From owner-mediaterre@agora21.org Mon Oct 1 18:07:11 2001 Date: Mon, 1 Oct 2001 17:55:24 +0200 (MET DST) From: Philippe Masson To: mediaterre@agora21.org Subject: [Mediaterre] Contre-information Toulouse Chers correspondants de Médiaterre, Toulouse est mal en point, et s'y conjugue une double-menace environnementale et sociale. Nous sommes au coeur des problématiques de choix d'aménagement du territoire, et des dérives qu'une démobilisation des pouvoirs publics à l'égard des conditions d'exploitation industrielle privée peuvent occasionner pour la population de l'ensemble d'une agglomération. Force est de constater que la situation du terrain est largement sous-évaluée dans ce qui se lit dans la presse nationale. La réaction des Toulousains est beaucoup plus marquée, la menace environnementale sans précédent depuis l'accident n'est jamais traitée. Les Toulousaines et toulousains ne dorment plus, et cela se justifie : nous vivons avec la menace d'un sur-accident sans garantie d'alerte, ni mise en place d'information sérieuse des populations quant à la nature technique des mesures de confinement...et alors qu'une accumulation considérable de produits chimiques dangereux vient d'etre secouée par une énorme explosion, en pleine agglomération, ceci conduisant des experts du risque à exprimer en apparté que le confinement en cas de sur-accident ne procéderait pas forcément d'une mesure bien efficace, sinon pour rassurer en périphérie des zones touchées. Les quartiers touchés par l'explosion sont dans la détresse extreme ; traumatisées pour la plupart, les personnes n'ont plus dutout confiance dans les pouvoirs publics, qui les ont exposées et désormais montent au créneau au plus haut niveau pour redonner force à l'hypothèse largement discutable d'une origine malveillante. Trouvez pour suite de ces quelques mots la dernière note d'une commission du Collectif d'habitants en cours de constitution pour obtenir la fermeture définitive du complexe chimique de Toulouse-Sud, qui a frappé ; seule cette mesure semble raisonnable pour redonner un minimum de quiétude à une population blessée. Bien à vous. Philippe Masson ---------------------------------------- Note de travail de la Commission Environnement et Sécurité du Collectif "plus jamais ça, ni ici ni ailleurs". Dimanche 30 septembre 2001 ; --------------------------------------- Tout d'abord qu'il soit permis d'inviter les habitantes et habitants de Toulouse de vérifier scrupuleusement leurs sources avant de diffuser tous azimuts des rumeurs alarmantes ; ces comportements se sont manifestés à différentes reprises cette semaine, et il s'agit d'insister sur le fait que tout le monde est choqué et se trouve en situation d'extrême vulnérabilité émotionnelle à cet égard. On persiste également à entendre les bruits les plus fantaisistes au sujet des éléments radiaoctifs présents sur le site lors de l'explosion. Ces barres de Césium dont il est question présentent un niveau de risque ridicule comparativement aux autres menaces environnementales présentes sur le complexe chimique de Toulouse-Sud. ---------------------------------------------- Elements reçus par la Commission et qu'il vous est invité de LIRE dans le détail et non en diagonale ; Informations reçues depuis le dernière note technique en date du 27 septembre dernier : ---------------------------------------------- Non précisé dans la note précédente, nous supposons fiable l'information suivant laquelle la pluie orange et visqueuse du 21 septembre se confirme n'avoir contenu que des dérivés d'engrais, dont l'innocuité reste à démontrer mais la toxicité semble a priori faible sinon négligeable. ---------------------------------------------- [note reçue vendredi 28 septembre cette note à un membre de la Commission.] Accidents impliquant du Nitrate d'Ammonium : 1921 - KRIEWALD (Silésie) Explosion de deux wagons contenant 30 tonnes de nitrate d'ammonium - des charges explosives y avaient été placées pour désagréger le produit pris en masse. 19 morts. 1921 - OPPAU (Rhénanie) Explosion d'un mélange de sulfate d'ammonium et de nitrate d'ammonium - tirs d'explosifs pour désagréger 4500 tonnes de mélange. Une partie seulement a explosé, estimée à 10 %, soit 450 tonnes. La méthode de désagrégation avait été auparavant utilisée des milliers de fois sans accident ! 561 morts - 1900 blessés - destruction d'Oppau - dégâts ressentis à 1,5 km. 1942 - TESSENDERLOO (Belgique) Explosion de 150 tonnes de nitrate d'ammonium suite à utilisation d'explosif pour désagréger le produit. 200 morts - 1000 blessés 1946 - TOULOUSE (France) Usine ONIA - Incendie dans un magasin renfermant 200 tonnes de Nitrate d'Ammonium - Le nitrate n'a pas explosé. 1947 - TEXAS CITY (USA) Explosion de Nitrate d'Ammonium enrobé (1 % d'hydrocarbure) dans un bateau "Grandcamp", suite à un incendie. 532 morts - 200 disparus - 3000 blessés 1947 - BREST (France) Explosion de l'"Ocean Liberty" qui renfermait 3300 tonnes de nitrate suite à un incendie et pollution du nitrate par différents combustibles. 25 morts 1947 - Mer Rouge Explosion du bateau "Tirrenia" renfermant 4000 tonnes de nitrate d'ammonium et du papier suite à un incendie. Pas de victime, l'équipage ayant abandonné le navire avant l'explosion 1973 - CHEROKEE (USA) Explosion de 3 à 6 tonnes de nitrate en sac, suite à un incendie et l'explosion d'un réservoir de propane. Un énorme tas de nitrate se trouvant à proximité n'a pas explosé. 1. Les explosions impliquant du nitrate d'ammonium sont parmi les plus graves de tous les accidents industriels, juste après ceux provoqués par explosifs, si l'on exclut la catastrophe de Bhopal. 2. Le premier constat lorsque l'on étudie ces différents cas, c'est que l'on n'a pas affaire au même produit. Des milliers de tirs d'explosifs peuvent être réalisés sans dommage et une fois, le nitrate explose. A Toulouse, en 1946, l'incendie ne provoque pas l'explosion du nitrate, au contraire des accidents de Brest ou Texas City. A Cherokee, un tas de nitrate explose suite à l'explosion d'un réservoir de propane, pas celui d'à côté. De même à Rouen en 1940, une bombe explose dans un stockage sans provoquer l'explosion de ce stockage. Or, à l'échelle macroscopique les mêmes causes sont censées produire les mêmes effets. Si des causes semblables ont produit des effets différents, c'est que le produit en jeu n'est pas le même. 3. En apparence, le nitrate d'ammonium est un corps fort simple : NH4NO3. En réalité, son comportement, vis-à-vis des risques d'explosion peut dépendre : - des impuretés et adjuvants qu'il renferme - de sa forme physique (granulés, poussières, blocs...) - de sa forme cristaline - des conditions dans lesquelles il est stocké (vrac ou ensaché, confiné ou à l'air libre) On peut considérer que chaque tas de nitrate d'ammonium possède des propriétés propres, peut-être même chaque grain. Dans ces conditions, l'étude des accidents du passé, des expériences et des études réalisées peut se révéler insuffisante pour comprendre ce qui vient de se produire à Toulouse. Il convient donc de ne tirer aucune conclusion péremptoire. L'article du Monde daté du 28 septembre présente de ce point de vue des racourcis troublants. La logique de l'article, s'appuyant sur des affirmations péremptoires de notoriétés, vise à rouvrir l'hypothèse de l'acte de malveillance. Or le comportement général du nitrate d'ammonuim est la stabilité. La probabilité de son explosion est faible. Il serait donc stupide pour une personne ou une organisation malveillante de mettre en oeuvre des moyens importants et de courir des risques pour un résultat possible mais peu probable. --------------------------------------------- Dossier Phosgène : Le phosgène brut en place sur le site s'élèverait suivant les informations fournies par des employés du site à deux fois dix tonnes. Suivant d'autres sources le produit serait en sécurité, confiné dans deux cuves anti-sismiques étanches à double-parois. Il semblerait qu'au regard du danger phosgène seul pose problème une poutre effondrée dans un hangar contenant du phosgène conditionné et d'autres matière premières ; poutre dont le dégagement n'a pas encore été effectué. --------------------------------------------- Complétant notre évaluation des risques, il semblerait que nous ayons un peu rapidement évacué ceux qui subsistent de ce qui reste de l'Usine AZF. Les wagons de chlore semblent avoir été évacués du site sans trop de problème ; restent entre autre 3500 tonnes de Nitrate d'Ammonium ainsi qu'une cuve contenant une très grande quantité d'Amoniac liquide. Au nombre des produits qu'il nous a été conseillé d'ajouter à ceux dont nous demandons l'évacuation compte l'oxygène, présente semble-t-il en quantité massive sur le site et potententiellement explosive. --------------------------------------------- Le site a été l'objet d'évacuations à différentes reprises durant la semaine, de nuit. Toujours dans la plus grande opacité vis-à-vis des populations de la zone limitrophe. --------------------------------------------- Suivant les termes du Courrier adressé par le M. Le Député-Maire de Toulouse à M. le Premier Ministre le 28 septembre, l'Incinérateur du Mirail aurait été "très durement touché". Voilà donc une usine dangereuse dont la question du déplacement devient d'actualité. --------------------------------------------- La suite lors de notre réunion du mardi 2 octobre 2001, 18 h 30 à Sud, 1, Impasse des Arènes. Bien à vous. Le rapporteur. --------------------------------------------------------------------------- Si vous voulez en savoir plus sur Médiaterre consultez la page : http://www.agora21.org/FORUM/forumb.html Vous pouvez aussi consulter les archives de Médiaterre sur le Web : http://www.agora21.org/MHonArc/mediaterre/ Si vous ne souhaitez plus recevoir d'informations de la part de mediaterre renvoyez le message suivant a mailto:majordomo@agora21.org unsubscribe mediaterre "votre adresse mel" Merci de votre comprehension. Mediaterre@agora21.org