RAPPORT SUR L'ACTIVITÉ
|
G. PIKETTY
Maintien des compétences et optimisation économique
des activités de DCN-Cherbourg
_______________
Par lettre en date du 26 novembre 1997, M. le Ministre de la Défense a demandé comment il serait possible de maintenir à lavenir dans des conditions économiques satisfaisantes les compétences techniques et industrielles de la Direction des Constructions Navales de Cherbourg dans un contexte où les besoins de la Marine Nationale ne permettront plus dassurer un plan de charge sans discontinuité.
Létude a été menée conjointement avec le Vice-Amiral dEscadre Hubert Foillard et avec la collaboration de Fabrice Dambrine, ingénieur en chef des Mines. Elle souligne que la variabilité accusée de la charge dactivité qui apparaîtra à lhorizon dune dizaine dannées dans les modes de fonctionnement actuels de la DCN, pose un problème radicalement nouveau, générateur de coûts stériles insupportables pour le budget et pour la compétitivité de létablissement. Or cette compétitivité est indispensable pour augmenter les chances à lexportation en contrepartie de la réduction des besoins de la Marine et pour se préparer à des rationalisations industrielles très probables à terme au niveau européen.
Létude préconise à cet effet :
- un mode dorganisation radicalement différent de la DCN, basé sur une logique de répartition par fonctions ou demi-produits de la charge globale dactivité entre les différents établissements, à la différence de logique de répartition par type de navires qui prévaut aujourdhui ;
- de rompre en conséquence avec le principe dautonomie des établissements, résultat dailleurs de la logique en vigueur et de mettre plus particulièrement en avant un couplage puissant entre DCN-Lorient et DCN-Cherbourg ;
- un recours systématique à la sous-traitance externe pour la réalisation à lextérieur de sous-ensembles ou de fonctions non stratégiques. La complexité des sous-marins nucléaires conduit à lintégrer comme un objectif prioritaire dans la conception des nouvelles générations des nouvelles générations de sous-marins, i.e. pratiquement dans la conception prévue dun sous-marin dattaque futur (SMAF).
A contrario, il convient que la DCN concentre son intervention directe sur les fonctions ou métiers stratégiques liés à la maîtrise de la construction des sous-marins.
Limpératif de compétitivité et les coûts statutaires élevés de la DCN obligent à pousser à lextrême cette logique, qui est par ailleurs celle de tous les chantiers civils confrontés par le jeu aléatoire du marché à des variabilités de charges qui peuvent être accusées.
Létude constate que dans ces conditions, avec une gestion ciblée des effectifs en conséquence, il ne devrait pas y avoir de problèmes de maintien des compétences techniques stricto sensu, même dans le cadre dune évolution des effectifs sur le moyen-long terme, adaptée à une réduction de lordre de 50 % de la charge globale moyenne à cet horizon par rapport à ce quelle est aujourdhui.
Cette conclusion conforte lanalyse faite par la mission selon laquelle il ne serait pas indiqué de développer à Cherbourg une activité dentretien lourd des sous-marins nucléaires pour soutenir le maintien des compétences techniques et lactivité de létablissement. Cette activité na que des synergies faibles avec lactivité de construction neuve et napporte rien au confort des disciplines ou métiers réellement stratégiques pour la construction. A contrario, elle a des synergies très fortes avec lactivité dentretien courant des sous-marins qui doit se faire obligatoirement aux ports dattache des sous-marins (Toulon ou Brest), Cherbourg ne pouvant techniquement prétendre à jouer ce rôle.
Létude constate enfin que lactivité de diversification ne peut que rester marginale compte tenu du coût et des rigidités statutaires et que, sil convient de ne pas la négliger, elle ne peut être un alibi pour ne pas engager sans tarder les orientations préconisées.
Si lon dispose en effet dune petite dizaine dannées avant que napparaissent des modifications profondes du contexte lié à la construction de sous-marins nucléaires, obligeant à «faire autrement», les rigidités et pesanteurs existantes concernant notamment lévolution et la qualification des effectifs, conduisent à mettre en place une dynamique nouvelle sur des fondements nouveaux sans tarder. A défaut, des mesures durgence et douloureuses simposeraient le moment venu, avec le risque de ne pas pouvoir tirer correctement son épingle du jeu, ni à lexportation, ni au plan européen.
Ce rapport a été rendu public par le Ministre de la Défense en juillet 1998.