(Last update : Sun, 16 Dec 2007)
[ industrie | cgm | 1997-98 ]

RAPPORT SUR L'ACTIVITÉ
DU CONSEIL GÉNÉRAL DES MINES
EN 1997-98

Conclusions du rapport «Internet et PME» : mirage ou opportunité ?

Internet lance à nos entreprises un défi majeur.

La puissance de la révolution qu'il porte tient principalement au fait qu'il est l'outil technique qui correspond aux mutations de nos économies et de nos sociétés : organisation en réseau, mondialisation, flux tendus, aplatissement des hiérarchies, demande de transparence et d'accès à l'information.

En effet, avant d'être un réseau ou un ensemble de technologies, Internet est un standard mondial de communication. Il offre la possibilité tout à la fois :

- de gagner en productivité dans la gestion interne et dans les relations interentreprises ;

- d'ouvrir aux entreprises des marchés nouveaux.

Les technologies Internet concernent toutes les fonctions de l'entreprise : vendre, se faire connaître, trouver des partenaires, faire de la veille technologique et de l'intelligence économique, transmettre des documents écrits, sonores, vidéo ou des programmes d'usinage de pièces techniques, trouver des appels d'offre et y soumissionner, conduire des projets, faxer, téléphoner, participer à des bourses, travailler en réseau, assurer le service après vente, la maintenance ou l'aide au dépannage, télésurveiller et télé-agir, acheter au meilleur rapport qualité/prix, recruter du personnel, utiliser le télétravail, mettre davantage l'entreprise au service du client...

Elles permettent en outre de faire des économies considérables tant sur les développements informatiques que sur les télécommunications.

Internet sera à terme l'outil universel du commerce inter-entreprise.

Très peu d'entreprises rencontrées, grandes ou petites, ont conscience de l'ensemble de ces possibilités : les anecdotes mises en exergue par les médias ne projettent bien souvent sous les feux de la rampe que les sites Web de vente au grand public, la navigation au hasard des pages ou les problèmes de paiement en ligne qui ne sont que l'écume du sujet et qui masquent la profondeur des bouleversements en cours (sans même parler des sites «plaquette», des pirates ou de la pornographie).

Sans doute serait-il plus significatif, même si ce n'est qu'un aspect très partiel des potentialités d'Internet, de mettre en avant :

- la réduction de 20 % du coût d'un avion (dont la conception et la construction concernent un très grand nombre de PME), par réduction des coûts de traitement de l'information ;

- l'économie d'un milliard de F attendue de projet d'extranet de l'industrie automobile américaine (projet ANX) ;

- la division par 6 du temps nécessaire pour réaliser un moule pour pièce plastique ou pour adapter une proposition à l'export pour une usine d'incinération grâce à des liaisons beaucoup plus efficaces avec le client ;

- la capacité de négociation que représente la communauté des acheteurs de fuel de Genève.

Toutes les entreprises, même les plus petites, même celles qui ont le sentiment de bénéficier d'une protection géographique, nous paraissent potentiellement concernées.

La nature et les métiers de nombreux intermédiaires vont être profondément bouleversés entraînant l'apparition de nouveaux acteurs et la disparition d'anciens qui n'auront pas su évoluer.

Certes, Internet, outil de démultiplication de la concurrence et de développement du pouvoir des consommateurs est autant porteur de menaces redoutables que de potentialités de croissance pour nos entreprises, mais il doit être bien clair que la passivité nous priverait des opportunités sans pour autant nous en épargner les dangers.

Internet n'est pas une mode ou un événement dont on peut décider de se tenir à l'écart.

Il est bien clair que l'essentiel du succès dans cette évolution repose sur les entreprises elles-même, sur leur capacité d'adaptation et d'innovation et sur leur volonté de gagner dans la compétition internationale.

Il n'en reste pas moins que les pouvoirs publics ont un rôle important à jouer pour créer un contexte favorable au développement d'internet, lever les facteurs de blocage, sensibiliser aux enjeux et accompagner les efforts de ceux qui tracent le chemin.

Ceux-ci doivent aussi intégrer cette nécessaire évolution quand ils sont eux même clients, fournisseurs ou partenaires des entreprises.

C'est la raison pour laquelle nous proposons ici une action forte de l'Etat, mais aussi de tous les acteurs porteurs de l'intérêt collectif : collectivités locales, CCI, organisations professionnelles, centres techniques, ...

La plupart des pays industrialisés, au premier rang desquels les Etats-Unis, mènent ainsi des politiques publiques très actives dans ce domaine.

Les pouvoirs publics doivent tout d'abord créer un environnement général propre au développement d'Internet dans notre pays :

- développer des infrastructures prenant en compte la politique d'aménagement du territoire et le renforcement de la cohésion européenne : ils ne peuvent plus se défausser de cette mission sur un opérateur chargé d'une mission d'intérêt général ;

- assurer une concurrence transparente et sans entraves dans les télécommunications pour permettre à nos entreprises de bénéficier de services de qualité à un coût raisonnable ;

- adopter des normes européennes pour le cryptage, en finançant si nécessaire, dans le cadre d'une politique de souveraineté, la mise sur le marché d'algorithmes non contrôlés par une puissance extérieure à l'Europe ;

- encourager la migration du minitel vers Internet ;

- dématérialiser les procédures administratives ;

- rendre accessible sur Internet les informations produites par l'Etat ;

- publier sur le Web les appels d'offre publics et gérer l'exécution des marchés par échange de données selon les standards internet (EDI sur TCP/IP) ;

- favoriser, en encourageant le capital-risque, le développement des entreprises de service capables d'apporter les outils matériels ou logiciels nécessaires au succès des projets des PME ;

- faire évoluer notre droit pour permettre la prise en compte de ce nouvel instrument des relations commerciales et participer activement à l'élaboration du droit international ;

- introduire Internet à tous les stades de la formation initiale et continue et amplifier les actions menées dans les écoles relevant du ministère ;

- favoriser la mise en place d'équipes de recherche non seulement sur les plans technologiques mais aussi sociologiques et économiques pour permettre aux acteurs publics et privés de prendre la mesure des évolutions et éclairer ainsi leurs décisions.

Dans le même temps, il convient de conduire une intense action de terrain en s'appuyant sur les DRIRE :

- action de sensibilisation auprès de toutes les PME pour leur faire prendre conscience très concrètement de toutes les potentialités de ces technologies, tant pour gagner en compétitivité que pour conquérir de nouveaux marchés ;

- dans cette logique, toutes les actions déjà lancées (exportation, intelligence économique, qualité, conseil statistique...) devront être enrichies d'un volet Internet ;

- de travailler prioritairement avec les communautés d'entreprises plus ou moins formelles existantes (grappe de sous-traitants, groupe d'entreprises géographiquement proches ou appartenant à un même secteur professionnel, réseau de franchisés...) pour agir de façon plus rapide et forger les outils adaptés aux PME tout en contribuant à aguerrir les sociétés de conseil ;

- de diffuser les technologies internet auprès du tissu des PME en mobilisant, au-delà même de la ligne spécifiquement dédiée à Internet, une large partie des crédits destinés à leur développement, notamment au sein des contrats de Plan (Internet constitue la plupart du temps l'outil qui permet aux actions déjà engagées d'aller plus loin dans leurs ambitions) ;

- pour agir vite, de façon mobilisatrice mais efficace et rapide, il convient sans doute de donner un nom à l'opération mais de ne surtout pas créer de nouvelles procédures :

Utilisons celles qui sont déjà rodées, connues et appréciées par les entreprises et qui couvrent parfaitement le champ des mesures préconisées : aides au conseil (FRAC, FRATT), crédits d'action collective (CPI), aide au recrutement (ARC), aide à l'appropriation de technologies nouvelles (ATOUT), aide à la modernisation (FDPMI), crédit d'impôt-recherche (CIR), appel à projet (AAP), information à partir d'opérations exemplaires (Références), assurance prospection, en adaptant en tant que de besoin certaines de leurs modalités notamment pour les ouvrir à certaines catégories d'entreprises du secteur des services participant à des communautés exposées à la concurrence internationale.

Par contre il convient d'utiliser les moyens spécifiques Internet (50 MF décidés dans le cadre du budget 98) pour donner l'impulsion à ce programme : sensibilisation, formation, expérimentation, ...

- d'offrir aux entreprises, les services d'une administration régionale ayant elle-même la maîtrise des technologies Internet et les utilisant pleinement : il conviendra en particulier que notre ministère bascule le plus rapidement possible de la messagerie CC:Mail actuelle vers un véritable Intranet permettant une pleine ouverture sur l'extérieur.

Notre pays et nos PME en particulier ont pris un retard certain sur beaucoup de nos compétiteurs mondiaux pour exploiter les nouvelles potentialités d'Internet et y adapter leur stratégie et leur organisation.

Ce retard, certes déjà pénalisant, ne paraît toutefois nullement irrémédiable.

Notre pays n'est en effet pas sans atout : les technologies de l'information et des télécommunications sont maîtrisées par nos ingénieurs et tous les domaines d'application techniques, commerciaux, artistiques ou juridiques attirent les jeunes.

Il n'est que de voir le succès des jeunes Français en Californie pour ne nourrir aucun complexe en ce domaine.

Il convient toutefois maintenant d'agir sans délai : une action résolue doit être engagée selon les lignes tracées plus haut avec la préoccupation permanente de rester à l'écoute des propositions venant du terrain et de se tenir informés des réalisations dans les autres pays afin de pouvoir adapter les mutations en fonction d'évolutions qui se produisent à

un rythme sans commune mesure avec celles que nous avons pu connaître dans le passé avec les mutations technologiques précédentes.

Il devrait ainsi être possible à nos PME de tirer avantage de la mondialisation des marchés, dans le contexte d'une compétition internationale exacerbée au bénéfice de notre économie et de l'emploi.

Copyright (c) 1998 Ministère de l'Economie, des Finances et de l'Industrie