(Last updated : Sat, 31 May 1997)
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| cgm
| 1995
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Le Conseil a examiné en séance plénière, le 5 février 1996, le rapport sur la gestion durable des eaux souterraines, établi par sa section technique sous la présidence de M. Y. Martin, sur la demande exprimée par Mme le Ministre de l'Environnement le 9 mars 1995.
Ce rapport réanalyse tous les fondements d'une politique des eaux souterraines, évalue le rôle joué par les différents acteurs publics. Il propose un réajustement de la perspective et de ce rôle. Il a donné lieu à un débat intense.
En raison de l'importance de la question, l'avis émis par le Conseil à l'issue de ce débat est présenté ci-après.
MINISTÈRE DE L'INDUSTRIE ,
DE LA POSTE ET DES TÉLÉCOMMUNICATIONS
AVIS DU CONSEIL GENERAL DES MINES
SUR LA GESTION DURABLE DES EAUX SOUTERRAINES
SEANCE DU 5 FEVRIER 1996
Le Conseil Général des Mines approuve les propositions du rapport établi à l'issue des
travaux de l'Instance qu'a animée la section technique. Il constate que l'opinion et les élus
sont
insuffisamment sensibilisés à l'importance économique et écologique des eaux souterraines et
aux menaces qui pèsent sur leur qualité; il insiste particulièrement sur les points suivants :
-
Un gros effort doit être fait pour acquérir et diffuser les connaissances nécessaires à la
gestion du remarquable réservoir naturel que représentent les 2 000 km3 d'eaux
souterraines;
-
effort de recherche, particulièrement sur les conditions d'alimentation des aquifères, sur leurs
relations avec les cours d'eau et sur les mécanismes de rétention, diffusion et épuration des
polluants dans le sol, le sous-sol non saturé et les aquifères,
-
effort de collecte et de stockage de toutes les informations que fournit l'exploitation des eaux
souterraines. Il est en particulier essentiel de connaître les volumes prélevés et leur évolution.
Les Agences de l'eau devraient se voir confier le soin d'assurer la maîtrise d'ouvrage et le
financement de l'acquisition des connaissances générales sur les ressources en eau souterraine.
Le BRGM, pour le compte et sous l'autorité des Agences, devrait assurer l'ingénierie de cette
acquisition de connaissances; il pourrait se voir confier en outre la gestion de certaines des bases de
données qui en seraient issues, comme il le fait déjà pour la banque des données du sous-sol, ou pour
l'observatoire national de la qualité des eaux souterraines. Par contre, il paraît opportun que la collecte
sur le terrain des données non géologiques soit confiée au cas par cas aux opérateurs capables de
procéder à ces opérations à un coût moindre.
La prise en charge, par les Agences, du financement des travaux relatifs aux eaux souterraines,
qui sont aujourd’hui effectués par le BRGM sur les crédits du ministère de l’Industrie, devrait permettre
d’améliorer l’efficience de la banque des données du sous-sol et de développer fortement l’appui
technique apporté par le BRGM aux administrations chargées de la police des eaux souterraines et de
l’organisation de sa gestion.
- La gestion quantitative des eaux souterraines devrait être fondée :
-
d'une part sur une procédure de déclaration des ouvrages de prélèvements, renforcée en impliquant la
profession des foreurs,
-
d'autre part sur une régulation des prélèvements par une intervention forte des Agences de l'eau sur les
aquifères, en petit nombre, où une limitation des prélèvements s'impose. Une autorisation préalable ne
devrait être maintenue que dans ces derniers aquifères et elle devrait être subordonnée à la mise en place
d'une redevance spécifique, destinée à financer toutes les connaissances supplémentaires nécessaires à la
gestion des prélèvements et à ajuster l'offre et la demande locale en eau.
- Les prélèvements agricoles pour l'irrigation se développent rapidement. Le recours aux eaux
souterraines est la meilleure façon de satisfaire ces besoins saisonniers, mais il est indispensable que les
agriculteurs déclarent leurs ouvrages et leurs prélèvements et acquittent les redevances de droit commun.
S'il s'avérait que le poids de ces redevances ne pouvait être pris en compte par la politique des transferts
organisés en faveur de l'agriculture, au niveau national et dans le cadre de la PAC, tout ou partie de la
recette correspondante pourrait être reversée à l'économie agricole (au mieux à l'économie rurale) des
secteurs concernés, selon une clef indépendante des prélèvements de chaque agriculteur (par exemple au
prorata des surfaces cultivées).
- Le Conseil regrette que les DRIRE, accaparées par d'autres missions, aient dû, faute de
moyens, se désintéresser progressivement des eaux souterraines. Elles représentent en région la tutelle
du BRGM, elles seraient les plus aptes à exercer le contrôle de la profession des foreurs et devront de
toute façon développer les compétences nécessaires pour prévenir la pollution des aquifères par les
installations classées. Il suffira donc que la question soit examinée attentivement par les Administrations
Centrales concernées.
S'il ne paraissait pas possible que les DRIRE prennent en charge la police des prélèvements, telle qu'il est
proposé de la remanier, il serait nécessaire de confier clairement celle-ci aux MISE encadrées par les
DIREN avec l'appui technique des Services géologiques régionaux du BRGM.
- Les organismes de bassin (comités de bassins et Agences de l'eau devraient concentrer
les aides des Agences, comme prévoyait la loi de 1064, sur les actions qui sont véritablement
d'intérêt commun aux divers utilisateurs d'eau d'un bassin ou d'un aquifère. Ils devraient par
ailleurs encourager davantage les initiatives des collectivités locales pour la gestion de la
ressource, en prélevant pour leur compte les redevances nécessaires à ces actions, en
application de l'article 31 de la loi sur l'eau de 1992.
- Le risque potentiel résultant des sols pollués par des décharges ou des installations
industrielles dont l'activité a souvent cessé est encore très mal évalué, mais le coût des mesures
à prendre peut se chiffrer en dizaines de milliards de francs. L'action entreprise par les DRIRE,
dans le cadre de la législation sur les installations classées, avec l'appui de l'ADEME et des
Agences de l'eau, pour structurer l'évaluation des mesures à prendre, doit être accélérée en
mobilisant les financements nécessaires.
- Vis-à-vis des pollutions diffuses d'origine agricole dont la gravité de l'impact sur la qualité des
eaux souterraines est d'ores et déjà avérée, la généralisation rapide des bonnes pratiques agronomiques
élaborées par le CORPEN, au cours du 7e programme des Agences, est indispensable. Si leur
financement ne pouvait être clairement acquis dans ce programme, avec le concours des Chambres
d'Agriculture et des Départements, une taxe parafiscale sur les engrais devrait être instaurée.
- Les exploitations de sables et graviers dans les aquifères alluvionnaires constituent une menace
potentielle pour la qualité des eaux souterraines. Le Conseil recommande :
-
d'une part la mise en oeuvre effective, au niveau national, d'une politique tendant à transférer notre
approvisionnement en granulais vers d'autres matériaux; dans certains secteurs géographiques, l'emploi
de sables et graviers alluvionnaires devrait être interdit pour certains usages, pour lesquels ils peuvent
être remplacés par d'autres matériaux,
-
d'autre part une meilleure planification de l'usage des sols dans les vallées alluvionnaires est
indispensable et la propriété des sites après exploitation pourrait être transférée à une collectivité locale
ou à un organisme public.
- La qualité de l'eau des distributions publiques d'eau potable est un enjeu important au plan de la
santé publique, comme au plan économique. Une adaptation des structures de distribution en milieu
rural et une amélioration technologique des petites installations de traitement sont nécessaires.
Par ailleurs, les procédures relatives aux périmètres de protection méritent d'être allégées. Les ambitions
de la loi de 1992 vis-à-vis des périmètres de protection des captages d'eau potable existants s'avèrent
excessives. Un inventaire des forages existants pour lesquels un périmètre est prioritairement nécessaire
devrait être entrepris; une large publicité locale devrait être faite à cette liste de captages en situation
dangereuse pour sensibiliser l'opinion et mobiliser les élus. Aucun nouveau forage ne devrait être mis en
exploitation sans être doté de son périmètre de protection rapprochée.
- On doit éviter que la procédure des SAGE ne se focalise à tort sur les problèmes d'eaux
superficielles alors même qu'elle serait surtout utile pour certains grands aquifères fortement exploités,
par exemple la nappe de Beauce: une initiative de l'Etat est indispensable pour susciter de tels SAGE.