(Last update : Wed, 8 Sep 1999)
[ Internet et PME ]
6.1.2.4
Un domaine où la croissance de l'entreprise et la maîtrise d'un marché l'emporte sur une vision patrimoniale de contrôle et de transmission familiale
Le
caractère extrêmement évolutif tant des technologies que
des marchés condamne toute approche statique ou malthusienne : elle
implique souvent que le chef d'entreprise sacrifie son pouvoir en acceptant des
prises de contrôle majoritaires pour ne pas brider l'expansion de son
affaire (ce qui la conduirait dans bien des cas à la disparition) : Le
nombre de sociétés rachetées par d'autres entreprises est
8 fois plus élevé que le nombre d'introductions en bourse
"Ce qui est important ce n'est pas de faire des bénéfices,
bien au contraire : ce qui est important c'est de gagner de l'argent. Si
l'entreprise fait rapidement des bénéfices, c'est soit que
l'idée n'était pas très intéressante, soit qu'elle
a été gâchée en n'investissant pas massivement
dès le départ pour devenir la référence mondiale
dans le domaine" Eric Benhamou CEO de 3Com
un éditeur américain renchérit dans
Editor&Publishers: "si quelqu'un gagne de l'argent aujourd'hui
sur internet...c'est qu'il n'investit pas assez"
Dans les NTIC, le créateur se focalisera davantage sur la
création de plus-values, gage de croissance forte à terme, que
sur la réalisation de bénéfices rapides :
"ses deux repères sont le burn et le stock" : le
"burn est la quantité d'argent "brûlé", c à d
dépensé chaque mois et le "stock" est la valeur boursière
"le plus grand risque d'échec est la panne de trésorerie au
moment fatidique" Serge Cuesta Pdg de Synchronix
http://www.synchronix.com dans
l'Essonne, (créateur du logiciel Bootsweb qui assure diviser par
2 ou par 3 les temps de connection au web), et Pierre Haren
créateur d'Ilog, de renchérir "le Pdg d'un grand groupe, membre
de notre conseil avait conduit au départ le groupe à stagner dans
son développement avec le principe "on ne peut dépenser plus
d'argent qu'on en gagne". Nous n'avons compris que plus tard que la
véritable contrainte, mais celle-là est mortelle, est de
ne pas en dépenser plus que ce qu'elle en a et que la différence
ce sont les fonds propres..."
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On pourrait à la limite, quelque peu paradoxalement, juger de la
qualité d'une start up au nombre de dizaines de millions de dollars
qu'elle perd à sa troisième année !!
En effet, comme nous l'avons vu nous nous trouvons dans une économie de
standard où les coûts marginaux de production sont faibles : il
importe donc de prendre le plus rapidement possible 30 à 40 % du
marché mondial pour devenir "la référence du
secteur".(une entreprise comme Oracle qui a maintenant 40.000 personnes a
connu un taux de croissance de 100% par an depuis 10 ans)
En effet, dès cette barre franchie, la rentabilité augmente
considérablement (les coûts de production marginaux sont quasi
nuls) et les développeurs d'application, soucieux de leurs propres
débouchés, capitalisent sur le produit "phare" en
délaissant ceux qui représentent une part de marché trop
faible. On passe ainsi sans grand effort de 30 à 95 % du marché.
La rentabilité devient alors considérable et permet, grâce
à cette rente de situation, "d'achever" les concurrents (en les
rachetant et en finançant l'amélioration du produit leader afin
qu'après la bataille il devienne effectivement le meilleur).
La bataille Microsoft-Apple est sans doute la plus
emblématique de cette logique mais elle est loin d'être un cas
isolé.
Il convient donc de lancer le produit sur le marché, même sans
attendre qu'il soit parfaitement au point et doté de toutes les
fonctionnalités dont le créateur voudrait bien le doter.
Plusieurs capitaux risqueurs américains nous ont dit leurs
difficultés avec des créateurs français à leur
faire mettre leurs produits sur le marché à un stade suffisamment
précoce pour ne pas se laisser doubler.
Ils considèrent que
De toute façon il restera toujours des bogues et que les clients sont
mieux placés pour détecter ceux qui sont vraiment
gênants
on peut toujours développer de nouvelles fonctionnalités :
il est préférable de se concentrer sur celles qui sont
demandées par les clients plutôt que par celles qui
intéressent le créateur.
Il importe alors que l'entreprise soit à l'écoute de ses
clients et soit extrêmement réactive pour corriger les
défauts signalés ou développer les fonctionnalités
demandées.
Dans les deux ou trois premières années le chiffre d'affaire est
quasiment nul (les services encore imparfaits sont souvent donnés
gratuitement)
Ce lancement mondial doit être très rapide et il exigent des
capitaux considérables, bien supérieurs à ceux que
nécessite la mise au point technique (en moyenne le marketing
représente 63 % du budget pour ce type d'entreprise contre 13 % pour la
R & D, le cout d'acquisition d'un nouveau client est estimé selon
les marchés à une somme comprise entre 40 et 120$ (45$ pour
CDNow, 80$ pour Amazon, 100$ pour Barnes&Noble)
Autobytel continue à investir les deux tiers de son chiffre
d'affaires dans la promotion de son service.
Or le marketing, bien qu'il représente en fait l'investissement majeur,
ne peut être comptablement considéré que comme des
dépenses de fonctionnement.
Comme nous avons vu que le chiffre d'affaire était négligeable
le déficit représente en fait l'investissement marketing.
Or cet argent provient, non pas des économies des créateurs
(souvent bien faibles) mais de l'argent mis sur le projet par des capitaux
risqueurs.
Quand on sait que c'est dans cette profession que l'on trouve les meilleurs
spécialistes du sujet on peut conclure que l'ampleur de cet
investissement, et donc de ce déficit, est directement
liée à la qualité du projet tel qu'il est
estimé par les personnes les plus compétentes pour en juger.
Ce raisonnement, pourtant simple, ne nous paraît pas avoir
été compris par tous les financiers français.
Et pourtant c'est bien cette démarche qui a assuré le
succès du Minitel en France (distribution gratuite du terminal qui a
fait hurler en son temps la Cour des Compte) ...et qui a conduit à son
échec à l'international, car il ne suffit pas que sa technologie
ne soit pas la plus performante, encore faut-il se donner les moyens financiers
pour l'imposer comme un standard au niveau mondial