La
lenteur actuelle du développement de cette technologie,
techniquement parfaitement au point, est dû au fait que les
concentrateurs, où se situent ces fameux filtres passe-bande
éliminant le signal au delà de 4 kHz, se trouvent sur à
l'intérieur de la boucle locale, et donc jusqu'à fin
2002, dans les faits sinon en droit, inaccessibles à la
concurrence (celle-ci n'a aujourd'hui accès au mieux qu'aux
autocommutateurs, points d'entrée dans les boucles locales, vers qui
convergent les concentrateurs):
Seul l'opérateur de cette boucle (en fait quasi exclusivement
l'opérateur historique) peut de ce fait mettre en oeuvre cette
technologie révolutionnaire (en septembre 2002 il n'y avait que ...1150
lignes de dégrouppées en France opérées par des
opérateurs concurents de France Télécom, soit 0,13% des
lignes ADSL exploitées par l'opérateur dominant..., en Allemagne
il y en avait déjà 623.000 début 2002).
Sous la pression de Bruxelle et de l'ART, 2003 voit un léger
décollage (100.000 lignes sur 2 millions) mais les nouveaux entrants
continuent à protester contre les différents obstacles qu'ils
accusent l'opérateur historique de mettre sur leur chemin (comme la
gratuité des frais d'accès réservée à ceux
qui utilisent des services non dégroupés)
"avec 400 lignes le dégroupage est inexistant en France. Son prix est
inacceptable: c'est quand même le seul exemple ou le tarif de gros
consenti aux opérateurs est 50% plus élevé que le tarif de
détail payé par le particulier" Philippe Germond, Pdg de
Cegetel dans une interview aux Echos le 14 mars 2002
l'ART a du bloquer une proposition de baisse de tarif aux fournisseur
d'accès (option 5) qui aurait eu en fait pour principale
conséquence, par effet de ciseau, d'exclure du marché, sans doute
involontairement, ses concurrents en l'absence de baisse concommitante des
tarifs de gros (option 3)
""France télécom déploie ses offres depuis 2 ans alors
même que les autres opérateurs n'ont pas été en
mesure de fournir des services dans des conditions équivalentes" ART,
rapport d'activité
www.art-telecom.fr
"Après 14 mois d'enquête la commission européenne aurait
conclu que wanadooa pratiqué des prix prédateurs dans l'ADSL"
titraient les Echos du 11 février 2003 "de 2001 à octobre
2002, Wanadoo a profité d'un appui de sa maison mère ce qui lui a
permis de capter pratiquement l'int"gralité du marché de l'ADSL,
Même si Wanadoo doit payer une amende, il a pris 3 ans d'avance"
déclare Nicolas Pinton de Tiscali
Ses concurrents, regroupés dans le "Collectif libre ADSL"
www.libreadsl.org accusent
France Télécom de ne pas respecter les échéances
fixées par l'autorité de régulation (le 1er
janvier 2001) en usant de tous les moyens (informations fausses ou
incomplètes, fourniture de documents papiers inexploitables, retards de
transmission, facturations abusives, tarifs exorbitants, installation de
filtres mettant hors service l'ADSL proposé par son concurrent Mobius
à la Réunion (et démarchant ses clients pendant ce temps :
France Télécom a fait l'objet d'une condamnation le 11 Avril
2001...), procédures judiciaires abusives cherchant à affaiblir
un concurrent (jugement de juin 2001 / One.Tel),
"[le dégroupage] suppose des négociations complexes. Les
ex-monopoles utilisent cette complexité pour contrer la concurrence
indésirable: dispositions techniques, tarifs (jusqu'à 0,5M pour
l'accès aux salles),.... Certains observateurs estiment que France
Télécom a remporté une première victoireavec les
délais de mise en oeuvre..." (étude CCIP, mai 2002)
Tous les moyens sont bons pour freiner : Serge Schoen DG de LDCom rappelle par exemple "lorsque nous devions entrer dans les centraux d'abonnés nous devions porter un badge qui demandaient six semaines pour être délivrés et il a fallu l'intervention de l'ART pour régler le problème" interview par Estelle Dumout ZDNet mai 2003 |
Ils l'accusent de bloquer l'arrivée des concurrents sur le marché, contraignant même ainsi au dépôt de bilan certains des nouveaux entrants comme Mangoosta ou Subiteo qui ne pouvaient financer cette période de paralysie et d'incertitude (de surcroit à un moment où les investisseurs adoptent une politique d'extrême prudence) ou à un retrait du marché comme ce fut le cas de l'américain Covad.
"l'opérateur rationne l'ADSL pour se créer des rentes" Jean-Ruffat, président de Stratégies-Structures colloque du CSTI du 2 décembre 2002.
L'ART estime en juin 2001 que "Cette situation pourrait être de nature à révéler un comportement prédateur" Une plainte, qui pourrait être suivie d'autres, a été déposée en février 2001 devant le conseil de la concurrence par un concurrent s'estimant lésé (9 Télécom) mais Pierre Goubet de Mangoosta estime "pour lui une amende même lourde est probablement préférable à une concurrence réelle sur la boucle locale". Rappelons par exemple que c'est seulement en janvier 2002 que l'ART a infligé une amende à l'opérateur pour une infraction de novembre 2000 ... et que Mangoosta a été acculé au dépôt de bilan."comme tous les opérateurs historiques FT tente de gagner un peu de temps en faisant appel des décisions qui lui sont défavorables, des recours qu'il perd la plupart du temps" (Jamal Henni, les Echos)
Stéphane Lelux président de Tactis n'exclut pas un "scénario très noir, car on aurait les inconvénients d'un monopole privé sans les avantages d'un monopole de service public. En clair, ça voudrait dire moins d'innovation, pas de baisse des prix, une modernisationmoins rapide de l'économie, et de nombreux territoires laissés à l'écart du haut débit"
Cette situation n'est pas propre à notre pays et en aout 2001 la commission européenne a décidé de lancer une nouvelle enquête afin d'analyser les éventuels abus de position dominanteet de lancer les procédures appropriées avec ce commentaire:"ce secteur demeure en l'absence de dégroupage effectif, le moins concurrentiel des télécom en europe". En Italie l'opérateur historique a été condamné à une amende de 70M par le gendarme de la concurrence ... sur une plainte de la filiale de France Telecom (Infostrada)
En mai 2003 Bruxelles a infligé une amende de 12,6 M à Deutche Telecom pour entrave de l'accès à ses concurrents
Par ailleurs le retard dans l'arrivée de la concurrence se traduit par des prix élevés (le double de la Suède ou l'opérateur historique a du céder 40% de part de marché aux nouveaux entrants, et du Canada ou déjà en 2000 le prix moyen d'un accès illimité à haut débit était de 28 par mois) et par voie de conséquence un retard dans le développement préjudiciable tant aux entreprises traditionnelles qu'aux producteurs de contenu (e-learning, médias,...): avec une population moitié de la notre, le Canada compte 6 fois plus d'internautes connectés à haut débit
Ceci permet de comprendre l'enjeu considérable dans tous les pays européen de l'ésotérique "bataille du dégroupage" qui donnera l'accès à la concurrence jusqu'à ce fameux filtre |
"les
opérateurs européens semblent plus désireux de promouvoir
leur offre RNIS, dont le débit est très inférieur
mais qui présente l'avantage de préserver les recettes de la
téléphonie locale et de ne pas menacer le métier
très lucratif des liaisons louées" rapport Aftel 1999
en aout 2001 l'ART a renouvelé son appel à la baisse de ces tarifs très rémunérateurs pour l'opérateur historique (1,3G, +13%), qui conserve là encore un monopole de fait, mais très pénalisants pour les entreprises Lors de nos missions aux USA nos interlocuteurs nous ont indiqué qu'ils considéraient cette technologie comme obsolète |
Ceci permet également de comprendre pourquoi l'opérateur historique risque de n'installer l'ADSL que dans les zones où il y sera contraint par la concurrence du câble, accentuant ainsi encore les distorsions dans l'aménagement du territoire voir page 396:
La CCI du Cantal a du organiser une pétition de ses industriels pour obtenir l'ADSL
Heureusement en 2003 la concurrence du couple satellite/WiFi et les autorisations données aux collectivités locales d'investir contraint l'opérateur historique a plus de réactivité et en juin celui-ci annonce un vaste plan de déploiement du haut débit basé sur l'ADSL mais aussi sur le couplage WiFi/satellite (5 expérimentation durant l'été 2003).
Mais de nombreux élus voient surtout dans cette annonce un essai de décourager et retarder les initiatives locales "Alors que nous avions les pieds dans les starting blocks, on nous annonce que tout sera réglé dans 3 ans"(Roger Mezin aux Echos), "ces déclarations ont jeté un trouble. Aujourd'hui il faut remouliner pour convaincre les élus. FT nous met un leurre devant les yeux pour dissuader les collectivités" (Jean-Louis VigneauDG des services de l'Ariège "Dès le lendemain de l'annonce, des projets de collectivité se sont arrété. France télécom vient de gagner un an(Philippe de Lussy, PDG d'Equal