens de l'ADICE.

4. Marché:

Deux logiques opposées peuvent être utilisées pour rendre compte du marché d'un futur réseau pédagogique.

La première consiste à constater les coûts de l'offre actuelle des fournisseurs (opérateurs, constructeurs, développeurs etc.), et à vérifier que les futurs usagers pourront s'y adapter.

Cette logique conduit immédiatement à l'impasse : n'importe quel enseignant, formateur, ou élu d'une collectivité locale est en mesure de calculer l'écart coût de l'offre-budget des utilisateurs en années-lumière...

La seconde, plus pragmatique, étudie d'abord les possibilités budgétaires des futurs clients, puis explore, en tenant compte de la rapidité de l'évolution des coûts, les réponses appropriées susceptibles de présenter un intérêt pour les fournisseurs.

Il semble plus conforme aux lois générales du marché concurrentiel que le fournisseur s'adapte à son client, plutôt que l'inverse.

4.1. Contraintes budgétaires:

4.1.1. Système éducatif:

Les lois de décentralisation ont confié la gestion du fonctionnement du système éducatif français aux Collectivités Locales : les écoles primaires sont gérées par les villes, les collèges par les départements et les lycées par les régions. Les universités sont autonomes.

Le projet de Réseau Pédagogique se conforme strictement à cette logique budgétaire.

Des discussions engagées avec les collectivités concernées par le démarrage du projet, notamment celles qui soutiennent le site-pilote situé à La Rochelle, il ressort que le coût d'une carte annuelle ne doit, pour l'instant, pas excéder 1000 Francs T.T.C. par classe et permettre de se connecter environ 50 heures.

Ces premières données sont confirmées par les enseignants consultés. Ils précisent souvent qu'en regard du faible montant des sommes allouées pour le fonctionnement pédagogique de leur classe, ils vivraient assez mal que des dépenses plus importantes soient consenties au profit d'un besoin qu'ils n'ont pas encore totalement identifié.

D'autres impératifs se dégagent des premiers contacts : Les exigences d'égalité d'accès aux connaissances, imposent au futur réseau un coût d'utilisation identique, quel que soit la situation géographique de l'établissement, sous peine d'être combattu par les enseignants (l'accès à Internet en tarif local, sur tout le territoire national est annoncé par FRANCE TELECOM pour le 15 mars 1996).

Le paiement de la communication téléphonique et du contenu par la carte à puce, financée par un budget pédagogique simplifie la gestion et présente l'avantage de rassurer les élus quant à la maîtrise des dépenses (impossibilité de dépassement de budget).

4.1.2. Familles:

A Noël dernier, malgré une légère baisse, Nintendo et Sega détenaient 40% du marché du jouet. Les premiers contacts pris avec les représentants de parent d'élèves indiquent que l'idée d'une carte à puce-cadeau, permettant d'accéder à un réseau pédagogique, rencontrera vraisemblablement un vif succès auprès des familles. La qualité du contenu sera, bien entendu déterminante, et l'on peut compter sur les enfants qui auront appris à se servir du réseau à l'école, pour exercer les pressions leur permettant de continuer à la maison.

Des cartes à différents prix, donc à différentes capacités doivent être prévues.

Il est probable que le paiement par carte rassure les parents, surtout ceux qui craignent les débordements rencontrés avec l'utilisation du Minitel.

4.1.3. Formation professionnelle:

Ce secteur brasse des fonds considérables (130 milliards de francs en 1993). Les gains de productivité engendrés progressivement par l'usage du réseau, notamment dans sa partie "cours sous tutorat" peuvent contribuer à rendre cet usage quasi obligatoire pour rester compétitif.

Les expérimentations prévues permettront de valider (ou d'infirmer) cette hypothèse. Elles permettront aussi d'évaluer plus précisément la consommation de cartes, la formation étant naturellement chronophage.

4.1.4. Formation continue:

Le réseau pédagogique pourrait constituer un excellent vecteur pour la formation continue puisqu'il sera accessible depuis le domicile de ses utilisateurs. Toutefois, ce marché est, en France, particulièrement flou. Il est susceptible de toucher tout le monde, donc actuellement personne. Les expérimentations ont prévu d'explorer ce domaine. Une étude générale pourrait être engagée à cette occasion basée notamment sur les sommes consacrées par les particuliers à leur formation continue. Au cas ou les données françaises s'avéreraient insuffisantes, les données anglaises publiées annuellement en kiosque (Floodlight) pourraient servir de premiers repères.

4.2. Economie générale:

Avec un peu d'humour, on pourrait considérer que l'économie générale du réseau repose sur la formule de Colbert : "il vaut mieux taxer les pauvres plutôt que les riches, non pas que l'on puisse attendre beaucoup de chacun d'entre eux, mais ils sont tellement plus nombreux"... On peut aussi rappeler de façon plus neutre que "les petits ruisseaux font les grandes rivières" :

Le réseau pédagogique vise une population à budget microscopique, mais cette population se compte en millions.

Les expérimentations prévues permettront de préciser la validité du concept, la répartition des recettes et les accords à prévoir entre les différents promoteurs du réseau.

4.3. Recettes:

La détermination des recettes, au cas ou la totalité des publics visés utilisent le réseau pédagogique, est relativement aisée. Par contre, aucune donnée ne permet actuellement de prévoir l'évolution des recettes à partir de la création du réseau. Les trois années d'expérimentation permettront d'y voir plus clair.

Pendant les trois années d'expérimentation, les flux resteront limités.

Huit sites expérimentaux sont actuellement prévus en France pour accueillir des classes de découverte du multimédia communicant.

Le site de Nîmes est déjà ouvert mais n'est pas encore communicant, celui de La Rochelle est en cours d'ouverture, les suivants sont prévus courant 96 (cf projet Multimédia Pédagogique Interactif).

En admettant que chaque centre initie 35 classes par an, la croissance annuelle du nombre de classes connectées s'établit à 280 classes. A ce rythme, il faut attendre environ 230 ans pour que toutes les classes primaires françaises aient bénéficié d'une initiation. Mais rappelons qu'il s'agit d'abord d'une phase expérimentale et qu'il est possible, de multiplier les sites d'initiation et le nombre de salles par site.

Le site rochelais accueillera une population élargie aux étudiants, ainsi qu'aux jeunes et adultes en formation (la connexion aux 60 centres de formation de la Ligue de l'Enseignement est envisagée, à terme).

4.4. Dépenses:

Les recettes, issues de la vente des cartes, doivent couvrir les dépenses suivantes:

5. Structure du réseau:

Il est encore trop tôt, à ce stade, pour définir avec exactitude les solutions les plus appropriées. Tout au plus peut on actuellement définir quelques orientations générales.

5.1. RTC:

Actuellement, seul le RTC permet de connecter, à un coût raisonnable, l'ensemble des établissements scolaires et l'ensemble des particuliers. Son débit, malgré des progrès sensibles, ne permet pas de tout faire. L'expérience du Minitel a prouvé qu'en matière de grand public, la rusticité est un atout majeur (les systèmes concurrents allemands ou canadiens, bien plus performants, ont échoué).

Le prix horaire des communications facturées par l'opérateur au gestionnaire du réseau doit tenir compte :

Les trois prochaines années, consacrées aux expérimentations, pourront être utilement mises à profit pour valider les hypothèses de départ et préciser l'architecture et la structure économique du futur réseau.

5.2. RNIS:

Le RNIS (en France NUMERIS) offre des capacités largement supérieures au RTC. Toutefois ses principes commerciaux freinent son extension à des usages pédagogiques.

Son coût de raccordement, d'abonnement et de communication, est plutôt prévu pour des sociétés générant de gros débits à partir de quelques sites, plutôt que pour des millions de petits usagers.

Les projets de l'ADICE prévoient, pour l'instant, d'utiliser ce réseau, en limitant l'expérimentation à la formation professionnelle et aux échanges européens (EMPLOY).

Les expérimentations conduiront, sans a priori, à s'interroger sur la place que pourrait occuper le RNIS dans le dispositif "réseau pédagogique". Il est évidemment souhaitable que les réflexions soient menées en étroite coopération avec l'opérateur national et ses homologues européens (l'ADICE participe aux travaux de FORUM ACE 2000).

5.3. RENATER:

Principalement utilisé comme vecteur d'Internet auprès des chercheurs et des universitaires, RENATER, ne répond que très partiellement aux impératifs du futur réseau pédagogique dans les domaines suivants :

Mais sa proximité des deux premiers sites expérimentaux de la Ligue (La Rochelle et Nîmes) permet d'envisager un raccordement pour préciser les points de convergence.

5.4. ATM:

La philosophie générale du réseau pédagogique consistant à valoriser et généraliser l'existant, l'ATM (réseau à gros débit) pourra faire l'objet d'expérimentations, dès que les actions en cours, concernant l'usage des réseaux actuels, seront suffisamment avancées.

6. Conditions de réussite:

Plusieurs conditions sont nécessaires à la réussite d'un projet de cette envergure.

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