From: Julien Marin ------- Un petit argumentaire pour vous proposer quelques faits, éléments d'information, et retour sur quelques idées reçues pour alimenter le débat sur les réformes l'éducation et leur conséquences, et afin de faire au discours malheureusement unilatéral des médias. (l'éducation est d'ailleurs loin d'être la seule touchée, comme on en donne trop souvent l'impression) A lire a tête reposée, seul, en famille, ou avec vos amis... Nous faisons appel à la solidarité des internautes pour faire suivre ce message à leur entourage, selon le principe de la chaîne de mails (chaque personne qui reçoit ce message le renvoie par mail aux personnes dont elle a l'adresse e-mail) ------------------------------------------------------------ Renégociation de l'A.G.C.S: AGCS signifie: Accord Général sur le Commerce des Services. Il s'agit de l'accord fondateur de l'OMC(1994). Son but est d'accroître la concurrence internationale, en luttant contre les différentes frontières juridiques des pays membres. Une dizaine d'années plus tard, il est en renégociation. S'il cela n'a pas fait l'objet d'une médiatisation ou d'un débat publique, l'impact sur les sociétés des nouvelles conditions de l'accord sera pourtant majeur: -Cet accord, sans précédant, engage les pays signataires à ouvrir la totalité ou une partie de leurs marchés de services locaux à la concurrence internationale dans les mêmes conditions juridiques quel que soit le pays. -Les secteurs ainsi ouverts à la concurrence ne seront plus régis par les gouvernement élus des pays signataires, mais par l'OMC. L'ORD (Organe de Règlement des Différends) est chargée de passer au peigne fin les textes de loi des pays signataires afin de vérifier s'ils sont en accord avec les exigences négociées dans le cadre de l'OMC. Le cas échéant l'OMC pourra prendre les mesures adéquates vis à vis du pays fautif. La France pourrait par exemple être très vite obligée d'accepter les aliments à base d'OGM, la viande à base d'hormones, etc... -Les conditions devront être les mêmes entre le public et le privé. Par exemple pour chaque subvention de l'état accordée au public, une subvention équivalente devra être accordée au privé. -Un des problèmes majeurs que pose cet accord est qu'il est irréversible. Il engage - quels que seront les votes futurs des citoyens - les gouvernements, et futurs gouvernements de tous les pays signataires. Si jamais un pays souhaite retirer un, plusieurs, ou tous ses secteurs de cet accords, il devra payer pour compenser le manque à gagner des entreprises... -Si dans le texte, l'AGCS n'ouvre pas à la concurrence les services publics, il faut savoir qu'au sens l'OMC, ne sont des services publics que les services fournis de façon entièrement gratuite, et pour lesquels il n'existe pas de concurrence. La plupart des services publics demandant à l'utilisateur une participation financière, ou étant en concurrence avec des entreprises privées, seules les fonctions régaliennes (police, justice, armée) ne seraient considérées comme publiques selon les critères de l'OMC. Le 31 mars dernier s'est achevé la seconde des trois phases de renégociation de l'AGCS. A ce stade les états devaient communiquer à l'OMC la liste de tous les services qu'ils souhaitent réengager dans l'AGCS. -L'éducation et la santé faisaient partie l'ancien AGCS, elles ne sont pour l'instant pas réengagées dans le nouvel AGCS. Par contre, la définition même de l'éducation a changé. Ne sera considéré comme éducation que le cours en lui même. Tout ce qui tourne autour (Encadrement, Entretien des bâtiments, restauration, aide à l'orientation, etc...) ne sera plus forcément considéré comme de l'éducation et pourra être soumis aux conditions de l'AGCS. Par exemple, dans le domaine de la santé, les lits d'hôpitaux ne sont plus considérés comme faisant partie du secteur de la santé, mais sont considérés comme une prestation d'hôtellerie et appartiennent au secteur "Loisir et tourisme". -C'est ce qui se passe avec la vague de décentralisation que l'on connaît en ce moment. Si les professeurs ne perdent pas leur statut de fonctionnaire, toutes les personnes tournant autour (surveillants, agents d'entretient, conseillers d'orientation, etc...) changent de statut, ce qui permettra éventuellement une ouverture de ce marché au secteur privé à terme. Reste à se demander si la vague de décentralisation précipitée que l'on connaît en ce moment est liée au passage du cap du 31 mars dans la renégociation de l'AGCS. L'AGCS concerne environ 140 pays. La dernière phase de négociation, au delà de laquelle il ne sera plus possible de revenir en arrière, doit s'achever le 31 décembre 2004. Nous vous invitons à vous informer plus en détails sur l'AGCS. Quelques sources, parmis d'autres: http://france.attac.org/site/page.php?idpage=2301 http://forums.transnationale.org/viewtopic.php?p=2520 Vous pouvez aussi simplement lancer une recherche en tapant "AGCS" sur Google. Décentralisation: Les universités et leur personnel (IATOS), ainsi que Le personnel des établissement du primaire et du secondaire ne seront plus payés par l'état mais par les régions. Il en sera de même pour les Conseillers d'orientation, les psychologues, les infirmières scolaires, les surveillants, et de façon générale de tous ceux et celles qui entourent les élèves... On peut craindre à terme des disparités entre les régions selon l'intensité de leur activité économique et leurs moyens. Le transfert de ces personnes aux régions, pourra aussi faciliter une future privatisation. Si cette mesure permettra de tenir la promesse électorale de baisse des impôts nationaux, les impôts locaux, beaucoup moins égalitaires, augmenteront en contrepartie... Par exemple, dans la région Midi-Pyrénées la décentralisation entraînera une hausse de 20 à 30% des impôts. Remise en cause de la maternelle pour les 2 à 3 ans: Pour beaucoup d'enfants (quand les deux parents travaillent par exemple), la maternelle leur permet d'être pris en charge dans des conditions égales. Professionnalisation des cursus: De manière générale de plus en plus de jeunes sont envoyés vers les filières professionnelles. Si elles offrent un choix alternatif à ceux qui ne veulent pas suivre une formation générale, la réalité montre que ce sont les jeunes ayant eu des résultats insuffisants (souvent issus de milieux défavorisés) qui y sont envoyés. On parle de remettre en cause le collège unique. Cela signifie la possibilité d'être envoyé vers un cycle court des l'entrée en sixième. N'est ce pas un peu tôt pour décider de l'avenir d'un élève? Au lycée, le conseil d'administration pourra dorénavant être présidé soit par un élu, soit par une personnalité extérieure (membre de la chambre du commerce, chef d'entreprise...) Pour ce qui est des universités, elles sont fortement encouragées à rechercher des financements à l'extérieur, en mettant en place des partenariats avec les entreprises locales, en contrepartie de la mise en place de cursus adaptés à celles-ci. Ainsi naquit la licence « management de rayon », financée par Auchan, ou mieux, la licence « développement durable », financée par Total-Fina A ce propos, il est important de revenir sur le préjugé qui veut qu'une formation professionnelle donnerait plus de chances sur le marché du travail qu'une formation générale. Une étude de l'INSEE a montré que pour une même filière, les chances de trouver un emploi étaient les mêmes que l'on ai un diplôme général ou professionnalisé. Réduction et casse du statut des surveillants et aide éducateurs: 25600 postes (5600 MI/SE, ou pions, et 20000 aides éducateurs) seront remplacés par 16000 assistants d'éducations. Le poste de « pion » était réservé aux étudiants, sur critères sociaux. Leurs horaires étais établis en fonction de leur cours afin qu'ils puissent suivre leur études. Le nouveau statut est ouvert à tous, le texte mentionnant particulièrement les jeunes retraités et les mères « au foyer ». Les horaires pourront varier d'une semaine à l'autre ce qui exclue les étudiant-e-s, qui ont des cours à suivre... Les jeunes des lycées et collèges seront donc entourés par des personnes moins nombreuses et moins jeunes. Autonomie des universités: Elles disposeront dorénavant d'un budget global, que le président devra gérer et répartir entre paye des personnels, locaux, matériel, etc... Il est ainsi mis dans la position d'un responsable d'entreprise publique. Le président ne sera d'ailleurs plus obligatoirement un professeur appartenant à l'université, mais pourra être une tierce personne, choisie pour ses qualités de gestionnaire. Un « conseil d'orientation stratégique », composé de personnes issues du milieu économique local, influera sur le conseil d'administration, aura un droit de regard sur le président et émettra son avis lors de son élection. (voir: Professionnalisation des cursus) Encouragement des universités à augmenter leur frais d'inscription: "Il faut sans doute réfléchir à une responsabilisation des étudiants à travers un lien financier plus fort avec leurs établissements" (B. Belloc, président de la Conférence des Présidents d'Université, 19/04/2001). En Europe, il faut compter en moyenne 1200 euros par an pour aller à l'université. En France, un IUP pilote demande 4000 euro par an. Désengagement financier de l'état: Le budget de l'enseignement supérieur 2004 annonce une baisse de 158M d'euros. Un certain nombre d'universités sont déjà bien en deçà des conditions de fonctionnement (nombre de profs en dessous du quota minimal, cessation de paiement, obligation de suspension des activités pédagogiques pendant quelques semaines faute de moyens...). Le budget de la recherche publique, quand à lui, baissera de 30%. Depuis quelques temps la conception même qu'on nous donne du but de l'enseignement change: D'une instance assurant gratuitement la transmission des savoirs au plus grand nombre, on introduit peu à peu l'idée d'une école et d'un savoir qui doivent être rentables. De même, l'utilisation dans le milieu pédagogique depuis une dizaine d'année du mot « compétence » à la place du mot « savoir » n'est pas innocente. Quelle place aura l'esprit critique dans une éducation « rentable »? Que fera un tel système éducatif des enfants en difficulté? Récemment, notre ministre Luc Ferry a remis en cause dans sa « lettre à tous ceux qui aiment l'école » le principe de « l'élève au coeur du système », pour retourner vers un système où le savoir serait au centre, et où l'élève aurait à s'adapter au système au lieu que le système s'adapte à lui. (la sociologie a démontré que la facilité qu'a un élève de s'adapter au système scolaire dépend fortement de son milieu social d'origine) L'école n'est pas la seule à être touchée par ce mouvement de rentabilisation et de privatisation. On peut citer entre autres, d'autres biens communs tels que la santé, l'énergie, les transports, la poste, la sécurité sociale... et, bien sûr, les retraites. Certes, beaucoup de choses sont à changer mais d'autres alternatives sont possibles. Face à l'importance de ces réformes et à la manipulation exercée par les médias, nous vous invitons, quelque soit votre opinion à vous tenir informés, à en discuter avec votre entourage, à faire suivre ce mail à un maximum de personnes, et, si vous le souhaitez, à participer aux différentes manifestations et actions organisées dans votre ville. C'est un véritable choix de société qui se pose à nous aujourd'hui. L'enjeu est énorme, et une mobilisation massive est nécessaire si l'on ne veut pas d'une société où seuls ceux qui en auront les moyens pourront suivre.