Dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution, la loi n° 2004-1343 du 9 décembre 2004 de simplification du droit puis la loi n° 2006-1770 du 30 décembre 2006 pour le développement de la participation et de l'actionnariat salarié et portant diverses dispositions d'ordre économique et social ont autorisé le Gouvernement à procéder par ordonnance à l'adaptation des dispositions législatives du code du travail.
L'ordonnance n° 2007-329 du 12 mars 2007 relative au code du travail (partie législative) a été prise sur le fondement de ces dispositions d'habilitation.
Le Conseil constitutionnel a été saisi, par plus de soixante députés, d'un recours dirigé contre la loi qui a procédé à la ratification de cette ordonnance, adoptée le 19 décembre 2007.
Ce recours met en cause la ratification, par l'article 1er de la loi, des dispositions de l'ordonnance dans sa rédaction modifiée par les articles 2, 3, 4, 6 et 7 de la loi. Les griefs articulés par les auteurs du recours appellent, de la part du Gouvernement, les observations suivantes.
*
* *
I. - Sur l'exigence constitutionnelle tenant
à l'intelligibilité et à l'accessibilité de la loi
A. ― Les députés requérants font valoir que les dispositions adoptées par ordonnance et ratifiées par l'effet de la loi déférée contreviendraient à l'objectif constitutionnel d'intelligibilité et d'accessibilité de la loi.
A cet égard, ils reprochent en particulier à l'ordonnance ratifiée d'avoir « éclaté » le code du travail en transférant certaines de ses dispositions dans d'autres codes, ce qui serait source d'une complexité accrue de la législation, d'avoir retenu un plan inadapté et d'avoir procédé à des scissions d'articles qui rendraient l'utilisation du code moins facile.
B. ― Une telle argumentation ne peut être suivie.
1. A titre liminaire et de façon générale, le Gouvernement tient à souligner que la nouvelle codification de la législation du travail résultant de l'ordonnance ratifiée par la loi déférée contribue nettement à améliorer l'intelligibilité et l'accessibilité de la loi.
Au fil du temps, en effet, le code du travail issu de la loi du 2 janvier 1973 avait connu de nombreuses modifications qui avaient, peu à peu, affecté sa lisibilité et son organisation et fait apparaître des imperfections. L'accumulation des textes relatifs à la législation du travail, leur fréquente modification, l'allongement progressif de certains articles, le manque d'harmonie de l'organisation générale du code ou encore l'insuffisante homogénéité de certaines de ses parties imposaient, plus de trente ans après son édiction, qu'il soit procédé à une profonde révision de ce code datant de 1973.
Dans cette opération de recodification, pour laquelle il a été habilité par le Parlement, le Gouvernement a eu pour objectif général de réduire la complexité du code et d'améliorer sa cohérence. Il considère que cet objectif est atteint : la partie législative du nouveau code résultant de l'ordonnance ratifiée par la loi déférée lui paraît assurément plus claire et mieux organisée que la partie législative du code actuel.
Ainsi, le Gouvernement estime que loin de contrevenir aux exigences constitutionnelles tenant à l'intelligibilité et à l'accessibilité de la loi, la nouvelle codification à laquelle a procédé l'ordonnance ratifiée par la loi déférée tend, au contraire, à les mettre en oeuvre. Au-delà des changements d'habitude qu'implique nécessairement le passage d'un corpus de textes à un autre, il considère que la lecture et la compréhension du nouveau code se révéleront plus aisées pour ses principaux utilisateurs que sont les salariés, les employeurs, les représentants du personnel, les responsables d'organisations syndicales et professionnelles ou les agents de l'administration.
2. Le Gouvernement estime, en outre, que les critiques spécifiques adressées, sur des points particuliers, par les députés requérants au texte de l'ordonnance ratifiée par la loi déférée ne sont pas fondées.
Il en va ainsi de la contestation du périmètre du nouveau code, critiquant l'« éclatement » du code du travail auquel procéderait l'ordonnance ratifiée et qui porterait atteinte aux objectifs d'intelligibilité et d'accessibilité de la loi.
On doit observer, à cet égard et en tout état de cause, que les requérants ne peuvent utilement invoquer, à l'appui de leur recours dirigé contre la loi qui procède à la ratification de l'ordonnance, un grief tiré de ce que l'ordonnance ratifiée aurait outrepassé les limites de l'habilitation qui avait été antérieurement donnée au Gouvernement par le Parlement, ainsi que le Conseil constitutionnel l'a explicitement jugé (décision n° 2004-506 DC du 2 décembre 2004). Apparaît ainsi tout à fait vaine la discussion nouée par le recours sur le fait que la loi d'habilitation n'aurait pas autorisé le Gouvernement agissant par voie d'ordonnance à procéder à des transferts vers d'autres codes.
Par ailleurs, le Gouvernement entend souligner que le transfert de certains articles figurant dans le code actuel vers d'autres codes, loin d'être une source de complexité accrue a, tout au contraire, pour objet et pour effet d'améliorer l'accessibilité et l'intelligibilité de la législation relative au travail.
Le périmètre du nouveau code du travail a été déterminé en fonction des principes suivants : l'ensemble des dispositions générales applicables aux salariés figurent au code du travail, alors que les dispositions spéciales relatives, par exemple, à des secteurs particuliers ou à certaines catégories de professions, sont réinsérées dans les codes régissant ces secteurs ou ces catégories lorsqu'ils existent.
Le code du travail a ainsi été recentré sur son objet principal qui est de rassembler dans un document unique les règles générales applicables à tous les salariés. Les dispositions de cette nature qui figuraient déjà dans le code actuel ont naturellement été maintenues dans le nouveau code. Y ont, en outre, été intégrées certaines dispositions qui n'étaient pas codifiées, telles que celles figurant dans la loi n° 78-49 du 19 janvier 1978 relative à la mensualisation et à la procédure conventionnelle qui régissent l'indemnisation complémentaire des salariés en cas de maladie, l'indemnisation des jours fériés, l'indemnité de licenciement. Des dispositions législatives applicables à tous les salariés, figurant aujourd'hui dans d'autres codes que le code du travail, ont, enfin, été intégrées au nouveau code : ainsi, par exemple, les dispositions des articles L. 133-5-3 et L. 133-5-5 du code de la sécurité sociale ont été en partie reprises dans la partie législative du nouveau code du travail pour regrouper dans ce dernier l'ensemble des règles relatives aux titres de travail.
Les dispositions particulières à certains secteurs ou professions ont, en revanche, été transférées vers d'autres codes lorsqu'ils existent ou ont été maintenues en vigueur par l'article 13 de l'ordonnance ratifiée par la loi déférée dans l'attente de leur intégration dans un code en cours d'élaboration. Sont, par exemple, dans ces cas les dispositions relatives aux assistants maternels et familiaux, réunies dans le code de l'action sociale et des familles, ou des dispositions relatives au secteur agricole (contrats de vendange, formation professionnelle continue dans les entreprises agricoles) qui ont été insérées au code rural. Parmi les dispositions appelées à figurer dans un code en cours d'élaboration, on peut mentionner, à titre d'illustration, celles qui sont relatives à la fonction publique.
Le mode de répartition qui a été adopté traduit une insertion plus pertinente des dispositions en cause dans l'ensemble du corpus normatif. Il assure, contrairement à ce qui est soutenu, une meilleure intelligibilité et accessibilité de la législation relative au travail.
3. Les critiques adressées par les auteurs du recours au plan retenu pour la nouvelle partie législative du code du travail ainsi qu'aux scissions d'articles auxquelles il a été procédé ne sont pas davantage fondées.
En premier lieu, l'organisation générale du code du travail en huit parties et non plus en neuf livres contribue à améliorer l'accessibilité et l'intelligibilité de la législation. On doit souligner, à cet égard, que l'organisation de l'actuel code du travail soulève plusieurs difficultés : sa structure rend impossible la création de nouveaux chapitres, sa numérotation est peu cohérente et certains de ses articles sont trop longs et complexes.
Une nouvelle numérotation à quatre chiffres a été retenue, comme pour d'autres codes dont le volume est important, conformément aux préconisations de la Commission supérieure de codification qui estime que lorsqu'un code contient au moins deux mille articles législatifs, il convient d'adopter une structure en parties, livres, titres et chapitres. Le nombre de subdivisions a mécaniquement augmenté, ce qui permet d'améliorer la recherche et la lecture de dispositions et de mieux guider l'utilisateur vers les informations qui lui sont utiles. Pour l'avenir, cette nouvelle organisation du code laisse ouverte la possibilité de créer une neuvième partie, ainsi que des livres supplémentaires au sein des parties existantes ; elle rend plus aisée l'insertion de nouvelles dispositions.
En deuxième lieu, les scissions d'articles ont été opérées pour clarifier la rédaction de nombreux articles du code actuel, afin de mieux distinguer, dans leur contenu, les règles de fond des règles de forme ou les principes de leurs dérogations.
Par exemple, l'article L. 227-1 du code du travail actuel, relatif au compte-épargne temps, comporte dix-sept alinéas et vingt-huit renvois. La lecture et la compréhension des règles qu'il énonce seront plus aisées dans le nouveau code, où la division en plusieurs articles a permis, par des énoncés brefs et simples, de mieux distinguer l'objet du compte-épargne temps, ses conditions de mise en oeuvre, ses règles d'alimentation, les règles d'utilisation des droits acquis, et les conditions de liquidation et de gestion (voir les articles L. 3151-1 et suivants du nouveau code).
S'agissant de l'article L. 122-14-4 du code actuel, invoqué par les députés requérants, le Gouvernement estime infondés les reproches qui sont adressés à sa recodification. Cet article a été scindé, pour le rendre plus compréhensible, en autant d'articles qu'il comporte de règles ; ces divisions ont permis de mieux répartir ses dispositions au sein du chapitre relatif aux contestations et sanctions des irrégularités du licenciement en distinguant les dispositions communes (art. L. 1235-2 à L. 1235-4 du nouveau code) de celles qui sont spécifiques au licenciement économique (art. L. 1235-11 à L. 1235-13).
En troisième lieu, on ne peut considérer que modifier l'emplacement de certaines dispositions à l'intérieur du code réduirait en soi l'accessibilité ou l'intelligibilité de la loi relative au travail. Les réaménagements auxquels il a été procédé ont contribué, au contraire, à la cohérence du corpus normatif. Ainsi, les dispositions relatives au salaire ne pouvaient logiquement être rattachées à la seule nouvelle partie I, consacrée aux relations individuelles de travail, ni à la seule nouvelle partie II, consacrée aux relations collectives de travail ; de caractère hybride, en ce qu'elles s'appliquent aux relations individuelles de travail tout en étant élaborées de manière collective, elles ont été regroupées au sein de la partie III avec d'autres dispositifs contractualisés comme ceux relatifs à la durée du travail, à l'intéressement, à la participation et à l'épargne salariale. On ne saurait non plus sérieusement reprocher à l'ordonnance d'avoir regroupé dans un même titre ― le titre III du livre II de la première partie du nouveau code ― l'ensemble des dispositions relatives à la rupture du contrat de travail à durée indéterminée : la procédure du licenciement pour motif économique y est décrite et la nouvelle structure présente les dispositions communes à tous les cas, avant de distinguer les différentes procédures selon les hypothèses considérées. Cette nouvelle organisation n'affecte ni la logique ni le contenu des dispositions en cause, qui continuent d'avoir pour objet la sauvegarde des emplois.
En quatrième et dernier lieu, si les auteurs du recours dénoncent les défauts d'une table de correspondance entre anciens et nouveaux articles publiée au Journal officiel, on relèvera qu'une telle circonstance est, en tout état de cause, sans incidence sur la conformité à la Constitution de la loi déférée.
Dans ces conditions, le Gouvernement considère que la critique tirée de l'objectif à valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi ne pourra qu'être écartée par le Conseil constitutionnel.
*
* *
II. - Sur le respect des articles 34 et 37 de la Constitution
A. ― Les députés auteurs du recours soutiennent que l'ordonnance ratifiée par la loi déférée procéderait à des déclassements de dispositions législatives au niveau réglementaire qui méconnaîtraient les articles 34 et 37 de la Constitution. Ils estiment, en outre, que l'ordonnance aurait codifié des règles issues de la jurisprudence et aurait modifié la portée de règles de valeur législative.
B. ― Les critiques formulées par le recours sont dépourvues de fondement.
1. En ce qui concerne la méconnaissance des articles 34 et 37 de la Constitution, la loi déférée ne serait susceptible d'encourir un tel reproche que si le législateur avait méconnu l'étendue de sa propre compétence en procédant au déclassement de dispositions qui, en vertu de l'article 34 de la Constitution, relèvent du domaine de la loi.
Pour le reste, l'article 57 de la loi n° 2006-1770 du 30 décembre 2006 habilitait le Gouvernement à procéder aux modifications nécessaires « pour assurer le respect de la hiérarchie des normes ». Les travaux de codification impliquaient ainsi nécessairement d'examiner le partage entre le domaine de la loi et le domaine du règlement ; c'est sur ce fondement que le Gouvernement, agissant par voie d'ordonnance, a procédé à cinq cents déclassements d'articles, alinéas, phrases, portions de phrases ou mots. Soixante et un articles ont été déclassés intégralement. Ces dispositions déclassées figureront dans la partie réglementaire du nouveau code du travail, sous réserve du transfert de certains d'entre eux vers la partie réglementaire d'un autre code qui s'avérerait plus pertinent, selon le même mode de répartition que celui, évoqué plus haut, retenu s'agissant des dispositions législatives.
Les députés requérants concentrent leur critique fondée sur les articles 34 et 37 de la Constitution sur trois aspects de l'ordonnance ratifiée par la loi déférée.
Or ces trois griefs manquent en fait.
Le recours vise, en premier lieu, le remplacement des mots « inspecteur du travail » qui figureraient à l'article L. 423-3 du code actuel par les mots « autorité administrative ».
Or, à cet égard et en tout état de cause, le Gouvernement ne peut que souligner que, contrairement à ce qui est soutenu, il n'a été procédé à aucun déclassement lors des travaux de codification s'agissant des dispositions de l'article L. 423-3. La critique formulée sur ce point manque ainsi en fait.
En effet, le principe de l'envoi du protocole électoral à l'inspecteur du travail demeure expressément prévu à l'article L. 2314-10 du nouveau code. Son article L. 2314-11 constitue la pure reprise des deuxième et troisième alinéas de l'article L. 423-3. Or, le troisième alinéa de ce dernier article mentionne déjà l'« autorité administrative » et la substitution de ces mots aux mots « inspecteur du travail » avait été, en réalité, opérée par l'article 2 de l'ordonnance n° 2005-1478 du 1er décembre 2005. La codification effectuée par l'ordonnance ratifiée par la loi déférée n'a aucunement affecté la rédaction des dispositions en cause.
Le Gouvernement observe, au demeurant, que, s'agissant de l'ensemble des dispositions qui régissent les pouvoirs propres des inspecteurs du travail, l'ordonnance ratifiée par la loi déférée a maintenu la désignation expresse de l'inspecteur du travail. La mention « autorité administrative » vise, dans le nouveau code, le ministre du travail (voir par exemple l'article L. 5123-1 sur les actions de reclassement professionnel dans certains bassins d'emplois), le préfet (voir par exemple l'article L. 7422-6 sur la détermination des salaires des travailleurs à domicile), le directeur régional ou départemental du travail de l'emploi ou de la formation professionnelle (voir par exemple l'article L. 1233-46 sur la notification du projet de licenciement pour motif économique) dans l'exercice d'attributions administratives qui, en tout état de cause, sont sans lien direct avec les pouvoirs propres et les garanties des inspecteurs du travail. De telles dispositions ont, en effet, trait à la répartition d'attributions entre autorités de l'Etat relevant, pour leur exercice, de la compétence du pouvoir exécutif ; elles ressortissent, en conséquence, au domaine réglementaire (décision n° 93-174 L du 6 avril 1993).
Les auteurs du recours critiquent, en deuxième lieu, l'atteinte qui aurait été portée à l'indépendance de l'inspection du travail, garantie par la convention n° 81 de l'organisation internationale du travail, et qui procéderait d'un autre déclassement. Ce grief manque également en fait, dès lors qu'aucune disposition législative du code du travail actuel ne contient une telle règle.
S'agissant, en troisième et dernier lieu, de la désignation expresse des conseils de prud'hommes, elle n'a disparu d'aucune des dispositions qui fixent l'étendue des compétences de cet ordre de juridiction au sens de l'article 34 de la Constitution (voir décision n° 91-166 L du 13 juin 1991). Le renvoi au « juge judiciaire » et non plus à la juridiction précisément identifiée a seulement été décidé, au cours des travaux de codification, lorsqu'il s'agissait, pour le pouvoir réglementaire, de déterminer, au sein de la juridiction judiciaire de droit commun, si le tribunal d'instance ou le tribunal de grande instance est compétent. Les attributions des conseils de prud'hommes, ainsi expressément désignés dans la partie législative du code du travail, demeurent énumérés, dans le nouveau code, aux articles L. 1411-1 à L. 1411-6, L. 1421-1 et L. 1422-1 à L. 1422-3.
2. Le Gouvernement entend souligner, par ailleurs, qu'aucune règle ou solution de portée jurisprudentielle n'a été insérée dans le nouveau code du travail à l'occasion des opérations de codification.
En particulier, contrairement à ce qui est soutenu, l'exigence d'une cause réelle et sérieuse pour procéder à un licenciement pour motif économique résulte des dispositions des actuels articles L. 122-14-3 et L. 122-14-4 du code du travail qui prévoient la sanction du licenciement décidé en l'absence de cause réelle et sérieuse, que ce soit pour un motif personnel ou pour un motif économique. Sans doute la condition tenant à la cause réelle et sérieuse n'apparaît-elle que dans les dispositions relatives à la sanction des licenciements irréguliers dans l'actuel code du travail alors que le nouveau code fait figurer cette règle de fond au début des dispositions relatives au licenciement. Mais ce réaménagement ne traduit pas de modification de fond ni de codification d'une solution jurisprudentielle ; il améliore, en revanche, l'intelligibilité et l'accessibilité de la norme.
3. Enfin, il n'a été procédé à aucune « transformation de la portée de règles législatives », contrairement à ce que tentent de laisser accroire les députés saisissants.
Au demeurant, comme il a été dit précédemment, à supposer que l'ordonnance ait modifié la portée de dispositions législatives contrairement aux prévisions de l'habilitation, la constitutionnalité de la loi de ratification de l'ordonnance ne pourrait être utilement critiquée pour ce motif. Aucun principe constitutionnel n'impose la codification à droit constant.
En tout état de cause, on ne saurait, en premier lieu, reprocher à l'ordonnance ratifiée d'avoir généralisé l'emploi de l'indicatif présent dans les cas où le code du travail prévoit des dispositions de portée impérative. L'indicatif présent a valeur impérative et il n'y a pas lieu, pour qualifier ou renforcer le caractère impératif d'une obligation, de recourir au verbe « devoir » ou à l'adverbe « impérativement ». La conjugaison du verbe au présent de l'indicatif suffit. Par suite, la portée obligatoire des dispositions qui ont ainsi été modifiées n'a aucunement été affectée.
En deuxième lieu, la portée exacte des « ajouts de normes » dénoncées par les députés requérants doit être rappelée.
La nouveauté de certaines dispositions particulières s'explique, d'une part, par un souci d'accessibilité et d'intelligibilité de la norme. Ainsi, des articles ont été créés pour faciliter l'usage du code par ses utilisateurs. Les nouveaux articles L. 1221-14 et L. 3243-6, par exemple, ont une vertu pédagogique en renvoyant à l'article L. 8113-6 qui détermine les conditions dans lesquelles les entreprises peuvent déroger à la tenue de certains registres et à la conservation des bulletins de paie. Ces dispositions n'ajoutent pas au droit existant mais facilitent la lecture du code et contribuent à mieux orienter son utilisateur. Dans d'autres hypothèses, il s'est agi de préciser certaines définitions pour mieux décrire ce dont il allait être question. C'est le cas de l'article L. 3132-12 qui définit la relation triangulaire entre l'employeur, le salarié et l'utilisateur en cas de recours au travail temporaire : sans affecter le droit positif, ces dispositions clarifient les notions de contrat de mise à disposition et de contrat de mission.
En ce qui concerne, d'autre part, le cas de l'article L. 3132-12 relatif aux dérogations permanentes de droit au repos dominical, il faut préciser qu'il est issu de la fusion des articles L. 221-9 (alinéas 1 et 16) et L. 221-10 (alinéas 1 et 5) actuels. Les alinéas 2 à 15 de l'article L. 221-9 et 2 à 4 de l'article L. 221-10 ont été déclassés. Le code du travail actuel énumère en effet indifféremment dans ses parties législative et réglementaire la liste des catégories d'établissements autorisés à accorder le repos par roulement (voir les articles L. 221-9 et L. 221-10 d'un côté et les articles R. 221-4 et R. 221-4-1 de l'autre). Il a été décidé de déclasser la totalité de la liste de ces catégories et de ne maintenir dans la partie législative que les conditions dans lesquelles un décret fixe cette liste. Dans ces conditions, l'introduction critiquée par les auteurs de la saisine de la notion de « besoins du public » répond seulement à la nécessité d'encadrer l'intervention du pouvoir réglementaire sans ajouter au droit existant.
En troisième lieu, les abrogations signalées par le recours entrent dans les limites et conditions fixées par les dispositions d'habilitation. En particulier, s'agissant du contrôle par l'inspecteur du travail de l'égalité salariale entre les hommes et les femmes (actuel article L. 140-6 du code du travail) et des infractions à la rémunération minimale (actuel article L. 141-15), ces dispositions ont été abrogées, lors des travaux de codification, en raison de leur redondance avec celles figurant à l'article L. 611-1 (recodifiées aux articles L. 8112-1 à L. 8112-4) qui fixent la compétence générale de l'inspection du travail en matière de contrôle de l'application de la législation du travail. Le législateur a, en tout état de cause, estimé souhaitable de reprendre les dispositions de l'article L. 140-6 actuel en créant, par le 49° de l'article 3 de la loi déférée, un nouvel article L. 3221-9 dans le nouveau code.
En quatrième et dernier lieu, les auteurs du recours ne sont pas fondés à soutenir, s'agissant des conventions de forfait, que le nouveau code s'abstiendrait de faire référence, s'agissant des salariés non cadres, aux clauses obligatoires prévues pour les conventions de forfait applicables aux cadres. Une section spécifique est, en effet, consacrée aux conventions de forfait au sein du chapitre relatif aux modes de décompte de la durée du travail. Cette section distingue nettement, selon deux sous-sections, les forfaits applicables aux cadres et ceux applicables aux salariés non cadres. Les conventions de forfait prévues à l'article L. 212-15-3, à l'origine réservées aux cadres, sont désormais étendues à d'autres catégories de salariés non cadres par les lois n° 2003-47 du 17 janvier 2003 et n° 2005-882 du 2 août 2005.
Au demeurant, l'article L. 3121-51 du nouveau code, dans sa rédaction modifiée par le 38° de l'article 3 de la loi déférée, prévoit que les conventions de forfait en heure sur l'année applicables aux salariés itinérants non cadres dont la durée du travail ne peut être prédéterminée ou qui disposent d'une réelle autonomie dans l'organisation de leur emploi du temps pour l'exercice des responsabilités qui leur sont confiées sont prévus par des conventions qui comportent l'ensemble des précisions prévues au deuxième alinéa de l'article L. 3121-40 et à l'article L. 3121-42 applicables aux cadres. Dans ces conditions, le Gouvernement considère que le texte critiqué n'encourt aucune des critiques qui lui sont adressées par le recours au titre de la compétence du législateur.
Pour ces raisons, le Gouvernement est d'avis qu'aucun des griefs articulés par les députés requérants n'est de nature à conduire à la censure de la loi ratifiant l'ordonnance n° 2007-329 du 12 mars 2007 relative au code du travail (partie législative). Aussi estime-t-il que le Conseil constitutionnel devra rejeter le recours dont il est saisi.