Le Premier ministre, Sur le rapport du ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, du ministre de l'économie, du ministre du budget et du ministre délégué à l'aménagement du territoire et aux collectivités locales, Vu le traité du 25 mars 1957 instituant la Communauté européenne; Vu le décret no 92-1129 du 2 octobre 1992 portant approbation des nomenclatures d'activités et de produits; Vu l'avis de la Commission de la Communauté européenne en date du 27 septembre 1994; Le Conseil d'Etat (section des travaux publics) entendu, Décrète:
Art. 1er. - Il est institué une prime d'aménagement du territoire financée par l'Etat et destinée à la promotion d'activités dans certaines zones du territoire national, énumérées aux annexes I et II du présent décret. Cette prime peut être attribuée, dans les conditions définies aux articles suivants, à certaines entreprises qui créent ou maintiennent des emplois dans ces zones.
Art. 2. - Peuvent bénéficier de la prime d'aménagement du territoire dans les zones énumérées à l'annexe I les entreprises dont l'activité consiste dans la fabrication de biens ou de produits inclus dans la section D de la Nomenclature d'activités et de produits approuvée par le décret du 2 octobre 1992 susvisé pour les programmes directement liés au processus de transformation ou de conditionnement d'un produit naturel ou semi-fini, à l'exclusion des activités de stockage ou de distribution non géographiquement intégrées à l'établissement de production. Peuvent bénéficier de la prime d'aménagement du territoire dans les zones énumérées à l'annexe II du présent décret les entreprises qui exercent des activités tertiaires, notamment des activités de recherche ou de service, de téléservice, de direction, de gestion, d'ingénierie, de conception, d'étude, et des activités de service relatives à l'informatique. Les dispositions des deux premiers alinéas du présent article sont également applicables aux entreprises qui se créent pour exercer les activités qui y sont mentionnées ou qui décident de développer de telles activités. Peuvent également bénéficier de la prime les sociétés civiles ou commerciales qui ont pour objet la construction de bâtiments à usage professionnel ou l'achat de matériels neufs destinés à être utilisés en crédit-bail ou en location-vente par les entreprises dont les programmes sont éligibles à la prime instituée par le présent décret. Ces sociétés ne peuvent prétendre à l'attribution de primes que si elles justifient avoir consenti aux entreprises utilisatrices des bâtiments ou matériels compris dans les programmes primés des avantages correspondant à ceux qu'elles tirent de ce concours financier. Le montant des primes attribuées à ces sociétés est fixé proportionnellement aux parts que celles-ci prennent dans les programmes d'investissements.
Art. 3. - Les entreprises mentionnées à l'article 2 sont susceptibles de bénéficier de la prime: 1o Pour des programmes de création ou d'extension d'activités; 2o Pour des programmes de délocalisation d'activités issues des zones définies à l'annexe III du présent décret. Pour en bénéficier, ces programmes doivent conduire à la création d'au moins vingt emplois permanents. Toutefois, dans le cas d'activités de service hautement qualifiées ou d'activités de recherche, le minimum d'emplois requis est de dix. Lorsqu'il s'agit d'une extension d'activités, les créations d'emplois doivent en outre correspondre à une augmentation de l'effectif de l'établissement concerné par l'extension d'au moins 50 p. 100, sauf si plus de cinquante emplois supplémentaires sont créés ou si l'opération concerne une activité nouvelle pour l'établissement. Les programmes de création ou d'extension d'activités doivent s'accompagner d'investissements d'un montant de plus de 20 millions de francs hors taxes.
Art. 4. - A titre exceptionnel, les opérations de conversion interne ou de reprise d'établissements ou d'entreprises en difficulté peuvent bénéficier de la prime d'aménagement du territoire. S'il s'agit d'une conversion interne, l'opération doit correspondre à une modification importante de la nature des productions ou des activités imposant un effort particulier d'investissement et de formation des personnels. L'effectif de l'établissement ou de l'entreprise concernée doit être au moins maintenu. S'il s'agit de la reprise d'un établissement ou d'une entreprise en difficulté, le bénéfice de la prime ne peut être accordé qu'après examen du plan de reprise et de redressement et du plan de financement correspondant par le comité interministériel de restructuration industrielle. Les reprises effectuées par des personnes physiques ou morales contrôlant directement ou indirectement l'établissement ou l'entreprise en difficulté ne sont pas éligibles. Dans les deux cas, les programmes doivent concerner au moins vingt emplois et correspondre à des investissements d'un montant de plus de 20 millions de francs hors taxes.
Art. 5. - A titre dérogatoire, la prime d'aménagement du territoire peut être attribuée pour des opérations qui, tout en respectant les autres conditions prévues au présent décret, sont réalisées en dehors des zones figurant aux annexes I et II et contribuent à la solution de problèmes locaux d'emploi d'une particulière gravité.
Art. 6. - Le montant de la prime accordée par emploi créé ou maintenu peut être modulé, pour tenir compte de l'importance des investissements réalisés, de la nature ou de la localisation du projet, dans la limite, d'une part, de plafonds par emploi, d'autre part, d'un taux maximal par rapport aux investissements réalisés fixés aux annexes I et II au présent décret. Il peut être dérogé à ces plafonds pour des opérations exceptionnelles soit par leur coût, soit par l'intérêt économique qu'elles présentent, effectuées notamment dans les régions où existent des problèmes particulièrement graves d'emploi ou de déclin démographique. Toutefois, le montant des primes attribuées aux entreprises exerçant une activité tertiaire ne peut dépasser le double du total des capitaux propres et des comptes courants d'associés de société.
Art. 7. - La création ou le maintien d'un emploi doit résulter du recrutement ou du maintien en activité à temps plein ou partiel d'une personne liée à l'entreprise par un contrat de travail à durée indéterminée. Le nombre des emplois donnant lieu à prime est calculé en tenant compte de l'évolution de l'ensemble de l'effectif de l'entreprise situé en dehors des zones définies à l'annexe III du présent décret. En ce qui concerne les opérations de délocalisation mentionnées à l'article 3, les créations d'emplois prennent en compte les emplois transférés. Les créations d'emplois et les investissements réalisés avant le dépôt du dossier de demande de prime ne peuvent être pris en compte.
Art. 8. - Les investissements à prendre en compte s'entendent hors taxes. Leur montant comprend le prix de revient des immobilisations corporelles, y compris les frais accessoires et de premier établissement, à l'exception des frais de publicité. Ces investissements doivent être liés à l'activité de l'entreprise bénéficiaire et correspondre au programme primé. Ils doivent être exécutés et inscrits dans les écritures de l'entreprise bénéficiaire pendant la période de réalisation de ce programme. Les participations au capital d'autres entreprises, les acquisitions de fonds de commerce et de brevets sont exclues de l'assiette des investissements. Le produit de la vente d'actifs situés en dehors de la zone définie à l'annexe III du présent décret est déduit de cette assiette lorsque ces actifs sont remplacés en tout ou partie par les investissements du programme primé.
Art. 9. - En cas de conversion interne, la prime est calculée en fonction des emplois concernés par le programme de conversion. Les investissements pris en compte sont les seuls investissements nécessaires à cette opération.
Art. 10. - S'il s'agit d'une reprise effectuée soit par rachat d'actions en vue de la réalisation d'un plan de continuation, dans le cas où l'entreprise est en état de redressement judiciaire, soit par rachat d'actifs après redressement judiciaire ou liquidation judiciaire, le nombre des emplois pouvant donner lieu à la prime est calculé sur la base des effectifs de l'entreprise au moment de la reprise et de leur évolution dans le cadre d'un programme de trois ans. Seuls les investissements nouveaux, à l'exclusion des actifs appartenant à l'entreprise ou à des sociétés liées à celle-ci, sont pris en compte.
Art. 11. - Les modalités de constitution et de dépôt des dossiers de demande de prime et les modalités de notification des décisions sont fixées par arrêté du ministre chargé de l'aménagement du territoire.
Art. 12. - La prime d'aménagement du territoire est attribuée par décision du ministre chargé de l'aménagement du territoire, après avis d'un comité interministériel dont la composition et les règles de fonctionnement sont fixées par arrêté du Premier ministre.
Art. 13. - La prime est accordée sous réserve que l'entreprise intéressée soit assurée des autres concours financiers nécessaires à la réalisation de son programme. Le versement de la prime est subordonné à la régularité de la situation de l'entreprise au regard de ses obligations fiscales et sociales.
Art. 14. - Le premier versement de la prime est égal au tiers de son montant. Le solde est ensuite versé en une ou plusieurs fois; chaque versement complémentaire est calculé en fonction des emplois créés et des investissements réalisés au moment du versement, déduction faite des précédents versements.
Art. 15. - La création des emplois et la réalisation des investissements retenus pour le calcul de la prime doivent intervenir dans un délai de trois ans. Au terme de ce délai et en cas de retards imprévisibles et indépendants de la volonté de l'entreprise, celle-ci peut éventuellement bénéficier d'une prorogation de deux ans au maximum pour réaliser ses engagements. Les emplois primés doivent être maintenus pendant une période de deux années suivant la réalisation du programme.
Art. 16. - Le contrôle de l'exécution des conditions prévues pour l'octroi de la prime est exercé dans les cinq ans suivant le début du programme primé par les services de l'Etat. L'inobservation de ces conditions entraîne l'annulation ou la réduction de la prime.
Art. 17. - Le présent décret ne peut être modifié que par décret en Conseil d'Etat. Toutefois, les plafonds et les taux fixés aux annexes I et II, en application de l'article 6, peuvent être modifiés par décret.
Art. 18. - Les dossiers pour lesquels une demande de prime a été enregistrée avant l'entrée en vigueur du présent décret seront instruits sur le fondement des dispositions applicables à la date de leur dépôt.
Art. 19. - Sous réserve des dispositions de l'article 18 du présent décret, le décret no 82-379 du 6 mai 1982 relatif à la prime d'aménagement du territoire, modifié par le décret no 87-580 du 22 juillet 1987, le décret no 91-1018 du 1er octobre 1991 et le décret no 93-626 du 26 mars 1993 et complété par le décret no 82-754 du 31 août 1982, sont abrogés. Le décret no 87-747 du 9 septembre 1987 modifiant les conditions de versement et de liquidation de la prime d'aménagement du territoire prévue par le décret no 82-754 du 31 août 1982 est également abrogé.
Art. 20. - Le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, le ministre de l'économie, le ministre de l'industrie, des postes et télécommunications et du commerce extérieur, le ministre des entreprises et du développement économique, chargé des petites et moyennes entreprises et du commerce et de l'artisanat, le ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle, le ministre du budget, le ministre de l'agriculture et de la pêche et le ministre délégué à l'aménagement du territoire et aux collectivités locales sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française.
Fait à Paris, le 6 février 1995.