(Last update : Sat, 6 Sep 2008)
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Résolution de l'Assemblée nationale relative aux services publics (30.11.95)
Résolution
sur des propositions et un projet de directives communautaires
relatives aux services publics (COM [91] 548 final/n°E211, COM
[95] 379/n°E467, n° E474, COM [95] 379 final/n°E507
corrigendum au E467, n°E508, COM [95] 337 final/n°E510).
L'assemblée nationale a adopté, en application de l'article
151-3 du Règlement, la résolution dont la teneur suit :
Article unique.
L'Assemblée nationale,
Vu l'article 88-4 de la Constitution,
Vu les articles 3B, 37, 77, 90 (2) et (3) du traité instituant
la Communauté européenne,
Vu les propositions de directives du Conseil concernant les
règles communes pour le marché intérieur de l'électricité et
du gaz naturel (COM [91] 548 final/n°E211),
Vu les propositions modifiées de directives du Parlement
européen et du Conseil concernant des règles communes pour le
marché intérieur de l'électricité et du gaz naturel (COM
[93] 643 final),
Vu sa résolution du 21 juin 1995 (T.A. n°368) sur les
propositions de directives concernant des règles communes pour
le marché intérieur de l'électricité et du gaz naturel,
Vu la proposition de directive du Parlement européen et du
Conseil relative à l'interconnexion dans le secteur des
télécommunications. Garantir le service universel et
l'interopérabilité en appliquant les principes de fourniture
d'un réseau ouvert (ONP) (COM [95] 379 / n°E467 et corrigendum
n°E507),
Vu la proposition de directive du Parlement européen et du
Conseil concernant les règles communes pour le développement
des services postaux communautaires et l'amélioraton de la
qualité du service (n°E474),
Vu le projet de directive de la Commission modifiant la
directive de la Commission 90/388/CEE et concernant
l'ouverture complète du marché des télécommunications à la
concurrence (n°E508),
Vu la communication de la Commission sur le développement des
chemins de fer communautaires - application de la directive
91/440/CEE - nouvelles mesures pour le développement des
chemins de fer, et la proposition de directive du Conseil
modifiant la directive 91/440/CEE relative au développement
des chemins de fer communautaires (COM [95] 337 final/n°E510),
Considérant que la législation communautaire tend à remettre
en cause la notion française de service public ;
Considérant cependant que, si les principes du service public
doivent être sauvegardés, leur défense ne doit pas se
confondre avec celle du statu quo ;
Considérant, en effet, que des adaptations à la réalité
économique et sociale s'imposent et que le service du public
doit rester l'objectif premier du service public ;
Considérant que, si les principes régissant le service public
sont intangibles, ainsi l'égalité d'accès et la péréquation
des prix, il n'en est pas de même pour ses modalités,
nécessairement contingentes ;
Considérant que seul le peuple français est légitimement
habilité à définir ces principes et à en tirer les conséquence
en termes d'organisation ;
Considérant que les services publics ne doivent plus souffrir
dune approche de la Commission européenne privilégiant le
droit de la concurrence ;
Considérant enfin que la Conférence intergouvernementale de
1996 constitue la dernière occasion institutionnelle de faire
appliquer le principe de subsidiarité aux services publics et
de faire admettre à nos partenaires la notion de service
public à la française ;
Sur les réformes institutionnelles nécessaires dans le
cadre de la conférence intergouvernementale de 1996
- 1.
-
Se félicite que le Conseil européen de Cannes ait unanimement
garanti la mise en oeuvre des missions d'intérêt général par
la déclaration suivante : "L'Union garantit en particulier la
mise en oeuvre des missions d'intérêt économique général en
Europe, en vue d'assurer l'égalité de traitement des citoyens
en Europe - y compris l'égalité des droits et l'égalité des
chances entre les hommes et les femmes -, un aménagement
équilibré du territoire, la qualité, la continuité et
l'adaptabilité du service rendu ainsi que la préservation
d'intérêts stratégiques à long terme" ; souhaite que cette
déclaration figure à l'article F du Traité de l'Union
européenne ;
- 2.
-
Souligne la nécessité de construire une doctrine européenne du
service public, notamment en intégrant les principes de
service public aux articles 3, 37 et 90 (2) du Traité
instituant la Communauté européenne et relève l'intérêt qu'il
y aurait à donner sa pleine portée à son article 77 ;
- 3.
-
Réaffirme la nécessité de limiter les possibilités de recours
à l'article 90 (3) du Traité instituant la Communauté
européenne, instrument de déréglementation auquel la
Commission européenne fait de plus en plus souvent appel, sans
disposer de la légitimité nécessaire pour faire oeuvre
législative ;
Sur les propositions de réformes présentées par la
Commission européenne
- 4.
-
Estime que les conséquences sociales des libéralisations,
notamment en matière d'emploi, doivent désormais être prises
en compte ;
Le service postal
- 5.
-
Se félicite de l'avancée que constituent, dans la proposition
de directive n°E474, la définition d'un "service postal
universel" et l'affirmation de la viabilité économique de ce
service, et ce, grâce à l'existence de services réservés ;
- 6.
-
Approuve les seuils de poids et de prix retenus pour délimiter
les secteurs réservés ;
- 7.
-
Demande que deux éléments essentiels de l'équilibre
économique, la distribution du courrier transfrontalier
entrant et le publipostage, soient considérés définitivement
comme des services réservés ;
- 8.
-
Demande en outre que les envois recommandés soient également
considérés comme un service public réservé compte tenu de leur
rôle dans les procédures administratives et judiciaires ;
- 9.
-
S'oppose à ce qu'une séparation comptable des activités de
collecte, de transport, de tri et de distribution soit le
prétexte à un futur démantèlement du service public réservé ;
- 10.
-
Demande, pour limiter les détournements de trafic, que la
rémunération versée au service public pour la distribution du
courrier en provenance de l'étranger ("frais terminaux") soit
évaluée en fonction du coût réel et de la qualité du service
offert ;
- 11.
-
Exige que la Commission retire le projet de communication qui
accompagne la proposition de directive ; en effet, ce texte
est axé uniquement sur la concurrence, avec le risque
d'introduire des doutes sur le droit applicable du fait de la
dualité de textes sur un même sujet ;
Les télécommunications
- 12.
-
Déplore que la proposition de directive du Parlement européen
et du Conseil n°E467 soit accompagnée d'un projet de directive
de la Commission n°E508, fondé sur l'article 90 (3) du Traité
instituant la Communauté européenne, et renouvelle son
opposition à l'utilisation de cet instrument juridique, ce
dernier projet étant axé uniquement sur la concurrence, avec
le risque d'introduire des doutes sur le droit applicable du
fait de la dualité de textes sur un même sujet ;
- 13.
-
Se félicite que la proposition de directive du Parlement
européen et du Conseil n°E467 précise les modalités de calcul
des contributions au service universel mais s'inquiète de
l'absence de prise en compte explicite de l'amortissement des
infrastructures publiques ;
- 14.
-
Souhaite que la volonté, exprimée par la Commission dans son
projet de directive n°E508, d'inciter à un rééquilibrage
rapide des abonnements, des frais de raccordement au réseau et
des tarifs des communications locales et longue distance
tienne compte des conséquences d'un tel rééquilibrage pour les
ménages ;
- 15.
-
Relève avec inquiétude la volonté, exprimée avec les motifs du
projet de directive de la Commission n°E508, de favoriser à
tout prix les nouveaux entrants sur le marché, en allant
jusqu'à les exonérer, le cas échéant, de toute contribution au
financement du service universel ;
- 16.
-
Salue l'évolution récente de la Commission, qui semble adopter
une attitude plus positive à l'égard des accords entre France
Télécom et ses partenaires allemand et américain, et souhaite
désormais une prompte réponse positive ;
Le marché intérieur du gaz
- 17.
-
Rappelle que la séparation comptable entre les différentes
activité de Gaz de France serait inacceptable si elle
aboutissait à mettre cette entreprise en position de faiblesse
face à des producteurs étrangers souvent en situation de
monopole ;
- 18.
-
S'oppose à l'accès généralisé des tiers au réseau de
transport de gaz qui favoriserait l'"écrémage" du
marché par des tiers ;
- 19.
-
Se déclare favorable à l'assouplissmenty des dispositions
législatives interdisant l'extension des activités des régies
gazières communales à des collectivités voisines ;
Le marché intérieur de l'électricité
- 20.
-
Renouvelle avec fermeté son attachement au maintien des
monopoles de distribution et de transport ;
- 21.
-
Réaffirme sa totale opposition à l'accès généralisé des tiers
au réseau ;
- 22.
-
Accepte que l'accès négocié au réseau soit étendu :
- aux exportateurs,
- aux producteurs ou importateurs ayant passé contrat avec des
gros consommateurs industriels ("consommateurs éligibles");
ces derniers devront être définis en fonction de l'intérêt
économique essentiel qu'ils peuvent avoir à rechercher la
fourniture la plus compétitive d'électricité ;
- 23.
-
Refuse
- que soit supprimée la limite maximale des trois points de
livraison dans le cadre des fournitures d'électricité entre
entreprises d'un même groupe ;
- que les distributeurs non nationalisés, y compris les régies
locales de distribution, soient considérées comme des
consommateurs éligibles ;
- 24.
-
Réaffirme son attachement au système d'un acheteur unique qui
achèterait aux producteurs et importateurs toute l'électricité
sauf celle directement fournie par des producteurs
indépendants aux consommateurs éligibles ou celle soumise au
système dit des "trois points" ; ces achats seraient effectués
par l'acheteur unique, après évaluation des besoins et dans la
limite de la satisfaction de ces besoins, par la signature de
contrats à long terme avec les producteurs ou importateurs
retenus dans le cadre d'une procédure d'appels d'offres ;
- 25.
-
Approuve la mise en oeuvre d'une séparation purement comptable
des activités d'Electricité de France, dans la mesure où elle
est indispensable à la mise ne oeuvre du système de l'acheteur
unique ;
Le transport ferroviaire
- 26.
-
Reconnaît que l'accès des tiers aux infrastructures pour le
transport des marchandises, tel que prévu par la proposition
de directive n°E510, pourrait avoir des effets bénéfiques sur
le développement du transport combiné rail-route et du
transport par train entier, donc sur l'ensemble du transport
ferroviaire par rapport d'autres modes de transport, mais
s'inquiète des conséquences notamment sociales sur le
transport par wagon isolé ; demande donc une mise en oeuvre
très prudente et beaucoup moins rapide que celle prévue par la
proposition de directive de cet accès aux infrastructures ;
- 27.
-
Refuse l'accès des tiers aux infrastructures de transport à
grande vitesse, dans la mesure où il est peu probable qu'un
droit de péage suffisant puisse compenser le coût de ces
lourdes infrastructures.
Délibéré en séance publique à Paris
le 30 novembre 1995
Le Président
Signé : Philippe SÉGUIN